[11] Ma première fan

— Elle avait raison ! Maman viens voir !

Je sursautai en entendant ces cris d'enfant, alors que j'approchais d'un nouveau jardin. Une petite fille d'une dizaine d'années me faisait de grands gestes en riant. Embarrassé, je la saluai de la main avec un léger sourire.

Je m'assis sur le mur et la fillette s'approcha de moi. Elle s'appelait Charlie et avait eu huit ans il y a un mois exactement ! Elle me présenta son chien, un Jack Russel nommé Pepito et quand sa mère vint la rejoindre, Charlie me précisa que son vrai nom était Flavie, mais qu'elle, elle l'appelait maman.

Charlie me faisait beaucoup rire, elle avait l'énergie et l'innocence de l'enfance, le regard qui pétillait et elle esquissait des pas de danse, gesticulant dans tous les sens comme pour capter toute mon attention. Elle me raconta qu'elle m'attendait et que cela faisait presque dix heures qu'elle était dans son jardin, à enlever les pétales des pâquerettes en attendant de me voir traverser.

— Tu m'attendais ? répétai-je surpris.

La petite hocha vivement la tête et me harcela de questions : qu'est-ce que je faisais là ? Pourquoi je marchais sur le mur ? Comment j'avais fait pour grimper dessus alors qu'il est aussi haut ? Est-ce que j'avais peur de tomber ? Où je mangeais ? Où je dormais ?

— Tu as discuté avec la grand-mère d'un des copains de Charlie, m'expliqua sa mère en la calmant, on l'a croisée à la boulangerie et elle nous a raconté qu'elle avait rencontré un adolescent qui marchait le long des fortifications. J'ai cru qu'elle plaisantait, mais pourtant, tu existes bien !

Elle rit et comme Anne-Catherine, voulut entendre mon histoire. Alors que je lui racontais ma courte vie que j'essayais d'étirer à ma manière, je sortis une enveloppe de mon sac et déchirai un autre de mes textes. J'écrivis une petite note à l'intention du lycée, et tendis la lettre à Flavie.

— Charlie, tu iras la poster ? demanda-t-elle à sa fille.

La petite lui prit la lettre en sautillant. Elle sortit mon texte et commença à le lire.

Couplet 1

Tu tournes la tête, tu crois voir une ombre passer,

Une silhouette semble apparaître à pas discrets,

Elle dépose cette lettre et laisse le vent l'emporter,

La seule preuve de son passage étant ce papier.

Cette ombre, la reverras-tu ?

Au plus profond de ton sommeil la recroiseras-tu ?

Elle court de vie en vie, déjà elle quitte la tienne,

Laissant un d'ces souvenirs qui partent et reviennent.

Juste une inconnue, une figurante dans ton film

Un perso secondaire qui n'apparaît qu'à une ligne,

Un passant, qui passe en arrière-plan,

Vite remplacé par le défilé des ans.

Je suis ce fantôme qui continue son chemin,

Au comportement de môme je cours jusqu'à demain

Et quand demain sera passé j'hurlerai à plein poumon,

Qu'aujourd'hui n'est qu'une étape avant d'atteindre l'horizon.

Pré-ref (prendre son temps)

J'hurlerai à plein poumon

Qu'aujourd'hui

N'est qu'une étape

Avant d'atteindre l'horizon.

Refrain

Si un jour je pars qui se souviendra de moi ?

Ma famille, mes profs, mes amis, mon chat ?

Si un jour j'me barre, qu'est-ce que la Terre dira ?

Qu'elle fut heureuse de me connaître mais qu'elle m'oubliera.

Comment faites-vous Rimbaud, Veil, Hugo,

Pour rester en vie malgré les siècles qui nous séparent ?

Doit-on forcément devenir des héros,

Pour ne pas sombrer dans le puits des mémoires ?

Couplet 2

Curieux comme chose ces souvenirs entassés,

Une bibliothèque qui sans cesse change les rayons,

On supprime et on remplace par les nouveautés,

Les plus vieux partent dès qu'il y a une publication.

Le cerveau, grand libraire, classe, et jette

Il enlève, crée des trous, qu'il ne bouchera jamais,

Ajoute des étagères, échange les cours pour des fêtes,

Et nous fait oublier sans jamais nous demander.

Il réduit certains livres en poussière,

A son sens personnel des priorités,

Mais laisse les moments qui nous rendent fiers,

Et nos actions qui font pitié.

On les emprunte juste pour quelques secondes

Afin de relire nos passages préférés,

Mais à peine ouverts déjà nos yeux s'inondent,

À l'idée que ces livres soient écrits au passé.

Pré-ref (prendre son temps)

Mais à peine ouverts

Déjà nos yeux s'inondent,

À l'idée que ces livres

Soient écrits au passé.

Refrain

Si un jour je pars qui se souviendra de moi ?

Ma famille, mes profs, mes amis, mon chat ?

Si un jour j'me barre, qu'est-ce que la Terre dira ?

Qu'elle fut heureuse de me connaître mais qu'elle m'oubliera.

Comment faites-vous Rimbaud, Veil, Hugo,

Pour rester en vie malgré les siècles qui nous séparent ?

Doit-on forcément devenir des héros,

Pour ne pas sombrer dans le puits des mémoires ?

Couplet 3

Souvenirs futiles qu'on ressasse sans intérêt,

Et autres moments qu'on préférerait oublier.

Parfois on choisit parfois la mémoire s'impose,

Nous oblige à revoir ces temps qui nous indisposent.

La recette de l'éternité dans cette société,

Où sont les mémoires ? Indiquez-moi l'entrée.

Après ma mort je ne veux pas tomber dans l'oubli,

Compositeurs, philosophes, où est votre potion de vie ?

J'écrirai pour que tu te souviennes de mon nom,

Je réciterai pour que tu sortes mes citations,

Je crierai mes mots pour que tu les chantes en chœur,

Je m'essoufflerai pour sortir le noir de mes peurs.

Retiens mon regard, retiens ma voix,

Et si mon nom ne te dit rien alors souviens-toi :

Je continuerai ma course pour le pays des rêves,

Si arrivé là-bas l'oubli abaisse son glaive.

Pré-ref

Je continuerai ma course

Pour le pays des rêves,

Si arrivé là-bas

L'oubli abaisse son glaive.

Refrain

Si un jour je pars qui se souviendra de moi ?

Ma famille, mes profs, mes amis, mon chat ?

Si un jour j'me barre, qu'est-ce que la Terre dira ?

Qu'elle fut heureuse de me connaître mais qu'elle m'oubliera.

Comment faites-vous Rimbaud, Veil, Hugo,

Pour rester en vie malgré les siècles qui nous séparent ?

Doit-on forcément devenir des héros,

Pour ne pas sombrer dans le puits des mémoires ?

Elle bégayait sur certains mots difficiles à lire pour une enfant, mais la voir ainsi concentrée sur mes paroles m'en donna des frissons. Quand elle retombait sur une rime, on avait l'impression qu'elle était comme devant sa classe à réciter sa poésie, elle souriait, fière d'elle. Elle dégustait mes mots, les faisait tourner sur sa langue et les soufflait avec précaution entre ses lèvres. Plus son regard descendait sur le papier, plus elle se concentrait sur chaque syllabe, comme prise au jeu. Habituée au mètre de mes vers, elle avait retenu les derniers vers du refrain, et finit son récital en me regardant dans les yeux.

L'effet de la voir me citer, avec son regard qui pétille m'ôtait les mots de la bouche. J'aurai beau feuilleter le dictionnaire, certaines émotions ne pouvaient pas être retranscrites, il fallait les ressentir pour les comprendre.

— Merci, lâchai-je alors en regardant Charlie.

Elle sourit, et après avoir eu l'accord de sa mère, elle partit en sautillant poster mon enveloppe. Flavie me complimenta, elle appréciait beaucoup ma plume et croyait en mon avenir de poète. Elle me souhaita bonne chance pour la leçon que j'essayais de donner à mes parents, et m'offrit un paquet de chips, et des chewing-gums à la menthe — Allez comprendre le message — je la remerciai chaleureusement et me levai.

— Vous pourrez dire à Charlie que j'ai été ravi de la rencontrer, et à Pepito qu'il pense à se calmer sur les croquettes.

— Aller va, fit-elle en riant, les messages seront passés.

Je la remerciai encore et après un regard vers la mer, je repartis. Souriant pour moi-même sans aucune raison, à part le fait qu'on attendait peut-être une plume dans un autre jardin.

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Hello comment que ça va ?

J'espère que cette histoire continue de te plaire et que tu apprécies sa tournure !

Hésites pas à me faire des remarques, j'en ai pas beaucoup et j'aimerais vraiment m'améliorer ^^'

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