25 novembre 2016 - Romain

Je n'ai pas croisé Gaël une seule fois depuis le départ d'Éline. Tant mieux. Anthony, son voisin de palier m'a indiqué qu'il avait demandé à pouvoir repartir en mission le plus vite possible pour ne plus devoir me croiser.

Je crois surtout que c'est le fait d'avoir pris une gifle monumentale par une femme devant l'un de ses plus proches amis qui l'a atteint dans son orgueil.
J'avoue que je garderai longtemps l'image de ce connard se faisant remettre à sa place par ma jolie Éline. Et tant pis pour les bonnes manières !

Le médecin qui me suit depuis mon retour d'Afghanistan m'a donné le feu vert pour que je reprenne petit à petit une activité physique journalière.

Il a même réussi à me faire rougir lorsqu'il m'a dit « Et je ne parle pas du sport en chambre Lieutenant »

Oui, de ce côté-là, c'est parfait. Enfin...ca l'était jusqu'à vendredi dernier.

Après la nuit blanche que nous avions passé Éline et moi après notre retour de soirée avec mes frangins je n'avais plus osé tenter quoi que ce soit.

C'était elle qui m'avait pratiquement sauté dessus le samedi soir et je n'avais pas eu voix au chapitre : pour une fois c'était Éline qui avait dirigé nos ébats et pas une seule fois elle ne m'avait laissé dicter ma loi. Elle m'avait obligée à m'allonger tandis qu'elle se plaçait à califourchon sur moi. Je l'avais laissée me torturer et j'avais finalement réussi à me détendre pour profiter pleinement de l'instant mais j'avais aussi subi ses regards impérieux si je tentais le moindre mouvement pour me relever.

Avant de me quitter pour reprendre son avion Éline avait pris soin de me sermonner en prenant ce que j'appelais maintenant sa voix de prof et je m'étais vraiment senti comme le gamin puni devant toute la classe : honteux et surtout désireux de ne plus me faire réprimander.

Tandis que j'effectue mon footing du matin, je repense aux résolutions que j'avais prises après son départ mais aussi à notre futur que je voulais commun.

J'ai la lourde tâche de veiller à son bonheur, après l'immense sacrifice qu'elle est prête à consentir en renonçant à devenir mère naturellement et je ne veux pas me louper.

Je ne manque pas d'idées mais elles me semblent toutes trop convenues, pas assez originales.

Lorsque je rentre chez moi, bien fatigué, je prends une bonne douche revigorante puis je saisis mon smartphone pour appeler la mère d'Éline. J'avais exigé, lors de mon passage à Lyon, qu'elle prenne note de mon numéro afin de me prévenir si ma compagne avait le moindre problème.

- Allo ?

- Bonjour Madame Arvidsson, c'est Romain Dalmans.

- Oh, bonjour Romain, comment vas-tu ?

- Bien merci. Je vous appelle parce que j'ai besoin d'un conseil.

- En quoi puis-je t'aider ?

- Et bien...je...je réfléchis à...à ce que je vais offrir à Éline pour Noël et je...je voulais savoir si vous pourriez me dire s'il y a quelque chose qui lui ferait vraiment plaisir.

- Elle n'a besoin que d'une chose Romain : toi. C'est très dur pour moi de la voir aussi triste et déprimée à chaque fois que vous devez vous séparer. Après ton départ de Lyon, Jade m'a dit qu'elle n'avait plus souris pendant une semaine complète. Et là c'est de nouveau la même chose.

- Hum...je ne suis pas certain de comprendre ?

- Romain, vous êtes des adultes et vous vous aimez. Éline restera toujours ma fille chérie mais je ne supporte pas de la voir aussi malheureuse. Alors, si tu tiens à avoir mon avis, le voici : propose-lui de te rejoindre à Bruxelles. Propose-lui de vivre avec toi.

- Euuuuh....

Sur le coup, je ne l'avais absolument pas vu venir celle-là!

- Je suis très sérieuse Romain. Et cela m'en coûte de le dire parce qu'Éline est ma petite dernière et que je l'ai toujours couvée. Mais elle a 26 ans et toi 28.

Il y a quelque chose entre vous que je n'arrive pas à définir. Je ne sais pas, lorsque je vous ai vu tous les deux la première fois, j'ai eu le sentiment que...que tu étais l'homme dont ma fille avait besoin.

Waouh...je m'y attendais pas du tout.

- Hum...d'accord. Je...je vais y...réfléchir.

- Si vraiment tu tiens à lui offrir quelque chose, une journée ou un weekend en thalasso. Elle adore ça. Ou des romans d'Agatha Christie ou de Patricia Highsmith.

Oui, pour la thalasso...j'en savais quelque chose...Les bouquins par contre elle ne m'en avait pas vraiment parlé. Je vais y réfléchir.

- Tu reviens le 9 décembre c'est bien cela ?

- Oui. Elle m'a fait promettre depuis des mois déjà de l'accompagner à la Fête des Lumières. Je pense que je n'ai pas intérêt à revenir sur ma promesse !

Lorsque je raccroche j'avoue que je suis pensif. Proposer à Éline de venir chez moi, cela implique qu'elle quitte son boulot et ses amis. Elle le sait cependant, à cause de mon job, je ne peux pas aller vivre en France. Ça m'énerve de lui imposer cela mais je pense, j'espère du moins, qu'elle le comprend. Je ne vais pas non plus me voiler la face, c'est ce que je veux. J'y pense depuis un mois, depuis que je l'ai retrouvée après cette putain de mission en Afghanistan.

Ça ne m'était jamais arrivé d'être aussi sûr de moi. Je vais finir par croire que ma mère m'a jeté un sort tant j'ai l'impression de débiter minute après minute le genre de phrases sorties tout droit des films qu'elle regarde.

Tandis que je me prépare rapidement à manger, je laisse mon esprit vagabonder une nouvelle fois vers Lyon : Éline me manque tellement...

Je rumine une bonne partie de l'après-midi jusqu'à ce que je sois interrompu par la sonnette de ma porte d'entrée.

Et je manque de m'évanouir lorsque je vois la silhouette d'Axana se profiler devant moi.

Avec elle, il ne faut surtout pas me demander d'être poli, surtout avec ce qu'elle m'a fait la dernière fois que je l'ai vue.

- Tu veux quoi ?

- Romain...Je voulais m'excuser, je crois que nous sommes partis sur de mauvaises bases toi et moi.

- Hein ?

Elle se fiche de moi là ? Dites-moi qu'elle est bourrée et qu'elle ne sait plus ce qu'elle dit ? Ou alors il faut que je m'inquiète sérieusement pour sa vue. Enfin quoi, elle m'a surpris avec Éline dans mes bras chez mon père ! Et elle se pointe chez moi pour... ? Non mais je rêve !

Je suis tellement choqué que je la regarde avec des yeux ronds et je suis incapable de lui dire de dégager. Cette garce en profite et elle s'approche de moi avec un petit sourire qu'elle veut sans doute aguicheur.

- Romain....Tu sais aussi bien que moi que cette fille n'est pas pour toi.

- Ne parle pas d'Éline comme ça ! Tu ne la connais pas.

- Je n'en ai pas besoin. Tu vaux mieux que ça Romain.

Sans me laisser le temps de réagir, elle fond sur moi et plaque ses lèvres sur les miennes.

Je réagis au quart de tour et je la pousse si violemment qu'elle tombe à la renverse sur le sol.

- Espèce de sale petite garce ! Je ne sais pas ce qui me retient d'appeler ton père la tout de suite et de lui raconter comme sa chère petite fille se comporte avec moi ! Je t'avais déjà demandé une fois de nous laisser tranquilles Éline et moi. C'est mon dernier avertissement Axana. Fiche nous la paix ou je vais vraiment devenir méchant.

Axana se redresse lentement tout en me jetant un regard noir.

- Je vais mettre ta mauvaise humeur sur le compte de la fatigue et de ce que tu as subi en Afghanistan. Tôt ou tard Romain, tu te rendras compte que tu fais une erreur.

Tu n'es pas dans ton état normal depuis que tu es rentré.

- Dégage Axana. Avant que je ne t'en colle une pour de bon.

Elle finit par obéir et elle se dirige lentement vers l'ascenseur sans montrer la moindre colère envers moi. Cette fille est cinglée, ce n'est pas possible autrement.
Avant de refermer la porte j'aperçois Gaël un peu plus loin qui m'observe d'un air narquois.

- Quoi, tu veux ma photo ?

Je claque la porte violemment et je pars ensuite m'écrouler dans mon divan. Il va falloir que je songe sérieusement à m'occuper du cas d'Axana. Je croyais franchement qu'elle avait compris le message chez mon père mais manifestement je me suis lourdement trompé. Si elle continue de la sorte, je n'aurais pas le choix, je devrais parler au Vice-Amiral.

Pour me calmer, je me mets à mon piano et je passe deux bonnes heures à débuter la composition d'un nouveau morceau.

C'est un violent mal de crâne qui m'oblige à m'arrêter en fin d'après-midi. Je suis trop tendu, trop stressé, trop énervé.
Le toubib de l'armée m'avait bien recommandé d'éviter les situations de stress, tu parles, elles sont omniprésentes depuis que je suis de retour en Belgique.

Je prends rapidement un médoc pour soulager ma douleur puis je me retrouve avachi dans mon divan à regarder la télé jusqu'à une heure avancée de la soirée sans vraiment m'intéresser à ce que je vois.

Mon smartphone qui vibre sur la petite table devant moi me sort de ma torpeur et je bondis sur mes pieds lorsque je remarque que j'ai reçu un message d'Éline.

Mon sourire s'efface rapidement lorsque je lis ce qu'elle m'a envoyé :

A quoi tu joues Romain ?


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