Chapitre - 45
"- Donc Miss Lovegood a des visions ?
- Luna, chéri.
- Oh oui Luna." Remus adressa un vague geste de la main à son épouse qui l'avait repris une fois de plus. Certes ils avaient grandi et étaient maintenant de braves adultes qui combattaient à ses côtés afin de sauver le monde, ces gosses resteraient toujours ses élèves.
"- D'après Hermione et Malefoy oui.
- Je dois avouer que leur raisonnement se tient.
- Alors vous pensez comme eux Professeur ?
- Harry, pour l'amour du ciel, n'en rajoute pas et appelle-le Remus.
- Désolé Tonks." le brun offrit un regard contrit à la jeune femme, leva la main qui ne tenait pas sa baguette en signe d'innocence, mais aucun d'eux n'était dupe. Autant que Remus ne pouvait se défaire de la vision de ces jeunes gens comme les braves gamins qu'il avait vus du haut de son pupitre, aucun d'entre eux ne pouvait dissocier Remus du titre de meilleur professeur des forces du mal qu'ils n'avaient jamais eu.
La métamorphomage agita sa baguette vers un coin de la pièce sans succès, avant de revenir vers les deux hommes. Ici aussi les fouilles ne donnaient rien et pour ne pas changer. Elle secoua la tête.
Ils avaient un monde à sauver.
Et
Elle avait un fils à sauver. Un remarquable petit bout de chou d'un an et demi qui devait rendre sa grand-mère slash baby-sitter attitrée barge à l'heure qui l'était. Maintenant que Teddy savait marcher, il mettait un point d'honneur à ne jamais s'asseoir et toujours rester en mouvement. C'est tout juste s'il ne fallait pas des yeux derrière la tête avec lui.
Elle revint se mordit la lèvre, serra la main de son mari, avant de se tourner vers Harry.
"- J'ai du mal à m'y faire, l'idée que notre petite Luna voit encore finalement mais... différemment ? Elle ne souffre pas au moins, je veux dire quand elle a...
- Hermione appelle ça des visions et non, Luna nous a rassuré, elle ne souffre pas, la seule qu'elle a eu jusqu'à lors elle l'avait confondu pour de la légilimencie dans un premier temps. Alors non elle ne souffre pas. Hormis ça, elle fait toujours le même rêve d'une porte étrange...
- Oui, Malefoy et Miss... Et Hermione m'en ont parlé. Je n'avais pas de réponse à leur donner. Moi-même je ne comprends pas ce que cette porte peut bien représenter.
- Que Malefoy nous aide... Ça aussi j'ai du mal à m'y faire." réagit la jeune femme aux propos de son époux et le plus jeune de l'équipe acquiesça de concert avec ses dires.
Remus les regarda l'un et l'autre avant de secouer la tête.
"- Certes je dois admettre moi-même que je suis un peu surpris. Mais quand bien même Monsieur Malefoy a fait les mauvais choix auparavant il n'a jamais été quelqu'un de mauvais. Je me souviens votre troisième année... Quand..." Le lycanthrope s'arrêta de parler pour diriger le faisceau de sa baguette vers un tiroir, qu'il entreprit d'ouvrir avec prudence, il n'y avait rien d'autre qu'un épais liquide noir dont il aurait mieux fallu ne pas connaitre l'origine.
"- Professeur ?" Harry rappela son attention, curieux de savoir ce qu'il comptait dire au sujet de son ancien ennemi.
"- Le premier exercice.
- Celui avec l'épouvantard ? Malefoy avait refusé de le faire non ? En braillant que c'était indigne d'une personne de son rang.
- Oui. Je l'avais fait venir dans mon bureau après les cours. Il pouvait ne pas vouloir le faire devant les autres, mais il n'avait aucune raison de ne pas s'exercer.
- Il l'a fait ?" le plus vieux des deux hommes balafrés hocha la tête.
"- Son épouvantard... C'était son père. Son père qui le menaçait de lui apprendre la vie, que c'était pour son bien, qu'il le fallait. Il tenait sa baguette dans ses mains et... Quand Malefoy l'a vu il est devenu blanc, il a reculé jusqu'au mur et s'est recroquevillé. Il n'a jamais pu lancer de riddikulus, c'était... trop dur pour lui, l'épouvantard était plus fort que sa volonté de lutter.
- Malefoy se faisait battre par son père ?" et comme Remus hochait la tête à la question de son ancienne élève, son épouse enchaina.
"- Il t'a fait penser à Sirius ce jour-là n'est-ce pas ?
- Comment ça ?" Remus s'arrêta pour se tourner vers le fils et le filleul de ses amis décédés.
"- Sirius... avait le même épouvantard." le quarantenaire soupira, détourna le regard et repris prestement son chemin sans laisser à Harry le temps de répondre.
"- Sirius se faisait battre..." et comme l'ainé ne disait rien, le silence trahissait la réponse. Ce fut Tonks qui posa une main tout autant amicale que maternelle sur son épaule avant de répondre.
"- C'était sa mère.
- Il ne m'en a jamais rien dit.
- Sirius n'a jamais aimé en parler. Ça rendait ton père fou.
- Mon père savait ?" Remus s'approcha d'une bibliothèque avant de répondre.
"- C'est ton père qui l'a sauvé.
- Tu l'as aidé aussi Remus." il nia pourtant l'affirmation de sa femme.
"- Non, jamais autant que James. C'est lui qui l'a abrité quand il a fui le domicile familial. C'est peut-être la seule différence entre Sirius et Drago Malefoy. L'un d'entre eux a eu des amis qui l'ont aidé à s'en sortir et à faire les bons choix, ça a jamais été le cas du jeune Malefoy.
- Il aurait eu de l'aide s'il en avait demandé !
- Ne soit pas de mauvaise foi Harry." l'ancien professeur retient un sourire, en voyant à quel point le jeune homme pouvait parfois ressembler à la copie conforme de son regretté meilleur ami. " Il ne pouvait pas vous demander de l'aide.
- Et pourquoi pas ?
- Parce que vous le détestiez.
- On l'aurait aidé quand même !
- Peut-être que oui, vous l'auriez aidé. Mais pourquoi aurait-il eu en premier lieu assez confiance pour vous demander cette aide ? Il a été éduqué pour ne se fier à personne, pour ne jamais montrer ses faiblesses. On a imprimé ces idées ridicules dans sa chair. Il ne pouvait pas vous demander de l'aide, il ne pouvait même pas y songer. C'était hors de pensée pour lui. Il a été conditionné à être un monstre solitaire, rien d'autre. Il était seul.
- Professeur...
- Je me souviens ce qu'était Sirius durant notre jeunesse. Il ne voulait pas en parler, et je suis sûr que de tout ce qu'il nous a laissé entendre, il ne nous a jamais entièrement dit tout ce que sa mère lui faisait vivre. Mais je me souviens de nos nuits dans le dortoir.
"- Il faisait des cauchemars ?
- Comme toi, pas pour les mêmes raisons. Je me réveillais en pleine nuit aux cris qui rompaient sa gorge, je l'entendais hurler d'arrêter, qu'il en avait assez, qu'il avait compris la leçon, qu'il ne recommencerait plus, qu'il ne ferait plus ça désormais. Les mots pouvaient varier en fonction de ses cauchemars, en fonctions de ses terreurs nocturnes, parfois on pouvait comprendre les raisons pour lesquelles il avait été puni, parfois non : pour un oisillon qu'il avait sauvé, pour les moldus qu'il avait voulu défendre de propos extrémistes, pour des choses encore plus minimes, pour rien. Je crois que cette femme le battait pour le plaisir, parfois, j'en suis pratiquement sûr. Le pire c'était quand il n'arrivait pas à se réveiller. Je me souviens d'être debout au pied de son lit et James assis sur son matelas qui le secouait par les épaules encore et encore et il ne se réveillait pas et quand il finissait par se réveiller, il fondait en larmes dans ses bras et James le serrait encore et encore jusqu'à ce qu'il arrête de pleurer, et on restait assis au pied du lit au bord du matelas, en silence, on attendait qu'il se calme assez pour se rendormir. Au réveil personne n'en parlait comme si ce n'était pas arrivé, c'était la règle : ne rien dire. Sirius refusait de répondre aux questions de toute façon, sauf quand c'était James et qu'ils étaient seuls, et encore, il était important pour lui de ne jamais perdre la face à lui. L'inverse valait également pour James. Patmol et Cornedrue avait cette relation intense et fusionnelle ou ils acceptaient de montrer leurs faiblesses à l'autre autant qu'ils voulaient toujours paraître plus forts qu'ils ne l'étaient, c'était assez exceptionnel. " Et comme Harry ne savait que répondre alors il releva simplement :
- Ça fait bizarre de vous entendre les appeler Patmol et Cornedrue." il lui accordât son éternel sourire fatigué.
"- Et moi ça me fait bizarre de ne pas les appeler Patmol et Cornedrue. On préférait tous ce surnom à notre prénom, on l'avait choisi, il disait qui on était. Il racontait nos aventures.
- Vous parlez de la carte du Maraudeur ?
- En autres. " Tonks attira son mari à venir l'aider pour déplacer un sofa, mais il n'avait rien en dessous.
"- Vous pouvez me raconter ?" Remus réfléchit une ou deux secondes, ouvrant les étagères de sa mémoire, sélectionnant un ou deux souvenirs intéressants (et pas Merlin ni trop osé ni trop vulgaire, il n'allait pas tout raconter au fils de son ami décédé, certaines choses ne se disaient pas, pas du tout).
"- Je me souviens de cette fois où Patmol avait pris trois soirs de détentions de façon injustifiée selon ses dires. La vérité c'est que cacher des souris dans la salle du Professeur McGonagall et crier "Bon appétit" lorsqu'elle s'en est rendue compte était largement passible de détention." Harry étouffa un rire, failli demander s'il n'avait pas osé, mais oui, il voyait tout à fait son parrain capable de faire ça, et laissa son ancien professeur de défense contre les forces du mal continuer. " Il criait à la ronde et heureusement que les couloirs étaient désert qu'il aurait bien aimé faire cramer ce vieux château branlant en entier, et Cornedrue de lui répéter que c'était un château en pierre et que le feu n'aurait que peu d'effet, et Patmol qui surenchérissait de plus belle en disant qu'au moins ça lui remonterait le moral. Quelques jours plus tard, chacune des lanternes de tous les couloirs de l'école s'éteignait subitement quand on passait devant et se rallumait quand on était loin d'elles. Les professeurs on mit trois soirs à tout remettre en était, on n'a jamais su qui avait fait ça, mais Sirius et ton père étaient morts de rires, et je les connaissais assez pour ne pas douter de leur implication dans l'affaire. Le professeur McGonagall aussi, bien qu'elle n'ait pas pu le prouver. Ils la rendaient folle.
- Folle ?
- Je suis sûre qu'elle a prié tous les anciens grands sorciers qu'elle connaissait le jour où elle vous a vu débarqué dans son bureau pour la première fois, Hermione, Ron et toi. Elle a du avoir l'impression de revivre les années de calvaires que James et Sirius avaient prodigieusement pris un plaisir à lui infliger. Avec ma contribution et celle de Peter. " et pour éviter de s'attarder à trop penser à quel point Peter était le traître, était le monstre, le responsable, l'allumeur de feu, Remus choisit de rajouter rapidement dans un sourire. " Parfois même celle de ta mère, contre son gré, et à chaque fois, Lily ne manquait pas de nous le rappeler, avec force et fracas !
- Rogue m'a dit qu'elle avait un fort caractère.
- Tu as parlé de Lily avec Severus ?" Harry se retourna pour hocher la tête, l'éclat de son Lumos balayant rapidement la pièce avant de revenir à la commode qu'il inspectait.
"- Oui, étrangement il a accepté de m'en parler. Je crois même que ça lui fait du bien.
- De parler enfin de la femme qu'il a toujours aimé, je suppose que oui.
- Vous saviez qu'il l'aimait ?" Remus se mordit la lèvre, hésita un peu.
"- Je savais qu'ils s'aimaient oui.
- Ils s'aimaient ?
- Ils ne se détestaient pas." Tonks intervint dans la conversation, loin d'elle l'envie d'aider son mari qui s'enfonçait.
"- Remus, tu as déjà gaffé, tu devrais assumer au lieu d'essayer de dévier la chose tu verras que ce sera bien plus simple." l'homme lui décocha un regard incendiaire avant de retourner à l'exploration des différents titres imprimés sur les ouvrages posés sur l'étagère.
"- Professeur...
- Lily était amoureuse de Severus.
- Quoi ?
- Oh non ne méprend pas mes propos. Elle aimait ton père, elle l'a vraiment aimé, sincèrement de tout son coeur, comme il l'aimait, tu es le fruit d'un amour honnête Harry.
- Mais... ?
- Mais, elle aimait Severus, tout du moins, elle l'a aimé, avant qu'il gâche tout." Harry failli lâcher sa baguette.
"- Vous en êtes sûr ?
- Pratiquement oui. Elle n'a jamais rien voulu nous dire. Mais on le savait tous. C'est pour ça que ton père s'est... acharné de la sorte contre Rogue.
- Elle l'aimait...
- Je pense qu'elle ne s'en rendait pas compte. Mais y avait des signes qui ne trompaient pas." le lycanthrope dessina de nouveau un sourire fatigué du bout de ses lèvres aux souvenirs heureux de l'époque où il n'avait que des problèmes de môme, de môme loup garou mais de môme quand même.
Il avait presque fini d'inspecter la bibliothèque et il savait qu'à côté de lui Harry et Tonks avaient pratiquement fini de fouiller la pièce, ils pourraient bientôt passer à la suivante en espérant y trouver quelque chose de plus intéressant.
Il soupira si Lily avait été là, elle aurait dit des bêtises et rigolé avec Tonks. Et si James avait été là, elle l'aurait disputé en le voyant faire le pitre, probablement avec Sirius s'il avait été là. Elle aurait disputé Sirius lui aussi, alors qu'il essayait de faire une farce entre deux meubles déplacés pour regarder par derrière.
Ses amis lui manquait terriblement.
"- Lily essayait de passer le plus de temps possible avec Rogue. Ta mère n'a jamais cru à la guerre entre les maisons tu sais Harry, c'était pas son genre. Mais, elle avait cette façon de sourire en s'asseyant à côté de lui quand on avait des cours en commun et qu'il lui avait gardé une place, ça ne trompait pas. Et puis elle était attentive à ce qu'il disait, tout le temps, elle l'encourageait à participer en classe quand il était trop timide, elle prenait toujours le temps de l'aider à réviser sa métamorphose, diantre il était nul en métamorphose, alors qu'elle refusait d'aider Sirius et James. Et elle les disputait si fort chaque fois qu'ils s'amusaient à embêter Severus ou qu'elle les suprenait entrain de lui faire une farce stupide. Puis... Je me souviens l'avoir surpris une ou deux fois à disputer Rogue parce qu'il manquait de confiance en lui, que c'était une personne merveilleuse et qu'il devait assumer qui il était vraiment, au diable l'opinion des autres. Crois-moi, je pensais pas qu'elle pouvait disputer quelqu'un encore plus fort que les savons qu'elle réservait à James et Sirius avant de voir ça. Mais elle l'encourageait tellement à devenir la meilleure version de lui-même... c'était différent d'avec nous... Je suis sûr qu'elle l'aimait, qu'elle l'a aimé à une époque. C'est juste... Je pense que ta mère ne s'en ai pas rendu compte, pour elle, Severus était comme un frère, c'était pas fraternel. Les sentiments qu'elle avait pour Sirius ou pour moi étaient fraternels... C'était pas le cas de ceux qu'elle avait pour lui. Elle s'en serait rendu compte je pense s'il n'avait pas..." il ne finit pas sa phrase mais Harry savait à quel événément il faisait référence.
Tout le monde savait à quoi il faisait référence.
Le grand scandale, la chute sublime, le spectacle d'un jeune homme qui a tout fichu en l'air, qui a fait fuir la seule femme qu'il ait jamais aimé par peur de l'aimer trop et par peur qu'elle l'aime en retour, et par peur et par peur et par peur.
Oui, pas besoin de le dire à haute voix, on savait ce qu'il lui avait dit. On se souvenait de ses erreurs. On se souvenait des larmes de Lily d'avoir le coeur brisé avant même que de se rendre compte qu'il aimait ce morceau de viande battant dans sa poitrine.
On oublie la douleur du serpentard, on se souvient des bras de James qu'il la réconfortait.
On a pas besoin de le dire à haute voix.
"- Rogue ne me l'a jamais dit.
- Rogue ne l'a jamais su. Il ne s'est jamais rendu compte qu'elle l'aimait, lui aussi. Au jeu de l'aveugle ils faisaient la paire. Il avait trop peur d'être aimé pour se rendre compte qu'il était réellement aimé et..."
La voix de sa femme l'interrompit et il arrêta dans l'instant de regarder les livres qu'ils inspectaient, courant à sa rencontre, près du bureau devant lequel elle se tenait.
"- Chérie, ça va ?
- Un parchemin. J'ai trouvé un parchemin codé, Remus."
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top