Chapitre 33 - Rolland

Mardi

Je trépignais d'impatience. Assis dans une alcôve du Carlton, j'attendais que Devyan daigne m'honorer de sa présence. Le Milicien était déjà en retard - ou plutôt étais-je en avance. Ma jambe battait un rythme nerveux sous la table.

Devyan n'avait plus quitté mon esprit depuis dimanche soir. J'avais pensé à lui nuit et jour, rêvant de son corps, fantasmant ses réactions. Et quelle ne fut pas ma frustration de le retrouver aussi impassible. Cela faisait grossir ce noeud dans ma poitrine, mêlant colère et excitation.

Comme je m'en doutais, il avait fini par découvrir les éléments que je lui cachais. Mais cela me permettait de le revoir. J'avais le pressentiment que si je lui avais tout dit, je n'aurais plus eu l'occasion de le rencontrer. Je n'étais pas prêt à abandonner. Tant que je n'aurais pas eu une réaction, je ne le laisserais pas tranquille. Je voulais voir l'orgasme et l'abandon de soi dans ses prunelles adamantines. Je voulais sentir son corps lâcher entre mes doigts.

Pour contenir l'impatience qui me tenaillait, je saisis mon verre de vin et fis tourner le liquide incarnat. Le mouvement hypnotique de la robe pourpre parvint à apaiser mes pensées sulfureuses. Les lumières des lustres en cristal se reflétaient sur le verre. Cette brillance me rappelait la parure impalpable dont Devyan était vêtu lors de notre première rencontre. Tout dans ce lieu me rappelait l'élégance et l'inaccessibilité de cet homme. Tant que je ne l'aurais pas possédé et fait entièrement mien, il me serait impossible de l'oublier.

Un soupir m'échappa alors que je m'appuyais contre le dossier de la chaise. Je fermai un instant les paupières, m'isolant du bruit de la salle.

— Vous semblez désespéré. 

La voix neutre de Devyan me sortit de cet apaisement passager. Comme piqué par une abeille, je me redressai pour lui faire face. Il n'avait pas attendu mon accord pour s'asseoir. Cela m'aurait agacé si je n'étais pas tant captivé par sa perfection.

Magnifique. Ses yeux me fixaient avec impassibilité. Ils n'étaient pas maquillés, ou du moins très légèrement, ce qui magnifiait sa beauté. Son visage calme était dégagé et ses cheveux, soigneusement brossés sur le côté ce matin, retombaient en harmonie sur son front dans un effet décoiffé. Une longue boucle d'oreille brillait à son oreille droite tandis qu'un diamant simple ornait la gauche. Son costume bleu nuit dévoilait le début de ses pectoraux et moulait avec élégance ses jambes. À son cou rayonnait une chaînette en or. Il avait fait un effort vestimentaire - ou l'avait-on obligé - afin de se rapprocher au plus proche de mes goûts. Mon cœur battit plus vite lorsque je détaillai ses lèvres pulpeuses enduites d'un baume légèrement rosé.

— Tu es magnifique, Babydoll, soufflai-je.

Brooklyn aurait haussé un sourcil ou rougit. Devyan ne réagit pas au compliment. Il se contenta de repousser une mèche de ses cheveux en arrière. Était-il également insensible aux flatteries ?

Je fis signe au sommelier, mais Devyan l'arrêta d'un signe de la main.

— Je ne bois pas d'alcool en service. De l'eau suffira.

— Comme tu voudras.

Le silence se tissa très rapidement entre nous. J'étais absorbé par sa beauté et son indifférence. Mon regard ne pouvait se détacher de ses longs doigts qui tenaient le verre de cristal. Le mouvement de ses lèvres m'hypnotisait, je dus desserrer ma cravate.

— Pourquoi m'avoir caché des éléments ? Mon sang ne vous a-t-il pas suffi ? Auriez-vous eu besoin de me frapper davantage pour me dire l'entière vérité ?

La neutralité avec laquelle il me posait ses questions me révolta. Était-il aussi vide d'émotions que le laissaient sous-entendre ses yeux ? Son intégrité n'avait-elle aucune importance ?

Voyant que je ne répondais pas, Devyan se cala dans le siège et me lança un regard presque agacé. Mon cœur rata un battement devant ce semblant d'émotion et l'excitation se répercuta dans mon corps. Je me penchai, intéressé par ce changement.

— Je voulais te revoir, répondis-je honnêtement.

Il haussa à peine un sourcil. Bien plus de réactions qu'au premier rendez-vous. Je sentis l'excitation grandir.

— Qu'importe. Ce n'est pas le sujet, vos motivations ne me concernent pas. En revanche, un autre magicien a failli mourir à cause de vos expériences, et ça, ça me concerne.

— Un autre, tu dis.

Je haussai les épaules et me laissai tomber en arrière contre le dossier de la chaise. Devyan avait retrouvé toute sa froideur.

— Vous m'aviez affirmé ne pas connaître Rodrigue Page. Pourtant, il a fréquenté votre clinique suite à un accident de rallye. Il y a connu Duncan et a participé comme vous à ce projet de pierres bipolaires. Cela vous rafraîchit-il la mémoire ?

— Je ne connais pas de Rodrigue Page, Babydoll, affirmai-je en fronçant les sourcils.

Il me colla une photo sous le nez. L'homme avait les cheveux bouclés et des yeux orangés, typique d'un magicien de feu.

— Ne vous dit-il toujours rien ?

— Il s'est présenté sous le nom de Joey Chase. Et effectivement, il est l'un des cobayes de Duncan.

— Vous reconnaissez donc avoir prêté votre clinique pour ses expérimentations ?

— Je reconnais.

Devyan reposa son verre d'eau et croisa les mains sur la table. Sa boucle d'oreille teinta alors qu'il se penchait vers moi.

— Bien. Maintenant soyez honnête, combien d'autres magiciens sont impliqués dans ce projet foireux ?

— Je ne pourrais pas te dire. Peut-être une dizaine ou une quinzaine. Duncan se sert juste de ma clinique pour donner plus de crédit à ce projet. Il y repère les magiciens fragiles, ceux qui sont isolés ou susceptibles de poser le moins de problème.

— Milie Parollère, la connaissez-vous ?

— Oui. Elle a été hospitalisée suite à un burn-out. Elle n'avait ni famille ni amis dans la région. Elle était intéressée par le projet et trop fragile psychologiquement pour se rendre compte du danger.

Devyan me regardait avec concentration, écoutant mes paroles sans en rater une seule syllabe. J'aimais cet air sérieux et l'attention qu'il me prêtait. Cela me donnait l'impression d'être important.

— Elle avait arrêté les injections car elles duraient depuis deux mois sans aucun effet.

— Et elle a failli mourir.

Il marqua un temps d'arrêt avant de reprendre.

— Pourquoi n'avez-vous rien eu ? Vous auriez dû ressentir des effets secondaires à l'arrêt de ces doses.

— Qui te dit que je ne les ai pas déjà eus ?

Aucune surprise ne se lut sur le visage de Devyan. Pourtant, je sentis son interrogation.

— Heureusement pour moi, mon homme de main est de la magie blanche.

Yohan avait longtemps travaillé dans une Milice. Il ne s'y plaisait pas, les responsabilités étaient trop lourdes pour son jeune âge. Il ne supportait plus de voir les mutilations importantes de ses collègues. Je le connaissais depuis son enfance, son père était un ami proche. Voyant son fils dépérir, il avait sollicité mon aide. Grâce à mon influence et à ma fortune, je réussis à négocier avec le Président Oltenier la libération de fonction de Yohan.

J'avançai l'article 9 des Anciens Écrits : tout magicien peut être libéré de sa fonction et de ses obligations si celles-ci mettent son intégrité en cause. J'avais jugé que des automutilations répétées et des idées suicidaires étaient un argument suffisant. Le Président me l'avait accordé et Yohan avait été libéré de ses fonctions avant que l'on ne perde un magicien. J'avais remis Yohan sur pied. Par reconnaissance, il s'était engagé à mes côtés et s'était épanoui dans son travail d'homme de main. Il avait trouvé une raison à sa vie.

Duncan, après plusieurs cas ratés, savait qu'il ne fallait pas arrêter brusquement les injections. Il avait alors diminué progressivement les doses jusqu'à les cesser complètement. Malheureusement, la bipolarité de ma pierre avait elle aussi décliné. Les symptômes ne s'étaient pas présentés tout de suite, seulement deux semaines après la dernière injection. Yohan m'avait alors retrouvé inconscient sur le carrelage de la salle de bain. Il avait dû déployer une quantité colossale d'énergie mais avait réussi à soigner mon embolie pulmonaire.

Depuis cet épisode, trois semaines auparavant, la bipolarité de ma pierre avait continué de s'amenuiser. Je n'avais pas eu d'autres symptômes et j'attendais tranquillement que ma pierre redevienne normale. Et même si cette expérience m'avait amené de l'argent et du sexe, je n'étais pas prêt à la retenter. Cependant, je n'étais pas non plus prêt à m'opposer à Duncan et à retirer l'aide que je lui apportais. Tout comme Alres, il était violent et je tenais bien trop à ma vie pour tenter le diable.

— Que contenait le produit qu'on vous a injecté ? reprit Devyan.

— Tu m'as déjà posé cette question et je t'ai déjà dit que je ne savais pas.

— Je ne suis pas convaincu de votre réponse alors je vous repose la question : que contenait ce produit ?

Un soupir m'échappa. Quelle impertinence. Si nous n'étions pas dans un restaurant, je l'aurais déjà puni.

— Je ne sais pas, Babydoll. En revanche, j'ai une hypothèse sur sa composition.

— Dites-moi.

— Je pense qu'il contenait de la magie activée.

— De la magie activée ?

Le scepticisme qui perçait dans sa voix et le haussement de ses sourcils furent un délice. Malgré la gravité du sujet, je ne pouvais m'empêcher de ressentir une certaine excitation en voyant les réactions millimétrées de Devyan.

— À mon avis, il contenait des particules d'une pierre. La magie a été activée depuis l'extérieur puis injectée. L'administration répétée des fragments de la pierre a dû provoquer l'apparition de cette magie, conclus-je.

— Où a-t-il trouvé ces pierres ? Il faut un magicien pour les activer.

— Dans son club. Il y a eu beaucoup de nouvelles recrues ces derniers mois.

Je vis Devyan déglutir alors qu'il comprenait où voulait en venir mon hypothèse.

— Vous pensez que Duncan utilise les pierres de ses danseurs ?

— Je le pense oui. De plus, fragmenter une pierre est dangereux puisque cela rend la magie plus instable. Ces magiciens sont en danger.

Je bus une gorgée de vin. Duncan ne m'avait pas tout dit. Il gardait une partie du projet secret. En revanche, si je ne savais pas tout, j'avais compris que son club était une plaque tournante. Il y recrutait les magiciens sacrifiants leur pierre et y préparait les doses. Cependant, il avait privilégié les injections dans une clinique pour donner une dimension plus crédible auprès des receveurs. Cela permettrait également de contrer les effets secondaires grâce à une médecine classique et de se débarrasser habilement des corps en fournissant un motif d'hospitalisation. Bien plus crédible et bien moins dangereux qu'une disparition suivie d'une enquête.

— Duncan a-t-il monté seul ce projet pilote ? poursuivit Devyan.

— Non. Je ne pense pas. À mon avis, il n'est que la main exécutrice. Je n'ai rien pour le prouver, le coupai-je en voyant qu'il ouvrait la bouche.

Il frotta son nez du bout du doigt, réfléchissant à ce que je venais de lui confier. Et son regard déterminé ne me laissa aucun doute : il préparait la suite de son enquête. Mais ça ne me concernait déjà plus.

J'allais lever la main pour appeler un serveur lorsque Devyan reprit la parole.

— Qu'avez-vous dit à Duncan concernant Brooklyn ?

— Rien. Simplement que je le réservais pour quelques temps et qu'il ne devait pas s'étonner s'il ne venait pas travailler au club.

— Pourquoi lui avoir caché qu'il était Milicien ?

— Tu es curieux, Babydoll.

Et je n'aimais pas le doux mépris que je lisais sous ce masque de neutralité. J'avais protégé Brooklyn de Duncan car le magicien noir me rappelait Alres. Les vantardises de mon meilleur ami me hantaient encore et je ne voulais pas que Brooklyn subisse à nouveau cela. Alors je lui avais construit un alibi. Et je ne regrettais pas. En échange du magicien de sang, j'avais obtenu un bien meilleur parti. Devyan et sa virginité. Devyan et la promesse de nouveautés qu'il amenait. Devyan et le défi qu'il représentait. Je ne le laisserais pas me filer entre les doigts. Je voulais le souiller, lui arracher une réaction. Faire tomber les barrières qui protégeaient son âme si pure. Voir son visage se défaire sous l'extase de l'orgasme. Admirer son corps cambré sous mes mains. Je voulais...

— Participez-vous toujours à ce projet ?

— Oui.

— Monsieur Deswalters, j'ai besoin de votre collaboration pour mener à bien cette enquête.

Mon cœur s'emballa sous le ton doux qu'employait Devyan. Il n'était pas mielleux, mais il savait s'attendrir pour obtenir des faveurs. Je ne saurais dire si cela m'agaçait, mais cela ne me laissait pas indifférent.

— De ma collaboration ? Je viens de te dire tout ce que je savais.

Je repris une gorgée de vin, essayant de copier l'air détaché qu'abordait si souvent Devyan.

— Vous êtes directement impliqué dans ce projet. Il nous sera plus simple de le démanteler si vous êtes de notre côté.

— Me demandes-tu de trahir un ami de longue date ? m'indignai-je.

La colère supplanta un instant l'excitation que je ressentais. Il avait du culot. Ses prunelles brillèrent sous les lumières.

— Je vous demande de sauver des vies, Monsieur Deswalters. Avez-vous donc si peu de considération pour autrui ?

— Je tiens à ma vie. Vous ne savez pas de quoi Duncan est capable.

— Je suis Milicien, je connais toute sa vie et je sais tout à fait de quoi il est capable. De jeunes gens sont entre ses mains et pourraient mourir pour une utopie ! Et vous pourriez les aider si vous n'étiez pas si concupiscent et obnubilé par votre propre nombril.

Sa tirade blessa sérieusement mon égo. Je sentis la colère tordre mon estomac et mon cœur s'emballer sous l'adrénaline. Et cela m'agaça d'autant plus qu'il avait raison. J'étais ma priorité et sans une compensation suffisante, je ne mettrais pas ma vie en danger.

Vexé, je me renfonçai dans mon fauteuil et lui adressai un regard empli de rage. J'eus envie de le gifler et le remettre à sa place ; à mes pieds. Si nous n'étions pas dans un espace publique, je n'aurais pas pris la peine de me contenir. Je l'aurais torturé jusqu'à ce qu'il s'évanouisse dans mes bras. J'aurais regardé le sang couler sur sa peau. Lorsque mon esprit dessina son corps brisé et enchainé sur des draps immaculés, je fermai les yeux et soupirai. Pour la première fois de ma vie, j'hésitais, ne savais pas quoi décider. Collaborer ou trahir ? Finalement, je fis ce que je savais faire de mieux ; conclure des marchés pour m'enrichir.

— Et tu penses que je vais accepter de vous aider sans rien en retour ? ricanai-je. Je perds au change en brisant mon échange avec Duncan.

Devyan prit un instant pour réfléchir. Il me fixait de ses magnifiques prunelles adamantines. Même Duncan, à notre rencontre, n'avait pas su me rendre si accro. Il était mystérieux certes, mais rien à voir avec la beauté envoûtante et froide de Devyan. Le Milicien ne faisait rien pour séduire et cela faisait tout son charme. Duncan ne m'avait jamais fait un tel effet. Même s'il était attirant, la relation que j'avais entretenue avec lui s'était résumée à un échange de bons précédés.

— Que voulez-vous ? finit par demander Devyan.

— Pardon ?

— Que voulez-vous en échange d'une collaboration fiable ? Mes propositions ne seront jamais satisfaisantes, alors dites-moi ce que vous voulez.

Je l'observai avec étonnement. Plus je le découvrais et plus il m'excitait. Sa neutralité qui m'énervait tant le rendait si attrayant que je ne pouvais résister. Il était telle une pierre précieuse à polir. Tels des draps immaculés à souiller. Son visage crispé par l'orgasme, son dos cambré prêt à céder et ses yeux embués d'extase se dessinèrent dans mon esprit. Tant de choses que Duncan ne pourrait jamais m'offrir.

— Signe un contrat de soumission le temps de l'enquête et je collaborai.

Il haussa un sourcil, je décelai presque la surprise dans ses yeux. Et cela me fit tressaillir de désir.

— Quels seraient les termes du contrat ?

— Tu m'appartiendrais, tu m'obéirais et tu ferais tout ce que je te demande bien sagement. Je n'accepterais aucune protestation de ta part. Tant que tu seras docile, je subviendrais à tous tes besoins.

— Je suppose que...

— Tu ne supposes rien. J'ai envie de te faire l'amour et tu connais mes goûts en matière de sexe désormais.

Je finis mon verre de vin et le reposai sur la table. Les doigts entrelacés, je dévisageais Devyan, essayant de deviner une émotion sur ce visage de céramique figé. Mon cœur battait si fort dans ma poitrine que j'eus la sensation qu'il frappait mes côtes.

— Le temps de l'enquête avez-vous dit, c'est-à-dire ?

— Jusqu'à ce que Duncan et son possible commanditaire soient hors d'état de nuire.

— Allez-vous me frapper aussi violemment que la dernière fois ?

— J'essaierai de ne pas en arriver à cette extrémité. Je t'ai donné un safeword, le mot crème, tu peux l'utiliser lorsque ta limite est atteinte, si tu n'es plus consentant ou que tu as peur. Le contrat peut être revu à tout moment et interrompu. En revanche, si tu souhaites le casser, notre collaboration s'arrêtera également.

Devyan hocha la tête. Ses yeux n'exprimaient rien. Il croisa les bras sur sa poitrine, froissant la veste bleue.

— Le contrat sera mis par écrit, avec toutes les conditions dont nous discutons. Y a-t-il quelque chose que tu refuserais, Babydoll ?

Je m'attendais à un non. Devyan ne semblait avoir aucune faiblesse.

— Le feu. Je ne veux pas de brûlure. Pas de cigarette, pas de bougie, pas de briquet ni de chalumeau lors de vos jeux.

— De chalumeau ? Me prends-tu pour un monstre, Babydoll ?

— Non. Je... veux simplement m'assurer que cette limite là soit claire et respectée de votre part.

— Elle le sera.

Je le détaillai un instant. Derrière son masque parfait, je connaissais l'ampleur de son histoire. Yohan avait été prolifique dans ses recherches. Né dans une famille sévère, Devyan avait très vite dû gérer le quotidien lorsque son père était décédé des suites de blessures de guerre. Lorsqu'il eut atteint sa majorité, il rejoignit l'armée et grada rapidement. Il travailla pour les forces spéciales pendant sept ans, jusqu'au moment où il fut enlevé pendant une mission. L'évènement avait été étouffé, Yohan n'avait pas su trouver qui étaient les ravisseurs ni ce qu'ils avaient fait subir à Devyan. L'ancien militaire n'en avait jamais parlé et semblait garder ses souvenirs au plus profond de son être. Suite à cet événement pour le moins traumatisant, il quitta les forces spéciales et rejoignit la Milice de Becky Halls. Son expérience lui ouvrit les portes de l'Unité 1 pour laquelle il travailla pendant cinq ans. Il fut ensuite promu à l'Unité 5 et la dirigeait depuis quatre ans d'une main de fer.

Ces éléments en ma possession, je ne m'étonnais plus de son stoïcisme. Il avait enduré tellement de sévices et de douleurs que sa résistance semblait infinie. Et, même si je souhaitais détruire ce masque derrière lequel il se cachait, je ressentis un sentiment que j'avais rarement connu ; le désir de protéger. J'avais envie de le réconforter. De poser ma main sur sa joue, qu'il appuie sa pommette contre ma paume et laisse ses démons s'exprimer. Qu'il puisse pleurer son passé et panser ses plaies.
Devyan me rendait ambivalent ; l'envie de le détruire et de le protéger se battaient dans ma poitrine. Il éveillait tant de sentiments contradictoires, du plus délicieux au plus dérangeant.

— Alors, qu'en dis-tu, Babydoll ? Acceptes-tu ce marché ?

Le cœur battant, je ne le vis pas hésiter. Il ancra ses prunelles adamantines dans les miennes. Un frisson me traversa alors qu'il me répondait avec son impassibilité déconcertante :

— J'accepte.

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