Une serviette autour des épaules, les cheveux tirés en arrière, Ariel arborait un grand sourire amusé. Fabien, leur voisin d'en face, frotta ses bras pour le réchauffer.

— Bien joué mec, le félicita-t-il.

Ariel lui fit un clin d'oeil. Il vit Anna rouler des yeux avec exagération, mais il savait bien qu'elle retenait un rire et cela le rendait encore plus joyeux. Puis, elle partit vers les nouveaux voisins et Ariel la suivit du regard quelques minutes. Il fronça les sourcils en voyant Neven sur son téléphone, ne prêtant même pas attention à sa petite-amie qui avait fait l'effort de venir vers eux.

Il ne comprenait vraiment pas le bouclé, la première rencontre s'était plutôt bien passée, sans Marion. Mais dès que celle-ci avait apparu, Neven avait changé et s'était braqué, restant dans son silence. Sans compter sur le fait qu'il fixait beaucoup Ariel, ce qui le mettait assez mal à l'aise. C'était pas un regard curieux ou intéressé, mais plutôt ce genre de regard scrutateur, qui juge.

Au moment où il enleva sa serviette et voulue partir se changer, le regard gris se leva enfin de son téléphone pour le poser sur lui. Débuta alors un contact visuel entre eux et Ariel se sentit gêné quand les yeux de son voisin descendirent sur son corps, seulement vêtu d'un caleçon trempé et lui collant la peau. Le jugement, le retour...

Ariel n'était pas complexé par son physique, mais quand on le regardait trop longtemps, il se sentait comme mis à nu. Il prit ses jambes à son cou et s'enfuit dans sa chambre pour se changer, il enfila d'autres vêtements secs et avait surtout déguerpi pour fuir ce regard.

Vêtu d'un jean retroussé et d'un t-shirt banal, il redescendit rejoindre ses invités. Il évita soigneusement Neven, qui de toute manière, était de nouveau sur son écran.

Vraiment asociale, se dit-il.

Enfin il s'en fichait, il était content de voir sa copine aussi  heureuse avec Marion. Si Neven semblait repoussant, ce n'était pas le cas de Marion, qui était très mignonne avec eux.

Donc, il décida de jouer au même jeu que lui à ne pas le calculer.

        Ariel resta tout le long avec Fabien et Aurélien. Ils discutèrent de jeux vidéos, de vie de couple, des femmes en général, de sports et autres, ce qui lui fit passer un bon moment avec ses amis. Anna venait souvent s'incruster quelques minutes pour l'embrasser ou enrouler ses bras autour de son cou, puis elle repartait toujours avec les autres filles. Seul Neven était exclu.

Après le repas, le jeune homme annonça qu'il allait faire des mojitos, sous une acclamation de joie, tous friand de cette boisson alcoolisée.

Alors qu'il sortait tout ce qu'il fallait pour en faire, Neven vint le rejoindre, à sa plus grande surprise.

— On m'a demandé de t'aider, lâcha celui-ci, d'un ton qu'Ariel qualifierait de las.

— Oh... Bah, ça devrait aller, je peux m'en sortir seul, répondit-il accompagné d'un petit sourire.

Qui ne lui fut évidemment pas retourné. Ariel se racla la gorge et de nouveau embarrassé, il commença à préparer les boissons à la filée.

— Et donc... Tu passes un bon moment ? tenta le faux mauvais garçon.

Il se gifla aussitôt mentalement. Bien sûr que non, il ne passait pas une bonne soirée, il était scotché devant son téléphone sans faire d'effort pour s'intégrer !

Le grand bouclé s'appuya contre le frigo non loin de lui, les bras croisés et le regarda faire.

— Te force pas, Ariel, moi non plus je n'ai pas envie d'être là, lança-t-il sèchement en appuyant sur son prénom.

Ledit Ariel fronça les sourcils et leva le nez quelques secondes pour l'observer.

— Le barbecue ne te plaît pas ? demanda-t-il.

— Bingo.

Au moins, ça avait le don d'être clair, net et précis. Il s'ennuyait ferme et ne le cachait même pas. Bien, il venait d'apprendre un trait sur la personnalité de son voisin. Cela lui confirma aussi que Neven faisait tout pour éviter le contact avec eux. Donc, il n'y avait que Marion qui souhaitait sympathiser.

Il jugeait qu'il était inutile de répondre, il n'allait pas s'énerver, surtout qu'Anna appréciait déjà beaucoup Marion et qu'Ariel ne voulait pas jeter de froid entre eux.

Quand il eut terminé, il imposa deux verres à son voisin pour qu'il aille les ramener sur la terrasse, aisni les gens penseront qu'il l'a aidé et cela fera plaisir à leur petite-copine respective. Il prit les autres sur un plateau et les servit à ses hotes.

Le comportement de Neven resta dans sa tête jusqu'à ce que tout le monde parte, au alentour de dix-sept heures. Il avait serré la main de son voisin brièvement au moment de partir, il n'arrivait à s'enlever le ton froid et distant que Neven avait pris avec lui.

Ariel ne comprenait pas comment on pouvait être si réfractaire à la sympathie.

Enfin, il n'aurait qu'à se tenir à distance et tout ira bien.