XVIII.
Neven se réveilla le lendemain matin, après avoir passé des heures sans réussir à fermer les yeux, comme si son passé pouvait le rattraper s'il avait clos ses paupières ne serait-ce qu'une seconde.
La bouche pâteuse, il décida de se lever. Il s'était endormi dans le canapé et Marion avait disparu alors qu'elle était restée des heures devant lui, à son chevet. Elle avait probablement regagné sa chambre dans la nuit, quand elle s'était aperçue qu'il dormait.
Le bouclé se sentait mal d'avoir fait une crise devant ses voisins, surtout qu'il ne se rappelait de rien après avoir regardé l'heure, qui indiquait minuit. Enfin, quelques brides de conversation, de geste lui revenaient en mémoire, mais cela restait assez flou dans l'ensemble.
La première chose qu'il fit fut de prendre son habituel doliprane. Ses boîtes de médicaments traînaient encore sur la table et il grimaça en les voyant. Il les prit aussitôt pour les ranger au fin fond d'une armoire quelconque.
Il se prépara une tasse de café en soupirant. Il avait juste envie de se rendormir pendant un mois, voire plusieurs, histoire que les évènements de la veille se dissipent et disparaissent des esprits. Pour oublier la honte qu'il s'était payé, il regagna le salon et ouvrit l'armoire qui se trouvait juste à côté de la télé, où étaient empilée une tonne de cassettes vhs. Il fouilla quelques instants pour trouver le film qui allait le plonger dans son scénario et choisit un grand classique : Psychose de Hitchcock. Il le fit entrer dans le magnétoscope. Il dut faire quelques manipulations avec sa télévision, puis le film débuta.
C'était l'un de ses petits plaisirs, il adorait tout ce qui était très ancien, d'une autre époque. Mais, par-dessus tout, il affectionnait le jeu d'acteur et les effets spéciaux des vieux films, qui étaient, à son goût, bien plus travaillés que les nouveaux. Dans les débuts de la vidéo, les réalisateurs devaient réellement se creuser la tête pour les effets, alors que, aujourd'hui, il suffisait d'un fond vert et d'un bon logiciel. Cela était plutôt ironique, en sachant qu'il travaillait justement dans cette nouvelle technologie.
Il s'installa confortablement, toujours habillé de ses habits de la veille, et posa sa tête contre un coussin, prêt à entrer dans le film.
Quelques heures après, Marion s'était levée, mais était restée silencieuse. Elle savait qu'après ce genre de crises, elle devait se taire et le laisser seul.
Vers quatorze heures, quelqu'un sonna à la porte. Étant donné que sa petite-amie était sous la douche, il grogna avant de partir ouvrir. Anna se trouvait devant lui, elle écarquilla les yeux en le voyant, mais elle se reprit rapidement.
— Oh, Neven... Est-ce que...
Le jeune homme ne lui laissa pas le temps de poursuivre qu'il cria :
— Marion, c'est pour toi !
Il lui dit cela avant de déguerpir, laissant la porte ouverte derrière lui. Le bouclé serra les poings, c'était ça qu'il craignait ! Il ne voulait pas voir ces yeux emplis de pitié pour lui.
Il partit se rasseoir sur le canapé, il s'était changé en début d'après-midi, revêtant une tenue de sport pour aller courir dans le parc. Il avait été soulagé de ne pas y croiser Ariel. Autant Anna, il s'en fichait un peu, mais son voisin aux muscles saillants... Non. Il devait se rattraper et lui montrer que ce n'était pas une petite chochotte. Dès qu'il entendit Marion au rez-de-chaussée, il fonça dans la salle de bain et prit une douche rapide. Il redescendit et débrancha la play d'Ariel, prit ses manettes et demanda à Anna si son copain était chez eux, auquel elle répondit par l'affirmative.
Neven sortit dans chez lui et sonna à la maison d'à côté, les dents serrées. Il n'avait pas envie de faire ce qui allait s'ensuivre, mais il était obligé.
Ariel vint lui ouvrir et eut la même réaction que sa petite-copine, ses yeux s'agrandirent de surprise en le découvrant.
— Je suis venu te rendre ça, annonça Neven en montrant sa play, dans ses bras.
Le brun suivit son regard et tomba sur sa console. Il resta immobile quelques secondes, avant de s'écarter de l'entrée pour le laisser entrer. Connaissant leur maison, le bouclé partit dans son salon et déposa le tout sur la table basse soigneusement.
— Merci, souffla Ariel.
L'informaticien et le galeriste se firent face, leurs yeux plantés les uns dans les autres sans qu'aucun mot ne fut prononcé. Les deux se jaugeaient, d'un côté, un air de défi se faisait ressentir, tandis que, de l'autre, une légère pitié et beaucoup d'incompréhension se faisaient comprendre.
— C'était cool, hier, se lança finalement Ariel, se jetant dans le bain du requin.
Cependant, Neven ne répondit pas. À la place, il s'avança à pas feutrés vers son voisin, l'expression sombre. Il pouvait voir le plus vieux frémir en le voyant se rapprocher de lui. D'ailleurs, Ariel se recula au fur et à mesure des pas du bouclé, se sentant acculé telle une petite souris l'étant par un gros matou, prêt à la dévorer toute crue.
Quand Neven fut assez proche, il posa ses mains de part et d'autre de son voisin, contre le mur, et continua de le fixer.
Le bouclé ne savait même pas ce qu'il était en train de faire, il n'était même pas venu pour ça, à la base ! Il voulait juste lui demander de lui refiler une adresse de salle de musculation sympa. Et voilà qu'il se retrouvait à emprisonner son voisin de ses bras. Il pouvait aisément lire l'incompréhension la plus totale dans les yeux de celui-ci.
Sa bouche s'ouvrit légèrement, laissant filtrer sa respiration, qui commençait à doucement s'emballer. Son visage se pencha vers celui d'Ariel, qui était statufié devant lui. Neven s'aperçut que le torse de son voisin se levait rapidement et ses lèvres s'entre-ouvrirent elles-aussi. Leur souffle se mêlait ensemble et, toujours en observant Ariel, il remarqua que celui-ci paraissait plus détendu, son corps se relâcha imperceptiblement et ses yeux, à demi clos, descendirent sur son torse. Lentement, la main d'Ari remonta, dans un geste infiniment doux, et vint se poser timidement sur son torse. Neven pensait qu'il allait se faire repousser, mais, bien au contraire, les doigts descendirent en une fine caresse qui s'arrêta au niveau des hanches. Ariel avait suivi du regard sa main, tandis que Neven avait frissonné en fixant le visage de son voisin. Tout son corps fut pris d'un spasme. Alors que le bouclé allait descendre l'une de ses mains pour la poser sur la joue de son voisin, une voix le fit bondir loin d'Ariel.
— Mon lapin, je suis rentrée !
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