JOUR 3 | Ce n'est pas très fair-play

∞ ∞∞ ∞

Vu la candidate qu'ils ont envoyée, notre stratégie de rapidité pour la déstabiliser devrait fonctionner. Il n'est pas question que l'équipe de Reyn l'emporte et que par la même occasion je perde mon pari accepté juste pour relever le défi.

Quelle idiote !

Pourquoi me suis-je laissée entraîner dans ce challenge ? Tout ça pour lui montrer que je peux être à la hauteur ? Ce n'est sans doute pas pour récupérer la montre des Monroe, dont je me tape comme de ma première chemise. Alors pour quelle raison ? Pour lui prouver qu'il ne m'est pas supérieur ? Sans aucun doute. Mais le prix à payer se révèle élevé...

— Poser votre main à côté du buzzer, l'autre derrière votre dos. Vous êtes prêts ? Je vais lancer le décompte.

Un. Deux. Trois.

— C'est une devinette...

Le buzzer de Elsey retentit, alors que l'énoncé n'a même pas commencé. Quel con !

Tous les participants de mon équipe hurlent de dépit tandis que celle de Reyn exulte. Pourtant le Boss les calme aussitôt en leur indiquant que Elsey n'a pas encore répondu. On ne sait jamais qu'il soit pris d'une fulgurance.

Tu parles !

— Elsey, as-tu une solution à me donner ?

Ce dernier se tourne vers nous en soulevant les épaules en quête d'un indice ou d'une réponse à fournir. Mais bien sûr, nous n'en avons aucune puisqu'on ne sait même pas en quoi consiste la question.

— Au hasard, je vais dire... Bleu.

L'organisateur regarde sa fiche, il laisse les secondes s'égrener en fixant Elsey puis Tessa. Il entretient le suspense, jusqu'à ce qu'il révèle la réponse.

— C'est une...

Nos adversaires n'en peuvent plus d'attendre. De notre côté, nous savons déjà que c'est perdu. Il y a une chance sur un million qu'il arrive à trouver la bonne réponse. Et si c'est le cas, il peut vite aller faire un tour au casino pour rafler la mise aussi. Remarque, on dit bien, malheureux en amour, heureux au jeu. Alors avec ses résultats catastrophiques avec les célibataires, il sera milliardaire avant que tombe la nuit. Je n'ai jamais vu un mec s'y prendre aussi mal avec des nanas.

— Mauvaise réponse.

Quelle surprise !

Cette fois-ci, l'équipe de Reyn ne cache pas sa joie et ils hurlent à qui veut bien l'entendre qu'ils sont les grands vainqueurs. Son regard de braise me fixe alors qu'un rictus fleurit sur son visage enjoué. Il doit jubiler et ça me fout d'autant plus la rage. J'appréhende déjà le moment où il va réclamer son dû. Pour une fois, je me serais bien passé d'être une personne de parole. Après tout, qu'est-ce que je risque en ne tenant pas mon engagement ?

Pour cela, il faudrait qu'il arrête de me fixer comme s'il avait déjà ses mains sur mon corps.

Je dois me focaliser sur autre chose que lui. Et quoi de mieux que la confirmation de ce couple qui n'en finit pas de croître sous nos yeux. Yann vient de fondre sur Tessa pour l'embrasser à pleine bouche. Je n'aurai pas tout perdu, puisque j'ai insisté pour que ces deux-là soient dans la même équipe contre l'avis de Reyn. Pour lui, il était peu probable qu'un avocat et une créatrice de vêtements pour animaux puissent s'entendre sur plusieurs jours.

Est-ce que ce nouveau duo pourrait m'aider ?

Pour le moment, je me focalise sur Tessa, qui, après avoir répondu favorablement au baiser de Yann, demande à l'organisateur si elle peut tout de même jouer.

— Bien entendu, voici donc la devinette. « Je marche en restant immobile et je peux m'arrêter sans avoir bougé. Qui suis-je ? »

Forcément, la réponse est évidente et nous rageons encore plus de ne pas avoir pu l'entendre. Elsey s'excuse et certains lui disent que ce n'est qu'un jeu, que ce n'est pas grave. Nesta, qui était son binôme, discute avec d'autres croisiéristes sans se préoccuper de lui quand il s'en approche. Il n'aura pas plus de succès avec elle. C'est tout de même la troisième prétendante qu'on lui associe et elles lui ont toutes mis un carton rouge comme réponse sur la tablette après leur premier rendez-vous.

Avant même qu'il ne parle, je sens le parfum de Reyn et la puissance que dégage son corps en approche. Je ne suis donc pas surprise de l'entendre me dire.

— J'ai gagné, petit Pinson !

Qu'est-ce qu'il m'énerve de me donner des surnoms, mais à choisir j'aime plus celui-là que « Caméléon ». Car je sais qu'il ne l'a pas choisi au hasard. Je me tourne vers lui et il fixe aussitôt mes iris, qui papillonnent pour tenter d'altérer la puissance des siens. Il veut vérifier l'impression qu'il a eue tout à l'heure en comprenant que je portais des lentilles.

— Je les ai juste mises pour être coordonnées avec ma tenue.

— Chacun son truc !

— Toi, ce sont les montres, moi, ce sont les lentilles de couleur.

— Tu en as plusieurs ?

— En quoi ça t'intéresse ?

— Je me demande quelle est ta véritable teinte ?

Je ne compte pas lui répondre, car ça lui donnerait un autre indice sur celle que je suis vraiment. Et ça, il n'en est pas question.

Je me dirige vers le reste des croisiéristes pour avoir leur ressenti sur cet « Escape Game » quand Reyn crochète mon bras.

— Tu ne comptes pas me répondre. Ok. C'est ton droit, Miss Épines, mais ça éveille d'autant plus ma curiosité. Et ça me confirme que tu me caches un truc.

— Arrête de jouer aux aventuriers en quête du Saint-Graal, Indiana Jones. L'Escape Game est terminée. Alors, range ton chapeau et ton fouet.

Je tire sur mon bras pour me détacher de sa poigne. Mais celle-ci résiste. Le contraire aurait été étonnant.

— Quoi, encore ?

— N'oublie pas mon gain !

— Je ne sais pas de quoi tu parles.

Je le toise, le défi du regard, car, même si j'ai perdu, il n'est pas question qu'il prenne l'ascendant sur moi.

— Tu devras bien te changer à un moment ou à un autre. Si tu n'y mets pas du tien, je vais te suivre jusqu'à ce que tu remontes à ta cabine.

— Ne te donne pas cette peine.

Je me rapproche assez de lui pour qu'il pense que je vais céder. Je laisse volontairement mon souffle se balader sur son cou avant de lui confier.

— Je n'en porte pas...

Il en reste bouche bée l'affaire d'une ou deux secondes. C'est suffisant pour que je mette quelques mètres entre nous. Reyn voudrait bien me rejoindre, mais des croisiéristes en profitent en le trouvant seul pour échanger avec lui sur la journée à terre qu'ils viennent de passer.

Arrivée au bout de la pièce. Je me retourne vers lui en sachant pertinemment qu'il n'a pas lâché mon corps du regard. Je le fixe, puis de façon la plus élégante possible, je déplace ma main vers mon visage pour voir si Reyn suit le mouvement. Quand j'obtiens toute son attention, je longe ma joue tout en lui montrant mon majeur bien dressé.

Mon sourire étincelle tandis qu'il perd le sien. Je n'attends pas plus pour me diriger vers les ascenseurs afin de gagner ma cabine.

Pourvu que Reyn soit bloqué assez longuement par ses clients pour que j'aie le temps de m'enfermer dans ma chambre. C'était sans compter sur Niels, qui me rattrape et s'engouffre au dernier moment dans la cage en fer.

— Tu as abandonné Logan ?

— J'ai une envie pressante. Si tu vois ce que je veux dire.

— Tu sais que tu peux trouver des toilettes à tous les étages.

— Je suis...

Il pose son index entre ses lèvres pour me donner l'impression qu'il réfléchit avant d'ajouter en se marrant.

— Maniaque, on va dire.

— Je ne m'en serais pas doutée.

Je ne cache pas mon hilarité et Niels n'a pas l'air de m'en tenir rigueur. Il ajoute même sous le ton de la confidence.

— J'ai les fesses sensibles et ne supporte pas de les poser n'importe où.

Cette fois-ci, on éclate de rire tous les deux. Quel bonheur que de discuter sans qu'il y ait une quelconque tension avec son interlocuteur. Les portes s'ouvrent, et mes iris humides, d'avoir trop rigolé, ne perçoivent pas tout de suite la silhouette qui nous attend.

— Les escaliers entretiennent la forme, on dirait. Je ne sais pas comment tu y arrives sans être essoufflé ?

— Justement, Niels, je m'entraîne. Et là en plus, j'avais une sacrée motivation.

Le temps que les deux amis discutent, je tente de longer le mur du couloir le plus discrètement possible. Je ne suis qu'à quelques pas de la liberté. Encore un mètre. Trois pas, tout au plus, et je serais délivrée de son emprise. Je sors rapidement ma carte prête à la dégainer dès que je me trouve devant la porte.

J'y suis presque.

Un dernier effort et je serai hors d'atteinte de celui qui me rend la tâche difficile. Le clic m'indique que la serrure est déverrouillée. J'écrase avec détermination la poignée et enfonce rapidement la porte.

Tout va très vite.

Je me sens propulsée vers l'intérieur avec une force inouïe. Tel un bulldozer, Reyn me pousse vers le petit salon de ma cabine. Je termine ma course à plat ventre sur le canapé. Il me retourne comme une crêpe et me chevauche dans le même mouvement.

— Du calme, mon Pinson.

Voyant que je ne veux pas abdiquer, ses doigts s'enroulent autour de mes poignets, qu'ils remontent au-dessus de ma tête, tandis que ses cuisses vigoureuses emprisonnent mes jambes. Mes sens sont en totales contradictions. Chacun de mes muscles vient de se raidir à cause de cette situation, qui en rappelle une autre bien plus dévastatrice. Pour autant, chaque parcelle de mon corps se délecte de le sentir aussi puissant au-dessus de moi. Reyn en impose et son sourire ravageur n'arrange en rien ma libido. Heureusement, ma tête est là pour me ramener à la raison. Il n'est pas question qu'il obtienne ce qu'il est venu chercher.

— Arrête de gigoter, tu m'excites en te frottant contre moi.

— Tu n'es qu'un porc.

— Si tu le dis. Mais j'ai gagné, il fanfaronne. Alors je viens réclamer mon prix.

— Il n'est pas question que je t'accorde le droit de vérifier.

— Ce n'est pas très fair-play.

Son nez se balade sur ma peau, qui réagit sur son passage. Je dois tenir bon. Allez, Sixtine, bats-toi.

— Ça ne l'est pas, mais je m'en cogne, j'affirme tout en essayant de le déloger. Tu n'as pas le droit de me forcer. J'ai dit « NON » !

Comme si je venais de tirer le signal d'alarme du train. Reyn stoppe ses mouvements. Il a l'air sonné. Il me regarde sans me voir, alors qu'il me relâche avant de se relever.

— Excuse-moi de ne pas t'avoir demandé si tu étais d'accord. Je me suis laissé emporter par notre petit jeu, par ton corps répondant à mes avances. Mais je ne t'aurais jamais forcée. Tu dois me croire...

Il se recule avant de me demander un brin inquiet.

— Je ne t'ai pas fait mal au moins ?

— Non. Ça va...

Je réponds un peu paumée en frictionnant la peau de mes poignets. Ce geste est plus là pour me donner une contenance. Car le voir aussi vulnérable me chamboule plus que je le devrais. Reprends-toi. Souviens-toi de la raison de ta présence sur ce paquebot.

Reyn sort de la cabine sans rien ajouter de plus et je me sens comme étourdie. Son attitude est incompréhensible. J'ai eu la sensation de réveiller un truc douloureux en lui ou plutôt d'avoir allumé un signal d'alarme. Depuis que je l'ai retrouvé, il n'arrête pas de me dire qu'il respecte mon choix et qu'il ne me ferait pas de mal. Pourtant...

Chez moi aussi, ça chamboule tout. Et ça, depuis des années.

∞ ∞∞ ∞

➥ Elsey, le jeune joueur de Lacrosse est à son troisième carton rouge de la part des participantes. Est-ce une cause perdue ou bien va-t-il trouver chaussure à son pied ?

➥ L'équipe de Reyn gagne, mais Sixtine ne veut pas tenir ses engagements envers le pari. Le devait-elle d'après vous ?

➥ La discussion dans l'ascenseur avec Niels nous en apprend un tout petit peu plus sur lui. Vous en pensez quoi de ce personnage ?

➥ Le refus de Sixtine réveille un truc chez Reyn. Une idée ?

∞ ∞∞ ∞

📍 Dans le chapitre de demain, on retrouvera REYN :

🎭 Aux grands maux, les grands remèdes.

∞ ∞∞ ∞

😍 Bonne journée mes #Love Boat, gros bisous 💋

✨️ Kty.Edcall.Romance ✨️