XX. Attirance
Une personne invisible.
Une personne invisible ?
La flèche atterrit pile au milieu de la cible circulaire située à plusieurs mètres de moi.
— Bravo Kalie ! C'était beau ça, me dit le professeur.
Je souris maigrement avant de poser l'arc et les protections pour les mains. Le coach me félicitait une dernière fois me disant que mes progrès était fulgurant et qu'il était fier de me voir venir après ce qu'il s'était passé. Je le remerciai et me dirigeai vers le vestiaire avant d'enfiler mes habits de ville puis direction boulot.
J'avais reçu mon emploi du temps et je travaillais les mardis et samedis. Il me fallait ce job, après la bombe d'hier, je ne savais plus quoi faire ni penser. Est-ce que j'avais réussi à avoir les idées claires ne serait-ce qu'une seconde ? Mon mal de crâne faisait partie intégrante de ma vie, je le supportai plus qu'autre chose.
C'était impossible que j'avais imaginé cette bagarre, je ne m'étais pas frappée toute seule, mais j'ai bien vu la personne partir dans l'angle de la sortie de l'infirmerie. Ils avaient tout revérifié, tout analysé, aucune séquence n'a été supprimée ou modifiée. Mais alors où est passé cette personne ? Qui était-ce ? Est-ce qu'elle était humaine au moins ? Ou un autre tour de passe-passe d'un petit fantôme ?
Un frisson parcouru mon échine à la seule pensée de revoir ce monstre terrifiant qui avait le visage de Jonathan. En pensant à lui, je ne l'avais pas revu depuis l'accident. Il devait bien s'amuser avec Victoria, il n'avait pas besoin de moi et elle était toujours là pour me le faire comprendre.
D'un côté, j'adorais plonger dans mes pensées, c'était le seul endroit où j'avais encore des souvenirs de lui et moi ensemble.
Arrivée au travail, je pénétrai dans le Diner sous le visage étonné d'Ashley. Mon cœur loupa un battement croyant que j'étais en retard, mais quand j'atteignis le comptoir, elle me prit à part après avoir donné une commande aux cuisiniers.
— Je suis en retard ? C'était pas dix-huit heures ? paniquai-je.
— Mais Kalie, tu n'as pas reçu mon message ?
— Lequel ? Non, mon téléphone a du être en silencieux.
— Kalie, tu peux rester te reposer chez toi, c'est cruel de te faire travailler après ce qu'il s'est passé. Les gens parlent tu sais ?
— Ashley... ne me traite pas comme les autres, je vais bien, regarde ma blessure cicatrise bien non ? dis-je en souriant.
Elle rit légèrement et me regarda tendrement.
— Bon d'accord, mais tu te sens mal, tu me le dis tout de suite, d'accord ? Dans tous les cas, je pense prendre quelqu'un en plus pour travailler, je tenais à te prévenir.
— Pas de soucis, mais je vais te montrer mon efficacité, tu seras épatée.
Elle rit et me dit d'aller me changer. Une fois l'uniforme mit, autrement dit une chemise rayée verticalement en noir et blanc et un pantalon noir, j'enfilais le tablier noir et des chaussures adéquates.
Pendant au moins une heure, Ashley me montrait le fonctionnement. Je devais prendre les commandes, sortir les poubelles, faire la vaisselle, nettoyer les tables et le comptoir. Je finissais à vingt et une heure et le Diner restait encore ouvert jusqu'à minuit, donc je ne me chargeais pas de la fermeture.
Après avoir compris les bases, je pris les commandes de plusieurs personnes et tout se passait super bien, Ashley était même étonnée de la façon comment j'avais tout assimilé. Rien de bien compliqué, du moment qu'on ne me demandait pas de faire la cuisine. Après encore une heure, je ne sentais plus mes pieds, je marchais de droite à gauche et c'était très épuisant, mais gratifiant. Je ne pensais pas à un tueur mystère, aux visions mystères, pratiquement à toutes les choses bizarres qui se passaient dans ma vie.
Et surtout, à lui.
Alors que je nettoyais le comptoir, je me maudis moi-même en apercevant qui venait de rentrer au Diner. J'étais obligée d'ouvrir ma grande bouche ? Je levai les yeux au ciel maudissant quiconque qui me jouait ces mauvais tours. Après avoir été trop en "contact" avec Jonathan, j'ai cru que j'allais me réveiller dans mon ancienne vie, mais rien.
Du moment que je n'engageais aucune conversation, je ne risquai rien. Mais si on me jetait des visions horrifiques à tout bout de champ et me mettait dans des "coïncidences" improbables avec Jonathan, je n'allais pas jouer le jeu plus longtemps.
Ils étaient tous réunis. Jonathan, Jason, Justin, Drake, Victoria et Sydney.
Le scooby-gang réunit. Je déglutis les voyant s'installer. Il fallait prendre cette commande comme toutes les autres, rien de bien compliqué. Je fermais les yeux un instant avant de mettre mon masque professionnel. Faire semblant, Kalie, tu peux le faire.
— Bonsoir, je vais prendre votre commande, souris-je, normalement.
Ils levèrent les yeux vers moi, tous surpris de me voir ici. Surtout Jonathan. Je pus l'apercevoir déglutir et prendre nerveusement le menu entre les mains. Victoria elle, s'inquiétait.
— Kalie ? Mais qu'est-ce que tu fais là ?
— Je travail ici, dis-je en montrant mon badge.
Drake siffla et me regarda de haut en bas.
— Franchement, pour quelqu'un qui s'est presque fait tuer-
— Drake ! crièrent-ils tous en chœur.
Comme dans mes souvenirs, lui.
— Désolée, il est vraiment pénible, mais il a raison, c'est courageux de venir travailler après ce qu'il t'ai arrivé, fit Sydney.
Une vague de nostalgie me submergea. Elle m'avait trahi, mais elle semblait être une bonne personne maintenant. Du moins, je l'espérai pour elle.
— Merci, Sydney. Bon, je vais prendre votre commande.
— Je sais ce que je vais prendre, commença Vic, un milshake à la banane et une gaufre. C'est une tuerie Syd, tu devrais goûter !
— Non, elle n'aime pas la banane.
C'était sorti tout seul, un mécanisme de langage, mais ça avait l'air très suspect. Sydney me regardait surprise, tout le groupe me regardait comme ça d'ailleurs.
— Euh, c'est marqué sur mon visage ? s'étonna-t-elle.
Je rigolai nerveusement avant de racler ma gorge.
— J'ai du l'entendre de quelqu'un, rigolai-je.
Pendant un court instant, les yeux de Jonathan me scrutait. Son regard passa de moi à Sydney avant de terminer par me jauger de haut en bas. Je détestais quand il m'analysait avec un simple regard, c'était perturbant. Et puis pourquoi est-ce que j'avais l'impression qu'il se posait des questions ?
Après qu'ils avaient tous passé leurs commandes, je donnais la feuille au cuisinier et tournai une dernière fois ma tête vers le groupe et croisait son regard.
Maintenant, je voulais partir.
***
— Bon travail Kalie, tu as bien géré la clientèle. Le mardi c'est moins complexe que le samedi, je veux te voir d'attaque ! m'encouragea Ashley.
— Tu peux compter sur moi ! dis-je en nouant le dernier sac poubelle à jeter.
— OK, tu jettes les sacs et tu peux rentrer, repose-toi bien !
— Merci beaucoup, pour tout.
— C'est normal, sourit-elle.
Je portais à deux mains les sac et ouvris la porte grâce à mon épaule et instantanément l'air frais de la nuit me rafraîchi. Après avoir bouger comme pas possible, j'allais être heureuse de marcher pendant un moment, mais je me souvenais que mon garde du corps, en d'autre terme, Lucas, était mon chauffeur attitré. Il devait déjà être dans le parking à m'attendre.
Il y avait toujours cette tension entre nous. Je n'avais pas évoqué le baiser d'anniversaire ni l'histoire de l'hôtel qui m'a l'air d'être bien lointaine avec cette tentative de meurtre. J'avais l'impression que je me mettais dans des situations compliquées sans en ressortir et je replongeais dans une autre situation complexe. C'était un cercle vicieux sans fin.
Mon attention fut attiré par du bruit juste à ma droite et en tournant la tête, le groupe de Jonathan était là. Encore et toujours.
Cette fois-ci, ils fumaient tous, c'était pas nouveau. Mais sérieusement ? Pile au moment où je sors les poubelles ?
Tu parles.
Alors qu'ils écrasaient leur mégot par terre et s'en allaient, Jonathan tourna sa tête vers ma direction et me vit au dernier moment. Moi qui voulais passer inaperçue c'était raté. Il fit signe aux autres qu'il les rejoindrait avant de venir vers moi.
Ne panique pas.
Ne panique pas.
Ne panique pas.
Il était à quelques mètres maintenant.
OK, je panique.
— Kalie ?
Non, c'est pas moi, au revoir.
Je gardais les yeux rivés sur les sacs poubelles, en train de faire semblant de les enfoncer dans la benne à ordures.
— Kalie, si tu continues d'enfoncer ces sacs, ils vont atteindre le sol.
Son humour était toujours intacte. Je lâchai les ordures et me tournai vers lui. Allez, Kalie, courage.
— Tu voulais ? demandai-je le plus normalement possible.
— Comment ça va ? Ton accident je veux dire.
— Très bien, comme tu peux le voir.
Il hocha doucement la tête, gêné de cette situation. Crois-moi Jonathan, je tiens à peine debout aussi. Un silence prit place avant qu'il inspire profondément et expire.
— Kalie, je veux parler de ce qu'il s'est passé à l'hôtel. Qu'est-ce qu'il t'ai arrivé là-bas ?
— Jonathan, pas maintenant. Je ne veux pas avoir cette conversation avec toi, dis-je en voulant rentrer dans le Diner, mais il m'en empêcha.
— Pourquoi tu te comportes comme ça avec moi ? A chaque fois que je te poses une question, tu te défiles ! s'emporta-t-il
— Arrête de dire n'importe quoi, soupirai-je.
— Kalie, tu crois que je ne t'observe pas ? dit-il plus calmement. Depuis le jour où tu es revenue au lycée après ton accident de voiture, tu me traites comme un moins que rien. Tu m'évites, m'insulte devant tes parents, m'ignore complètement et tout ça pour quoi ?
Je levai les yeux au ciel et passait une main sur mon front, épuisée. Cette conversation ne pouvait pas avoir lieu maintenant. Ma gorge se serrait, une boule énorme se formait dans mon ventre et les larmes commençaient à monter.
— Jonathan, laisse-moi passer.
— Non, dit-il durement en me tenant le bras, m'empêchant d'ouvrir la porte.
Il n'était qu'à quelques centimètres de moi, je pouvais sentir son souffle sur ma peau. Je détournai le regard et fixai le sol. Je pris une grande inspiration puis essayais de calmer mon cœur.
— Jonathan, tu...
— Je t'ai aidé la fois où tu t'étais évanouie dans le bureau du conseil. C'était moi qui t'ai emmené à l'infirmerie.
J'écarquillai les yeux alors qu'il continuait :
— J'aide ma mère a préparer des repas pour ton rétablissement, je t'ai aidé la fois à l'hôtel, la fois dans le car scolaire pour que tu me traites de cette manière ? chuchota-t-il. Pourquoi ? Pourquoi est-ce que tu me traites exactement comme les ordures que tu viens de jeter ?
Je tournai la tête vers lui, le cœur aux bords de lèvres. Il venait de prononcer ces mots sur un ton si triste, si désespéré que je me sentis tout de suite coupable. Je pouvais lire de l'incompréhension dans ses yeux et de la peine.
— Mais la vraie question que je me pose c'est... pourquoi ça me fait tant d'effets ?
Ses yeux se baladaient sur mon visage tout entier avant de fixer mes lèvres. Incapable de me contrôler, je fixai les siennes aussi. Et alors que nos visages s'approchèrent dangereusement, je repris conscience de ce que je faisais et m'écartais immédiatement.
Mais alors que je m'écartai, mes yeux atterrirent sur la personne qu'il ne fallait absolument pas. Il était à l'entrée de la petite ruelle, debout sans faire le moindre bruit.
— Lucas...
***
Le trajet se passait dans le plus grand des silences. Lucas ne disait pas un mot mais je pouvais le voir serrer le volant à plusieurs reprises. Sa colère se sentait dans l'atmosphère, ou du moins sa jalousie.
Me battre avec lui n'était pas une option, je voulais juste mettre ce mauvais épisode de côté. Mais connaissant Lucas, il en ferait tout un plat. Il tourna à droite, un peu trop vite à mon goût avant de se garer près de la maison.
Je me faufilai rapidement dans cette dernière, ignorant Lucas qui m'appelait depuis tout à l'heure. Le spectacle allait commencer. Heureusement que Chloé était chez une amie et Dorothée travaillait.
— Kalie ! Kalie, je te parle !
J'ouvris la porte de ma chambre et balançai mes affaires sur le bureau avant de prendre ma tête entre mes mains.
— Lucas, avant que tu dises quoique ce soit, je n'allais pas...
— Quoi ? Embrasser un mec qui d'ailleurs a une copine ? s'énerva-t-il. Si, Kalie, c'est exactement ce que tu allais faire si tu ne m'avais pas vu.
Je plissai légèrement les yeux.
— Lucas, j'ai un self-control d'accord ? Je me suis ressaisis toute seule.
— Self-control ? Vraiment ? T'as peut-être oublié l'anniversaire de Carla !
Il continuait à me dire à quel point j'étais irresponsable et trop naive mais trop c'est trop. Il n'avait aucun droit de me dire quoi faire ni quoi dire. Je bouillonnai de l'intérieur avant d'imploser complètement.
— Excuse-moi, Lucas, mais tu n'as aucun droit de me dire des choses pareilles ! criai-je. Tu crois vraiment que Leila ne m'a pas dit ce que tu me cachais depuis mon accident ? Je sais tout Lucas ! articulai-je alors qu'il devint blanc et muet. Je sais que tu m'as trompé avec une fille et que tu as refusé de me dire son identité. Alors c'est qui l'irresponsable et le connard dans cette histoire ? Avant de me faire la morale, tu devrais revoir tes priorités.
— Kalie, je...
— Tu quoi ? le coupai-je. D'accord. Tu veux me prouver que tu es une meilleure personne que moi ? Dis-moi qui est cette mystérieuse fille ?
— Je...
Il se tut un instant avant de soupirer.
— Je ne peux pas.
Je ris faussement à ce qu'il venait de dire avant que ma main vienne s'écraser sur sa joue.
— Dégage, je ne veux plus te voir, sifflai-je entre mes dents.
Il fit l'opposé et se rapprocha de moi.
— Juste-
— Non ! Je ne veux plus t'entendre, sors !
— Je ne peux pas ! Je ne peux pas te laisser comme ça, Kalie ! Bon sang, tu ne vois pas que je t'aime toujours ?
— M'aimer ? Tu m'aimes ? Tu as pensé à moi quand tu m'as trompé avec une autre qui d'ailleurs est tellement importante que tu ne peux même pas me dire qui c'était ? Mon amnésie doit vraiment t'être bénéfique pas vrai ?
— Non ! C'est faux ! Kalie, même après ce que j'ai fais, tu n'as pas pu m'oublier et moi non plus. On était censé...
— Lucas, il n'y a plus de nous. Je ne suis plus la fille que tu as connu et qui est tombée amoureuse de toi. Jamais cette Kalie reviendra ! gueulai-je essoufflée. Mets-toi ça dans le crâne, si tu crois qu'il y aura quoique ce soit entre nous, tu te-
Je ne pus finir ma phrase puisque ses lèvres sur les miennes m'en empêchaient. Il m'avait saisit par les épaules et avait rapproché nos corps si près l'un de l'autre, que je pouvais sentir son cœur battre. D'un coup sec, je le repoussais avant de le gifler une deuxième fois.
Mais cette fois-ci, la frustration en moi reprit son pouvoir. Toutes les choses qui s'étaient produites se mêlèrent dans ma tête. Mon esprit cherchait une échappatoire, un endroit où je pouvais me lâcher et bizarrement, mon corps me criait de faire cette chose interdite.
Cette chose que j'allais forcément regretter plus tard. Mais j'en avais envie. Est-ce que c'était à cause de Jonathan et de ce qu'il avait tenté de faire ? Etait-ce parce que je me sentais frustrée de ne pas pouvoir assouvir mes désirs ? Je n'en savais rien, mais je savais une chose :
J'en avais marre de réfléchir.
Sans crier gars, je saisis Lucas par les épaules et l'attirai contre moi pour pouvoir l'embrasser de nouveau et il se montrait très réceptif. Cette fois-ci, il passa sa langue dans ma bouche et je l'acceptai en lui rendant son baiser plus ardemment. Sa main se glissa sous mon pull et parcouru mon dos ce qui me fit tressaillir.
Il me colla contre le bureau et commença à m'enlever mon haut et je fis de même avec le sien. Son torse contre ma poitrine alimentait encore plus mon désir et sa bouche qui parcouru mon cou m'arracha un gémissement de plaisir. Je saisis sa tête et replaçai encore mes lèvres sur les siennes avant de l'embrasser encore plus passionnément qu'avant. Je tirais ces cheveux en arrière ce qui le fit grogner. Quand ses mains se baladèrent sur mon jean, mon corps entier se mit à trembler.
Il rompit le baiser avant de me regarder dans les yeux et de chuchoter mon prénom. De mes pouces, je caressais ses lèvres avant de m'y replonger. Et pourtant, quand il avait prononcé mon prénom, j'avais vu Jonathan.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top