XXX. La fille mystère

Une semaine et demi s'était écoulée depuis la discussion avec Oliver, et pour une fois, j'avais laissé cette coïncidence sur le compte du hasard. Après tout, je n'allais pas rajouter des problèmes. Même si j'avais l'impression de tourner en rond depuis quelque temps, à chasser mes propres démons sans jamais trouver le fin mot de l'histoire, je ne me sentais plus mal. 

Les maux de tête se faisaient rare, pas d'attaques surprises au beau milieu de la nuit, les tensions dans la famille s'était apaisées et quand je croisais Jonathan, il ne m'a pas posé plus de questions. Comme si tout se passait comme sur des roulettes, mais ça signifiait toujours que quelque chose d'horrible allait arriver. 

Mais puisque le calme était revenu, ou du moins un semblant de calme, j'allais quand même en profiter, surtout qu'aujourd'hui, c'est la fameuse excursion au milieu des bois. L'organisation était beaucoup plus compliquée que celle des musées puisqu'une bonne partie du lycée est incluse dans le voyage. Plusieurs cars ont été prévu et l'idée de pouvoir juste regarder les paysages défiler sous mes yeux pendant le trajet était un pur bonheur. 

Il était tout juste cinq heures du matin, les cars partaient à six heures et demi pétante, il fallait vraiment avoir tout de prêt. Pour prendre encore plus d'avance, je voulais aller à l'école dès maintenant pour éviter de devoir courir après, surtout que ma mère devait faire des échographies et mon père ne pourra pas m'emmener à temps. 

C'était donc à pied que je me résolu à faire le chemin. Dans ce froid de canard, et avec la menace qui planait au dessus de ma tête, ma mère n'était absolument pas d'accord pour me laisser marcher seule dans la rue. Pourtant, elle n'avait pas trouvé d'autre solution, donc, elle allait s'en contenter. 

— T'es prête ? 

Mon père se tenait au pas de ma porte, sa tasse de café en main, à moitié réveillé. 

— Vous étiez pas obligé de vous réveillez aussi tôt, tu sais ? ris-je. 

— On va pas te voir pendant trois jours, il faut bien qu'on dise au revoir à notre petite fille. 

Je secouai légèrement la tête et souris face à son comportement. 

— Papa, je m'en vais pour quelques jours et c'est supervisé avec des professeurs. Ne t'en fais pas j'irais bien. Et dis à maman de déstresser, je serais en sécurité pendant le trajet jusqu'à l'école. Je le fais toujours. 

Soudain, la mine de mon père changea complètement, il fixa le sol et fit une moue qui voulait dire "ne m'en veux pas". Qu'est-ce qui se tramait encore ? 

— Oui, à propos de ça... commença-t-il, avant que quelqu'un ne vienne sonner à la porte. 

— Mais qui ça peut être à cinq heures du mat' ? grognai-je. 

Mon père murmura des trucs inaudibles avant de se gratouiller l'arrière de l'oreille et en fuyant mon regard. 

— Rejoins-nous en bas quand tu as fini. 

— Euh... d'accord. 

Mais qu'est-ce qu'il se tramait enfin ? J'en étais sûre que quelque chose allait faire basculer se semblant de calme qu'il y avait dans ma vie. A la vitesse de l'éclair, mon gros sac à dos était fait contenant tout le nécessaire de survie, à savoir des livres, de la musique et de la nourriture et des vêtements bien chaud. 

Je dévalais les escaliers, prête à aller déjeuner quand je tombais des nues. Mon corps entier se crispa, l'air ne passait plus dans mes poumons, mais ce sentiment s'en alla plus rapidement que je ne l'avais pensé. 

C'est sûr que voir Jonathan en cours ou à l'autre bout de la rue me faisait tout drôle, mais le voir chez moi était autre chose. Et c'était précisément ce que je me demandais. 

Qu'est-ce qu'il faisait là ? 

— Bonjour.

Il le dit sur un ton simple mais d'une manière plutôt chaleureuse et douce. On aurait dit qu'il venait juste de se réveiller et ces yeux encore un peu rouge et ses cheveux ébouriffés le rendait encore plus craquant que d'habitude.  

— Salut... dis-je peu assurée. 

Il avait beau être mignon à en mourir, je ne savais toujours pas pourquoi il était là. Mais bizarrement, plutôt que de ressentir de l'hostilité, je me sentais... normale. Je ne dirais pas à l'aise et je n'engagerais pas de conversation avec lui, mais il n'y avait plus cette animosité de ma part. Et puis si Leiw me regardait de là où il était, il pouvait voir que c'était Jonathan qui me collait aux basques et non l'inverse. 

Ce jeu mental par lequel je passais à chaque fois que je le voyais devenait épuisant. 

— Kalie, bien dormi ? fit ma mère avec un ton innocent. 

Oui, maman, prétends que Jonathan n'est pas ici, je ne le remarquerai pas. 

— Super, rétorquai-je en me versant une tasse de café. Qu'est-ce qu'il...

— Fait ici ? termina Jonathan à ma place. Ta mère ma demandé de t'emmener, histoire de... enfin si tu ne veux pas.

— Bien sûr que si elle veut, affirma ma mère. Comme ça le trajet est moins ennuyant à deux, et puis Kalie, tu devrais voir comment Jonathan conduit, ça sera ton tour bientôt, rigola-t-elle. 

Je ris faussement, essayant d'esquisser un sourire à l'égard de Jonathan. Il semblait plus gêné que moi pour une fois. Après quelques minutes, j'avais ingurgité mon déjeuner et un silence un peu pesant régnait. La dernière fois, j'avais dit des paroles affreuses à Jo, mais je ne m'étais jamais sincèrement excusée, et on n'en avait plus reparlé avec mes parents. 

— Prête ? questionna Jonathan. 

— C'est parti.

Nous sortions après quelques embrassades et je grimpais dans la voiture de Jonathan avant de démarrer direction l'école. Ce trajet allait être d'enfer. 

***

— Tiens, oublie pas de mettre ta ceinture, signala-t-il  en faisant tourner le moteur histoire de le réchauffer. 

Je m'exécutai essayant de l'agripper, mais décidément, elle s'était gelée. Je tirai à plusieurs reprises, mais quelque chose devait coincer. 

— Attends, je vais...

Sans crier gars, Jonathan se pencha jusqu'à ma place pour m'aider. Je tournai ma tête au même moment et nos visages n'étaient plus qu'à quelques centimètres l'un de l'autre. C'était après s'être rendu compte de ce qu'il venait de faire qu'il me regarda dans les yeux, aussi gêné que moi, pourtant personne ne dit rien. 

Je restais là, en train de le fixer dans les yeux, mes joues sûrement cramoisies. Pour une fois, je n'étais pas en colère, le repousser ne me traversa même pas l'esprit. Est-ce que je jouais avec le feu ? Sans doute. 

Il restait dans cette position quelques instants, le temps de bien s'imprégner de mon visage et moi du siens. Mes yeux ne pouvaient pas s'empêcher de se balader sur son visage et de rester figés sur ses lèvres qui m'appelaient. Soudain, je le sentais encore un peu plus proche, comme s'il s'était rapproché de moi, mais l'instant d'après, il se résigna, se replaçant sur son siège. 

Il avait beau faire moins cinq degrés dehors, je sentais une chaleur extrême dans l'habitacle. Je râclai ma gorge, oubliant ce qu'il venait de se passer avant de tirer plus sévèrement sur la ceinture et cette fois-ci, elle m'obéit. 

Coup de pouce du destin ou pas, ce jeu allait vite commencer à m'agacer.  

Après quelques minutes, il démarra la voiture et le trajet se fit dans un silence pesant. Cela me faisait rire. J'avais l'impression que le Jonathan qui faisait les courses de voitures et qui se comportait comme un clown datait d'il y a des années. Bizarrement, il était plus mâture, plus posé, plus... lui-même. Le départ de sa mère (ça aussi on aurait dit que c'était il y a des lustres) l'avait encore plus traumatisé que ce que j'aurais pensé. 

— Tu as des nouvelles pour ton agression ? Est-ce qu'ils ont attrapé celui qui avait fait cela ? 

— Non, malheureusement... répondis-je même si sa soudaine prise de parole me surpris. Tu connais la police, ils sont même pas capable de trouver un étudiant. 

— Tu penses que c'est un élève du lycée ? 

— Peut-être, mentis-je. Après tout, il aurait pu se fondre dans la masse. 

— Tu regardes trop de séries sur Netflix, toi, plaisanta-t-il. 

Nous rigolions ensemble, ce qui me surpris un peu. Jamais j'aurais pensé rire avec Jonathan, et puis est-ce que ça voulait dire que je faisais une terrible erreur ? A force de tenter le diable, j'allais peut-être faire une grosse connerie. 

— Je suis désolé, lâcha-t-il. Tu méritais pas ça, avec tout ce que tu as vécu. Et puis désolé pour la fois dans le Diner, c'était stupide de ma part, je ne sais même pas ce qui m'a pris. 

— C'est bon, Jo, ne t'en fais pas, le rassurai-je en remarquant la gaffe que je venais de faire. 

— Jo ? rit-il. Jamais tu ne m'avais appelé comme ça. 

Oui et bien je suis débile.

— Ton prénom est beaucoup trop long dans tous les cas, plaisantai-je. 

— Touché. 

Après quelques minutes, nous arrivions sur le parking du lycée, éloignés de la foule. Jonathan avait sans doute du se dire que nous voir tous les deux pourraient créer des rumeurs. Et si Lucas nous voyais encore ensemble, ça n'allait pas être jolie à voir.

— Merci pour la balade, le remerciai-je. 

— Pas de soucis, sourit-il mincement. 

Un énième silence s'installa dans la voiture, sans que personne ne parle. Pourquoi est-ce que je ne partais pas en vitesse comme d'habitude ? Je n'en savais rien. Pourquoi est-ce qu'une boule se formait dans mon ventre au fur et à mesure ? 

Trop de questions, trop peu de réponses. 

— Kalie, je peux te poser une question ? 

— Je t'écoute, dis-je ma gorge sèche. 

— Est-ce que tu...

Avant même de pouvoir finir sa phrase, un gros "boum" se fit entendre sur la vitre. En état de panique, il me fallut quelque temps avant de voir qu'une personne avait frappé sur le vitre de la voiture comme un fou furieux et cette personne n'était autre que Justin. 

— Je t'ai bien eu mon pote ! s'esclaffa-t-il derrière la vitre. Mais... y a quelqu'un dans la voiture ? Kalie ?! 

OK, c'était mon signal pour me barrer en vitesse. J'ouvris la portière et salua Justin rapidement avant de m'éclipser. Bordel, jamais je n'avais détesté Justin à ce point, et puis c'était quoi la question de Jonathan ? 

Sans me retourner, je marchais direction les cars, dans l'espoir de pouvoir mettre en place mon plan. 

Cette journée n'était pas seulement la journée camping et détente, mais bien plus. J'allais enfin savoir si Sydney était bien celle que je pensais, si c'était elle qui avait brisé mon couple. Et pour ça j'aurais besoin de toute l'aide que je pouvais avoir. 

***

— Oubliez pas, le camp Harlow est très large et se situe sur les montagnes plutôt dangereuses. Vous avez interdiction de vous aventurer seuls dans ces zones. Et puis surtout, nous ne savons pas si quelqu'un de dangereux se trouve dans l'enceinte de l'établissement, ou même pire, dans des salles de classe. L'incident s'étant produit récemment à une de vos camarades, nous vous demandons d'être bienveillants les uns envers les autres et d'ouvrir l'œil.

Le speech du proviseur lui-même avait raisonné dans les oreilles de tous les élèves. Sa voix dure et sévère aidait à produire cet effet. Mais je n'étais pas stupide, cette élève en question, c'était moi, et les regards posés sur mon visage signifiaient plusieurs choses à la fois. Certains étaient inquiets, d'autres juste curieux. 

Certains parents n'avaient pas acceptés que leurs enfants fassent cette sortie avec tous les évènements récents, ce qui avaient vidés les bus conséquemment. Mais les trois cars étaient tout de même bien bruyants et le trajet allait être long. 

Leila, assise à côté de moi s'était déjà endormie, les yeux cernés. La dispute avec Oliver devait être vraiment dure, puisqu'ils ne s'étaient même pas adressés un mot depuis une semaine. Chloé et Oliver, assis juste devant nous, papotaient de tout et de rien pendant que moi, je cherchais du regard Sydney et bingo elle se trouvait devant à ma droite assise à côté de Justin. 

Jonathan et Victoria, eux, dormaient paisiblement juste derrière moi. Je les avais vu en montant dans le car et oui, la jalousie résidait toujours en moi. Partira-t-elle un jour ? 

Lucas lui était introuvable. Il devait se trouver dans un autre car. On avait parlé lui et moi, comme ce qu'on avait prévu, mais au final, j'avais l'impression de lui faire plus de mal que de bien. Il s'attendait à ce que je lui donne une seconde chance, mais quand je lui avais fait part de l'inverse, il s'était renfermé. 

D'un autre côté, j'ai été peut-être trop gentille avec lui. Il n'avait pas hésité a cacher l'identité de la fille mystère même après mon accident. En fait, ça l'arrangeait plutôt bien. Le truc c'était que j'avais été trop bête pour le voir. Je ne pourrais pas être en colère contre lui puisque je n'avais rien vécu avec "ce" Lucas. Mais jouer à la fille débile qui, pour oublier quelqu'un se jette dans les bras d'un autre... ce n'était pas moi. Et cette nuit là, je m'étais perdue. 

Posant ma tête contre la vitre, je laissais mes pensées vagabonder dans ma tête sans essayer de les arrêter. Et puis doucement, je fermis les yeux et rattrapai le sommeil dont j'avais désespérément besoin. 

***

— N'oubliez pas, les activités commencent dans quelques heures. Mais avant, on fera un tour du camp et on grignotera un petit truc ! informa notre professeur principal. Prenez place dans vos chambres, pas plus de six personnes par bungalows !

Leila, Chloé et moi échangions un regard avant de nous diriger vers Victoria et Sydney, un peu perdue. 

— Salut ! Vous voulez venir dans notre bungalow ? proposa Leila un sourire faux aux lèvres. 

— Bien sûr ! On allait vous proposer, s'exclama Vic. 

— Parfait, fis-je en lançant des regards à Sydney qui sourit gentiment. 

Notre amitié remontait à tellement longtemps, c'était tellement lointain que parfois je me dis est-ce que je n'avais pas rêvé de tout cela. Nous nous dirigions sans plus attendre vers notre cabine avant d'y déposer nos affaires. Le parquet fraîchement ciré, la fraîcheur des draps et la propreté des lieux me donnaient envie de me jeter dans le lit et de ne plus jamais me réveiller. 

L'agencement du bungalow était également très épuré mais chaleureux. Trois lits à deux étages étaient mis aux quatre coins de la chambre et je me précipitai vers le lieu le plus haut donnant sur le velux. Entendre et voir la pluie tomber sur la vitre m'apaisait moi et mes pensées. 

— Wow, cet endroit est génial ! s'extasia Chloé. 

— Mais tellement ! renchérit Leila, je veux rester ici à jamais. 

J'inspectais les lieux, notamment les toilettes et m'étonnai à voir à quel point elle était spacieuse et tout aussi chaleureuse. Pas de baignoire, mais une douche un peu à l'italienne plutôt grande qui faisait tout aussi bien l'affaire. 

De retour dans la pièce principale, Leila, Chloé et Sydney étaient déjà avachi sur leur lit, sur le téléphone à la recherche d'une connexion internet. 

— Où est passé Victoria ? demandai-je.

— Elle est partie voir son copain chéri, comme d'habitude. 

Bien sûr...

Bon, il était temps de mettre le plan en marche. Je sortis mon téléphone et me mis à faire semblant d'avoir un dilemme pour un achat. Leila et Chloé entrèrent dans mon jeu, mais rien n'était garanti. Je ne leur avais même pas expliqué pourquoi je pensais que Sydney était la coupable, enfin j'avais menti plutôt.

— Non, je préfère l'autre, fit Chloé. 

— T'es sérieuse ? T'as aucun goût ! Tiens, Sydney, viens voir, on a besoin de ton avis, interpella Leila. 

— Ah pourquoi ? 

— J'hésite entre ces deux paires de boucles d'oreilles, t'en dis quoi ? 

Le temps qu'elle analyse les deux paires, l'attente était interminable. Nous avions toutes les trois l'impression de faire partie d'un film 007 alors qu'en réalité notre plan était simple et peu impressionnant, mais c'était tout de même drôle de voir cette vraie cohésion de groupe sans cette gêne entre moi et Chloé. Et puis, elles étaient tout aussi pressées que moi de voir le résultat. 

— Oh ! J'ai les mêmes paires !

Ces simples petits mots me firent l'effet d'une flèche dans le cœur. Non seulement, Sydney était cruelle ans l'autre vie, mais également dans celle-ci. En premier Jonathan et puis moi... est-ce que c'était son destin d'être briseuse de couple ? 

— Ah bon ? répondis-je les dents serrés. 

Mais avant de pouvoir m'énerver, elle me coupa la parole. 

— Oui, malheureusement Vic les a perdus. Pouf, volatilisé. Mais, achète-les ! Elles t'iront comme un gant !

Nous échangions un regard Chloé, Leila et moi qui voulait dire la même chose. Il me fallu quelque minute pour comprendre ce que Sydney voulait dire. 

— Attends, tu veux dire que Victoria était la dernière personne à les avoir porté ?

— Euh... Ouais ? Enfin, elle a perdu une boucle et je lui ai dit de garder l'autre. Pourquoi ? 

Alors la fille mystère était Victoria ?

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Ce chapitre m'a pris du temps à écrire ouhlà et si vous voyez des fautes, désolée ! Je corrige pas mes chapitres pour le moment. Nous sommes au chapitre 30 OMG je fais même pas attention ! J'espère que l'aventure vous plaît, encore 22 chapitres à venir ! Et ça va chauffer à partir de maintenant !

Gros bisous <3 

Krystal ~

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