Le jour où Daniel a senti un poignard transpercer son cœur
Red Bull racing vous annonce avec tristesse que Max Verstappen ne sera pas un pilote Red Bull pour la saison 2023. Le champion du monde, actuellement en soins pour l'ensemble des blessures contractées lors du dernier Grand Prix d'Angleterre, ne sera pas remis à temps pour la reprise de la saison et de longs mois de rééducation l'attendent. La situation sera réévaluée au fur et à mesure de ses progrès avec l'espoir de le revoir au volant d'une Red Bull en 2024. Christian Horner rappelle que « son siège lui est bien entendu réservé et tout le monde à Milton Keynes attend son retour avec impatience ». Il lui souhaite une rapide guérison et ajoute que « Red Bull fera tout en son pouvoir pour l'aider à se rétablir ». Actuellement, le futur pilote n'est pas encore défini, Liam Lawson qui a déjà pris sa place pour les courses continuera jusqu'à la fin de saison tandis qu'une solution est recherchée à plus long terme.
Le regard de Daniel ne se détache pas des quelques lignes qu'il relit une nouvelle fois alors qu'elles apparaissent de nouveau dans les informations qui lui sont proposées. Elles désintègrent son cœur. Il espérait naïvement en apprendre un peu plus dans cet article, mais ce n'est pas le cas. Il n'a pas eu de nouvelles de Max. Il ne l'a pas revu depuis ce jour où ils se sont croisés dans cette boite de nuit et où il a ostensiblement embrassé une femme devant son nez. Il avait alors précipitamment quitté une soirée pour la cinquième fois, Max étant toujours présent alors qu'il lui avait dit que ça ne serait pas le cas. Daniel s'échappait toujours immédiatement quand il repensait aux mensonges dilapidés par son cadet tandis qu'il combattait son corps tout entier qui voulait juste le retrouver.
Il s'en veut un peu. Il se souvient du regard peiné et énervé que lui lance Sergio à chaque fois qu'il s'en va. La première fois, la culpabilité l'avait alors étouffé tandis qu'il avait la désagréable impression de se faire juger. Depuis, elle le suit partout dès qu'il croise le regard du mexicain.
Il a tant l'impression qu'il lui en veut qu'il a presque peur d'aller lui demander plus d'informations sur le néerlandais. Des données auxquelles il a forcément accès. Mais quand il approche ce matin là, une fois de plus, le visage du père de famille est froid.
Quand l'annonce est tombée, Daniel a senti son cœur se fissurer. Il a pensé à Max et à toutes les larmes qu'il avait dû verser quand on lui avait annoncé. Le je suis désolé n'a pas obtenu de réponse, pas plus que les autres mots de réconfort qu'il lui a envoyés ou ses nombreux appels tombés directement sur messagerie. Alors il s'approche malgré tout. Si Max ne veut pas lui répondre, il va cuisiner le coéquipier.
La première chose qu'il voit quand il arrive devant le garage Red Bull pour rejoindre Checo est Max. Il a l'impression qu'il est un aimant destiné uniquement à l'attirer. Il a essayé de le sortir à plusieurs reprises de son cœur depuis cette soirée qu'il avait fini en compagnie de cette brune. Rien n'y a fait. Son cœur semble toujours être la propriété du néerlandais.
Pendant quelques temps, il a cru que ses pensées pouvaient résulter d'une autre problématique. Qu'il projetait des désirs enfouis sur le blond. Mais quand il s'est retrouvé à moitié dénudé devant ce brun après une soirée où il avait bu pour se donner le courage de tester son idée, il a compris que non. Il s'est rhabillé en vitesse et a fui sa propre chambre d'hôtel, se réfugiant chez Michael qui l'a accueilli sans poser la moindre question. Le problème n'est pas une éventuelle attirance envers les hommes. Le problème est cette attirance vers cet homme.
Cet homme qui vient d'annoncer son arrêt de la compétition pour au moins une saison. Cet homme qui est là et qu'il va pouvoir confronter, ou consoler. Peut-être qu'aujourd'hui, il pourra tout lui dire de vive voix. Il comprend que la situation ne doit pas être simple. Il a donc envie qu'il sache que quoi qu'il se passe, il est là, même si ça ne va pas non plus de son côté. Il s'approche rapidement avant que le coéquipier vers qui il se dirigeait initialement ne puisse l'arrêter.
— Heya Maxy.
Un léger sursaut se produit alors qu'il est dos au fauteuil roulant. Celui-ci tourne habilement. Il se demande depuis quand il le maitrise si bien. Cette idée le frappe. Cela lui rappelle à quel point il ne l'a pas réellement vu depuis des semaines. Sinon, il aurait su que se déplacer ainsi était devenu une habitude pour lui.
Le regard qui se pose sur lui est glacial. Le visage fermé. Il a l'impression d'être remonté dans le temps de plusieurs années.
— Bonjour Daniel.
Il arque un sourcil devant autant de formalités. Pas de heya, hey, salut ou yo comme il le faisait normalement. Il n'est plus Dan ou Danny. Il est Daniel, et sortant de la bouche de Max ça parait beaucoup trop formel.
— J'ai appris. Je suis désolé et si tu veux quoi que ce soit...
Il ne prononce pas la suite de la phrase. Il n'en a pas besoin. Il veut juste lui rappeler qu'il est là. Comme il l'a promis à Christian. Comme il se l'est promis. Comme il lui a promis il y a des années. Parce qu'il n'existe aucun monde où il pourrait l'abandonner.
— Tu m'évites plus ?
S'il pouvait, le regard lui enverrait des balles. Mais ce n'est pas la colère de Max qui détruit l'australien. Non, c'est l'immense tristesse et l'idée de rejet présente dans ses yeux clairs quand ils croisent les siens tandis qu'il lève la tête vers lui.
— Non, parce que je me demandais si j'existais encore dans ton univers.
Les mots prononcés le heurtent moins que la douleur présente sur le visage et dans le ton employé.
— Je m'en suis sorti comme ça depuis un mois et demi sans ta présence, c'est pas l'annonce qui va changer ça, je devrai pouvoir continuer à survivre sans toi.
Survivre. La colère gronde quand le mot est presque craché. La peine et la souffrance affleurent. Daniel peut les palper sur le visage fermé et dans les yeux blessés.
— Mais Maxy.
— Même quand je fais des efforts et que je viens aux soirées juste pour toi, tu viens pas me voir, comme si ça t'énervait que je sois là. Est-ce que t'es déçu de moi ? Parce que je conduirai peut-être plus jamais.
Sa gorge se noue quand la dernière phrase est prononcée. Il ne comprend pas comment Max peut penser une seule seconde qu'il réagisse comme ça si c'était vraiment le cas. Mais il sait que ce n'est pas tellement étonnant. Il est toujours à la recherche de la fierté dans le regard des autres.
Le discours est incohérent. C'est lui qui n'est pas là pour lui dans ces cas-là, il lui dit toujours spécifiquement qu'il ne viendra pas. Il en a même arrêté de tenter de l'inviter, frustré par ses nombreux rejets. Ils les auraient acceptés, s'ils étaient liés à sa fatigue comme Checo le prétendait. Mais la raison doit être autre, puisqu'il finit toujours par se pointer à ces soirées où il lui dit toujours qu'il ne viendra pas. Et ce sont ces mensonges qu'il ne comprend pas. Il ne saisit pas pourquoi il lui dit qu'il ne sera pas là pour se retrouver à le narguer à l'autre bout de la pièce à chaque fois.
— Maintenant si tu pouvais - il fait un léger mouvement de main pour lui faire comprendre qu'il veut passer - je suis pas là pour la beauté du spectacle, j'ai rendez-vous avez Christian.
Il fait un saut pour le côté alors que le fauteuil se dirige vers lui. Il évite de se faire rouler sur le bout des pieds ainsi. Il cligne plusieurs fois des paupières, assimilant la scène qui vient de se dérouler. Il réagit. Il fait un pas en direction de l'endroit où se dirige le néerlandais.
— Max, atte...
Une main se porte à son torse, l'empêchant d'avancer. Il se tourne pour tomber dans les yeux marron de Sergio qui l'observe avec un air désolé.
— Laisse lui de l'espace Daniel. Il est encore retourné par l'annonce. On avait essayé de le prévenir, mais il n'y était quand même pas préparé. Il a même dormi chez Christian après.
Son estomac fait un tour. Il se souvient de l'unique autre fois où il s'était enfui pour dormi chez lui. Il se souvient aussi de ses yeux encore rougis le lendemain quand ils s'étaient croisés dans les couloirs de l'usine de l'écurie. Ça le rassure de se dire que ce n'est pas de sa faute, cette fois-ci.
— Ils disent qu'il y a de l'espoir qu'il reconduise, mais tu sais c'est juste un moyen de le forcer à se bouger. Parce que s'ils lui retirent cet espoir-là, ils ont peur qu'il se laisse aller et qu'il remarche plus jamais vraiment.
Il hoche la tête, la gorge nouée et les yeux se mettant à piquer.
— Je sais pas quoi faire, il veut pas de moi.
Un rire éclate en face. L'idée qu'on puisse se moquer de cette idée le blesse instantanément. Parce que la situation est très loin de l'amuser. Savoir Max ne voulant plus vraiment lui parler lui fait bien plus mal que ce à quoi il s'attendait. Encore plus qu'il est la seule personne qu'il a envie de voir depuis plusieurs semaines. Leur période à Red Bull, celle où ils se glissaient sous une couverture pour regarder des films, celle où il le réconfortait, celle où il pouvait le réveiller dès qu'il le souhaitait et où Max ne cessait de lui sourire lui manque fortement. L'australien regrette ce qu'il prend comme un éloignement. Plus que tout, il en déteste la raison qui aurait certainement pu être facilement évitée s'il avait juste une fois été capable de dire non.
— Sans blague. Commence déjà par arrêter de l'éviter et de t'envoyer la terre entière en soirée quand j'arrive à le motiver à venir après des heures de discussion. Tu te rends compte qu'il fait un effort surhumain pour se bouger dans des lieux comme ça dans son état ?
Ses yeux s'agrandissent sous les mots. Les yeux normalement si doux et à l'écoute se sont violemment noircis. Il lit un énervement qui ne lui ressemble pas sur le visage normalement avenant de son cadet. Une nouvelle fois, il sent le regard le sonder et il a l'impression d'être le coupable lors d'un procès. Il ne fait pourtant rien de plus que s'amuser à des soirées où son ancien coéquipier lui fait bien comprendre qu'il n'a pas envie d'aller.
— Je vois pas le lien avec le sujet.
Les prunelles se lèvent au ciel.
— Tu sais très bien à quoi je fais référence. Quand je pense que je me débrouille pour te l'amener à chaque fois parce que t'es pas foutu d'aller le voir chez lui et que tu le plantes pour des inconnues. Arrête de jouer avec mon coéquipier. Arrête de faire du mal à mon coéquipier. Et fais très attention à ce que tu fais. Parce que si tu brises la seule chose actuellement non brisée de mon coéquipier je peux t'assurer que jamais je te le pardonnerai.
— Mais, je...
Il n'a pas le temps de prononcer une phrase de plus qu'il est laissé en plan au milieu d'un garage hostile. Les mots résonnent sans qu'il ne les comprenne vraiment. C'est le brun qui a dit plusieurs fois que Max était particulièrement fatigué et qu'il avait envie d'être tranquille devant l'ensemble des pilotes quand certains d'entre eux avaient émis l'idée d'aller lui rendre visite. Et il ne voit vraiment pas ce qu'il pourrait briser chez Max, ni même les raisons qui font que le mexicain lui en veut. Il ne joue pas avec Max, il n'a jamais joué. Il est cette personne pour laquelle il pourrait tout faire si seulement elle arrêtait de le repousser. Et depuis quand Sergio était aussi protecteur avec le néerlandais ?
Il quitte les lieux, se dirige vers son propre garage. Il doit retraverser tous les endroits où ses pas l'ont mené. Il s'arrête quelques secondes pour observer la Red Bull qui trône au milieu. C'était celle de Max, avant. Il la détaille. Il s'en rapproche et finit par reculer sa main au dernière moment, se rappelant subitement qu'il n'est plus dans cette écurie. Parfois, il aimerait pourtant remonter le temps, oublier son cœur brisé en Azerbaïdjan et pouvoir grimper dans cette voiture. Ça ne peut pas être pire que sa McLaren, ses débriefs interminables, son directeur d'écurie antipathique, son coéquipier sympathique mais qui n'est pas Max et les sourires qu'il est obligé de forcer après chaque course faisant semaine après semaine de sa vie une véritable tragédie.
Une porte s'ouvre et il voit Max et Christian en sortir. Des brides de mots lui parviennent. Daniel. Voiture. An prochain. La discussion semble animée et bientôt, le champion du monde quitte les lieux sans se retourner, laissant l'anglais seul au milieu de la pièce.
Son regard se tourne alors dans sa direction. Il lit immédiatement l'embêtement d'avoir été surpris. Il se sent être entièrement mis à nu et dévisagé. Les traits sont soucieux et l'énervement très légèrement présent. La porte claque violemment là où le fauteuil vient de s'échapper, les faisant tous les deux sursauter.
La bouche du directeur de Red Bull se transforme en une légère moue. Les yeux clairs se font tristes et désolés. Daniel comprend alors de quoi il vient d'être témoin. Il contient le rire jaune plein d'ironie qui manque de lui échapper. Quelle est la probabilité de surprendre la conversation où son ancien coéquipier et ami refuse de le voir revenir dans l'écurie ?
Il ne comprend pas quand les choses ont pu à ce point dégénérer. Le néerlandais semble pourtant véritablement lui en vouloir et avoir agi en premier. Max vient de lancer un poignard qui a atteint sa cible en plein centre, transperçant complètement son cœur. Alors qu'il rêvait depuis quelques jours à un retour, il vient d'en retirer le tout petit espoir d'un éventuel bonheur.
Malgré son incompréhension grandissante face aux actions de l'australien, Max ne désespérait pas de retrouver son ami qui était dans une situation compliquée de son côté. Mais peut-être que c'était la formule un et ses précédents succès qui faisait qu'il l'évitait. Ce jour-là, après son bref saut au garage, Max roula hors des lieux avec un sourire satisfait et une détermination sans faille. Christian n'avait jamais su lui dire non, alors comme pour tout le reste il n'aurait pas de mal à le convaincre de prêter son siège à Daniel pour un an. Il ne comprenait d'ailleurs pas comment Christian pouvait douter que ce fut la meilleure des solutions. C'était évident que lui seul méritait de veiller sur ce qui lui était le plus cher au monde.
bon, j'aurais bien galéré sur ce chap un peu chaotique du coup.
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