22🎁

Le monde du soleil bleu leur en mettait plein la vue, et après cet épisode ainsi que celui de la mer, qui avait permis à Donna de recevoir la plume qu'elle serrait désormais contre elle, Revoar paraissait désormais un peu plus accessible aux deux compères. Peut-être était-ce grâce à l'étrange chaleur du lieu qui, aussi réconfortante qu'une tisane brûlante en plein hiver, avait quelque peu éclairé leur champ de vision ? En tout cas, une chose était sûre : la quête n'était pas terminée.

— Toutes ces péripéties sont éprouvantes, mais je crois que nous nous rapprochons du but ! lança Donna à l'attention de son ami.

Lucien acquiesça, sans quitter des yeux le livre de poèmes qu'il avait de nouveau entre les mains

— Il reste un vers avant le quatrain final : « Résonnaient les étoiles métalliques de demain...» Voilà qui est bien intriguant.

— Il n'y a pas d'étoiles métalliques dans le ciel de Revoar, nota la jeune femme en levant la tête. Elles semblent pareilles à celles de notre monde.

Lucien secoua la tête.

— Il faut sans doute l'interpréter différemment. Les étoiles de demain n'existent pas encore, par définition.

— Est-ce que tu penses que le vers fait référence au futur ? Mais ça n'a rien à voir avec la littérature !

— Je pense plutôt qu'il faut qu'on cherche le Revoar d'après, répondit le barman, les sourcils froncés. D'ailleurs, regarde là-bas !

Au loin, un bâtiment cubique, d'un gris tristement bleuté, avait fait son apparition. Bien différent du monde coloré qu'ils avaient pu admirer auparavant, il restait cependant étrangement remarquable. Donna, qui ne pouvait en détacher ses yeux, hocha la tête, déjà prête à partir.

Les deux compagnons se mirent ainsi à marcher vers la construction, qui leur parut finalement bien plus proche à mesure qu'ils avançaient.

— Nous y sommes ! fit Lucien alors que l'architecture du bâtiment s'élevait devant leurs yeux. Mais il y en a d'autres, regarde.

Derrière celui-ci se trouvaient désormais des dizaines d'autres immeubles grisés, aux parois froides et métalliques. Donna avança au milieu des habitations, qui semblaient plus fades les unes que les autres. Quelques fenêtres étaient allumées et diffusaient une lumière bleutée hypnotisante. La jeune femme décida de jeter un œil au travers d'une d'entre elles ; tout à l'intérieur était pâle, et la seule source de vie était un écran immense, dont les images défilaient à une vitesse folle.

— C'est triste, remarqua-t-elle. C'est donc ça, le Revoar du futur ?

Lucien, qui s'était rapproché d'elle, ne put qu'acquiescer.

— Voilà les étoiles métalliques, effectivement. Ce monde est froid comme la glace, et tout semble figé, comme si le temps s'était arrêté.

— J'espère que ce n'est pas ça, la fin de l'histoire, souffla Donna.

Le barman ne répondit pas, les yeux rivés sur les tristes bâtiments. Le futur qui s'était dévoilé sous leurs yeux était bien morne. Le bonheur ne semblait plus vraiment y avoir sa place, encore moins la littérature. Mais cet avenir désolant ne venait pourtant pas à bout de la détermination de Donna ; et alors que sa main agrippait encore fermement la plume qu'elle avait reçu auparavant, elle se sentait responsable de toute cette histoire. Pour le barman, pour Raphaël, pour le monde, mais aussi pour elle, il fallait qu'elle aille au bout de cette aventure hors-norme.

La jeune femme décida d'examiner d'un peu plus près les bâtiments, dans l'espoir d'y trouver yn quelconque indice. Elle posa sa main sur une des parois, et tandis que de sa paume semblait irradier une froideur inhabituelle, le mur devint encore plus pâle qu'il ne l'était déjà. Donna retira sa main avant de réessayer, perturbée par le phénomène qui prenait place sous ses yeux ; le même schéma se répéta.

— C'est mauvais signe, lança Lucien, qui la regardait faire depuis le début. Plus le froid va recouvrir ces lieux, plus Revoar va s'éteindre. Et qui sait si...

— Si cela ne concerne pas aussi Raphaël ? répondit Donna d'un air doux.

Le barman hocha la tête sans laisser paraître d'émotions, mais son regard ne mentait pas. Son fils lui manquait, définitivement, et il aurait donné cher pour découvrir ce qu'il s'était passé et pour le retrouver.

— Tu sais quoi ? reprit la jeune femme. On ne va pas perdre plus de temps. Qu'est ce qui pourrait combattre ce froid et cette tristesse ? Que faire face à un monde aussi triste, aussi fade, aussi morne ? Il doit bien y avoir une façon de lui rendre ses couleurs.

— On pourrait faire fondre la glace, tenta-t-il en haussant les épaules. Mais vu la taille de mon briquet, ça risque d'être long.

Donna grimaça. Lucien avait raison, et puis, elle sentait que ce n'était pas la bonne solution. Il fallait quelque chose de bien plus profond et de bien plus mystérieux pour changer le cours de l'histoire. Quelque chose qui permettrait de faire à nouveau de Revoar un monde de couleurs, de parfums et d'imagination. Quelque chose de magique...

— Je vous dérange ? lança une voix familière.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top