Chapitre 1 ✔
C'était, comme à mon habitude, en cours de français où je m'ennuyais le plus. Impossible de me concentrer alors que la femme en face de moi parlait chinois. Même si elle n'avait pas l'air méchante, je n'aimais pas sa façon d'enseigner, je la trouvais trop rapide.
Mon stylo en main, je laissais dériver mon imagination et dessinais des choses banales comme un arbre ou un œil. Quand j'en avais ras-le-bol, mon regard se perdait dans l'horizon et je me mettais à réfléchir sur comment ma vie était devenue si ennuyeuse.
J'étais assise tout devant à côté de la fenêtre et la légère brise qui entrait me fit un peu de bien. Perdue dans mes diverses activités passionnantes, je ne faisais pas attention aux regards que l'on me jetait. J'avais l'habitude, à force, mais cette fois-ci les gens se mettaient à rire. Je levai la tête et me retournai puis vis Jonathan glousser et il n'allait pas tarder à exploser. C'est alors que la prof intervint :
— Je peux savoir ce qui te fait rire Jonathan ? demanda-t-elle, ses lunettes sur son nez.
Ce dernier reprit son sérieux, mais esquissa un sourire tout en me fixant.
— Non rien, dit-il.
— Bon, je disais... reprit la professeur.
J'en avais plus qu'assez de ces regards incessants, mais la fin du cours approchait et je me sentis soulagée. La prochaine heure j'avais maths et je devais avouer que même si j'étais plutôt moyenne, j'aimais bien le chapitre sur lequel on travaillait ce n'était pas trop compliqué.
En sortant de classe, je soupirai, car à chaque fois, je faisais face au même décor qui se dressait sous mes yeux : des casiers à gauche et du gazon à droite. Il n'y a rien de pire que la routine dans le monde. Cela faisait trois ans que je côtoyais cette école et il m'était devenu de plus en plus insupportable d'y mettre les pieds.
A peine arrivée à mon casier, je sentais encore ces regards moqueurs. Ce fût assez ! J'ouvris mon casier précipitamment et me regardai dans la glace, mais il n'y avait rien sur mon visage. Une main dans mon dos me fit sursauter, mais ce n'était autre que mon amie Sydney.
— Tu m'as fait peur ! m'exclamai-je.
Sydney avait le don d'apparaître quand il ne fallait pas, tel un fantôme.
— Kalie... c'est quoi ça ?
En fixant le mot qu'elle venait de décoller de mon dos, je me rendis compte que je m'étais faite avoir... encore.
— Jonathan... murmurai-je.
— Oh non... il est quand même allé loin là ! dit-elle, en fixant le message qui disait : Je suis une vilaine fille, que quelqu'un vienne me dompter...
— Tu veux qu'on aille lui parler ? demanda Sydney.
— Ne t'en fais pas, je vais gérer à ma manière. De toute façon parler avec lui serait parler à un mur.
Elle soupira et jeta le mot à la poubelle.
— Votre manège, il dure depuis quoi ? Trois ans ? C'est un peu long non ?
En effet, ça devenait lassant ! Je me souviendrais toujours de la première fois où l'on s'était rencontré... Il me détestait et c'était pareil. Jonathan n'était qu'un inconnu qui me faisait vraiment passer un mauvais quart d'heure à chaque fois que je le croisais, mais ce qui rendait le jeu intéressant, c'était que je ripostais et cela depuis maintenant trois ans. Même en classe de première Jonathan était insupportable, mais cette année il se défoulait de plus en plus.
Ce n'était pas le genre de mec qui fumait sa cigarette à la sortie de l'école ou le genre de garçon à être le chef de son groupe. Non, il n'était pas du genre bad boy, car même ces derniers avaient un semblant d'élégance alors que Jonathan... c'était le clown du lycée ! Il avait des filles à ses pieds, mais seulement pour sa stupidité et son beau physique. Il ne prenait rien au sérieux à part son cours de sport qui captivait toute son attention. Sydney m'extirpa de mes pensées par un raclement de gorge.
— Ne rumine pas trop... en tout cas, j'ai hâte de voir ce que tu vas lui faire.
— J'ai ma petite idée, tu verras par toi-même.
Si ta vie dépend du sport Jonathan, tu seras servi.
Après le cours de maths tellement palpitant, Sydney et moi étions parties manger à la cantine. La nourriture n'était pas vraiment celle d'un restaurant cinq étoiles et Sydney en était consciente. Elle ne faisait que de dire à son père de changer la nourriture, mais aussi, bon nombre de choses dans l'établissement... en effet, le père de mon amie n'était autre que le directeur. Plutôt pratique. Sydney était une fille très gentille et attentionnée avec tout le monde, elle était comme moi : réservée et discrète, mais quand on la provoquait elle ripostait. On ne voulait pas s'exposer, mais on n'était pas timide pour autant. Nous étions des filles très calmes et très zen et cela énervait beaucoup de personnes.
— Regardez qui voilà, l'animal ne devrait pas être en cage ?
Sa voix... elle m'irritait au plus haut point. Sérieusement qu'est-ce que j'en avais marre de ses réflexions stupides ! Il avait toujours ce sourire plaqué sur le visage qui malgré tout restait très attirant pour un singe. Je n'avais qu'une envie, c'était de prendre ses deux lèvres et de les coudre l'une à l'autre pour qu'il la boucle. Mais c'est une très bonne idée ça... faudrait que je me renseigne, songeai-je.
— Jonathan, c'est pas très cool de parler de toi.
Il fit mine d'être blessé en mettant une main sur son cœur et répondit :
— Tu es longue à la détente quand même, je l'avais accroché depuis ce matin le mot.
Je m'approchai de lui et lui chuchotai :
— Sans ce mot, je n'aurais pas eu une idée brillante, prépare-toi.
Il me répondit sur le même ton :
— J'attendrais...
Puis je partis m'asseoir à une table avec Sydney qui continuait à jeter des regards à Jonathan. Tout ça allait être marrant pensais-je, tandis qu'un sourire machiavélique se dessina sur mes lèvres.
— Oh oh, quand tu souris comme ça, c'est mauvais signe.
— Tu n'as même pas idée. J'aurais besoin de ton aide.
Elle sourit à son tour et rétorqua :
— Tu peux compter sur moi.
Un acolyte était la meilleure arme. Jonathan ne serait vraiment pas déçu. Nous finissions de manger et c'était reparti pour trois heures de cours tous plus passionnants les uns que les autres. Quand nous avions fini notre cours de chimie, je me précipitais au gymnase avec Sydney sans que personnes nous remarquent bien sûr. Je sentais que Sydney était toute excitée et qu'elle avait hâte de voir la tête de Jonathan. Arrivé au gymnase, j'examinai les alentours : il y avait deux étages ; l'un était dédié au sport comme le basket, le volley, ou même le badminton tandis que le deuxième était la piscine. Comment avaient-ils pu se payer une piscine sérieusement ? Outre ce détail, je trouvais que ce gymnase était vraiment bien bâti et que la lumière extérieure, qui passait à travers de grandes baies vitrées, apportait un côté chaleureux. Mon plan était soigneusement en train de se mettre en place et après avoir fini, un sourire vainqueur s'afficha sur mon visage.
— Tu crois que ça va aller ? demanda Sydney.
— Tu regrettes ? dis-je, étonnée.
— Non, en fait, je demandais ça parce que je pense qu'il faut encore en rajouter, rit-elle.
Nous étions perdues dans un fou rire et nous sortions du gymnase ni vu ni connu.
Après notre plan terminé, il ne fallait plus qu'attendre la réaction de notre cher Jonathan et j'avais tellement hâte ! Sur le chemin du retour, nous nous amusions à imiter les différentes têtes que Jonathan pourrait faire et nous partions en fou rire à chaque fois. Sydney, elle, prenait le bus qui se trouvait près de ma maison pour atteindre la sienne un peu plus loin dans le quartier, flemmarde comme elle était ça ne m'étonnait pas vraiment. Elle émit un bruit de dégoût et regarda le trottoir opposé à celui de ma maison.
— J'arrive pas à y croire... dit-elle, en secouant la tête lentement.
— Ouais, mais il aura une bonne leçon.
Elle soupira et me fit un signe de la main.
— Bon allez, à demain !
— A demain !
Je montais les marches du perron quand un sifflement m'interpella. En me retournant, je retrouvais le visage de Jonathan tout sourire. Car, en plus de le voir au lycée, je le voyais aussi depuis ma fenêtre.
— A demain voisine ! dit-il, en prenant une voix féminine. Il avait le culot de nous imiter, ce qui prouvait encore bien ses enfantillages. Tu ne viens pas juste de l'imiter toi aussi ? me soufflait ma conscience. Je me dirigeai vers la porte d'entrée et murmurai en entrant :
— Crois-moi Jonathan, tu regretteras tes paroles.
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