Partie 1 - Chapitre 3

Les feuilles crissent sous mes pas et le pistolet frotte agréablement contre la peau de mon dos.

Ma tête essaie de mettre de l'ordre dans les récents événements et dans mes émotions. Je devrai être effrayée, hurler de peur, pleurer en boule dans un coin. Mais le seul sentiments qui me gagne est le calme plat et serein qui m'avait pourtant quitté depuis les... accidents avec mon père.

J'ai beau ressasser les scènes dans mon esprits, je me sens totalement détachée de tout cela. Comme si ces événements avaient toujours faits partis de moi, tels une routine particulière et répétitive. Puis s'impose dans ma tête la scène où j'ai assommé cet homme. Une frénésie tapie au plus profond de moi semble remonter lorsque je pense que j'aurais pu le tuer. J'aurais vraiment pu... Pendant un instant, j'imagine mes mains saisir le pommeau de douche, l'utiliser pour frapper cet intrus aux poignets.. Je vois mes membres tremblants s'emparer de l'arme qui aurait glisser sur le carrelage immaculé. Puis, les sens en alerte, j'aurais tiré en plein dans son crâne. La cervelle aurait volé dans la salle, peut-être en aurais-je eu maculant ma veste... Et cette perspective ne m'effraie en rien. Elle me semble même... Plaisante.

Pendant un instant, j'essaie d'imaginer le sentiment qui m'aurait conquis en voyant le crâne de cet homme totalement éclaté par la balle. J'essaie d'imaginer la peur si propre à ma personne soumise et fragile, mais elle ne se montre pas. Comme si ressentir de la peur à cet instant était impossible. Je ne réussi qu'à ressentir la joie de voir ce sang visqueux maculer le sol. Pourquoi ?

Ma main glisse jusqu'au pistolet et je le fais rouler dans ma main. Pourquoi ce sentiment se repend - il en moi ?

Je ne suis pas une meurtrière ! Encore moins une psychopathe ! Je n'ai jamais eu envie de tuer qui que ce soit ! Et ce n'est pas en seulement deux jours (bon, une nuit et une journée) passés en compagnie d'un cannibale et d'un tueur qui vont me changer d'un coup ! Je pense. Parce que là, les changement sont inquiétants !

Finalement, je me laisse tomber contre un arbre et le pistolet glisse entre mes doigts pour atterrir sur le sol à quelques centimètres de moi. Je suis totalement dans ma bulle.

Comment se fait-il que je me sente capable de tuer de sang froid un être humain ?

Les feuilles crissent près de moi et j'attrape furtivement la garde du pistolet


" - Tiens Lana.. Qu'est-ce que tu fais là ? "


Je me retourne d'un bond vers Jeff, qui s'est appuyé d'une main lasse sur l'arbre derrière moi. Je soupire de soulagement.


" - Salut. "


Il se penche pour que son visage soit à la même hauteur que le mien.


" - Pourquoi t'as un fusil ? "


Je soupire et lui raconte brièvement l'intervention de la police. Il m'écoute sans broncher et lorsque je termine, se relève.


" - Bah moi je rentre. "


Sur ce, il s'éloigne. Wow ! Merci pour l'intervention Jeff.


Résignée, et définitivement sortie de ma petite bulle de réflexion, je me lève et commence à le suivre. Il ne fait pas de commentaire, se contente de marcher vers la maison de bois perdue au milieu des bois. Au loin, j'entend soudainement des aboiements. Je souris en pensant à Smile qui doit être en train de jouer avec un quelconque bout de bois. Ou un reste de corps...


Lorsque nous arrivons devant la porte, je peux entendre Jack sacrer à l'intérieur et gueuler des phrases que je ne comprends pas. Pourtant, j'ai la forte impression qu'il répète plusieurs fois mon nom.


" - C'est quoi son problème ? "


Demande Jeff dans un souffle avant d'entrer en faisant claquer la porte. Un coup de feu retentit alors. Le son provenant du salon me fait sursauter et je recule d'un petit bond. Le garçon aux cheveux noirs qui m'accompagne se rue vers la pièce. Apeurée, je le suis avec une certaine hésitation, mon arme à la main. Dans le salon, Jack essaie de maîtriser un homme qui se défend plutôt bien. Jeff se dirige vers la cuisine, tout à coup désintéressé de la bataille qui fait rage dans son salon. En le voyant, Jack peste encore plus. Derrière lui, Smile adopte une réaction semblable à celle de son maître. C'est alors que je remarque l'énorme tâche rouge sur l'épaule de ce cher cannibale. Paniquée, je cours vers lui et arme mon fusil. Deux secondes plus tard, le coup a retentit dans la maison et le silence s'est abattu, précédé d'un cri d'agonie. Personne ne bouge.

Je...

Je viens de tuer quelqu'un...

Mon fusil tombe au sol et fait retentir dans la pièce un bruit sourd et pesant amplifiant le silence. Je suis petit à petit prise de tremblements. Jeff réparait quelque minutes plus tard, un couteau à la main. Il me lance un regard accusateur.


" - Tu aurais pu me le laisser. "


Je ne répond que par un regard meurtrier.

C'est ce que je suis.. Une meurtrière...

Smile vient fourrer sa truffe mouillée sur mon ventre, me forçant à réagir. Je baisse la tête vers lui et m'écroule au sol. Aucune larme ou soudaine envie de vomir ne me prend. Ce qui s'accorde avec mon étrange ressentiment de plus tôt. Je suis capable de tuer des êtres vivants. Pourtant, les yeux écarquillés, je ne suis pas capable de ressentir autre chose que de la terreur. Smile se fait plus pressant, plus rassurant et j'abandonne le spectacle du corps sans vie pour me concentrer sur son pelage tâché de sang. C'est alors que je me souviens de la blessure de Jack. je me précipite vers lui et il m'interroge du regard.


" - Est-ce que tout va bien ? "


Je lui demande en essayant d'apercevoir la blessure de plus près. Bien sûr, je reste à une distance respectable. Il est encore à califourchon sur le corps de ma victime. Mon cher cannibale hausse les épaules et se lève.


" - Moi ça va. Je peux pas en dire autant pour lui. "


Je baisse les yeux, coupable. Mais une main vient gentiment, mais sévèrement, me frapper à l'arrière du crâne. Je pousse un petit gémissement de surprise et lève mon regard vers Jack, qui me lance un regard qui se veut (je suppose) rassurant. Ce qui ne doit pas être de coutume chez lui.


" - T'a fait ce qu'il fallait. "


Je hoche la tête et réussis un pitoyable sourire. Il ne me répond pas et se contente de prendre la direction du deuxième étage.


" - Au fait Lana.. La prochaine fois que tu t'occupes d'un étage, assure-toi qu'il n'y a plus personne de vivant. Ok ? "


Réalisant que c'est de ma faute s'il est blessé, je m'empourpre et baisse les yeux.


" - Je... Je suis désolée... "


Il hausse de nouveau les épaules et s'en va. Je me tourne vers Jeff, qui regarde le corps sans vie avec sadisme.


" - Je pourrai le découper, non ? "


Il me pose la question sur un ton tellement... naturel... que j'en frissonne.


" - Fais-en ce que tu veux. Je monte à l'étage. "


Il ne fais pas attention à ce que je viens de dire et s'approche lentement du corps.


" - Tu peux prendre la chambre aux murs roses. "


Je reste sceptique un moment. Pourquoi deux garçons auraient aménagés une chambre rose ? Peu importe. Rapidement, je m'engage dans le petit escaliers et gagne l'étage. Jack est sans doute dans sa chambre. Bon, laquelle de ces chambres possède des murs roses ? Résignée d'avance à devoir ouvrir toute les portes, je suis gagnée d'une bouffée de soulagement lorsque que je vois que la seule chambre dont la porte est ouverte est peinturée en rose pastel.

J'entre vivement et referme derrière moi. Enfin dans un petit havre de paix, je suis heureuse et soulagée. Doucement, je me laisse tomber sur le grand lit double à baldaquin. Je n'ai jamais dormi dans une chambre si luxueuse. Et le lit est si confortable ! Tout de même encore apeurée, je décide d'aller prendre une douche pour me remettre les idées en place.

Bon, d'abord, trouver une serviette. Je me dirige lestement vers la salle de bain maintenant dénuée de tout corps ou trace de sang. Le ménage se fait vite ici... J'ouvre rapidement le petit meuble sous l'évier, sûre d'y trouver des choses qui n'ont leur place dans aucune maison habitée d'êtres normaux. Mais à mon plus grand étonnement, je met directement la main sur une pile de serviettes propres. Je souris et en prend une avant de commencer à me dévêtir. Mon pantalon, mon pull, puis mes sous-vêtements vont s'échouer sur le sol blanc. Sans autre forme de procès, j'ouvre le robinet de la douche et me glisse sous l'eau chaude. Je ne peux retenir un petit grognement de plaisir. Dans mon ancien chez moi, je n'avais que très peu souvent droit à une douche. Une fois par semaine pour ne pas que j'ai l'air trop sale... Et encore, souvent avec de l'eau froide. La seule fois où j'ai eu droit à une vraie douche chaude... C'était lors de mes 10 ans. Chez ma tante. La seule personne qui m'ait un jour aimé. Elle est encore en vie, mais habite en Russie. Pas très pratique pour garder contact.

Je profite donc au maximum de l'eau qui coule sur mon corps et qui le débarrasse de la crasse. Sur le bord de la baignoire, des produits sont posés en désordre. Décidée à profiter le plus longtemps possible de ce petit moment de bonheur, je me donne la tâche de ranger correctement les produits. En utilisant entre-temps le savon et un... shampoing à la fleur de cerisier. Ça m'étonne que deux garçons possèdent ce genre de produits. Mais bon, je ne vais pas m'en plaindre. Une fois propre et la douche parfaitement en ordre, j'éteins à contre cœur le robinet. Quelques minutes plus tard, la serviette enroulée autour de mon corps et mes vêtements sous le bras, je sors de la salle de bain. A mon plus grand étonnement, je trouve sur mon lit des vêtements propres et pliés, prêts à être utilisés. Je souris, aux anges, et me dépêche de découvrir ces nouvelles tenues. Rien de très stylé ou à la mode, ce qui m'arrange et me satisfais. Juste deux slim bleu marine et un jogging gris, un sweat à capuche noir, un chemisier bleu et un pull gris orné d'une tête de mort deux fois trop grand pour moi. Je jette mon dévolu sur le pull et sur le jogging. Non, je ne suis pas au top du féminisme, mais c'est confortable. Je m'habille donc puis me laisse glisser dans le lit. Juste être là et être tranquille. Ça me fait un bien fou !

Quelqu'un frappe alors à ma porte et je grogne de mécontentement. Avant même que je ne me sois levée pour aller ouvrir, Jeff entre. Jack se tient derrière lui. Je me dis un moment, ce qui est très approprié, qu'il a une tête plutôt sympathique.


" - Oui ? "


Je demande alors qu'ils se tiennent avec un étrange sourire à l'entrée de ma chambre. Alors que Jeff est sur le point de dire quelque chose, on le pousse sans ménagement sur le côté. Je baisse la tête vers Smile qui court vers moi. Je ris un peu et l'accueille dans mes bras avec affection. Jack soupire et s'en va sans autre explication. Ok... Jeff reste là et me regarde un moment avant de s'approcher de moi.


" - Tu veux venir en ville avec nous ? "


Je lui lance un regard sceptique.


" - Ecoute, c'est pas parce que j'ai paniqué ce matin que je suis une meurtrière ! Je ne tiens pas à tuer des gens ! "


Son sourire (déjà flippant) est accentué par un... élan de sadisme.. ?


" - Même pas pour les deux pires ordures de la ville ? "


Je comprends immédiatement le sous-entendu.


" - Je ne vais pas tuer mes parents !!!! "


Son regard se charge d'un espèce de mépris et d'amusement.


" - Vraiment ? T'en a même pas un petit peu envie ? "


Je me détourne de Jeff et me plonge dans mes pensées. Mon esprit m'envoie d'abord des tonnes de messages affolés et raisonnables. Puis, une part de moi... De mon esprit, que je n'ai jamais senti avant, se manifeste. Je ferme les yeux, luttant intérieurement pour ne pas laisser prendre le contrôle de mes actes. Je lutte pour ne pas qu'elle me pousse à bout, pour ne pas lui donner raison.

Lorsque mes yeux s'ouvrent, ce n'est plus Lana aux commandes. Seulement une meurtrière.

Un sourire sadique, et c'est parti.

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