Chapitre - 39



Il aurait bien pu l'assassiner juste en sentant l'odeur dégueulasse avant même que de passer la porte.

"- Tu fumes encore ?!" Drago ne se retourna pas, ne répondit même pas, c'est à peine s'il haussa les épaules.

Le roux avait été dépêché sur une énième mission de fouilles dans l'après-midi et il était rentré après 21 heures bien passées.
Contrairement à Harry, il n'avait pas fait partie de l'équipe qui s'était chargée de surveiller et d'analyser l'entrevue de l'ancien Prince des Serpentards et Zabini à bonne distance. En rentrant son meilleur ami lui avait fait un rapide topo dans la cuisine pendant que le rouquin se faisait réchauffer une part du repas et l'engloutissait plus qu'il ne la mangeait. C'était là tout ce qu'il savait de ce qu'il s'était passé, des suites qu'on avait données à son idée farfelue d'envoyer Malefoy racoler son ancien ami pour en faire un agent double.

De ce que lui en avait dit Harry, et vu comment tout cela semblait s'être passé, il se doutait bien qu'il n'allait pas retrouver son camarade de chambre (contre son gré) en bon état. Force était de constater qu'il avait raison.

Il voyait le blond, debout de dos, adossé à l'embrasure du velux ouvert, torse nu, un pantalon vert sombre lui tombant sur les hanches, pieds nus, des ecchymoses apparaissant visibles, à tous les endroits dénudés. Les vêtements qu'il semblait avoir porté durant sa mission trainaient pas loin de son matelas sur le sol, visiblement troués, tâchés de terre et de sang...

"- Maman m'a dit que tu ne lui avais pas donné tes fringues pour qu'elle s'en occupe en rentrant de mission." il haussa de nouveau les épaules, c'était un peu vague, un peu désordonné comme mouvement, ça semblait pas très aristocrate à voir, d'ailleurs, sans que Ron puisse expliquer pourquoi il pensait ça. 

Le blond expulsa un nuage de fumée. 

"- Ouais, je sais, je lui donnerai demain. " il sembla accorder un petit coup d'œil au tas de tissu informe. " Désolé pour ton pull, je ne voulais pas qu'il finisse comme ça. 

- Pas grave, connaissant Maman elle se fera une joie de le réparer. Sauver le monde c'est pas trop son truc, mais repriser n'importe quel vêtement, y a pas meilleur qu'elle. Elle a du mal à savoir comment elle peut aider, alors... ça l'occupera sûrement. Puis ce n'est qu'un pull, c'est matériel, facultatif... Contrairement à tes poumons, éteins-moi cette cigarette de suite ! 

- Oh par pitié, on ne va pas à nouveau avoir cette discussion où tu me dis que je suis un vilain garçon qui se fait du mal et ou je te réplique que c'est mon corps, mes choix et que tu ferais bien de me fiche la paix ? 

- Oh que si on va l'avoir, et on l'aura tant que tu t'évertueras à foutre ces petits rouleaux de mort à ta bouche ! 

- Je suis pas ton gosse, t'as pas à me faire la leçon." 

Le Ron d'une époque, impulsif et incapable de contrôler ses émotions lui aurait répondu en hurlant qu'il n'était peut-être pas son enfant mais qu'il était son ami. 

Le Ron actuel, marqué par les horreurs qu'il avait vécues et les traumas pas guéri, et d'avoir dû grandir trop vite soupira simplement. Il posa le plateau repas qu'il avait préparé lui-même et monté pour l'autre idiot sur le rebord de la commode avant de le rejoindre près de la fenêtre. 

"-  Honnêtement Malefoy ? À quoi bon jouer à ça ? Je veux dire, tu sais très bien que je te lâcherai pas dans que tu n'auras pas éteint ce truc, alors fais nous gagner du temps. 

- Je comprends toujours pas ce que ça peut te faire, si je me fais du mal." 

Il y avait beaucoup de choses à répondre à ça. Du genre "je crois que je te déteste plus" ou "je n'ai pas envie de te voir souffrir encore plus", des choses un peu niaises, un peu bancales, des choses qu'on ne s'entendait pas encore penser, des choses qu'il était bien trop tôt pour murmurer, pour les prononcer à haute voix. 

"- Je ne comprends pas non plus. Ça doit être mon côté de Gryffondor idiot et suicidaire. 

- Ça doit être ça. 

- Allez éteins-moi ça. 

- Je te déteste. 

- Je sais. " 

Le blond grogna, une fois, deux fois, trois fois, porta la cigarette à ses lèvres, grogna encore, finis par la presser contre le rebord du velux pour l'éteindre et jeter son mégot au loin dans le jardin.


Ensuite il y eu un silence, encore un silence, un silence, un silence, un silence toujours un silence, t'façon il n'y avait que ça entre eux, que des silences, toujours des silences, des silences ou des insultes.  

Les silences c'étaient leur façon de communiquer de se dire ce qu'ils n'osaient pas dire. Ils n'étaient pas forcément les plus bavards au monde. 

Alors il se passa une minute ou deux, comme ça, Drago accoudé à l'embrasure du vasistas, les mains de l'autre côté de la fenêtre, Ron un peu en retrait, à le regarder. Sans bouger, ni l'un ni l'autre. 

"- Tu trembles. 

- Putain Weasley c'est ta grande passion d'énoncer des choses aussi absurdes à haute voix ? Tu te sens un génie quand tu le fais, c'est ça ? 

- Et toi ta passion c'est d'ignorer ce que je dis hein ? Ferme-moi cette fenêtre tout de suite... Je t'entends marmonner des jurons dans la barbe que tu n'as pas ! ... " le rouquin n'avait même pas besoin de regarder dans son dos pour le voir fermer la fenêtre en insultant ses ancêtres sur huit générations. Il se contenta d'attraper un pull épais dans le tiroir de sa commode et de revenir vers lui. " Tu ne vas pas crever d'hypothermie sous mes yeux sombre fou... 

- Si j'en ai envie ? 

- Je m'en tape de ce que tu as envie, enfile-moi ça fissa." et comme le dragon aux cheveux d'argent ne bougeait pas le moins du monde, Ron le fixa trembler, ses lèvres bleues de froids, contusionnées des coups que son ancien ami lui avait assénés à peine quelques heures plus tôt


Il commençait à le connaître, son Serpentard, son petit prince déchu, tombé de son trône, la couronne envolée, la couronne en carton posée de travers pour faire genre qu'on n'était pas totalement dépossédé, pas totalement cassé la gueule, qu'on était quand même un peu plus, juste un peu plus que l'ombre de ce qu'on avait été. 
C'était plutôt simple de comprendre, une fois qu'on avait pigé le truc et sans avoir à lui poser de questions, et peu importe ce que le blond dirait. 

Drago Malefoy était un bon artiste, ses masques de chairs qu'il portait en permanence pour jouer un rôle au monde, il les avait peint lui-même, sculpté à la main, avec du temps et de la patience, et beaucoup de peurs et d'insécurités et du reste des failles qui lui trouaient l'âme. 
Le truc c'est que le petit snobinard agressif qui insultait tout le monde et dédaignait la moindre critique qu'on pouvait lui faire, la moindre attaque qu'on pouvait lui faire, c'était une façon élégante de chercher à protéger le gamin qui avait peur de lui-même. Le petit blondinet chétif qui se détestait. 
Allez-y insultez-moi donc, au jeu de qui me haïra le plus, je serais toujours le vainqueur. 

Or que comme Drago prenait grand plaisir à se plaindre en quasi non-stop, les Gryffondors étaient des êtres impulsifs, tarés, suicidaires ET têtu. 

Ron n'était pas toujours sûr de l'apprécier, mais, on lui avait fichu dans les pattes en lui disant que cet idiot de ses deux dormirai dans sa chambre, que ce prisonnier infernal serait sa responsabilité. Et alors Ron refusait formellement de le voir se faire du mal sous sa surveillance. 

Il lui semblait qu'ils se ressemblaient trop pour le laisser jouer à trouver toutes les manières possibles de se laisser souffrir, de se laisser mourir de façon discrète mais néanmoins efficaces. 

Il était hors de question qu'on joue à ce genre de jeu des enfers sous le nez du Gryffondor. 

"- Tu vas me l'enfiler cette fichue laine où je te l'enfile moi-même ? Parce que j'en ai marre de t'entendre claquer des dents comme ça, t'es ridicule Malefoy." le blond croisa les bras sur sa poitrine toujours tremblante, voulant rester digne. 

"- Tu n'es pas cap.

- On parie ?" 

Alors oui, c'est comme ça qu'à 22 heures et quelques minutes sur l'horloge en bas dans la cuisine et par une froide nuit de novembre, que Ron et Drago se retrouvèrent plus où moins à se chamailler, alors que l'un tentait d'enfiler un pull à l'autre, de force. 

Drago grimaça alors que le rouquin finissait de lui enfiler la dernière manche sur son corps contusionné par la bagarre avec Zabini. 

"- Je t'ai fait mal ? 

- D'après toi ? 

- Si tu ne t'étais pas débattu aussi. 

- C'est une putain de façon bizarre de t'excuser Weasley. 

- J'ai pas dit que je m'excusais. " 

Pas de réponse... Drago tremblait toujours de froid, Ron était si proche qu'il pouvait presque le ressentir dans tout son corps par procuration. Il venait seulement de se rendre compte que mettre un pull à quelqu'un de force rendait l'autre personne très, très, très proche. 
D'ici, autant rapproché, il dépassait le blond d'une bonne tête, c'était bizarre.

Le rouquin se racla la gorge, détourna le regard, fit un pas en arrière. 

"- Je... ahem... Vais aller chercher de quoi soigner tes blessures... Pas envie que ça s'infecte... Je reviens." 

Il se racla à nouveau la gorge, tourna prestement les talons, une main sur son poignet le retins. C'était l'héritier, enfin, l'ancien héritier, le regard fuyant vers la fenêtre, une petite voix au bord des lèvres. 

"- Non... Reste... S'il te plait... Je veux pas... rester seul..." 

Ron hocha la tête, n'ajouta rien, attrapa sa baguette dans la poche arrière de son jeans et gestura un mouvement ample du poignet qui fit apparaitre sur le lit l'énorme trousse de premier secours qu'Hermione rangeait dans le placard de la salle de bain. 

Enfin... Énorme peut-être pas, la boite en métal était de taille moderne. Mais sa meilleure amie comme à son habitude et sa manie infernale des sorts d'extension indétectables et autres sortilèges du même acabit s'était amusée à transformer, le contenant de métal peint rouge de sorte à ce qu'il puisse contenir tout ce qui puisse aider à soigner n'importe quel blessure, que ce soit des bandes, des compresses, des petits outiles, des pansements, des médicaments moldus, des potions sorcières, où il ne savait quoi d'autre. Il n'était pas trop sûr de comment ça marchait, à ce qu'il en avait compris, la boite savait ce qu'elle devait contenir lorsqu'on l'ouvrait, genre elle pouvait analyser la situation, un truc du genre, une invention à la Hermione ça. Elle pouvait pas s'en empêcher, c'était plus fort qu'elle... Enfin, ça leur arrangeait bien les choses, souvent, et franchement, il comprenait pourquoi son frère inventeur excentrique était éperdument amoureux d'elle à en vomir de la guimauve. 

Il se retrouva, assis sur le matelas où il couchait, Drago, en face de lui, plus ou moins un mélange raté de malaise et d'impassibilité. 

"- Je peux savoir pourquoi tu me soignes comme un moldu ? Un coup de baguette est c'est terminé, t'es un sorcier, tu devrais le savoir non ? " il hocha la tête. 

"- Peut-être bien, oui, mais... Tu sais... Quand on a dû... Traverser le pays tout entier dans la quête de ces putains d'horcruxes... Je me suis retrouvé gravement blessé au bras et... C'est Hermione qui m'a soignée, on avait pas trop le choix faut dire, c'est pas comme s'il y avait beaucoup de médecins quand on tu te retrouves hors-la-loi et cachés dans une forêt... Toujours est-il qu'elle a mis un point d'honneur à me soigner... Certes avec quelques potions, mais sans la magie... Elle disait que mon bras guérirait mieux ainsi, et c'est vrai qu'elle a sauvé mon bras... Mais je pense qu'elle faisait ça pour se rassurer... Tu sais... Les trucs de moldus... Ça la rassure, je veux dire, ça se voit... Bref... Toujours est-il que... se faire soigner, sans magie, ça m'a fait du bien... C'est différent, vraiment différent, ça prend plus de temps et ça n'a peut être pas les mêmes résultats mais... Je sais pas, c'est plus humain, y a plus de chaleur... c'est... 

- Vas y. 

- Hein ? 

- Arrête de défendre tes conneries et fais-le. " Drago avait dit ça sans le regarder, et quelque part, même si le jeune Weasley savait qu'il n'était pas l'idiot raciste et sectaire auquel il voulait si ardemment faire croire, ça sonnait quand même toujours un peu bizarre qu'il abdique si facilement, qu'il accepte des soins qui ne soient pas magiques sans broncher. 

Le rouquin attrapa un coton qu'il imbiba d'alcool cutané dans un petit silence gênant. 

"- Alors ahem... C'est pour ça la cicatrice sur ton bras gauche, quand tu te changes ? 

- Oui... Transplanage d'urgence... Je me suis désartibulé le bras.

- Oh je vois... " Ron se racla la gorge avant de lançait d'une voix un poil incertaine mais pas trop, c'était bizarre, il ne savait même pas pourquoi il n'était pas assuré. 

"- C'est de l'alcool cutané et euh... Tu vois ça sert à désinfecter tes plaies, avant de les soigner mais ahem... ça risque de piquer un peu... T'es d'accord ? 

- Vas-y, je suis un Serpentard, pas une chiffe molle. 

- C'est pas synonyme ? 

- J'ai soudainement envie de te frapper. 

- Vu l'état de tes mains, je crois pas qu'on soit sûr que c'est une bonne idée. " et comme Ron commença a tamponner le coton contre son arcade contusionnée, il ne répondit pas, grimaça simplement. 

Le rouquin eut un sourire en coin à son expression, au sifflement contenu en serrant les dents. 

"- Ça pique Malefoy ? 

- Ta gueule. " 

Ron ne rigola pas à haute voix, pas vraiment, il n'en pensait pas moins pour autant. 

Il désinfecta le reste de ses plaies visibles en silence, son arcarde ouverte, la contusion sur son nez, sa lèvre fendue, les coupures sur ses mains. Drago resta muet, docile, appliqué à ne montrer aucune expression de douleur, appliqué à ne montrer aucune expression de "je déteste pas que tes sales mains de rouquins me soignent", appliqué à rester un petit con des plus stoïque et indifférent. 

"- Bon ahem... Je vais appliquer une crème à... l'arnica. C'est une plante je crois. Hermione dit que c'est le seul truc qu'on peut utiliser sur les hématomes et autres echymoses, et toi t'en as un paquet, il t'a pas raté mon pauvre. 

- Ta... 

- Oui oui ta gueule, je sais. Attention ça risque d'être froid." 

Le blond garda ses lèvres résolument closes alors qu'il observait du coin de l'oeil son-ancien-pire-ennemi-qui-apparemment-n'était-plus-un-pire-ennemi-maintenant-même-si-on-en-était-pas-trop-sûrs occupé à soigner ses blessures.
C'était drôle de quelle façon il pouvait se concentrer à une tâche et comment ses sourcils roux se fronçaient quand il s'appliquait. D'ailleurs, il était extrêment doux, et délicat, pour l'espèce d'énergumène maladroit et bourru qu'il était. 

Plus serviable qu'il le pensait même... Quand on savait que le Gryffondor avait sciemment choisi de le soigner comme un moldu pour prendre du temps avec lui... Parce que c'était plus facile de lui apporter ce genre de soutien que de l'encourager à parler de ce qu'il s'était passé plutôt. 

Comme si Drago allait s'épancher sur ce qu'il ressentait de s'être fait tabassé par ce qui avait le plus ressemblé à un meilleur ami pour lui. 

Allez quoi ! Il marmonnerait que la mission était à l'évidence un succès puisque Zabini acceptait d'aider leur camp (enfin, toujours est-il qu'il ne savait pas si on pouvait lui faire véritablement confiance) et qu'il n'y avait donc rien de plus à dire, terminé, fermez les rideaux. 


Ron lui posa la crème sur la commode à côté du plateau repas et des crèmes de soin pour son tatouage en lui lançant vaguement qu'il faudrait en appliquer sur ses bleus du corps plus tard, mais que pour l'instant, il vallait mieux le laisser se réchauffer (ses lèvres d'idiots qui restait sous le vélux ouvert quitte à chopper une crève capable d'assassiner un dragon étaient encore un peu bleuâtres et il frissonait encore un peu) plutôt que de le déssapper ici et maintenant. 

Bon Hermione s'occuperait de lancer un sort pour résorber son sublime oeil au beurre noir et ses autres copines ecchymoses le lendemain, mais ça c'était un autre sujet. 

Ils étaient toujours silencieux alors que le rouquin s'occupait à bander ses mains. 

"- Ça arrive plus souvent qu'on ne le pense, tu sais. 

- De quoi ? 

- Que les frères se battent. Quand on était plus jeune, Percy m'avait fichu une de ses patates et j'avais rien vu pendant 3 jours. Maman l'avait en... 

- C'est pas ça. Tu trompes. Zabini et moi on est pas frères. 

- Mais c'est tout comme ?" Malefoy soupira. 

"- Nan, pas vraiment, nan. On a jamais été proches. 

- Vous étiez amis à Poudlard. 

- Toi et tes potes me l'avez si souvent balancé à la gueule depuis que je suis arrivé ici : je n'ai jamais eu d'amis. On perd la mémoire Weasley. 

-... C'est juste... Vous sembliez proches..." marmonna-t-il l'air gêné. Il avait soudainement l'impression d'avoir dit une connerie. 

"- Oui c'est ça le truc justement, "on semblait proches", le mot clef c'est "sembler". Ma vie n'était qu'un jeu de mis en scène et de paraître total, rien n'était jamais réel. Vous aviez raison, Potter... tout le monde, j'ai jamais eu d'amis. Hormis Astoria... 

- Et moi je suis quoi ? 

- Un camarade de chambre insupportab... Aie ! Tu m'as frappé !" le blond porta une main enrubannée de bandage à sa tête, l'air outré. 

"- Nan, je t'ai carressé du plat de ma main avec vigueur voyons. Et je recommencerais chaque fois que tu diras des conneries. 

- Je te déteste. 

- Je te déteste aussi. 

- Alors t'es pas mon ami si tu me détestes ! 

- Bien sûr que si ! Je suis ton ami quand même ! 

- Idiot ! 

- Idiot toi même ! " ils se dévisagèrent en grognant, avant que Drago retourne son regard vers la fenêtre. 

Ron lui appliqua un petit pansement sur son arcade avant de s'écarter. 

"- Terminé !" aucun des deux ne bougea.  

Une minute. 

Deux minutes. 

C'était bizarre de se regarder dans les yeux si proches, assis sur le lit d'enfance du rouquin. 

Ron fini par se racler la gorge, agiter sa baguette pour faire disparaître la boîte de secours ainsi qu'elle était apparue. Drago attrapa ses jambes entre ses bras et se tourna définitivement vers le vélux, désormais fermé. 

"-... Je savais que ça se passerait comme ça au fond tu sais... Je suis pas étonné. 

- Mais t'es déçu quand même. 

- J'en ai marre de toi. 

- C'est normal d'être déçu tu sais. " 

Drago ne répondit rien, de là où il était, assis au bout du matelas, il pouvait discerner un peu les étoiles dans le ciel. 

"- Les moldus se battent aussi. 

- Hein ? 

- Ils font la guerre. Comme les sorciers. En fait de ce que j'ai lu ils font que ça. 

- Je savais pas vraiment." le blond hocha la tête. Ron qui était derrière lui à observer son dos, vit sa nuque bouger. Il se mordit la lèvre. Assis ainsi au bord du lit pour une discussion qui semblait... devenir importante ? Il grimpa sur matelas pour aller s'asseoir en tailleur à côté du Serpentard. 

"- Oui... Il y a... En 1914, ils ont commencé une guerre, une guerre sans précédents, elle a duré 4 ans, jusqu'en 1918 et tous les pays se sont battus. Ils ont appelés ça la Première Guerre Mondiale, la drôle de guerre. Apparemment c'était la première fois que ça prenait de telles proportions. Ils ont inventés de nouvelles armes, plus destructrices que toutes celles jamais créées, ils se sont mis à attaqués les civils, qui n'avaient rien demandés, ils ont menti au popluation, ils ont détruit des villages entiers. Ça a été un vrai carnage, plus que n'importe lesquelles de nos guerres en fait, Grindelwad, Tu-sais-qui... C'était rien à côté... On a chiffré à des millions de morts. 

- Des millions ?! 

- Dix millions je crois, pour être précis en fait. 

- Dix millions ?!" Ron qui avait crié, félicita le choix des deux garçons d'avoir insonorisé définitivement la chambre à l'aide de sorts, la semaine précédente. 

Le blond haussa vaguement les épaules. 

"- On est pas mieux. On a tué pour le sang des sorciers, ou pour l'espèce des créatures magiques, ou parce que les loups garous étaient des loups garous... La liste est tellement longues. Les sorciers ne peuvent pas les juger. Faut croire que c'est dans le propre de l'homme de tuer ses semblables par peur, par différence, parce que c'est plus simple que d'apprendre à les connaître. 

- Tu dis ça d'une façon si... 

- Froide ? Indifférente ?" Drago haussa les épaules. " J'ai eu le temps de m'y faire. Poudlard, la Guerre, le mauvais camp, Azkaban... Toute ma vie n'est que l'apprentissage de cette vérité... Au moins chez les moldus elle est créatrice... 

- Comment ça ?" le Gryffondor lui jeta un coup d'oeil, il avait beau avoir appris que le jeune homme avait passé son adolescence à lire des livres sur les moldus tard le soir en cachette dans la bibliothèque de l'école, il ne s'y faisait toujours pas. 

"- Ils ont raconté des histoires, ils ont peint, ils on écrit... La Guerre, la Vérité, l'Atrocité du monde, les plaies béantes de la nature humaine, ils ont cherchés à les transcender par l'Art. 

- Pour ne pas oublier ? 

- Oui." il parut pensif un petit instant." Pour se souvenir, des faits, il y a l'Histoire. Demande à des gens comme le professeur Bins, ils seront te dire ce qu'ils s'est passé exactement, où et quand et comment et pourquoi, les dates, les heures, les lieux, les gens présents, les gens morts, les gens demi vivants... Mais pour la Mémoire, le savoir de ce qu'il s'est essenti, ce qu'il s'est vécu... On peut faire confiance aux artistes. 

- Tu penses ?" le blondinet hocha de nouveau la tête. 

"- Les surréalistes tu connais ? 

- Du tout. 

- C'est un mouvement... De réponse aux atrocités de la 1ère Guerre mondiale. C'est des artistes, des peintres, des poètes qui ont décidé de dépassé les horreurs de la Grande Guerre par l'Art. Ils ont explosés les règles, ils ont pris des substances, ils ont déconstruit la réalité, ils ont été puisé à l'intérieur de même, ils ont recollés comme ils pouvaient et de façon maladroite ce qui avait été brisé en morceaux... Y a un poète... Un poète surréaliste que j'aime beaucoup. 

- Un poète ?" le blond pencha l'oreille d'un côté, pensif. 

"- C'est vrai qu'on a pas vraiment beaucoup de poètes sorciers... La Poésie tu sais, c'est comme de la musique, mais juste avec des mots, sur papier. C'est bizarre un peu mais, c'est sublime surtout. Des fois ça a pas de sens, mais en fait faut pas lui chercher du sens, faut juste... Le ressentir. Et c'est tellement beau, tellement fort, tellement grand, tellement puissant. Ça parle de la Vie, de la Mort, de ce qu'il y a au milieu, des gouttes d'eau sur la vitre et des verres qui tremblent et la couleur des fueilles et la couleur du ciel, et la couleur du reste et la vérité du monde... Et de ce qu'il y a l'intérieur de nous... et... " il sembla se perdre en lui même

"- Tu aimes la poésie ?" le Serpentard ne répondit pas mais c'est pas vraiment utile qu'il réponde, quand bien même. 

"- Y a un poème que j'aime beaucoup... De Boris Vian... C'est pas un surréaliste mais... Il parle de guerre. 

- Tu crois que tu pourras me le faire lire un jour ? 

- En fait je m'en souviens..." Ron le regarda avec des grands yeux, s'attardant sans vraiment le voir sur la gêne visible de l'autre. 

"- Par coeur ? 

- Par coeur. 

- Tu peux me le dire ? 

- Oui, je crois ?" 

Drago se gratta la nuque, Ron décrocha ses mains appuyés sur le matelas et tourna son buste vers lui, dans un expression inconsciente d'attention non dissimulée. 

"- Le Déserteur, Boris Vian

Monsieur le Président je vous fais une lettre
Que vous lirez peut-être
Si vous avez le temps
Je viens de recevoir
Mes papiers militaires
Pour partir à la guerre
Avant mercredi soir
Monsieur le Président
je ne veux pas la faire
je ne suis pas sur terre
Pour tuer des pauvres gens
C'est pas pour vous fâcher
Il faut que je vous dise
Ma décision est prise
je m'en vais déserter

Depuis que je suis né
J'ai vu mourir mon père
J'ai vu partir mes frères
Et pleurer mes enfants
Ma mère a tant souffert
Qu'elle est dedans sa tombe Et se moque des bombes
Et se moque des vers
Quand j'étais prisonnier
On m'a volé ma femme
On m'a volé mon âme
Et tout mon cher passé
Demain de bon matin
Je fermerai ma porte
Au nez des années mortes
J'irai sur les chemins

Je mendierai ma vie
Sur les routes de France
De Bretagne en Provence
Et je dirai aux gens
Refusez d'obéir
Refusez de la faire
N'allez pas à la guerre
Refusez de partir
S'il faut donner son sang
Allez donner le vôtre
Vous êtes bon apôtre
Monsieur le Président
Si vous me poursuivez
Prévenez vos gendarmes
Que je n'aurai pas d'armes
Et qu'ils pourront tirer.


Et encore une fois il y eu ce long silence planant. 

Ron n'était pas assez suicidaire pour relever la voix qui s'étaient brisée sur les derniers vers. 

"- Wow. 

- Je me suis toujours identifié à lui, tu sais Weasley ?" 

Et Ron se redressa prêt à l'engueuler, à lui sortir ses diatribes de Gryffondors à lui beugler qu'il fallait se battre. 
Le connaissant, le blond repris la parole avant lui. 

"- Maintenant c'est plus le cas. 

- Hm ? 

- Maintenant je veux me battre." 


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