16 août 2016 - Romain


J'ai l'impression d'avoir fait une chute monstrueuse tant mon corps me fait souffrir. Oh et ce mal de crâne, putain !

Il y a des bruits bizarres autour de moi. J'ouvre lentement les yeux et je ne reconnais pas l'endroit où je me trouve.

Je ne me rappelle rien. Juste cette grotte où nous nous sommes cachés après l'attaque de notre convoi.

Merde c'est quoi ça ?

Je regarde mon bras où sont plantées plusieurs seringues puis je fixe les pochettes qui sont attachées à un grand pied à perfusion.

A côté je vois une sorte de monito qui mesure les battements de mon cœur et d'autres appareils qui me sont inconnus.

Ok, je suis à l'hosto ça, c'est une certitude. Mais où ? Bordel mais qu'est-ce qu'il m'est arrivé ?

Julien m'avait certifié que mes blessures n'étaient pas graves. On ne met pas une perf à un gars qui a un poignet cassé tout de même.

Je commence alors à me souvenir difficilement que mon coéquipier parlait avec notre capitaine avant que je ne sombre totalement.

Je crois qu'il avait parlé de déshydratation sévère et d'une plaie infectée mais...

Un claquement de porte. Des voix. Bordel ma tête...

- Oh putain vous pourriez faire un peu moins de bruit et la fermer merde !

- Ah, notre lieutenant est enfin de retour parmi nous.

Je vois alors un gars s'approcher de moi avec une infirmière à ses côtés.

- Je ne vous connaissez pas un langage aussi fleuri Lieutenant Dalmans. Mais, j'avoue que c'est bon signe, cela veut dire que vous allez mieux.

Je m'apprête à demander au médecin s'il sait quand je vais pouvoir rentrer chez moi mais une violente quinte de toux m'en empêche et je porte instinctivement ma main droite, celle qui n'est pas plâtrée, vers mon torse qui est entouré d'une large bande qui me comprime de partout mais qui permet de rendre la douleur presque supportable.

- Je rentre quand ?

- Ha...A vrai dire...je n'en sais rien.

- Comment ça vous n'en savez rien ? Vous êtes toubib oui ou non ?

- Ecoutez Lieutenant, vous avez été salement amoché et vous avez perdu beaucoup de poids en à peine trois semaines. Vous êtes encore trop faible pour voyager et de toute façon avec vos côtes fissurées...il vous faut un repos complet de 6 à 8 semaines.

- Vous plaisantez ?

Non, vu sa tronche, il plaisante pas le doc. Et sœur sourire à côté n'a pas l'air d'être commode non plus. Génial, manquait plus que ça. D'où elle sort celle-là d'ailleurs, je la connais pas.

- Femke s'occupera de vous. Vous êtes bilingue Lieutenant ?

- Non, je me débrouille en néerlandais mais là j'ai pas vraiment le cerveau en état de marche.

- Oui, naturellement, je comprends.

- Dites, il y a quoi dans toutes ces perfs ?

- De quoi vous remettre sur pied et vous aider à vous reposer. D'ailleurs, je vois que celle-ci est presque vide. Nous allons vous la changer et d'ici une bonne dizaine de minutes vous vous assoupirez à nouveau.

- Non mais attendez, je ne veux pas dormir moi.

- Vous avez besoin de repos Lieutenant Dalmans. Vous avez fait un arrêt cardiaque et vous avez eu une infection pulmonaire en plus d'une déshydratation sévère et de nombreuses côtes fissurées. Vous êtes épuisé et votre corps est à la limite de la rupture. Vous avez perdu plus de 10% de votre poids, vous avez besoin de temps pour récupérer.

- Plus de 10 % ? Ma mère trouvait que je n'étais déjà pas gros,...

Ah, c'est vrai, vous pourriez m'apporter mon portable ?

- Je regrette Lieutenant, mais vous allez être au repos complet pendant encore au moins trois semaines.

- Quoi ? Hors de question ! Je dois contacter une personne le plus vite possible et...

- Rassurez-vous, votre famille a été prévenue et...

- Non, vous ne pigez pas. Cette personne n'était pas sur la liste.

- Il faudra attendre dans ce cas. Je suis désolé mais vous avez besoin de repos. Vous avez également été victime d'une commotion assez sévère, je tiens à ce que votre cerveau soit au repos complet.

- Et le téléphone ? Je peux passer un appel au moins ?

- Non plus. De toute façon toutes les communications privées sont suspendues jusqu'à nouvel ordre

- Pourquoi ?

- Vous avez été victime d'une embuscade Lieutenant Dalmans et toute la lumière n'a pas encore été faite sur cette affaire. L'Etat-Major a donc pris quelques précautions supplémentaires.

- Je veux voir le capitaine Raes.

- Si vous voulez, mais ça ne changera rien. Maintenant cessez de parler et reposez-vous. Vous devriez commencer à sentir les effets du médicament.

Ce crétin de médecin a raison. Mes paupières deviennent lourdes et je finis par glisser dans un sommeil sans rêves.

Je me réveille à la tombée de la nuit. Femke, qui tire toujours autant la tête, examine attentivement la feuille qui sort du monito.

Je repense aux mots du médecin. Un arrêt cardiaque ? Merde alors, je suis pas passé loin de la catastrophe moi...

Je ne comprends pas. J'ai toujours été en parfaite santé, il n'y a aucun antécédent dans ma famille. Faudra que je demande l'avis de Grégoire moi.

L'évocation de mon frangin me fait alors penser à Éline. Je lui avais parlé de Greg à l'aéroport. Avec un peu de chance elle s'en était rappelée et elle aura essayé de le contacter.

Ouais et après ? Il ne pourra rien lui dire de toute façon elle n'est pas sur cette putain de liste.

Je soupire profondément ce qui a le don de réveiller la douleur dans mes côtes.

8 semaines à passer dans ce lit ? Je suis bon pour l'asile quand je rentrerai au pays.

Et cette histoire de communications suspendues, c'est bien une première ça. J'espère que le capitaine va passer. Y a trop de choses qui m'échappent encore pour le moment.

Comme s'il y avait eu une transmission de pensées, la porte de ma chambre s'ouvre sur mon supérieur et Femke nous laisse seuls.

- Tu nous as fichu une sacré trouille Romain.

- Il paraît.

- Le doc a dit que tu voulais me voir.

- Ouais. C'est vrai cette histoire de...les appels, tout ça...

- Malheureusement oui. Il y a un problème ?

- Je...je suppose que toute ma famille a été prévenue ?

- Oui en effet.

- J'ai besoin de contacter quelqu'un. Une personne qui n'était pas sur ma liste de contacts officiels et je...

- Éline Castellan ?

- Que... ? Oui mais...comment ?

- J'ai eu ton frère au téléphone ce matin. Apparemment, à la demande de cette fille, il a contacté plusieurs personnes à Bruxelles pour qu'elle puisse avoir accès aux informations qui te concernent.

Mais cela a été refusé. La DG HR a expliqué qu'il fallait impérativement ton accord et...

- Et bien, je peux le donner si c'est juste ça et...

- C'est un peu plus compliqué que cela. Au départ tout le monde a pensé à un enlèvement et toute ta famille a été mise sur écoute au cas où une demande de rançon serait formulée.

Et ton ordinateur a été examiné. Il a fallu une semaine à l'un de nos experts pour accéder à tes dossiers cachés.

Je déglutis lentement en entendant les paroles du capitaine et j'ai le désagréable sentiment qu'il ne me dit pas tout. Mais au moins Éline est en contact avec mon frère.

Je dévisage anxieusement le Capitaine Raes en attendant la suite.

- Seul ton frère a lu vos échanges. C'est elle sur la photo en fond d'écran ?

- Hum...oui.

- Très jolie fille. Qui est-elle Romain ?

- Pourquoi cette question ?

- La Sûreté de l'Etat a commencé une enquête sur elle.

- Hein ? Mais pourquoi ?

- Parce qu'elle est la seule civile avec laquelle tu étais en contact ces derniers mois.

- Oui, et alors ?

- Et bien, ils veulent s'assurer qu'elle n'a rien avoir avec...

- Oh oh attends un peu. Ils ont fumé la moquette ou quoi ? Éline n'a rien à voir avec l'embuscade, c'est du délire !

Mon père...il sait...pour elle ?

- Non.

- Cette enquête est inutile. Je ne veux pas qu'on l'ennuie. Elle...Je lui ai sauvé la vie à Zaventem le 22 mars. Je pense que je ne dois pas te faire un dessin sur son état psychologique les semaines qui ont suivi ?

- Non en effet.

- Je suis resté en contact avec elle après les attentats. Je veux qu'elle sache que je vais bien. Et cette surveillance de ma famille doit cesser. C'est totalement absurde.

- Ça va se faire. Par contre pour Éline...

- Putain Manu, s'il te plait. Elle est tout pour moi. Je l'aime comme un fou.


Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top