XXV.

" Je l'ai embrassé, Jim !

— Dis donc, tu n'as pas perdu de temps, petit coquin, pouffa Jim, à l'autre bout du combiné.

— Tu ne comprends pas ! Je suis foutu, mec, foutu de chez foutu, souffla Ariel, déjà dépité par ce qui allait s'ensuivre.

— Oh, déstresse, c'est juste un baiser, rien de grave, tenta-t-il de le rassurer.

— Neven... Il va le dire à Anna et à Marion aussi...

— Ari, t'en fais des caisses, là. Est-ce qu'il t'a répondu ? Ou est-ce qu'il t'a directement repoussé ? Et comment il t'a repoussé ? se renseigna Jim.

— Je... Je sais plus, je m'en souviens plus. Ou peut-être que... Je crois qu'il s'est laissé faire, mais, au bout de quelques secondes, il m'a repoussé assez abruptement, comme lorsque nos cuisses se sont touchées. Il semblait paniqué avant de prendre un visage froid et de se casser. "

Ariel était totalement angoissé à l'idée des conséquences de ses actes. Que lui avait-il pris de faire une chose aussi irréfléchie ? Si Neven ne le balançait pas aux filles, Ari était sûr qu'il ne voudrait plus jamais le voir. Il était censé observer, pas agir bêtement ! Mais c'était toujours comme ça, avec lui. Il foirait tout dès qu'une idée lui effleurait l'esprit.

Enfin, il avait déjà trouvé d'autres femmes attirantes, mais jamais il n'avait sauté le pas pour se rapprocher d'elles. Il les tenait toujours sagement éloignées, par respect pour Anna et aussi parce qu'il pensait qu'elles n'arriveraient certainement pas à la hauteur de sa meilleure amie, alias, sa compagne. Il avait cette peur profonde d'abandonner son quotidien, sa petite vie rangée et tranquille, mais, surtout, il avait peur d'abandonner Anna pour se mettre avec une autre femme et se rendre compte que, finalement, c'était bien mieux avec l'Italienne.

Dans un sens, il était heureux avec elle, même s'il craignait toujours qu'elle trouve quelqu'un ou que lui succombe à une autre personne. Ce qui le rendait malade, c'était qu'il venait d'être infidèle. C'était certes un petit baiser bouche contre bouche, mais il se sentait horrible. Il haïssait l'infidélité. Et puis, il appréciait beaucoup Marion, elle était adorable avec lui, ils parlaient toujours bien ensemble et riaient même assez souvent pour rien. De quel droit pouvait-il embrasser son petit-ami ? Mais Ariel était impatient... Il avait ressenti ce besoin urgent de connaître ce qui lui torturait l'esprit. Est-ce que Neven l'intéressait ? Est-ce qu'il l'attirait ? Alors, quand il s'était retrouvé à quelques centimètres de lui, il avait tout oublié, les petites-amies en haut, l'infidélité, la moralité et s'était lancé dans ses bras pour goûter au fruit défendu. Ce visage un peu plus pâle qu'à la normale, ces yeux gris cernés, ces cheveux bruns bouclés, dont certaines petites mèches s'étaient glissées sur son front et, enfin, cette bouche charnue, qui avait retourné son ventre. Tout ça avait contribué à son lâcher-prise.

Le fait que Neven soit un homme n'était absolument pas un problème pour Ariel. Il avait appris, au lycée, qu'il pouvait aimer tous les genres, même s'il n'était sorti qu'avec des filles, car, jusque-là, aucun homme ne l'avait attiré. Cependant, il n'avait jamais ressenti le besoin de mettre un nom sur sa sexualité, il s'en fichait pas mal. Il aimait une personne, point. Jim était, d'ailleurs, au courant, ce qui n'était pas le cas d'Anna, qui ne lui avait jamais demandé, donc il n'avait jamais ressenti le besoin de parler de ça.

" Bon... Franchement, mec, t'as le chic pour faire le contraire de ce que tu dis, rit doucement Jim, avant de reprendre un air sérieux en entendant le soupir d'Ari. Encore une fois, vois comment il réagit et agis en conséquence. Puis, ne t'en fais pas, il ne dira rien à sa nana et à la " tienne ", parce qu'il y perdrait aussi, dans l'histoire.

— M'ouais...

— Et cette fois, fais-le vraiment et ne lui saute pas dessus dès que tu le croises ! se moqua gentiment son meilleur ami.

— Ta gueule, ronchonna Ariel.

— Bon, allez, je vais dormir. Je suis claqué. On en reparle demain. Bonne nuit, ma sirène !

— Ouais, bonne nuit, Ursula. "

Il entendit Jim rire avant de raccrocher. Ariel gonfla son torse d'air et expira lentement, tentant de relâcher la tension de ses muscles. Il se mordit la lèvre, les images du baiser en tête. Il se concentra pour chercher le moment où Neven l'avait repoussé. L'avait-il fait quelques secondes après parce qu'il s'était rendu compte qu'il ne voulait pas ça ? Ou, alors, une chose l'avait-elle fait réagir de cette manière ?

— Fais chier ! jura-t-il en donnant un coup de pieds dans une cannette.

Il n'arrivait pas à savoir. Il ne se souvenait plus très bien des choses autour, il avait été tellement concentré sur ses lèvres qu'il avait l'impression que le temps s'était arrêté autour d'eux. C'était juste deux bouches, l'une contre l'autre, et rien de plus. Le plus vieux se doutait bien que ce n'était pas en raison de sa peur du contact, car il ne l'aurait jamais laissé l'embrasser si c'était le cas. Il se rappelait encore de sa réaction quand leurs cuisses s'étaient touchées.

Il ne comprenait vraiment plus rien. Ariel avait juste envie de se dire que son voisin était simplement trop bizarre, mais il savait qu'il y avait quelque chose derrière cette peur. Un traumatisme ? Fort probable. Il mourrait d'envie de savoir, mais, avec ce qu'il avait fait aujourd'hui... Neven n'allait même plus vouloir se trouver dans la même pièce que lui. Ari avait tout foutu en l'air. Son téléphone se mit à vibrer dans sa main et Ariel ouvrit directement le message, pensant qu'il était de Jim.

" Demain. on va manger au resto avec les voisins. Je l'ai proposé à Marion, comme ça tu pourras essayer d'en savoir plus sur Neven, toi qui veux tant connaître son petit secret... Et je dors chez Alice et Romane ce soir. On se voit demain, bisous ! ;) "

C'était Anna. Ariel leva les yeux au ciel. Elle avait dix trains de retard là. Il se rappela de sa promesse, celle où il devait éviter dix sorties à Neven. Il supposait que ce n'était plus d'actualité, maintenant, et que Neven ne viendrait jamais à ce resto. Il reprit le chemin de sa maison, il était parti de chez lui pour téléphoner à Jim. Ariel était soulagé qu'Anna ne dorme pas chez eux aujourd'hui, il voulait rester seul.

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