Chapitre 26

Cela faisait près de trois mois que Ben et Calypso avaient franchi le pas de se mettre ensemble. Depuis ce jour, ils avaient passé tout leur temps ensemble. Ils apprenaient à se connaître, à se faire confiance aussi. Caly sentait qu'elle progressait chaque jour un peu plus. Le soir, quand elle allait se coucher près de Ben, l'angoisse était toujours bien présente, mais elle parvenait à la maîtriser et à se convaincre que le jeune homme ne lui ferait rien. Leur première nuit, elle n'avait pas réussi à fermer l'oeil de la nuit, trop gênée par la demi-nudité du grand brun. Désormais, elle se laissait lentement glisser vers le sommeil, apaisée par les lentes caresses de Ben sur ses bras.

— T'es vraiment obligée de retourner bosser demain ? marmonna-t-il.

— Oui, Martin a besoin de moi pour ranger.

Calypso avait bénéficié de trois mois de congés supplémentaires suite à un dégât des eaux qui avait ravagé tout l'établissement dans lequel elle travaillait. Les travaux étaient enfin terminés, elle allait pouvoir reprendre son activité.

— Mais je vais faire quoi sans toi, moi ? geignit Ben.

— Ce que tu faisais avant qu'on soit ensemble, rit Caly.

— Mais moi je préfère quand même ce qu'on fait quand on est ensemble, lui murmura-t-il.

Ben se retourna vers elle et lui adressa un sourire malicieux. Une main posée sur son ventre, par-dessus le t-shirt qu'il lui avait prêté, il l'attira un peu plus contre lui et en profita pour déposer quelques baisers dans son cou. Puis, suivant la ligne osseuse de sa clavicule, il dériva lentement sur sa peau fine. Ses doigts glissèrent sous le tissu pour la chatouiller de quelques caresses sur son ventre, autour de son nombril. Enivré par le parfum ambré de Caly, par la douceur de sa peau, par les frissons qu'elle déclenchait en lui à chaque fois qu'elle l'effleurait, Ben fut ramené à la réalité par le souffle saccadé de sa copine.

— Rien de plus que ça, tu te souviens, lui murmura-t-il.

— Je sais, haleta-t-elle.

Pour se rassurer, mais aussi pour lui rappeler qu'elle lui faisait confiance, Calypso écrasa brusquement sa bouche sur celle du brun. Une larme roula sur sa joue quand la main chaude de son copain remonta sous sa poitrine et l'effleura.

— Je t'aime, souffla Ben.

Calypso se figea aussitôt, le souffle coupé. Non. Il ne pouvait pas lui dire ça ! Sans qu'elle ne s'en rende compte, elle le repoussa d'un violent coup de coude et recula tant qu'elle tomba du lit. Ahuri, Ben se redressa en gémissant.

— Aïe ! Tu m'as pété trois côtes au moins là... maugréa-t-il.

— Pardon. Je...

La jeune femme balbutia quelques mots incompréhensible et recula encore, paniquée. Son dos heurta le mur. Elle était piégée, à la merci des envies animales de l'homme qui partageait son lit. Sa vue troublée ne lui permettait plus de voir ce qu'il se passait autour d'elle. Elle était aveugle, réduite à l'état de proie, comme toujours.

— Caly. C'est rien, t'inquiète pas. Excuse-moi, j'aurais pas dû faire ça.

Ben sauta du lit et s'agenouilla devant elle. Il prit doucement ses mains entre les siennes. Elle hurla de terreur et se recroquevilla un peu plus dans le coin de la chambre. Par réflexe, elle leva les bras pour protéger son visage.

— Caly, c'est moi... répéta-t-il plusieurs fois, désespéré de la voir ainsi réagir. Je suis désolé, je voulais pas te faire peur. Excuse-moi. Princesse ? Allez, je te ferai rien, tu le sais.

La jeune femme hocha la tête sans même avoir écouté ce qu'il disait. Sa voix n'était qu'un son lointain, méconnaissable. Elle n'arrivait plus rien à distinguer autour d'elle. Tout n'était qu'ombre et terreur. Ses trois mots résonnaient encore et encore dans son esprit tourmenté. Je t'aime. Un sifflement assourdissant les couvraient peu à peu. Jusqu'à ce qu'elle n'entende plus que ce bourdonnement douloureux.

— Caly... je t'en prie, dis quelque chose.

Ben posa une main sur la joue trempée de larmes de sa copine. Elle sursauta et le repoussa d'un coup de pied. Le jeune homme recula juste à temps pour ne pas prendre un autre coup qui lui laisserait un bleu.

— C'est moi... C'est Ben... T'es en sécurité ici. Princesse, la supplia-t-il.

— S'il te plaît, haleta Caly. Recule.

— Je te ferai pas de mal. N'aies pas peur de moi, s'il te plaît, l'implora-t-il. Caly...

La jeune femme baissa ses bras avec une lenteur extrême. Son regard hagard, s'ancra une seconde à celui de Ben, paniqué par la situation. Puis, comme si elle prenait soudain conscience de ce qu'il se passait, elle s'effondra en larmes. Prise de tremblements incontrôlés, elle se pelotonna contre le mur, honteuse et apeurée.

— Caly.

— Pardon. Pardon. Pardon, sanglota-t-elle. Excuse-moi.

— C'est rien, balbutia Ben.

D'un geste hésitant, il tendit la main vers elle. Elle n'eut aucun mouvement de recul. Alors, il se rapprocha encore d'elle, jusqu'à pouvoir glisser un bras autour de ses épaules et l'attirer contre lui. Dans l'obscurité de la nuit, il crut voir quelques perles sombres couler le long du bras de la jeune femme.

— Pardon, répéta-t-elle.

— T'inquiète pas, Princesse.

Calypso se cramponna à lui comme s'il était son ancre dans la réalité, loin de ses cauchemars, de ses souvenirs envahissant. Le silence qui les enveloppa sembla plus écrasant que d'ordinaire.. Elle lui avait fait du mal en le repoussant ainsi. Ben faisait tout pour qu'elle se sente bien avec lui, il la rassurait toujours, ne s'offusquait jamais de rien et voilà comment elle le remerciait. Elle le repoussait. Elle avait peur de lui. Elle le confondait avec son bourreau. Il lui en voudrait, elle en était certaine. Elle avait tout foutu en l'air, toutes ses chances d'être heureuse, tout.

— J'aurais pas dû faire ça.

— C'est pas ce que tu as fait, couina-t-elle. C'est ce que tu as dit.

— Ce que j'ai... tu...

Ben comprit. Du moins, il crut comprendre. Il lui avait exprimé ses sentiments, c'était la première fois qu'il les disait en de tels mots. Et elle n'en voulait pas, parce qu'elle ne ressentait pas la même chose que lui. Il ne voyait pas d'autre explication. Déçu, il se détacha d'elle. Son coeur se tordit brusquement quand il croisa le regard désolé de Caly. Alors, il se releva et quitta la chambre, blessé. La gorge nouée, il s'isola dans la cuisine, attrapa une cigarette et s'assit sur le rebord de la fenêtre, les yeux rivés sur l'appartement voisin. Il regretta presque le moment où il n'était pas encore tombé amoureux de Caly, quand il ne faisait que la trouver bizarre à passer ses nuits dans le froid, les pieds pendant dans le vide.

— Ben, gémit Calypso derrière lui.

— Quoi ? marmonna-t-il, peu désireux de faire des efforts pour se montrer plus doux.

— Tu m'en veux.

Le jeune homme serra les dents, pour retenir le sanglot qui menaçait de lui échapper. Trois mois. Il avait espéré que leur relation dure plus longtemps. Mais Calypso semblait ne pas être prête à accepter son amour. A quoi bon s'acharner ?

— Il me disait ça. Il me disait ça quand il me forçait à coucher avec lui, avoua-t-elle, la gorge nouée. Il me disait qu'il m'aimait.

Ben fit volte face, bouche bée. Il ne s'attendait pas à une telle révélation. Caly avait dû faire preuve d'un courage fou pour lui parler de ce souvenir douloureux. Et lui avait été trop stupide, lui avait été trop égoïste et lui en avait voulu. Furieux contre lui-même, le jeune homme serra les poings et se retint tant bien que mal de les écraser dans le mur en crépi à sa droite. Il hésita un instant. Devait-il rester à distance de Calypso, pour ne pas l'effrayer, ou au contraire la prendre dans ses bras ? Il eut sa réponse quand elle piétina jusqu'à lui et s'écrasa sur son torse, les bras serrés autour de ses hanches, le visage enfoui dans son cou.

— Je suis désolée, pleura-t-elle. Je...

— Nan, t'excuse pas, murmura-t-il. C'est de ma faute. Je le dirai plus, je te promets... Et je te ferai jamais de mal, je te forcerai jamais à quoique ce soit, tu le sais ça, hein ? On ira toujours à ton rythme, pas à pas, d'accord ? Tout ce qui compte, pour moi, c'est de te voir sourire, te savoir heureuse. Parce que N'habek*.

— Parce que quoi ? s'étonna Caly.

— Ma mère est algérienne. Mon père a pris des cours d'arabe avec mon oncle pour pouvoir lui faire une déclaration d'amour quand ils étaient jeunes. Il lui disait ça tous les jours jusqu'à sa mort. Ça veut dire...

Calypso hocha la tête. Il n'avait pas besoin de poursuivre pour qu'elle comprenne. Elle n'arrivait pas à croire qu'il soit si prévenant.

— Je t'agapó*. C'est en grec, précisa-t-elle

La jolie brune releva les yeux vers son copain. Son coeur bondit dans sa poitrine quand il effleura son nez avec le sien. Son souffle saccadé frappait sa bouche. Elle retint sa respiration. Il glissa ses doigts sous son t-shirt et les resserra dans son dos.

— On a toute la vie pour s'aimer, chuchota-t-il.

— Toute la vie ?

— Tout la vie. Je te rendrai heureuse, je te le promets. 

* NDA : Je ne parle ni arabe, ni grec, ces mots sont le fruit de google traduction donc si quelqu'un a une meilleure traduction, je suis preneuse ^^

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