Prologue, Partie 3 : Ou la suite du début des problèmes

Kiara, Jour 3 :


Bonsoiiiir,

Je veux en finir avec toutes ces premières présentations (monokuma insiste que les premières impressions sont importantes et m'a encouragé à continuer alors bon) je vais essayer de raconter toutes les rencontres ce soir. Ou le plus possible, il ne faudrait pas que je détériore la kalitey de mon récit par précipitation !

Donc après avoir rencontré Otto et Jedi, on leur a indiqué la direction des autres, et comme Jedi était encore un peu remuée, les jambes toutes tremblotantes comme un faon qui vient de naître, ils sont allés les rejoindre.

Cameron et moi, on a décidé de descendre d'un étage. On a pris les longs escaliers vers le niveau inférieur. Cameron m'a soudain dit :

- C'était courageux de ta part de les aider...

Je l'ai remercié et j'ai ajouté :

- En même temps je ne pouvais pas juste croiser les bras en attendant qu'une jolie fille tombe en mode « Non ! Je refuse de prendre un seul risque ».

Il me sourit.

- J'en connais qui auraient refusé.

- Tu connais des personnes bien faibles de caractère alors.

Il haussa les épaules, l'air brièvement songeur.

- Peut-être en effet...

J'espère que je ne l'avais pas vexé. Il s'apprêtait à continuer quand il se figea et m'arrêta d'un geste. Je l'ai regardé d'un air interrogateur avant de comprendre ce qu'il l'avait fait réagir. Un bruit de pas, rapide, comme si quelqu'un courait dans les escaliers, venant de l'étage du bas.

Cameron descendit d'une marche pour se placer un peu face à moi et soudain une petite silhouette le percuta de plein fouet. Le choc la déséquilibra et elle manqua de tomber en arrière. Le combattant sauta d'une marche en avant pour lui attraper le bras de justesse avant qu'elle ne tombe en arrière.

La jeune femme qui venait d'apparaître lâcha un cri de peur et tenta de s'éloigner de lui, mais si Cameron l'avait lâché à ce moment, elle aurait risqué de se faire vraiment mal, alors il la tira dans le sens inverse vers nous, ce qui la fit paniquer encore plus.

Son pied glissa sur la marche, et elle bascula en arrière, perdant tous ses appuis. Cameron passa son bras autour de sa taille pour la retenir de justesse, dans une position digne d'un tango. J'ai très vite chassé le pincement qui me prit en les voyant tous les deux comme tirés conte de fée (enfin les pieds poilus en claquette de Cameron en moins).

- L-lâchez-moi !!

Je suis descendue à son niveau pour la rassurer :

- hey hey eh tout va bien !

Sa panique diminua d'un cran en me voyant. Peut-être parce que j'étais encore plus petite qu'elle, ou que j'avais l'aura d'agressivité d'un bout de tofu. Elle arrêta de se débattre et Cameron la libéra.

Puis elle nous fixa encore une seconde, l'air de petit à petit comprendre la situation. Elle balbutia :

- Il-il y avait un homme qui me poursuivait et j'ai... j'ai

Elle déglutit.

- On est dans une Tuerie c'est ça ?

On s'est regardé avec Cameron et c'est lui qui lui annonça la mauvaise nouvelle. Il hocha sombrement de la tête.

Elle serra les lèvres, et s'accroupit en prenant sa tête dans ses mains.

- Merde, merde...

Je me suis accroupie pour poser une main sur son épaule.

- Eh ça va aller...

Elle posa sur moi ses yeux vert d'eau sans croire en mes paroles, mais un petit sourire naquit sur ces lèvres.

- Au moins vous avez l'air plus sympa que l'autre...

- Comment tu t'appelles ?

- Amanita, vous pouvez m'appeler Nita. Je suis l'ultime Bénévole, et vous ?

On s'est présenté tour à tour, et elle se crispa en serrant la main de Cameron, je sentais qu'elle se méfiait de son ultime. Et je pouvais la comprendre, se retrouver dans une tuerie avec des gens très compétent dans l'art de la violence n'avait vraiment pas de quoi rassurer...

Elle finit se calmer et j'ai pu l'observer un peu mieux. Une aura de douceur se dégageait d'elle.

Elle portait une longue robe complexe très colorée et richement brodée, des gants hauts mauve sombre et des petits talons fuchsia. Sa peau était très sombre et ses cheveux courts étaient plaqués sur sa tête, sculptés pour faire des spirales sur son front, ses joues et sa nuque. Elle était petite et un peu enrobée, et avait de grands yeux vert menthe à l'eau qui papillonnaient autour d'elle, frappant d'expressivité. Elle aurait pu sortir d'un film disney...

- Qui te poursuivait ?

Elle se tripota les mains l'air embarrassée.

- J'ai peut-être un peu sur-réagit. C'est juste qu'il est apparu de nul part et m'a attrapé le bras et j'ai paniqué... Je ne sais pas son nom.

- Où est-ce que ça s'est passé ?

- Juste en bas de ces escaliers en fait...

Alors il n'était peut-être pas très loin. Elle demanda alors :

- Vous... vous en avez vu d'autres ?

- Oui, ils se sont réunis à l'étage du dessus, dans le couloir.

- On en a vu 8 autres, avec toi 9.

- 10 même, avec Keith on en a vu un autre mais il est parti de son côté.

Elle intégra l'information :

- Donc en théorie, il en reste 6 ? Avec celui que j'ai vu, il y en a encore 5 dont on ne sait rien c'est ça ?

- En gros oui... Mais avec Cameron on allait visiter le reste, retrouver les autres et les diriger vers le groupe, les autres pensent que c'est là que les règles seront exposées.

Il y avait quelque chose de terriblement sinistre dans le fait de parler aussi ouvertement de ce qu'il allait se passer. On avait beau le savoir, on n'était pas les premiers, mais ça semblait toujours aussi surréaliste. Encore plus pour moi qui n'avait que des souvenirs très flous de ce qu'étaient les tueries, malgré les explications de Keith.

Elle sembla hésiter à nous quitter. Cameron l'invita alors :

- Tu peux visiter avec nous si tu ne veux pas repartir seule.

Je n'ai pas protesté et elle sembla peser le pour et le contre, avant de nous remercier.

- Je veux bien au moins jusqu'à ce qu'il y ait quelqu'un pour m'accompagner. J'ai peur de me perdre, ou de croiser des mauvaises personnes.

C'est donc à trois qu'on a repris notre descente. Assez vite, des voix se firent entendre. Amanita se tendit avant de chuchoter :

- Je crois reconnaître la voix de celui que j'ai croisé...

L'endroit où nous venions d'arriver était similaire à l'étage du dessus, excepté qu'étant plus bas, la vision du jardin était principalement composée de troncs, où de feuilles de palmiers plus petits que leur camarade d'autres espèces inconnues. À une trentaine de mètres de nous sur le cercle, 2 silhouettes se disputaient. Décidément, beaucoup de disputes.

Je me suis tendue d'un coup. Je reconnaissais une des deux silhouettes. C'était le flamant rose, qui avait déjà troqué le manteau ruiné par une tunique longue blanche et étonnement sobre de sa part et qui jurait un peu avec son pantalon toujours aussi flashy...

En face de lui se tenait un jeune homme. Ses cheveux étaient tressés finement, et il portait un jean baggy avec des grosses baskets et un top qui découvrait ses épaules. Bracelet et colliers colorés autour du cou et des poignets, il y avait une attitude nonchalante et un peu insolente.

L'exact opposé de son interlocuteur, qui le regardait de haut avec ses cheveux blonds, ses yeux bleus, et ses vêtements ajustés.

- Rend moi ça tout de suite.

- Sinon quoi ? Tu vas agiter les fesses en caquetant ?

- Tu ne me provoqueras pas avec des insultes d'enfants de 5 ans, ça m'appartient, rend-le moi.

- Ça à l'air précieux, je pourrais le revendre cher...

- Il faudrait déjà que tu sortes en vie d'ici.

Il éclata de rire :

- Quoi tu me menaces ?

Cameron les interrompit :

- On est dans une tuerie. Il a raison, c'est juste un fait.

Flamant rose haussa un sourcil en regardant dans notre direction. Pendant ce temps, l'autre inconnu se retourna pour nous faire face. Dans son poing il tenait un lourd collier. Celui que Flamant rose portait quand je l'avais rencontré avec Keith.

- Vous êtes-qui vous ?

Lança l'inconnu voleur de collier. Soudain ses yeux s'écarquillèrent. Il avait visiblement reconnu Nita.


- Oh ! La peureuse ! T'es allée chercher des renforts ?

Elle serra les poings et ne dit rien. Le Flamant-rose poussa un long soupir fatigué et commenta :


- Hey, Le petit écureuil là.

Je n'ai pas compris à ce moment qu'il me parlait à moi. Nita me poussa du coude :


- Il parle de toi.

- Hein ? Moi ?

Il pris une expression encore plus agacé :


- Oui toi. On s'est déjà vu. Où est le rat qui t'accompagnait et qui sont ces deux là ?

Je me suis crispée qu'il qualifie encore Keith de rat. J'allais rétorquer qu'il ferait mieux d'apprendre la politesse avant d'ouvrir son bec de sale flamant-rose mais Nita, très diplomate, se présenta :


- Je suis désolée de m'être enfuie, j'ai simplement pris peur. Nous sommes dans une tuerie après tout... Je m'appelle Amanita, vous pouvez m'appeler Nita, je suis ultime bénévole.

Le voleur de collier souffla un peu du nez, puis finit par se présenter aussi.

- Tao Toa, ultime rappeur.

La seule surprise que ça représentait était qu'il était tellement dans le cliché d'un rappeur que paradoxalement c'était surprenant.

Je me suis ensuite présentée, puis Cameron fit de même.

Il ne restait que l'odieu oiseau de malheur, qui après un moment d'hésitation et une belle expression de mépris, daigna nous honorer de son patronyme :

- ... Je suis Eldey Arnasson. Ultime nez.


Sans pouvoir m'en empêcher, j'ai éclaté de rire. Ultime NEZ ? Genre quoi ? il est modèle de nez ? C'est vrai qu'il a un grand nez plutôt éstétik mais comment peut-on être ultime NEZ ? Un jour on va avoir des ultimes oreilles ? Des ultimes pieds ? Des ultimes pancréas ? Ouh là Sophie me mitraille des yeux, heureusement qu'on a pas le droit de faire de bruit ici.

Enfin de toute façon, j'ai appris depuis ce qu'un "nez" est puisque Eldey m'a fixé comme si j'étais un vulgaire cafard nageant dans un jus de poubelle et a expliqué :

- Un nez est un créateur de parfum. Je travaille pour la marque Égéria.

J'ai vu derrière moi Nita écarquiller les yeux, l'air surprise, mais aussi.... un brin admirative ? Visiblement c'était une marque de luxe, qu'elle connaissait. Et peut-être qu'elle aimait aussi. Enfin bon de toute façon ça n'était pas une déduction très compliquée vu que toute son attitude semblait crier "luxe, luxe, gay, luxe". Il tourna les talons et s'apprêtait à partir (sans son collier) tout en déclarant :


- Bref je n'ai pas de temps à perdre avec des-

Cameron l'interrompit :


- Le point de réunion est au deuxième, dans le grand couloir entre les 2 boucles.

Eldey jeta un coup d'oeil derrière lui. Et comme il ne dit rien, Cameron ajouta :


- Le jeu ne commencera pas tant que tout le monde n'y sera pas en même temps pour écouter les règles.

Le nez (mdr) ne rajouta rien, et s'en alla. Il aurait pu dire merci quand même. Bref.

Nita sembla soudainement prendre conscience de quelque chose et s'écria :

- A-attend !

Eldey, en retenant un autre soupir, se retourna et demanda sèchement :


- Oui ?

- Je-je peux venir avec toi ?

J'ai regardé Nita comme si une troisième tête lui avait poussé. Non attend une deuxième, elle en a qu'une seule. Et bon, comme elle a dû sentir mon incrédulité (quel genre de dégénéré voudrait passer du temps avec cette espèce d'incarnation du mépris) elle me glissa à voix basse :


- Je ne veux pas aller au point de rendez-vous seule. S'il part, soit je devrais laisser Tao m'accompagner, et je n'en ai pas envie, soit il faut encore que j'attende qu'on rencontre une autre personne qui n'a pas l'air louche, et je commence à être fatiguée...

Entre nous, à sa place, j'aurais préféré attendre encore plutôt que de partir avec l'un des deux, m'enfin à voir sa réaction de tout à l'heure, je me doutais qu'elle avait dû renifler un ou deux parfums Gérénia-truc-chouette. Peut-être voulait-elle lui en parler ?

Eldey lui jeta un petit regard de haut en bas, et jugeant sans doute qu'elle était d'une autre catégorie que les péquenauds que Cameron et moi sommes, il se retourna en donnant son accord.

- C'est d'accord. Viens si tu veux.

En même temps, avec sa belle robe et son beau visage, et sa façon de se tenir, droite et élégante, je comprenais son jugement. Pour une ultime bénévole, elle avait certainement l'air riche, en même temps, assez logique, il faut de l'argent pour pouvoir donner son temps.

Une fois les deux disparus Tao glissa son collier fraîchement volé dans sa poche et sans nous regarder s'éloigna. Cameron (paix à son cerveau qui nous a visiblement quitté) l'interpella :

- EH ! Tu crois que tu vas juste t'en sortir comme ça ? Après avoir volé un objet de valeur ?!

Tao haussa les sourcils et se tourna vers nous comme s'il venait à peine de se souvenir de notre existence :

- Oui ?

- Et bien tu as tort ! Donne-nous le collier, nous allons le rendre à son propriétaire !

J'ai chuchoté entre mes dents serrées :

- Cameron, je pense que le fla- que Eldey s'en fiche

- Mais c'est du vol ! C'est nul et incorrect, à la limite s'il en avait besoin, mais ici l'argent ne veut rien dire.

Un bref instant, j'ai compris le point de vue d'Eldey. Quel idiot.

- Tu sais qu'il va y avoir des meurtres ici. Pourquoi tu te soucies d'un collier ?

Tao éclata soudain de rire. Il pointa du doigts Cameron :

- T'es un petit rigolo toi !

Puis soudain à mon plus grand étonnement. Il mis la main dans sa poche et jeta le collier à Cameron, qui l'attrapa de justesse :

- Tu sais quoi, pour la peine je le rend. Et puis j'irais voler toute la bijouterie au fond là-bas. De toute façon je suis sûre que celui-là c'est du toc.

Et il se détourna et disparut en un instant. J'ai tapé l'épaule de mon grand camarade héros parmi les héros en le rabrouant.

- Tu penses que c'est une bonne idée de provoquer des gens chelou comme ça ? On va peut-être crever à cause de toi !

Cameron me fit un sourire charmeur et me rassura d'une voix douce :

- Je te protégerais t'inquiète. 

J'ai pris sur moi pour ne pas le laisser me désarçonner en espérant que ma foutue peau teint yaourt ne me trahirait pas, et j'ai commencé à marcher dans une direction au hasard. Il me rattrapa en deux enjambée :

- Je vois que madame prend des initiatives, où allons-nous, oh phare dans la nuit ?

- Oh ta gueule.

Il éclata de rire encore une fois. Il était très détendue pour quelqu'un dans une tuerie. Mais d'une certaine façon, ça me dé-stressait un peu aussi.

Je me suis enfoncée dans le couloir de cet étage, et là, face à nous, au centre de l'allée, un parc de jeu. Un truc à la Youpi. Si vous voyez pas de quoi je parle vous n'avez pas d'enfance.

Jedi me force à retirer ce que j'ai dit. Visiblement elle ne connaît pas les parcs Youpi (la pauvre, ça explique des choses).

Bref, nous sommes tombés sur un parc de jeu intérieur, avec des structures pour escalader, un sol un peu mou en cas de chute, des rouleaux en mousse, des minis trampolines, une balançoire dans un coin, et surtout... une piscine à boules. Le tout bien sûr dans un écoeurant mélange de couleurs primaires.

Je crois que Jedi a compensé le fait de ne pas connaître de parc Youpi en devenant un parc Youpi.

Bien sûr, comme tout humain normalement constitué, je n'ai pas pu résister, j'ai foncé dans la piscine à boules.

En touchant le fond, seule ma tête en dépassait. Cameron, au lieu de me juger comme j'ai cru qu'il le ferait, se jeta à son tour dans la mer de balles en plastoc colorées.

- Le dernier sorti a perdu !

Je me suis précipitée vers le bord.

Il arriva par derrière m'attrapa par la taille et me replongea dans la piscine. j'ai tenté de me débattre mais rien à faire. Je l'ai vu partir en direction du bord près à sortir en s'exclama :

- Tu vas perdre !!

J'ai saisi les premières balles que j'ai trouvé et j'ai bombardé sa tête. Il rit de plus belle quand elles rebondirent sur son crâne avec des petits "toc" ridicules étouffés par ses dreads, mais ça ne l'empêcha pas du tout de se hisser hors du bac.

- Perduuu !

- C'est de la triche t'es beaucoup trop grand.

Il me tendit la main, et je l'ai attrapé, puis il me hissa hors du bac. Je me suis immédiatement dirigée vers la balançoire d'un bas décidé.

- Celui qui saute le plus loin a gagné.

- Tu vas encore perdre !

J'ai commencé à me balancer, pour prendre de l'élan, tandis qu'il en faisait de même à côté de moi, puis quand la nacelle sur laquelle j'étais assise fut au point le plus haut vers l'avant, je me suis élancé hors du siège pour atterrir le plus loin possible.

Je suis une professionnelle dans ce jeu, j'ai failli me casser le coxxys au moins vingt fois en perfectionnant ma technique de lancer de balançoire !

Les grosses jambes musclées de Cameron atterrirent brutalement juste à côté de moi.

Il s'exclama :

- J'ai gagné ! Encore une fois !

Une indignation profonde me traversa :

- Mais non c'est ex aequo !

- C'est une phrase de perdant .

j'ai tracé une ligne invisible sur le sol pour lui montrer que nous étions au même niveau.

- Regarde !

- Tut tut tut !

Il retraça la ligne, en coupant un bout de son orteil pour me prouver que ses pieds étaient plus loin.

- C'est parce que tes pieds sont plus gros mais nos talons sont au même niveau !

- C'est les orteils qui comptent, pas les talons.

- Bien sûr que si c'est les talons ! c'est l'endroit où on atterrit qui compte !

- Quelle mauvaise foi ma chère ! Les paroles d'une perdante !

Je m'apprêtais à lui tirer les dreadlocks, quand soudain un petit raclement de gorge nous interrompit.

- Excusez-moi ?

Cette fois je fus bien sûr que mes joues avaient pris une teinte cramoisie. Avec Cameron, comme il me rejoignait dans mes bêtises, je n'étais pas embarrassée, mais là, l'arrivée de cet inconnu qui avait peut-être tout entendu à notre conversation me remplit de honte.

Je me suis tournée vers lui. C'était un jeune homme à l'air doux, une sorte de turban sur la tête dont dépassait quelques mèches sombres bouclées. Des bleus pâles, et une peau tannée par le soleil. Il portait des vêtements simples et un peu rustiques. À mon immense soulagement, il n'y avait pas une once de jugement dans sa voix.

- Je me suis réveillé ici sans souvenir... Savez-vous ce qu'il se passe ?

On s'est regardé avec Cameron, l'air de se demander qui allait lui annoncer.

Cameron finit par s'en charger. Une fois la situation expliquée, et sa détresse initiale un peu adoucie, nous sommes passés aux présentations.

- Je suis l'ultime berger. Je m'appelle Fayed Djebar.

- Enchanté Fayed !

J'ai serré sa main et il serra ensuite celle de Cameron. Nous lui avons transmis l'information sur le lieu de rendez-vous, mais il demanda un peu gêné.

- Ça ne vous dérange pas que je reste avec vous pour rencontrer les autres ?

Je n'ai pas consulté Cameron pour répondre.


- Nous pas du tout !

Contrairement à Tao ou Eldey, il avait l'air d'un être humain décent. Et peut-être qu'il calmerait un peu Cameron (Et moi par la même occasion).

Nous avons donc continué ensemble. Fayed nous interrogea un peu :

- Vous avez rencontré beaucoup d'autres personnes ? Pouvez-vous me parler un peu d'eux ?

j'ai réfléchi tout en faisant le point sur nos camarades d'infortunes.

- Alors il y a Keith, Eldey, Terpsichore, Sophie, Cameron... Comment s'appelle la sexologue déjà ?

- Fyona.

- Voilà Fyona, euuh Moses. Ensuite Jedi et Otto, c'était Otto c'est ça ?

- Oui Otto Klein.

- Ensuite Nita, puis Tao. Et maintenant toi !

Fayed fit remarquer :

- Ça fait donc 11 personnes, plus vous deux, 13... il devrait rester 3 personnes en théorie.

- C'est ça.

Nous sommes arrivés au bout du couloir, mais il n'y avait personne, soudain deux voix un peu distantes, et énervées, se firent entendre.

Fayed commenta alors :

- Bon. Deux de plus il semblerait.

J'ai soupiré, fatiguée d'avance d'encore tomber sur du conflit. Mais il n'y avait personne à l'horizon.

- Où sont-ils ?

Fayed dit :

- Je... crois qu'ils sont à l'étage du bas.

En effet, les voix semblaient venir du jardin en contrebas. Nous avons pris les escaliers pour rejoindre le rez-de-chaussée. Devant nous, au milieu de l'herbe, une jeune femme frappait un jeune homme avec une espèce de branche couleur lilas.

En se rapprochant un peu j'ai compris qu'il ne s'agissait pas d'une branche... mais d'une jambe. Une prothèse de jambe.

- Recule espèce de pervers ! Ferme les yeux !

- Mais je veux t'aider imbécile

- Va chercher de l'aide alors !

- Mais si je te laisse là et que tu te fais attaquer je fais quoi moi hein ? Je culpabilise comme un idiot ?! Laisse-moi t'aider !

- Ne me touche pas avec tes sales pattes !

La jeune femme portait une jupe recouverte de mousseline sombre à l'ourlet doré. La jupe en question s'était empalée sur une branche et était à moitié relevée, exposant le derrière de la jeune femme à notre regard. Quand j'ai enfin compris ce que je voyais, j'ai sauté sur la pointe des pieds pour couvrir les yeux de Cameron. Ce dernier détournait déjà le regard et s'énerva :

- C'est bon hein ça va je regarde pas, tu me prends pour qui ?!

Son exclamation attira l'attention des deux qui se disputaient, et le visage de la femme se décomposa. Elle agita avec agressivité sa prothèse dans notre direction :

- Dégagez, pervers ! Bande de pervers ! Allez-vous-en !!

Puis soudain elle me remarqua et son expression fit un 180 degrés, reconnaissance et soulagement s'y lisèrent en une seconde :

- Oh ! Toi, jeune fille, s'il te plait viens m'aider à décrocher ma jupe je t'en prie !

J'ai obtempéré sans poser de question. je me suis approchée et j'ai tendu les bras pour essayer d'atteindre la branche et le tissu et déchirer un bout pour la libérer.

L'autre inconnu se plaint :

- je vais avoir une énorme bosse, tout ça parce que tu ne voulais pas de mon aide.

- Tais-toi.

Puis soudain à mon intention avec un ton dégoulinant de douceur comparé à la phrase d'avant:

- Tu y arrives ? Ça va ?

Le tissu était bien solide et la branche un peu haute, alors j'avais un peu de mal.

- Je vais devoir escalader un peu.

Sur ces mots j'ai commencé mon ascension, heureusement pas très haute, pour décoincer le tissu. En une minute ce fut fait et j'ai sauté au sol.

- C'est bon !

Le tissu déchiré retomba et recouvrit convenablement les jambes de la jeune femme à la prothèse. Le soulagement procuré changea radicalement son attitude.

Ses épaules se détendirent, elle se tourna vers Cameron et Fayed :

- Pardonnez ma rudesse, vous pouvez vous approchez maintenant.

- Et moi alors ? Pas d'excuse ?

Elle regarda avec rancœur l'autre inconnu.

- Il va falloir en faire plus pour te faire pardonner.

- Mais j'ai pas fait exprès, ma main a glissé quand j'ai voulu tiré sur la branche ! C'était un accident !

Ouh là visiblement il y avait eu embrouille.

- Je m'en fiche.

Elle s'assit gracieusement sur un banc en bois juste à côté et entrepris de remettre sa jambe en place. J'ai alors remarqué qu'un de ses bras était également une prothèse, de la même teinte lilas. Je remarquai maintenant qu'elle semblait presque fait de porcelaine et était recouverte de fins motifs végétaux d'un violet un peu plus sombre.

La fluidité de ses mouvements me marqua aussi, la facilité avec laquelle elle pouvait l'enlever et la remettre. Elle bougeait ses doigts quasiment comme une vraie main et en quelques minutes sa prothèse de jambe était fonctionnelle pour se redresser et se déplacer comme si de rien n'était.

- Bon laissez-moi me présenter.

Elle épousseta sa jupe :

- Je suis Sao Mai Pham. Ultime Prothésiste.

Elle portait un chapeau traditionnel stylisé, sous lequel ses cheveux noirs, était attaché en un chignon à l'exception de deux mèches ondulées de chaque côté de son visage et d'une frange droite. Ses yeux d'un brun étrangement clair, presque doré était vif et intelligent, presque rusé. Un sourire insondable étirait légèrement ses lèvres peinte en violet, comme une bonne partie de sa tenue.

L'autre inconnu ne nous laissa même pas le temps d'ajouter quelque chose avant de se présenter à son tour.

- Lucien Mpeya, ultime Iron-man, pardon pour cette mauvaise première impression, je voulais vraiment aider !

Encore une grand sportif. Lui était un peu moins grand que Cameron, Eldey et Otto. Mais pas moins musclé, une musculature plus sèche que celle de Cameron. Il avait les cheveux très courts, presque rasés, la peau sombre. Malgré un air un peu brute de décoffrage, il brillait dans ses yeux une franchise et une intégrité qui me fit bonne impression. C'était comment dire... comme l'opposé complet de quelqu'un de vicieux.

Enfin bon, tout ça pour dire qu'il avait une bonne tête. Il fut d'ailleurs le premier à nous interroger sur la tuerie :

- Vous avez connaissance de beaucoup de gens ? Je ne me suis pas éloignée de madame Pham donc je n'ai pas pu explorer. Vous avez croisé des personnes dont vous pensez qu'il faudrait se méfier ?

Il... allait droit au but. J'ai regardé Cameron et Fayed comme pour les consulter silencieusement. Ils ne semblaient pas trop quoi savoir lui répondre alors j'ai pris l'initiative de tenter sans beaucoup de confiance en mes paroles.

- Avec vous on a vu presque tout le monde. Il ne reste qu'une personne que nous n'avons pas vu... et pour la seconde question... C'est dur de juger les gens aussi vite. Certains ont l'air un peu... individualiste et...excentrique, mais personne n'a fait preuve de réelle méchanceté ou agressivité.

- Je vois. J'espère que les individualistes ne sèmeront pas trop de trouble... des disputes se sont-elles déjà produites ?

Alors- lui et madame Sao Mai déjà -
Je n'ai pas commenté ça et j'ai répondu :

- Hum. Quelques petits malentendus mais rien de méchant je dirais...

Il eut l'air embêté, mais répliqua avec entrain :

- Bon d'après les standards des tueries sur lesquels on a des renseignements, j'imagine que c'est pas mal !

Puis il nous fit un grand sourire.

- Bon en tout cas, ravi de faire votre connaissance ! Encore mille excuses madame Pham.

Ajouta-t-il précipitamment avec une courbette.

Son zèle poli et sa positivité avait radoucit la prothésiste qui se tenait droite et élégante à côté de lui. Elle prit alors la parole à son tour.

- J'imagine que je peux faire preuve de clémence, il serait dommage de partir sur de mauvaises bases dans notre situation.. Tu es pardonné.

Son visage s'illumina et il s'exclama :

- Oh Merci Sao Ma-

- C'est toujours Madame Pham en revanche.

Elle se tourna vers moi et avec un léger sourire et des yeux pétillants elle ajouta :

- Toi tu peux m'appeler Sao Mai très chère.

- D'accord madame Sao Mai !

Elle haussa un fin sourcil et poussa un rire très doux. Elle jeta un vague regard en direction de Lucien en lui disant, presque comme si elle prenait à part un public :

- Elle a tout compris cette petite.

Puis elle épousseta encore sa jupe et se rapprocha de nous. En passant à côté de moi, elle ébouriffa mes cheveux et ajouta à notre intention.

- Enfin bon, je vais rejoindre les autres. À plus tard.

- Madame Pham vous ne voulez pas que je vous accompagne ?

Lucien s'était exclamé avec une pointe trop de zèle d'après moi. Elle lui jeta un regard amusé par dessus son épaule.

- Ça ira merci, je sais me débrouiller seule.

Sans se laisser départir de son enthousiasme, il changea de question :

- Dans ce cas, accepteriez-vous ma présence ?

Cameron avait l'air un peu dépassé par ce surplus de politesse et de termes élégants. Fayed lui se contentait de rester discret, et ne semblait pas dérangé le moins du monde par le ton cordial de nos nouveaux camarades. J'ai retenu un rire devant la tête perdue de Cameron, et j'ai observé Sao Mai peser le pour et le contre mentalement avant de trancher.

- Ta présence m'est indifférente.

Une forme implicite d'accord que Lucien n'ignora pas. Il nous jeta un dernier grand sourire :

- À tout à l'heure, je vais me faire mon avis des autres participants !

Je l'ai gratifié d'un pouce en l'air, il fit un check à Cameron et un signe de tête poli à Fayed, puis partit sur les traces de Sao Mai dont les talons violets claquaient légèrement sur le sol.

Il nous restait donc encore 1 personne à trouver. En théorie en tout cas.

Je reprendrais plus tard. Aujourd'hui, comme hier et avant-hier, la situation est bizarrement calme. Je vous raconterais ça plus tard mais presque rien ne s'est passé alors il n'y pas grand chose à dire. Je continue d'apprendre à connaître mes autres camarades d'infortunes et je crains ce qui se passera dans quelques jours quand.... enfin bon je vous parlerait de ça plus tard. Pour l'instant je profite encore de ces jours de calme pour finir mon récit. Monokuma m'a gratifié d'un hochement de tête approbatif hier quand elle a vu le nombre de pages que j'avais gratté. Je ne devrais pas m'en réjouir (je devrais même la haïr) mais curieusement je ne peux pas m'empêcher de ressentir une forme de fierté face à son approbation.

Je vous laisser ici, je suis épuisée, et j'ai bientôt fini de vous raconter nos premières rencontres.

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