CHAPITRE 5 (NV)

Kalie

Un mal de crâne. C'était tout ce que je ressentais, une douleur tellement vive qu'elle m'empêchait de faire le moindre mouvement. En m'efforçant à me lever, des courbatures me plaquèrent directement sur le lit. Mon corps était plus lourd que d'habitude et j'avais une terrible envie de vomir.

— Hé, ho, réveille-toi, je vais être en retard à l'école ! dit une petite voix masculine.

Une petite voix masculine ? Je me levai, en comptant sur le peu d'énergie qui me restait, et me forçai à ouvrir les yeux. La lumière du jour me transperça ces derniers ce qui me fit cligner des yeux plusieurs fois. Le garçon qui se tenait en face de moi était brun aux yeux bleus. Il était tout mignon et me semblait étrangement familier. Mais qu'est-ce qu'il faisait dans ma chambre ? C'était ça la vraie question.

— Qui es-tu ? Que fais-tu dans ma chambre ? dis-je, en essayant de garder mon calme.

Ma voix... elle était super grave, peut-être que j'avais attrapé un très gros rhume ?

Le petit garçon en question me regarda surpris et arqua un sourcil. Il s'approcha de moi et posa sa main sur mon front.

— Tu n'as pas de fièvre... si tu ne veux pas aller en cours dis-le, c'est bien plus simple Jo ! Même si ce n'est pas très mature.

Jo ? C'était quoi ce surnom débile ? On me surnommait Kal, Lilie, mais pas Jo... Alors que je reprenais mes esprits petit à petit, j'observais les alentours et c'était avec effroi que je me rendis compte que ce n'était pas ma chambre. Mais où est-ce que j'étais ?! Je commençais sérieusement à paniquer alors je me levai précipitamment de mon lit et c'était à ce moment-là que j'avais cru que j'allais m'évanouir. Mes jambes étaient beaucoup plus poilues que d'habitude ! Et mon corps était plus imposant, je me sentais lourde. Mes mains, mes pieds, mes bras, rien ne m'appartenait. Le garçon était toujours en train de me scruter l'air perdu.

— Quand t'auras décidé de redevenir mon grand-frère, tu me fais signe Jonathan, finit-il en sortant de ma chambre.

Grand-frère ? Jonathan ?! Mais bien sûr, ce petit garçon, c'était Damien, le frère de Jonathan ! Qu'est-ce qu'il faisait là ? Et c'était où exactement ce ? Je ne comprenais plus rien, mais je réussis finalement à faire un pas devant l'autre et les sensations qui me traversaient étaient bizarres avec toujours cette sensation de peser trente kilos de plus que d'habitude. Et c'était alors que je me vis dans le miroir accroché derrière le mur de la chambre, et là, je poussais un cri plus strident que n'importe quel bruit au monde.

*

Dites-moi que je rêve, dites-moi que je rêve, dites-moi que je rêve ! Non, rien de tout cela n'était réel, j'allai me lever tranquillement dans mon lit et tout redeviendra normal comme avant ! C'était en me donnant plusieurs baffes que je croyais que tout allait rentrer dans l'ordre, mais rien à faire, le miroir ne me renvoyait pas mon reflet. Il projetait tout sauf ça ! À la place je voyais le visage que je détestais le plus au monde. Ce n'est pas possible, pensai-je, mais Jonathan était un garçon, et un garçon n'avait pas la même physiologie d'une fille, alors ça voulait dire que j'ai un...

— NON ! criai-je.

C'était à ce moment-là que Damien entra dans la chambre, un peu perdu par ma réaction matinale peu commune. Il était là, devant moi et cette créature était mon frère. Bordel ! Je ne pouvais rien croire, c'était absurde. Je sortais en trombe de cet endroit, qui se nommait chambre, mais qui ressemblait à un dépotoir, et examinais les alentours.

— Mais on n'a pas changé la déco... Je serais vraiment chez lui ?! dis-je en m'ébouriffant les cheveux. OK, Kalie, respire, respire... tout va bien, dis-je en accentuant ces trois derniers mots.

— Papa ! Jonathan fait sa crise d'hystérie, je crois qu'il ne va pas très bien.

Ledit père ne répondit pas à l'appel de son fils. Quant à moi, je descendis et examinai encore une fois cette demeure étrangement familière. Je vis sur le canapé un homme d'une quarantaine d'années, en train de se réveiller. Je vais près de lui et cette fois-ci, il n'y avait plus aucun doute, j'étais bien chez les Byler.

— Monsieur Byler... murmurai-je.

Il se releva totalement et écarquilla les yeux. Quoi ? Il savait que je n'étais pas son fils ?

— Jonathan ? Tu n'es pas en retard pour les cours ?

— Mais arrêtez de m'appeler Jonathan !

Je bouillonnais de l'intérieur, je ne savais pas si j'avais peur, mais une chose était sûre, j'étais en plein délire. En voyant l'expression de monsieur Byler, je m'étais dit que j'avais fait une gaffe, mais dans tous les cas j'étais beaucoup trop déboussolée pour pouvoir répondre quoi que ce soit.

— Jonathan, qu'est-ce qui se passe ? Tu ne te sens pas bien ?

Mais je me sentais très bien, pensai-je avec ironie. J'étais juste sur le point de tomber dans le coma tellement cette situation était grotesque. Pourquoi ça m'arrivait à moi ? Et d'ailleurs comment était-ce arrivé ?

— Oh !

— Quoi ? fit monsieur Byler.

Hier, j'avais le repas avec ma classe. Je me souvenais de ce que j'avais dit à Jonathan et que j'avais fait preuve de beaucoup de courage à ce moment. Puis ensuite Sydney et moi étions partis chez moi pour prendre des vêtements et quand on était arrivé l'ambiance était assez lourde avec la présence de Jonathan, mais je m'étais amusée et puis ensuite... rien. Trou noir.

Je soupirai et me frottai le visage. Qu'est-ce que je faisais maintenant ? Un bruit de sonnette retentit dans la demeure et je me précipitai dessus pour l'ouvrir. Quand je vis mon propre visage à quelques mètres de moi, je croyais rêver. Je, enfin, Jonathan se tint là, devant moi et surtout dans mon corps.

— Kalie ? demanda monsieur Byler.

— Bonjour, monsieur Byler. Je dois parler à Jonathan, c'est très urgent, dit-... il.

Jonathan entra comme si c'était chez lui (et ça l'était d'ailleurs) puis sourit à son petit frère comme s'ils étaient de bons amis. Je remarquai un peu de tristesse dans ses yeux et il me fit signe de monter à l'étage.

— On n'en aura pas pour très longtemps, dit-il, en regardant son père. Cela était très perturbant...

— Depuis quand ils sont aussi proches ? demanda le père de Jonathan à Damien.

Ce dernier haussa les épaules et ils me regardèrent tous bizarrement. Ce qui était encore plus bizarre c'était le fait que Jonathan avait l'air de bien réagir. Il était très calme et malgré le fait qu'il était dans mon corps, il ne réagissait pas comme je le faisais ce qui était encore plus stressant. Après tout ce qu'il s'était passé entre nous, je me demandais vraiment à quoi il pouvait bien penser. À la seconde où nos regards s'étaient croisés, j'avais repensé à mon monologue d'hier. Espérons que Jonathan possédait les réponses à mes questions.

Il referma la porte de sa chambre derrière lui et s'assit sur le bord du lit. En s'emparant d'un coussin qu'il plaqua sur sa tête, il cria de toutes ses forces à l'intérieur. Je retirai ce que j'avais dit, il le prenait tout aussi mal. Il reposa le coussin et son regard se dirigea vers moi. J'explosai littéralement :

— Jonathan ? Jonathan c'est bien toi hein ? Tu peux me dire ce qu'il se passe ? Je me suis réveillée et pouf j'ai changé de sexe, tu peux me dire c'est quoi le problème ? Pourquoi tu ne dis rien ? Tu n'es pas choquée ? Pire ! C'est un rêve et vu que tu n'es que le fruit de mon imagination tu...

— Kalie ?

— Quoi ?!

— Respire.

Sa voix, enfin la mienne techniquement parlant, me sortit de mon monologue interminable. J'étais à bout de souffle les joues rouges et me fixait dans le même miroir que tout à l'heure, quand il prit la parole.

— Écoute, je sais que c'est bizarre, mais j'ai eu du temps pour un peu plus réaliser ce qu'il se passait.

— Comment ça ?

Il soupira et se dirigea vers moi.

— J'avais très soif la nuit et bizarrement en me levant, je me sentais plus léger. Je voulais ouvrir la porte, mais elle n'était pas au même endroit que d'habitude. Alors j'ai voulu allumer la lumière, mais je ne la trouvais pas. Après avoir enfin trouvé la porte, je me suis dirigé vers la salle de bains. Encore une fois, elle n'était pas au même emplacement. J'avais cherché interminablement. Quelque chose clochait, je ne me sentais pas à l'aise. En rentrant finalement dans la salle de bain, je me suis rendu compte de l'horreur. J'ai cogité toute la nuit et il n'y avait qu'une seule explication logique.

— On a échangé nos corps.

— Oui, bon ça sonnait mieux dans ma tête, avoue-t-il.

Je soupirai pour la trentième fois cette journée et il en fit de même.

Il me scruta de haut en bas avec un regard tellement... froid. On dirait qu'il n'avait rien oublié de notre échange lui non plus.

— Jonathan... Est-ce que tu te souviens de quelque chose ?

— Non, je me souviens de ce que j'ai fait il y a une semaine, deux semaines même un an, mais... hier soir ? Aucun souvenir. Et toi ?

— À ton avis ? répondis-je, désespérée. Qu'est-ce qu'il se passe bon sang... ? Ça rime à quoi tout ça ?

— De toutes les personnes sur cette Terre, il fallait que j'échange de corps avec toi, rit-il.

Ce n'était pas un rire normal, mais amer. Est-ce que je pouvais vraiment le blâmer ? Non. Je pensais exactement la même chose. Pourquoi lui ? Et si ce n'était qu'un putain de rêve et qu'on allait tous se réveiller ? J'aurais espéré, mais c'était bien réel.

Qu'est-ce qu'il fallait faire dans ce genre de situation ? Comment procéder ? Finalement, on n'avait pas trop le choix, soit pleurer et devenir fou ou alors essayer de résoudre le problème. La première solution m'avait traversé l'esprit, certes, mais je ne pouvais pas rester ici, les bras croisés à vivre une vie qui n'était pas la mienne et ça, il fallait le lui faire comprendre.

Je me plaçai devant lui décider à me faire entendre et être aidée de sa carrure imposante était plutôt bénéfique. Il me regardait en levant légèrement la tête et haussa un sourcil.

— Oui Jonathan, je sais, on se déteste mutuellement tous les deux, mais écoute, dis-je en le pointant du doigt. Ce que j'ai dit hier je le pensais vraiment d'accord ? Sache que j'ai aussi beaucoup de raison de t'en vouloir, mais je pense que maintenant on a d'autres choses plus importantes dont on doit s'occuper, alors essayons de mettre nos différends de côté s'il te plaît.

Il hocha la tête continuellement et se leva.

— OK, Kalie. Faisons comme tu dis.

C'était presque trop facile.

Alors qu'il s'apprêtait à partir, quelque chose attira mon attention.

— Mais Jonathan, tu as changé de vêtements ? Cela veut dire que tu as...

Il roula des yeux et soupira.

— Si ça peut t'aider, il n'y avait vraiment rien à regarder... par contre si jamais tu veux changer de caleçon, fais attention tu pourrais être très impressionnée.

Je roulai des yeux à mon tour en affichant une mine dégoûtée.

— Bon change-toi et c'est moi qui conduis. Hors de question que je te laisse ma voiture et tuer mon frère par la même occasion en causant un accident. Ensuite, on essaiera de chercher une solution à cette situation. Ah et tiens, je suis venu te donner ça aussi.

Il me lança mon téléphone et je l'attrapais en plein vol. Il saisit le sien qui était posé sur la table de chevet puis s'en alla me laissant dans sa chambre. Cette histoire c'était juste du délire. Pourquoi Jonathan ?

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