Troisième partie : Les autres
Encore une fois, je suis dans un lit d'hôpital. Les couleurs n'ont pas changé. Le blanc m'oppresse.
«Alors sujet Seven, des questions ? M'interroge une femme au teint halé et aux cheveux noirs, assise à un bureau. Le nom de sujet m'incite à penser que je ne suis pas le seul cobaye qu'ils aient.
Je n'ai rien dit à propos d'Adam, ni même à propos de ce qu'il s'était passé. Je ne peux leur faire confiance. C'est de leur faute si mes souvenirs ont été effacés. Le mensonge se tisse au fur et à mesure que je me fais inspecter (mentalement et physiquement). Mes cris de désespoir se sont transformés en cris de détresse et de lutte sous l'influence de l'araignée qui tisse mon mensonge. Adam se fait passer pour mon kidnappeur, mort avant d'avoir pu essayer quoi que ce soit. Ils n'ont pas l'air de se douter de quelque chose cloche avec moi. Personne ne se doute de rien, personne ne pense qu'un seul instant je puisse leur mentir.
- J'aimerais savoir la raison de mon amnésie.» Lui répondis-je, m'avançant vers le bureau. Je pose cette question par évidence, c'est la première qui m'est venue à l'esprit à mon réveil.
Un sourire vient se dessiner sur les lèvres de la jeune femme. Ce sourire n'a rien de rassurant, il me laisse prédire la suite avec réticence. Son sourire, carnassier, me permet de déduire qu'elle va sûrement me mentir. Je ne sais pas comment je le sais. C'est comme un instinct. Il s'est passé la même chose lorsque je me suis mise à soigner Adam, en vain.
Je m'assois sur la chaise face à elle, nonchalamment. Elle joint ses deux mains entre elles et me lance :
«Nous t'expliquerons en temps voulu. Je lui lance un regard interrogateur, l'incitant à me donner les raisons de cette réponse évasive.
-Je ne pense pas qu'ils veulent que tu le sache maintenant. Mais je vais te donner un petit indice. Elle me fair un bref clin d'œil avant de poursuivre.
Tu as vécu l'enfer sur Terre, des gens ont voulu te tuer, d'autre te kidnapper comme l'homme il y a peu. Et nous t'avons récupéré, à la limite de la mort. Voilà pourquoi tu es ici, avec nous.» Je la regarde dubitative, qu'est-ce qui me prouve que je puisse la croire ? Adam faisait parmi des gentils. Mais qu'est-ce qui me prouve qu'elle n'a pas tord ? Je doute.
La femme me sourit et déclara :
«Dave va t'emmener au dortoir, tu y sera mieux.» Je me lève et avance vers la porte entrouverte.
La porte franchie, un homme aux cheveux d'un noir corbeau m'accueille, un large sourie aux lèvres. Il m'incite à le suivre et je lui emboite le pas, mes réflexions reprenant le dessus. Quelque chose m'intrigue. Je me souviens des corbeaux, ces oiseaux noirs, souvent associés au mal. Je ne me souviens de rien d'autre. Cela aurait pu être une personne, quelqu'un à qui je tenais, mais non. Il faut que ce soit un corbeau.
C'est comme si mon amnésie était sélective. Je sais parler, j'ai du vocabulaire, j'ai des connaissances. Cependant, je ne connais pas l'origine de mes connaissances, j'aurais pu le rappeler de pourquoi je sais cette notion, ou de comment je l'ai sue.
«Comment te sens-tu ? Me demande Dave, amicalement. Ses yeux foncés sondent les miens.
-Ça va, encore un peu perdue. Je lui réponds soulagée qu'il me fasse penser à autre chose.
-Ne t'inquiètes pas, tu vas t'y faire.» Nous tournons à droite et en marchant quelques mètres, on arrive devant une porte. J'en ai croisé quelques unes du même genre avec des numéros écrits dessus.
Sur la porte, il y est écrit : « S7 ». Serait-ce ma chambre ? Dave ouvre la porte et me laisse entrer. La pièce est petite. Elle est composée d'un lit, au fond de la pièce, d'une armoire et d'un petit bureau avec une chaise. Sur ce bureau, il y a un carnet et des stylos. Toute la chambre est blanche et je pense sincèrement que je ne vais pas réussir à supporter cette couleur longtemps.
« Dave ? je demande
-Oui sujet Seven ? il me répond intrigué
-Qu'est-ce qui m'attends demain ? Pourquoi y a-t-il d'autres portes avec d'autres numéros ? il me fixe un instant puis me sourit
-Tu vas déjà aller manger, et demain tu auras droit à ta première journée de cours. » J'hoche la tête, pensive. Ma première journée de cours... j'ai sûrement déjà eu ce genre d'enseignement avant. Avant ... comment c'était avant ? Avant que je perde la mémoire. Est-ce que j'étais déjà ici, avec ces gens ? Est-ce que je vivais avec une famille comme Adam me l'avait dit quelques temps plus tôt ? Tant de questions et si peu de réponses.
Dave m'emmène dans des couloirs tous aussi similaires les uns des autres. Je vois des adultes dans des sortes de bureaux discuter sur des sujets, que j'en déduis d'importants vu la gravité de leurs regards. Je vois un tableau dans un des bureaux. Un corbeau dévorant, déchiquetant sa proie.
Un instant, je vois des corbeaux voler dans le ciel. Celui-ci est clair et une chaleur étouffante règne. Un de ces oiseaux vient se poser au sol et arrache des lambeaux de peau sur une personne morte, à mes côtés. Je pouvais sentir l'odeur nauséabonde, je pouvais sentir cette chaleur, les rayons brûlants du soleil sur ma peau.
Puis tout redevient blanc, les murs, les gens, la lumière. Qu'est-ce que c'était que ça ? Je fixais toujours le tableau quand je me suis dit qu'il fallait peut-être que je continue de suivre Dave. Il m'attends, à une dizaine de mètres de moi. Je le rejoins et lui dit que j'admirais le tableau. Je lui dit que cette espèce est superbe et il me répond de même.
Nous continuons à marcher. Arrivés à une grande ouverture d'où laquelle émanait des éclats de voix et des bruits métalliques. Je m'avance et vois des jeunes, comme moi je dirais, assis à des tables en train de manger et de discuter. Il y a un self au fond du réfectoire, des dames servent les repas, d'un air fatigué. Je regarde Dave sidérée, mais pas pour la raison qu'il pense. Il y a au moins une cinquantaine voire une centaine de jeunes. Sont-ils des cobayes ? Se doutent-ils de quelque chose ? Cent adolescents dans un réfectoire, c'est n'est pas une petite quantité de sujets. Pourquoi sommes nous ici, dans ce bâtiment ?
Je laisse mes questions pour plus tard, et marche direction le self. J'avance dans la queue. Une fois mon assiette servie par une des dames fatiguées je prends une pomme et marche, mon plateau à la main en quête d'une place. Personne ne semble faire attention à ma présence. Suite à cette pensée, je m'assois à une table vide et entame mon repas.
Une personne derrière moi me bouscule. Je me retourne et vois un garçon aux cheveux noirs et aux yeux de glace me fixer un instant avant de murmurer un presque inaudible « Pardon ». Il est intimidant. Son visage fermé, aux traits fins m'intrigue. Avant même que je me retourne pour continuer mon repas, une tête blonde s'exclame tout en me rejoignant :
« Hey, mais tu es nouvelle ici ! Attends, je vais manger avec toi. Ce ne serait pas très sympa de te laisser seule alors que tu viens juste d'arriver. »
Il me sourit. Sa gentillesse me frappe en plein cœur. Ses yeux noisettes et son visage angélique me redonnent un peu d'espoir. Je ne serais peut-être pas seule finalement. Le malaise s'empare de moi, je ne sais pas quoi dire.
« C'est quoi ton numéro du coup ? me demande-t-il pour engager la discussion
-Seven, et toi ? souris-je
-Five. Au fait, ne t'inquiètes pas pour le garçon de tout à l'heure, il est juste très renfermé. Je ne pense pas qu'il voulait te faire peur. » Il me sourit une énième fois. C'est à ce moment que je me dit que je vais bien m'entendre avec lui.
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