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La jeune femme se retourna soudainement avant de tomber nez à nez avec Aenja. Soulagée, elle s'empressa de questionner l'entité, sans vraiment mesurer ses propos, mais l'esprit ne lui permit pas ses bavardages. Rendue muette par une force invisible, Donna se résigna tandis qu'il se mettait à parler.
— J'ai obtenu l'autorisation, mes chers Maîtres, de vous donner un ultime indice. Vous êtes intelligents, et vous êtes plutôt bons en chasse au trésor, mais vous n'êtes pas encore au point sur les éléments naturels de la région !
Lucien jeta un coup d'œil hésitant à sa camarade, qui semblait elle aussi ne pas comprendre grand-chose aux propos d'Aenja.
— Ce que je veux dire, reprit l'esprit dans un soupir exaspéré, c'est que Revoar est un monde parallèle au vôtre. Ce qui fait fondre la glace chez vous, n'est point ce qui marche dans ce monde d'images.
— Merci, Capitaine Obvious, ironisa Lucien. C'est dingue !
— Faites un petit effort, siffla Aenja. Moi, je ne peux rien dire de plus.
À ces mots, l'entité s'évanouit dans l'air frais de Revoar, laissant les deux compères à nouveau seuls.
— C'est rageant, pesta Donna. Je n'ai aucune idée de ce qu'il faut faire maintenant.
La jeune femme s'accroupit un instant, avant de se laisser tomber sur le sol qui était redevenu givré. En tailleur sur la terre froide, les mains sur les tempes et une larme au coin de l'œil, elle se laissa aller quelques instants à sa mélancolie, le fait de tourner en rond lui minant sérieusement le moral. Elle baissa la tête, sans oser montrer ce moment de faiblesse à son compagnon. C'était Noël, et elle avait tout raté. Enfin, elle n'avait certes pas prévu grand-chose, mais elle avait embarqué Lucien dans cette quête à la noix et cela ne semblait lui ramener que de mauvais souvenirs. Sans compter le destin de Raphaël, qui avait fini par reposer plus ou moins entre ses mains !
Lucien, pas dupe pour un sou, avait bien remarqué l'état de sa jeune amie. Il s'abstint pourtant de tout commentaire et, d'un geste délicat, posa sa main sur l'épaule de Donna alors qu'il se mettait à sa hauteur. En silence, il accompagna les reniflements de la jeune fille qui avait laissé tomber son masque d'assurance, et ils restèrent tous deux quelques instants sans bouger, le temps de se remettre de ce trop-plein d'émotions qui semblait les submerger.
Mais alors que la respiration de Donna paraissait s'apaiser, et que le barman s'apprêtait à se relever, une forte chaleur s'éleva du sol givré. En passant par leurs pieds, puis leurs jambes, avant de monter et de réchauffer leurs deux corps fatigués, un étrange halo de lumière se mit à les encercler. Le givre s'effaça doucement, les parois des immeubles décongelèrent, et le triste monde de Revoar sembla soudainement prendre une toute nouvelle inspiration.
— C'est quoi ce bazar ? hoqueta Donna sans comprendre.
Lucien, qui paraissait mi-émerveillé, mi-perdu, trouva pourtant les mots pour exprimer le phénomène.
— C'est nous qui avons fait fondre la glace. Nous, et notre passion.
La forte chaleur s'était étendue, et rayonnait désormais sur les tristes parois, qui reprenaient peu à peu de nouvelles couleurs. Le grisâtre s'envolait, le désespoir aussi ; et tandis que les deux amis se tenaient par le bras, plus unis que jamais, un chemin se dessina sous leurs pieds.
— On sait ce qu'il nous reste à faire, n'est-ce pas ? fit la jeune femme, un sourire sincère aux lèvres.
Le barman acquiesça, le cœur de nouveau léger. Le monde de Revoar était peut-être magique, mais il était aussi lié aux plus profondes émotions des voyageurs qui parcouraient ses terres. Le chemin qui venait de se dévoiler n'était ainsi que le doux reflet de leurs passions respectives ; ce qui consumait le cœur d'une écrivaine et l'âme d'un paternel aimant.
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