Chapitre 11
Le saut en parachute effrayait Elias depuis son plus jeune âge. Il avait toujours eu le vertige et était incapable de partir en randonnée dans les montagnes. Plonger dans le vide était donc impensable. Quand il habitait chez les Sanders, même l'échelle qu'il devait gravir pour parvenir au grenier lui semblait trop élevée par moment.
Pour l'épreuve qui l'attendait, Elias allait devoir dépasser ses peurs. Il voulait prouver à tous qu'il en était capable.
Je ne dois en aucun cas me laisser faire ! Quelle idée d'abandonner à un tel stade !
Toute l'équipe arriva en sueur devant un sommet. Ils avaient suivi tout un sentier pour parvenir là. Ailes frissonna en se rendant compte qu'il devrait monter tout en haut du mont. Ce n'était qu'une petite montagne, mais il ne pouvait retenir ses jambes de trembler et ses dents de claquer. Un des plus jeunes résistants fit part du malaise d'Elias à son ami et ensemble, ils ricanèrent. Le concerné s'empourpra et serra les poings.
— Mêlez-vous de vos oignons ! grimaça-t-il en remuant sa main vers les apprentis espions.
Il ne devait pas montrer sa faiblesse, il avait intérêt à rester stoïque devant les épreuves. C'était là, la clé de la réussite. Il se plaça en tête du groupe pour se donner du courage et se mettre en valeur.
À la suite de leur entraîneur, il commença à gravir la pente. Le vent balayait ses cheveux bruns, le faisant vaciller à chaque instant.
Son visage devint blanc, limpide, mais personne n'était là pour le soutenir. Ses mouvements étaient plus lents, moins assurés au fur et à mesure qu'il montait vers le sommet. Il se laissa rattraper par ses coéquipiers et ralentit jusqu'à arriver à quelques mètres de son ancien ami, lequel l'observait. Dans ses yeux, une lueur hésitante flottait. Elias le voyait s'agiter sur le chemin.
Dans la montagne, Louis avait retrouvé toute son agilité, il semblait aimer grimper ainsi pour s'élever toujours plus haut dans les airs, tel un oiseau prenant son envol. Il s'approcha de son ami à petits pas et quand il arriva tout près, l'empoigna par le bras. Elias s'appuya de tout son poids sur son sauveur, manquant de le faire tomber.
Il adressa un faible sourire à son ami. Après quelques instants, des pensées contradictoires fusaient déjà dans sa tête.
Pourquoi Louis m'aide ? Il me soutient, sinon je tombe. Mais les espions vont dire que je suis faible... Je serais rabaissé au rang de chétif.
Alors qu'il captait des regards moqueurs, il se dégagea alors de l'emprise de son ami et se remit à avancer, la tête haute, les pieds tremblants. Des gouttes de sueurs roulaient le long de son dos et à chaque pas, Elias manquait de rouler sur le flanc du mont.
Son supplice s'acheva enfin quand ils arrivèrent sur un plateau. L'entraîneur arrêta d'un geste de la main tous les résistants. Elias se recroquevilla et respira à plein poumons. Il avait l'impression que sa tête avait été frappée contre des pierres tant elle le faisait souffrir. Il finit par relever le visage vers la vue magnifique qui s'offrait à lui. Il n'avait jamais atteint une telle altitude. Après avoir sué corps et âme pour parvenir jusque-là, le paysage en valait la peine.
Le ciel était clair, pas un seul nuage ne voilait ce bleu infini. Sur les versants de la montagne, des arbustes se développaient de tous les côtés et, encore plus bas, des champs s'étendaient à perte de vue. La ville d'Oxford se détachait au loin. Ses immeubles paraissaient minuscules et Elias fut pris d'un grand élan de puissance. En haut du mont, il surplombait tout le Royaume-Uni et se sentait comme le roi du monde. Pourtant, il n'en voyait qu'une infime partie.
— Vous êtes tous rassemblés pour votre premier essai de saut en parachute, déclara l'instructeur d'une voix forte pour couvrir le vacarme du vent. Je pense que certains d'entre vous ont le vertige. Cette journée se soldera donc peut-être par un échec, cependant vous n'abandonnerez pas. Il faudra alors recommencer. Si vous ne surmontez pas cette phobie, vous pouvez rayer de votre avenir les missions en tant qu'espion ! Vous balayerez les couloirs du quartier général pour le restant de vos jours !
Il déclama cette dernière phrase avec un regard particulier pour Elias. Il lui adressa un sourire narquois et poursuivit :
— Vos précédents instructeurs m'ont fait part de la virilité de certains d'entre vous. Je propose donc à Ailes de servir de cobaye et d'effectuer une démonstration !
Celui-ci balbutia quelques mots inaudibles. La colère lui montait au visage. Ainsi, le professeur voulait se moquer de lui ? Il allait lui prouver qu'il savait dompter ses peurs. Il s'approcha de l'entraîneur et répliqua d'une voix forte bien qu'un peu tremblante :
— Je suis votre homme !
Cette phrase fit ricaner plusieurs compagnons mais Mr. Neuwham adressa un regard noir à chacun.
— Hé bien ! Je vois que je ne me suis pas trompé ! Je vous en prie, Ailes, prenez place là et équipez-vous.
La vaillance d'Elias faiblit quelque peu lorsqu'il s'approcha vers les flancs du mont pour rejoindre l'équipement. Il commença à revêtir les harnais, les protections et le parachute sous les instructions du commandant. Ses gestes étaient saccadés, ses mouvements raides. Les lèvres tremblantes, il se rapprocha un peu plus de la falaise.
Quelques instants plus tard, Mr. Neuwham donnerait le départ. Elias rassembla toute la bravoure qu'il possédait, mais il ne pouvait pas faire ça.
— Tu peux y aller Ailes ! cria l'entraîneur tout en sifflant.
Je ne peux pas faire ça... Non, non, non... Je dois rester fort mais c'est au-dessus de mes forces...
Se décourageant, il recula à petits pas et sanglota. Il s'éloigna vers un buisson en se dépêtrant de son équipement. Ses camarades allaient en faire des gorges chaudes cependant, il n'avait pas la capacité de sauter, du moins pas sans entraînement préalable.
— Je crois que nous avons touché en plein dans le mille ! s'amusa le chef. Ailes a donc peur du vide... Intéressant ! Je vous conseillerai à l'avenir de moins faire le malin, jeune homme, le prévint-il le ton sévère. Néanmoins, je tiens à vous féliciter pour votre courage. Peu de personnes auraient fait la même chose s'ils avaient eu le vertige.
« À présent, je vais organiser des groupes pour permettre à chacun de s'entraîner au saut, continua-t-il pour tout le monde. Ceux qui ont le vertige peuvent se rassembler avec Ailes à gauche, ceux qui ont déjà fait du saut en parachute peuvent se mettre à droite, le reste au milieu.
Il considéra les trois masses formées. Une très petite minorité faisait partie du groupe de droite, seulement trois résistants sur une trentaine. Cinq ou six jeunes s'étaient placés autour d'Elias, tandis que les autres formaient une équipe d'indécis.
Ailes s'aperçut que Louis appartenait au premier groupe, avec Rostre et un autre espion auquel il n'avait jamais adressé la parole. Il remarqua qu'il y avait bien une quantité d'informations dont il n'avait jamais pris conscience au sujet de Louis. Il ne s'y était pas assez intéressé. Son ennemi lui adressa un sourire mauvais :
— Hé, Ailes ! T'as perdu tes plumes ?
L'intéressé grimaça mais se mura dans son silence.
Pas la peine de répondre, il est lourd... Quelle idée d'être aussi parfait !
La suite de l'après-midi se déroula comme elle avait commencé pour Elias. Il était toujours paniqué à l'idée de sauter du sommet de la montagne. La perspective de tomber dans le vide, seulement retenu par un simple tissu, le terrifiait. Il effectua de petits échauffements pour s'y préparer. Même s'il voulait réussir, il était mis à rude épreuve.
Tandis qu'il était assis sur un rocher au bord de la montagne, Ailes observa son meilleur ami s'approcher à petits pas.
— Tu as besoin d'aide ? demanda Louis d'une voix penaude.
— Laisse... commença-t-il en l'observant d'un regard noir.
Toutefois, Elias s'arrêta tout de suite. Il aimerait renouer avec son ami. Ses autres compagnons l'avaient peu à peu lâché comme il n'était plus le meilleur.
Un peu d'aide ne me fera pas de mal, non ? Je n'y arriverai pas seul...
Il serra dans ses bras Louis les yeux larmoyants. Ce dernier commença déjà à lui expliquer des détails techniques.
Quelques semaines plus tard, Ailes parvint enfin à sauter, un soir d'avril, le cœur serré. Une immense aspiration le porta alors qu'il descendait vers les plaines, en contrebas.
Fier de ce qu'il avait accompli, il se réjouit, mais il savait le chemin encore dur et il désirait plus que tout devenir espion.
Plusieurs de ses compagnons abandonnèrent, trop horrifiés par le vide et leur entraînement s'arrêta là, tout comme leur espoir de devenir espion au sein du SOE.
Elias et Louis s'étaient rapprochés de plus en plus durant ce stage. En contrepartie de son aide pour les sauts en parachute, Ailes avait décidé de donner des cours de combat à son ami qui peinait dans ce domaine. Il était content de retrouver Louis, ce dernier avait laissé un vide derrière lui, même si Elias ne s'en était pas rendu compte.
Et puis, c'est de sa faute ! Il n'est pas venu me voir.
Les espions partirent un soir de printemps vers leur dernière école de préparation. Les techniques furent approfondies encore pendant quelques semaines. Enfin, les apprentis furent prêts. Après plus de quatre mois d'entraînement, ils étaient devenus de vrais durs à cuire. Aucun d'entre eux ne se laissait démonter face aux aléas de la vie, le froid et la faim les dérangeaient moins. La route était encore longue avant leur première mission. Le test ultime barrait la route. Il faudrait surmonter cette épreuve que tout le monde craignait et redoutait.
***
Hello <3
Nouvelle épreuve pour Elias qui a le vertige !
Le chapitre suivant aura un peu plus d'action, puis dans les suivants, Elias va voyager !
J'espère que vous découvrirez tout ça ! <3
Plume
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