III. Nouvelle venue

- Kalie ? Tu as choisi ?

Ma mère debout devant moi sa tablette dans les mains me demandait de choisir entre une robe bleue et une de couleur rouge. Mes oreilles n'écoutaient qu'à moitié ce qu'elle disait, le choix de la robe m'importait peu, mais elle semblait attendre une réponse alors je pointai du doigt la rouge.

Septique, elle fit une moue puis pencha légèrement sa tête sur le côté.

- Je ne sais pas... tu crois qu'elle m'irait ?

- Oui, maman.

Elle posa l'appareil sur la table puis soupira un bon coup avant de s'asseoir sur la chaise à côté de mon lit d'hôpital. Ses cheveux bruns étaient attachés en chignon, laissant apparaître quelques cheveux blancs, mais cela n'enlevait en rien sa beauté naturelle. Malgré ses traits fatigués, elle essayait au mieux d'étirer ses lèvres pour m'adresser un sourire.

- Désolé ma chérie si je t'ennuie, je voulais te changer les idées. Tout n'a pas été facile, ces derniers jours, et puis on attend encore le verdict des médecins. Rien ne te revient en mémoire ?

Je secouai la tête. C'était le trou noir.

- Je vois... fit-elle en regardant le sol, ses sourcils froncés. Le choc a dû être assez fort mais espérons que ce ne soit pas sérieux.

J'avais l'envie terrible de lui poser une question qui me brûlait les lèvres. Non, en réalité, j'en avais une centaine. Ma soudaine perte de mémoire n'était pas une surprise, je n'étais littéralement plus la même, je venais d'un univers qui n'existait plus et à cause de ça, une partie de moi se sentait brisée, vide, sans la moindre émotion. Le choc n'y était pas pour rien non plus.

- Où était papa avant mon accident ? demandai-je doucement.

Ma mère, surprise, se redressa lentement et me sourit légèrement.

- Dans la maison Kalie, dit-elle en fronçant encore plus les sourcils. Il revenait d'une journée de travail épuisante puis avant dîner, tu es partie courir.

- Il n'était donc plus en déplacement ?

- En déplacement ? questionna ma mère étonnée par mes questions à qui les réponses paraissaient évidentes. Non ma chérie, ton père a obtenu une promotion il y a quelques semaines de cela, il a maintenant un poste fixe qui lui permet d'être plus souvent à la maison. Mais ça tu devrais le savoir, c'était bien avant l'accident...

Je hochai la tête lentement en l'écoutant attentivement un léger sourire sur les lèvres. Mes parents étaient vraiment réunis et moi avec eux. D'un coup, comme si mes pensées me rappelaient à l'ordre, je me souvenais d'un détail : Anna, la mère de Jonathan, était-elle de retour ? Enfin, était-elle restée ? Je me devais de poser la question subtilement, sinon j'allais passer pour une folle, même si je partais plutôt bien sur ce chemin-là.

- Mon accident... les voisins ont-ils été alertés ? Je veux dire est-ce tout le quartier sait que c'est moi ?

- Dur de ne pas voir les ambulances dans notre quartier paisible. On t'a renversé assez près de l'entrée du quartier, du coup, je pense que oui le bruit a du courir, mais rien n'est ta faute Kalie, c'est ce fichu conducteur... il était au téléphone au moment de l'accident. Une chose est sûre, il n'aura plus son permis. Et dire que c'était une connaissance de ton père et un voisin assez gentil. Il n'aura plus mes cookies, c'est sûr.

- Tu fais des cookies maintenant ? demandai-je surprise, en oubliant le reste.

Ce détail me surprenait plus qu'il le devrait. Ma mère, même si elle était douée pour la cuisine, les pâtisseries ce n'étaient pas son truc. Et puis elle avait jamais le temps de faire des cookies avec son métier.

- J'en ai toujours fait ! Je m'ennuie un peu dans mes journées à vrai dire.

S'ennuyer ? Les patients manquaient à l'appel à l'hôpital ou quoi ? Jusqu'où s'étendait mon amnésie au juste ?

- Maman, tu n'as plus ton boulot d'infirmière ?

- Pardon ?

A peine avais-je eu le temps de répondre que quelqu'un toquait à la porte. Un homme, dans la trentaine environ, bruns aux yeux bleus, vêtu d'une blouse blanche avec un stéthoscope autour du cou et un dossier jaune se tenait sur le pas de la porte. Il avança puis nous salua en se présentant :

- Bonjour madame, Docteur Rodriguez, le médecin qui s'occupe du dossier de mademoiselle Cole.

Nous le saluions à notre tour puis il se tint en face de moi, ma mère s'étant levée de la chaise placée à ma gauche.

- Comment te sens-tu aujourd'hui Kalie ? interrogea-t-il d'une voix douce.

- Plutôt bien, même si mon corps me fait toujours mal. Je sens que je gagne des forces.

Il prit en compte ce que je disais en notant des petites choses sur un papier.

- D'accord, et au niveau de la tête ?

- Elle ne se souvient de rien, intervint ma mère, inquiète de mon état.

Elle avait tous les droits de l'être, ma mémoire avait subit un changement assez conséquent. Ma mère n'avait plus son job, mon père avait une promotion... combien de chose ont changé au juste ?

- C'est-à-dire ? demanda Docteur Rodriguez.

J'allais prendre la parole, mais ma mère me coupa dans mon élan.

- Elle n'arrive pas à se souvenir à quoi ressemblait sa vie avant l'accident. Ni la notre. Est-ce que c'est normal de ne rien se souvenir comme ça ? Elle ne se souvient plus de mon travail ni que mon mari a eu une promotion il y a deux semaines.

Le Docteur se racla la gorge. En consultant ses notes et en levant les sourcils il poursuit :

- Eh bien, il y a une anomalie dans le lobe frontal en effet. Ce n'est pas alarmant et la mémoire à long terme n'a pas l'air touchée, mais la façon dont vous me le dites ça m'a l'air d'être assez inquiétant. Néanmoins, restez calme, ce n'est peut-être que temporaire. Nous ferons plusieurs examens pour déterminer le degré de danger pour Kalie. En ce qui vous concerne mademoiselle, vous pourrez partir demain si vous vous sentez mieux. Vous devrez revenir régulièrement pour un suivi attentif.

Je hochai encore une fois la tête puis Docteur Rodriguez tourna les talons et sortit de la pièce nous laissant moi et ma mère seules. L'inquiétude émanait d'elle. Tout ça était dingue, comment tant de choses avaient pu changer ?

Ma mère s'approcha du côté droit de mon lit cachant les rayons du soleil qui passaient à travers les stores. Sa main sur la mienne, elle la serra fort tandis que son regard chaleureux me parcourait le visage.

- Pour répondre à ta question, fit ma mère, j'ai pris un congé pour mon boulot d'infirmière Kalie. Je n'étais plus apte à travailler comme ça et puis ton père avec sa promotion nous aident à subvenir à tous nos besoins. Et puis...

Elle se mordillait la lèvre inférieure et déglutit avant de se racler la gorge.

- Si tu ne te souviens plus de mon métier ni celui de ton père, tu ne dois pas te souvenir de ce que je t'ai dit il y a une semaine.

Intriguée, je haussai les sourcils et scrutai ma mère avec de gros yeux pour qu'elle crache le morceau. Qu'est-ce que je devais découvrir encore ?

Elle saisit ma main calmement et la posa doucement sur son ventre plat. Mes yeux s'écarquillèrent de plus en plus en la regardant faire puis à l'entente de ses mots :

- Tu vas être grande-sœur Kalie, sourit-elle.

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