Chapitre 1 - Le début et la fin (4)
Soudain, un éclat bleuté attira son attention et invita l'adolescente à plonger derrière une pile de caisses défoncées. Elle s'aplatit dans la boue et suivit plus loin encore dans le noir l'étincelle bleue. Cette dernière luisait, falote, dans l'obscurité. Un étrange sentiment de douceur envahit Alyss. Elle était comme hypnotisée par cette lueur qui contrastait tellement avec le jaune et le brun du tell. Ce bleu légendaire avait la pure couleur d'un ciel d'été. En tout cas, c'était ce que disaient les gens qui prétendaient l'avoir vu un jour. En réalité, le ciel restait éternellement jaune des fumées qui s'échappaient du cœur du tell. D'autres prétendaient que le bleu était la couleur de l'eau propre de l'océan. Encore quelque chose qui relevait du mythe.
Alyss tendit les doigts pour atteindre l'objet et elle s'accroupit pour le saisir. La lumière bleutée s'enfuit. Un rat couina. Alyss retint son souffle.
Elle plissa les yeux et aperçut à travers une fente l'adolescent qui se tenait à l'entrée de l'impasse. Âgé de seize ans à peine, le Singe arborait pourtant le rictus pervers de ceux qui en savent trop. Son corps était marqué par nombre de souvenirs.
Son œil gauche, crevé trois ans plus tôt pendant sa Révélation et aussitôt changé, venait tout juste d'être amélioré. Le nouveau, fait de métal et de câbles fixés à son crâne rasé, vrombissait en tous sens dans l'orbite désormais morte. Pourvu qu'il ne me voie pas, se répétait la jeune fille. Le Singe hésita, pénétra dans l'allée sombre, et appuya sa main valide contre l'un des murs. Il braqua subitement la tête dans la direction de la cachette d'Alyss. L'avait-il vue ? L'avait-il entendue ?
— Hé ! le Singe... Tu l'as trouvée... ?
Le Singe détourna la tête. Un de ses acolytes l'avait rejoint. À la respiration saccadée et sa façon de s'ébrouer, Alyss devina qu'il était prêt à relâcher ses efforts.
— Nan, pas encore, mais ça ne devrait plus tarder, maintenant, répondit le Singe, agacé. L'est pas loin. Elle a dû se cacher.
— Parce que je commence à fatiguer... moi..., se plaignit le suiveur.
— Ta gueule. Tu continues à chercher.
L'autre type ne pipant mot, le Singe reprit plus fort, et pour sa proie :
— La Rêveuse ! On sait que t'es quelque part par là ! Alors montre-toi, qu'on puisse vraiment commencer à s'amuser. À moins que tu préfères jouer à rat perché ? Hein, ma petite ratte, que tu aimes te brûler les papattes sur les toits ? Je vais t'en donner, moi, de la chaleur !
Les deux adolescents se mirent à alterner petits cris et claquements de langue obscènes. Alyss déglutit. Ne pas bouger, ne pas respirer. Elle eut du mal à retenir les heurts de son cœur. Et son souffle qui était encore coupé par la course effrénée. Elle repensa furtivement à la lumière bleue et mobile qui lui avait sauvé la peau quelques minutes auparavant. Mais Alyss devait se concentrer sur le Singe.
Visiblement, le délinquant n'avait pas trouvé autre chose qu'un œil d'entrée de gamme, sans amélioration aucune qui aurait permis de détecter Alyss dans la pénombre. Les meilleures pièces se trouvaient plus haut dans les pentes, plus près de la plate-forme de la Zone 3. Pour les atteindre, il fallait passer plusieurs points de contrôle, ce qu'à l'évidence le Singe n'avait pas encore réussi à faire. Une chance supplémentaire pour Alyss.
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