20 - Kei
Sur la place pavée qui s'étend devant le fronton du Département Historique, le soleil rasant se reflète dans les vitres des bâtiments environnants et renvoie dans l'atmosphère un kaléidoscope prismatique. Les rares passants s'attardent pour admirer le spectacle en brandissant leurs pads pour saisir des images des couleurs mouvantes. Kei les ignore, se concentre sur les menaces potentielles. Pas de policiers ou de soldats à l'horizon, rien qui ne ressemble à un agent civil en planque, aucun individu à l'allure de chasseur de primes... La jeune femme vérifie les données de son scan portable : pas d'émissions radio ou radar suspectes non plus, ni de brouillage électromagnétique. La ville est presque trop calme.
— Il manquait des années entières de référencement dans ces archives, lâche Astéria tout en enfonçant les mains dans ses poches. Ces gens-là ont des choses à cacher.
Kei acquiesce.
— S'ils ont continué à utiliser la réorganisation moléculaire après son interdiction, les informations doivent être surclassifiées. Il était peu probable que le tout-venant puisse y accéder sans contrôle.
La jeune femme balaye l'air de la main. Décevant, mais prévisible.
— Tochiro a peut-être eu plus de succès avec le mouchard, poursuit-elle.
— Mouais...
Astéria ne paraît pas convaincue. Kei ne peut lui donner tort. Leurs recherches ont duré bien moins longtemps qu'initialement planifié, et le signal de Tochiro était sans équivoque : son piratage informatique ne s'est pas déroulé aussi bien qu'escompté.
— En fonctionnant par négation, j'ai tout de même réussi à obtenir des résultats intéressants, intervient Gwenig. D'un point de vue géographique notamment, il n'y a rien qui ressort dans la zone des Monts Griffus.
— Tu parles des monts dans lesquels l'Arcadia s'est posée pour être au calme ? fait Astéria, sourcil levé.
— Ceux-là même, oui...
— Ah ben on n'est pas sortis des ronces, alors.
Astéria marmonne quelques mots dans lesquels Kei pense reconnaître « Je vous l'avais bien dit », puis elle regarde autour d'elle d'un air courroucé.
— Bon. Et il est où, Dick ? Non seulement il part se prélasser en terrasse pendant qu'on bosse, mais en plus il va nous mettre en retard !
Soudain saisie d'un doute, Kei consulte son scanner. Les communicateurs personnels de l'équipage sont tous équipés d'un traceur détectable à courte distance sur une fréquence que Tochiro modifie régulièrement.
Trois points s'affichent sur l'écran. Gwenig, Astéria et elle. Kei relève les yeux vers ses coéquipiers avec une grimace.
— Dick est hors de portée, dit-elle. S'il s'est installé dans un des bars de la place, alors il n'y est plus.
Astéria grogne.
— Il ne pouvait pas prévenir, ce crétin ? Comment on le retrouve, maintenant ?
Gwenig est moins conciliant.
— Ils peuvent rentrer à pied, non ?
Certes. Après tout, ce n'est pas la première escale de l'Arcadia et personne ne s'est jamais plaint d'avoir à se débrouiller pour revenir à bord après avoir été boire un verre en ville. Mais n'empêche. Cette petite planète soi-disant tranquille laisse à Kei une impression mitigée.
Elle grimace à nouveau. Ne reste qu'à prévenir Tochiro qu'elle a « perdu » une partie de son équipe. Dick. Et Tadashi.
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