Chapitre 7.3 : Yume
– Allez, rends-toi sans faire d'histoires maintenant ! cria un des Miliciens.
– Vous pensez réellement que ça serait aussi facile ? questionna Yume entre ses dents serrées de colère.
Les soldats, derrière leurs visières noires, se lançaient des regards débordant d'incompréhension. Il était fait comme un rat, alors pourquoi s'obstinait-il à prétendre que tout n'était pas encore terminé ?
– Suis-nous maintenant.
Le Milicien baissa lentement son fusil. Tout se passait exactement comme Yume semblait l'avoir prévu. Les Miliciens vinrent alors l'encercler, de sorte à ce qu'il ne puisse pas s'enfuir. Effectivement, le jeune homme ne pouvait pas s'échapper sur les côtés, mais qu'en était-il de la voie des airs ?
Yume s'arrêta soudainement de protester, ce qui fit se poser bon nombre de questions aux Miliciens l'entourant. Ils espéraient surtout qu'il s'était enfin rendu à l'évidence, et qu'il ne tenterait rien qu'il pourrait regretter plus tard.
– A quoi tu joues, encore ? s'énerva l'un d'eux.
Le jeune homme, désormais agenouillé au sol, esquissa un sourire en coin, déjà fier de son prochain coup. Prenant appui sur un seul de ses pieds, Yume se donna la force nécessaire pour effectuer un saut d'une dizaine de mètres au dessus du sol. Cela lui permit de s'éclipser sournoisement de la garde rapprochée des Miliciens. Le blond avait également calculé son acrobatie de sorte à pouvoir se réceptionner plus à proximité de la fontaine.
– Tirez ! Mais ne le tuez pas, sinon le boss sera furieux ! cracha celui qui devait sans doute être le chef provisoire de cette petite escouade.
En effet, depuis le début, il s'agissait toujours de cette même voix rauque et acerbe qui hurlait des ordres.
Des dizaines de balles en plombs fusèrent dans l'air à la seconde près. Heureusement que ces Miliciens ne savaient pas viser comme il le fallait, sinon Yume serait mort depuis longtemps ! Plusieurs balles manquèrent de le toucher à de multiples reprises, mais aucune ne l'atteignit directement. Le jeune homme parvenait, avec une dextérité à couper le souffle, à les dévier, et même à en trancher certaines en deux grâce à la lame acérée de son épée.
Yume bondit de nouveau, vers l'arrière cette fois-ci, dans le but d'atterrir les deux pieds dans la fontaine. Il s'agenouilla dans l'eau pour éviter les tirs des soldats.
– Cessez le feu !
Le chef de la bande s'avança prudemment vers l'ancien Épéiste. Même s'il portait un casque, Yume savait pertinemment que ce simple Milicien le toisait de haut. Il n'avait pas à se prendre pour le plus fort. S'il était ici, c'était uniquement parce qu'il avait échoué à l'examen d'entrée pour devenir un Épéiste. En somme, pas de quoi faire le fier.
– Tu es piégé. Arrête de résister et nous ne te ferons aucun mal.
– Tu penses vraiment servir une bonne cause ? lâcha Yume entre ses dents, dévisageant le soldat d'un regard de glace.
Voir des hommes aussi dévoués à l'Élite le répugnait. Si seulement ils savaient la vérité. Si elle éclatait au grand jour, sans doute se remettraient-ils sérieusement en question, et peut-être se rendraient-ils compte qu'ils agissaient pour le compte d'un affreux tyran, sans cœur et sans aucun état d'âme !
– N'essaie pas de nous déstabiliser ! Ton petit manège ne marche pas avec nous !
– Dommage, j'aurais essayé. Je suis vraiment désolé pour vous.
Yume se releva, un petit sourire confiant et triomphateur dessiné sur les lèvres.
– Ça risque de picoter un peu, annonça ce dernier sur un ton espiègle.
Le jeune homme les aspergea alors d'eau à l'aide de son bras encore libre, imitant à la perfection un enfant jouant dans un bassin. Les Miliciens ne purent s'empêcher de rire face à un tel acte. Ce garçon ne devait plus avoir toute sa tête !
– De l'eau ?! s'exclama leur chef entre deux rires. Mon garçon, je crois que tu es totalement fou. Attrapez-le vous autres !
Tandis que les Miliciens finissaient de rire, Yume matérialisa une nouvelle fois son épée dans sa main. Il ferma les yeux puis leva son arme vers le ciel. Même s'il ne voulait pas en arriver là, il devait tout faire pour échapper à la Milice.
– Foudre ! hurla-t-il d'une voix puissante.
Un coup de tonnerre déchira subitement la nuit calme de cette fin de dimanche. Tous les soldats, le chef y comprit, eurent un hoquet de surprise. Qu'avait-il l'intention de faire, cet écervelé ? Un rapide éclair pourfendit soudainement les cieux, sans prévenir, et vint subitement frapper les têtes des Miliciens. L'effet escompté fut immédiat. Tout le monde savait parfaitement cela : l'eau et la foudre ne faisaient pas bon ménage. Jamais.
Les soldats de l'Élite crièrent leur douleur. La décharge électrique produite par cet éclair était surpuissante. Elle s'insinuait dans tous leurs membres, leur lançant par moment des horribles picotements. L'eau ne faisait qu'empirer leur malheur, étant un élément conducteur. Ils se figèrent tous sous l'impact. Les Miliciens ne pouvaient même plus bouger le petit doigt, tant la puissance de leur supplice était atroce !
Tandis que les hommes tombaient tour à tour au sol, complètement électrocutés et vidés de leurs forces, leur chef luttait incroyablement contre la douleur physique, voulant à tout prix remplir la tâche qu'on lui avait ordonné : rapporter Yume vivant à Seven. Mais ses forces quittaient peu à peu son corps fébrile, à l'instar de toute son escouade.
– Crois-moi, on se reverra ! Et la prochaine fois, je te laisserai pas t'échapper aussi facilement ! ragea le chef de la petite escouade avant de lamentablement s'effondrer au sol comme ses hommes avant lui.
Le jeune homme lui adressa un regard désolé. Il ne voulait pas les blesser, mais il n'avait pas eu d'autres choix. Il ne pouvait pas laisser l'Élite gagner.
****
Ce ne fut qu'après avoir repris sa course pour sa survie que Yume remarqua que beaucoup de Fikternandiens avaient assisté à cette scène depuis leurs fenêtres. Il savait pertinemment ce qu'ils pensaient de lui désormais. Autrefois traité comme un héros aux yeux de la ville, le voici à partir de maintenant réduit au rang d'infidèle. Du point de vue des habitants, c'était lui le méchant de l'histoire. Le traître à l'Élite, celui qui s'en prenait sans aucune merci à ses anciens camarades. Mais ils pensaient et parlaient sans savoir.
Yume essaya de ne pas prêter attention à ces regards beaucoup trop curieux et accusateurs à son goût. Bientôt, ils le remercieraint. Mais pour cela, il fallait sortir d'ici, et ne pas se faire attraper !
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Yume emprunta la grande allée menant vers les portes de marbre, la sortie de Fikternand. Depuis la place centrale et jusqu'ici, il n'avait rencontré plus aucun Miliciens et il s'en réjouissait ! Un peu de répit lui ferait le plus grand bien ! Mais d'une autre part, cette absence soudaine d'ennemis l'inquiétait. Ils préparaient quelque chose, ceci, il en était certain. Ce n'était pas du genre de l'Élite d'abandonner aussi facilement une mission. Même perdue d'avance, les soldats continuaient sans relâche, car parfois, tout se jouait de peu, et l'avantage leur revenait bien souvent.
Peu rassuré, Yume accéléra légèrement le pas. Pas question que Teki ou les Miliciens le retrouve maintenant, si près du but, si près de la liberté !
Il percuta soudainement quelqu'un dans sa course. Secoué par la violence à laquelle il venait de heurter cette personne, Yume tomba tête la première au sol. Lâchant un juron, de une parce que sa course venait d'être subitement arrêtée et de deux parce que tomber sur la tête faisait extrêmement mal, le jeune homme se releva difficilement. Il fixa un instant la personne qui l'avait fait tomber d'un œil inquisiteur. Une jeune fille ! Yume s'autorisa un instant pour la détailler, ne se rappelant pas avoir déjà croisé sa route lorsqu'il était encore le bienvenu à la capitale. Cette jeune demoiselle possédait de beaux cheveux noirs de jais aux pointes finement bleutées, tombant en cascade sur ses frêles épaules, dont une était par ailleurs dénudée. Ses yeux, deux sublimes pupilles rouges sang – ils ressemblaient beaucoup à ceux de Fileya d'ailleurs – fixait ardemment les pavés qui constituaient le chemin. Yume ne saurait dire pourquoi, mais il l'a sentait légèrement perdue. Peut-être était-ce simplement dû à leur collision imprévue ?
Sortant de ses pensées, le jeune homme se rappela qu'il devait se montrer un minimum courtois. Il s'agissait d'une jeune fille tout de même, et Yume aimait beaucoup se servir de ses charmes dans des situations comme celles-ci !
– Est-ce que tu vas bien ? lui demanda-t-il avec la voix la plus doucereuse qu'il puisse avoir.
La brune leva ses beaux yeux flamboyants vers lui. Elle ne lui sourit même pas. Yume crut apercevoir cependant une pointe de surprise et de peur dans ses iris. Étrange... Était-elle en fuite, elle aussi ?
Le jeune homme lui tendit une main pour l'aider à se relever. Cette dernière la fixa un instant, comme incertaine. Elle finit par la saisir, mais toujours sans dire un seul mot.
Alors qu'elle peinait à se remettre sur ses pieds, Yume en profita pour la détailler plus amplement. Cette drôle de jeune fille portait une robe bleue claire lui descendant à peu près à mi-cuisses. Cette robe ne comportait qu'une seule manche, ce qui laissait apercevoir son épaule gauche, ainsi qu'une peau incroyablement blanche. Elle semblait tellement pure ! L'adolescente portait également de hautes chaussettes noires s'élevant au niveau de ses genoux. Enfin, elle chaussait une simple paire de bottines noires elles aussi. En guise de manche, son bras gauche semblait couvert d'un gant blanc bouffant, montant un petit peu au dessus de son coude et s'arrêtant au niveau de son poignet. Il ne s'agissait pas réellement d'un gant, mais Yume ne savait pas comment cela se nommait, et le moment n'était pas propice pour le lui demander.
La jeune fille regarda Yume droit dans les yeux, plantant volontairement son regard dans le sien. Elle semblait complètement ébahie de se retrouver là, face à lui, comme si elle n'en croyait pas ses propres yeux. Jamais le blond n'avait fait cet effet-là à une fille ! Et il se sentait quelque peu gêné d'être fixé ainsi...
– Euh... Je... dois y aller, annonça le jeune homme en se grattant nerveusement les cheveux, geste qui prouvait un certain malaise.
En vérité, quelque chose l'attirait fortement vers cette fille. Yume souhaitait rester plus que tout avec elle. Mais d'où lui venait cette soudaine envie ? Jamais il n'avait ressenti une telle chose auparavant ! Même son désir de rester plus de temps avec Fileya ne lui infligeait pas une telle douleur au niveau du cœur, ce serrement à l'idée de se séparer. Et comment expliquer cette sensation si forte qu'il ressentait ? C'était complètement fou, impensable ! Il ne la connaissait même pas ! Et pourtant, quelque chose au fond de lui lui prouvait tout le contraire. Qu'est-ce que cela pouvait bien signifier ? Il s'agissait de quelque chose de si étrange et tellement... inconnu... Yume aimait bien cette sensation. Là, à cet instant précis, il ne pensait plus à rien. Oubliée sa fuite, son envie de vengeance, son désir ardent de sauver le Royaume. Tout ce qu'il voulait, c'était la regarder encore. Et le temps parut comme figé.
Soudain, il comprit. C'était de la sorcellerie. Oui, ce ne pouvait être que cela. Personne ne pouvait ressentir quelque chose d'aussi fort pour une inconnue. Cette fille devait être une envoyée de l'Élite pour le forcer à ralentir ! Yume se maudit d'être tombé si facilement dans leur piège minable ! Une véritable Sorcière !
Sans un mot de plus pour la jeune brune, Yume reprit une nouvelle fois sa course pour sa survie, non sans lui avoir lancé un dernier regard noir.
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