CHAPITRE 24 : ENTREZ, VOUS ALLEZ SOUFFRIR

Après deux ou trois bonnes heures de marche, nous arrivâmes enfin sur le lieu du stage. C'était un vaste domaine entouré d'un haut mur blanc surmonté de pics. Face à nous se trouvait un portail de la même couleur. Celui-ci était fermé.

-- Comment fait-on pour entrer ? demanda Sylvain.

-- Je propose le choix de la destruction, déclara Armand.

-- On va se passer de ça, d'accord ? dit alors Thélio.

Sans un mot, Sakura s'approcha du portail, toqua et une voix venant de l'autre côté s'éleva.

-- C'est pour quoi ?

-- Nous venons pour un stage intensif.

-- Je suis désolé mais nous sommes fermés, bonne journée.

-- Quel toupet de nous fermer la porte au nez ! s'exclama Camryn. Enfin, elle n'était même pas ouverte mais quand même !

-- Nous sommes là de la part du Boss du QG des Renaissangs, expliqua Neven.

-- Vraiment ? questionna la voix. Montrez-moi vos coupons.

Nous les passâmes en dessous du portail avant de nous les revoir retournés.

-- Je vous ouvre.

-- Je savais qu'on était prestigieux, s'amusa Tôn.

Ce fut un homme d'une trentaine d'années qui nous accueilla.

-- Bienvenue. Si vous voulez bien me suivre.

Nous nous exécutâmes sans rien dire. Le domaine était très grand et des tentes de différentes couleurs étaient parsemées un peu partout. Tout était recouvert d'herbes excepté le cœur du domaine avec terrain qui n'était que de sable et de terre.

-- Dans un premier temps, nous allons faire un tour dans la tente des enregistrements. Tout vous sera expliqué là-bas.

Comme depuis quelques minutes, nous le suivâmes sans piper mot. Le chapiteau en question était plutôt imposant. Nous nous engouffrâmes à l'intérieur et deux femmes nous saluèrent.

-- Bonjour ! Ici nous allons récolter des informations sur vous qui sont essentiels pour la continuité du stage. Vous aurez d'abord cette fiche de couleur bleue à remplir. Elle concerne votre identité donc nom, prénom, âge etc. La rose est pour vos caractéristiques physiques soit poids, taille, pouvoir et éventuellement des particularités comme des maladies où je ne sais encore. Pendant que certains s'occuperont de ces feuilles, ma collègue fera passer un test qui évaluera votre réflexion. Comme cela, nous aurons des informations sur vos capacités physiques et intellectuelles.

Lyvia fut la première à passer le test tandis que nous autres remplîmes les fiches de couleurs.

-- Euh... Si je ne me souviens pas de mon poids..., commençai-je.

-- Vous avez une balance à votre disposition juste là, expliqua la femme en pointant la machine se trouvant en plein milieu de la tente.

-- Merci beaucoup.

Je me plaçai donc dessus et lus l'affiche.

-- 65,23 kilogrammes. C'est précis dis donc.

-- Excusez-moi monsieur, intervint la dame. Il nous faut le nombre précis donc pas de vêtements pour la pesée.

Et puis quoi encore ? Tu veux me mater ou quoi ? Je ne vais m'exhiber devant tout le monde ! Allez, on va dire que grosso modo je fais 65 kg.

Je revins à l'accueil mais la femme me reprit une deuxième fois.

-- Je ne vous ai pas vu enlever vos vêtements, me fit-elle remarquer.

Tu veux vraiment me mater en plus ?

-- Eh bien... C'est plutôt gênant...

-- Prenez exemple sur votre ami, il a même retirer son sous-vêtement.

Mais Neven ! Qu'est-ce que tu fous ?

-- Il devient plus extrême que l'extrême lui-même, me souffla Tôn.

-- Parfois j'en ai honte...

-- Je te comprends. Par contre va falloir y aller ! Allez, va nous montrer ton corps de rêve ! se moqua-t-il.

-- Toi aussi tu vas devoir y aller, rétorquai-je.

-- Et non ! Je me suis pesé avant de partir.

-- Je suis sûr que tu mens.

Je retournai donc vers la balance en affichant une fausse confiance en soi. Je retirai lentement mon T-shirt et puis...

-- Youhou ! La température commence à monter ! s'écria Tôn.

Mon ami fut aussitôt calmé lorsque Thélio lui donna un coup de fouet à la cuisse.

Et toc !

Je retirai ensuite mon short, rouge de honte.

-- 65,00 kilogrammes... Sérieusement ? m'exclamai-je.

Je me rhabillais en vitesse.

-- Pourquoi tu nous as fait tout ce caprice ? questionna Camryn.

-- Je ne suis pas d'humeur. Cette balance se paye ma tête !

Je finis donc de remplir ma fiche quand on m'appela pour le test. Je rejoignai donc la seconde réceptionniste et cette dernière me posa différentes questions sur ce que je ferais dans des situations bien particulières. Elle ne fit que noter mes réponses donc je ne savais pas si je m'en étais bien sorti. Arbalèta passa après moi et je m'assis sur un banc en attendant les autres avec Lyvia.

-- Tu as dit quoi pour la troisième question ? m'interrogea-t-elle.

-- Sur comment passer de l'autre côté d'une large rivière ?

-- Oui.

-- Eh bien j'absorbe l'eau dans mon miroir, je la traverse et je remets l'eau. Et toi ?

-- J'abats un arbre assez grand et je m'en sers comme pont.

-- Mais s'il n'y avait pas d'arbres de la bonne longueur ?

-- Ça, ce n'est pas mon problème, ce n'était pas précisé s'il y avait des chênes ou uniquement des arbustes.

-- Pas faux.

Au fur et à mesure, tous avaient terminé leur enregistrement et nous pûmes quitter cette tente.

-- Maintenant que les inscriptions sont faites, nous allons sur le terrain de terre. Là-bas, la patronne vous rencontrera. Je vous conseille de faire bonne impression.

-- Tant que ça ? questionna Thélio.

-- Oh oui !

Cela ne nous rassurait pas du tout. Sur le chemin, nous partageâmes notre vision de cette fameuse organisatrice. Pour ma part, je m'imaginais une militaire très autoritaire et stricte. J'espérais tout de même me tromper.
Lorsque nous arrivâmes au cœur du domaine, la pression commença sérieusement à monter. L'homme du portail nous laissa en nous disant qu'elle ne devrait pas tarder à venir. Nous restâmes plantés là pendant une dizaine de minutes avant qu'une silhouette apparut au loin.
Elle était petite et elle semblait courbue. Elle avait trois jambes donc la troisième devait être une canne. Nous avions donc affaire à une personne âgée.

-- Qui sont les minables à qui je dois apprendre à se battre ? hurla-t-elle.

Eh bien ! Elle a la voix qui porte.

-- Ça doit être vous puisque je ne reconnais personne. C'est donc vous les apprentis du stage. Certains m'ont l'air très prometteurs et d'autres... beaucoup moins... Je vais devoir faire avec. Tout d'abord, sachez que normalement nous sommes fermés. Or, votre demande est particulière donc je l'accepte. Cependant ! Cependant, si l'un de vous vient à pleurer parce que c'est trop dur, je l'expulse sans aucun scrupule. Suis-je bien claire ?

Des petits "oui" s'échappèrent de nos bouches.

-- Si l'un de vous ne se sent pas près, qu'il reçoive la honte de sa vie tout de suite au lieu de se la prendre en pleine gueule en plein milieu du stage.

Aucun de nous ne bougea. En même temps, on ne se voyait pas revenir seul au QG.

-- Vous marquez déjà tous un point pour ne pas vous être dégonflés. Par contre, ne pensez pas que vous m'avez dans la poche ! N'espérez pas cela de moi, je vous préviens. Bon, j'ai lu vos petites fiches. Certaines sont plutôt intéressantes. Qui est...

Elle examina une feuille rose.

-- Armand ?

Ce dernier s'avança.

-- Ah oui. Tu es vraiment très grand. C'est un avantage comme un inconvénient. Nous allons travailler ça et autre chose si besoin. Enfin, je vous donnerai vos objectifs après vous avoir observés. Pour l'instant, vous allez vous affronter entre vous. J'ai fait des duos et nous allons enchaîner les combats. À partir de ce que je vois, je vous donnerai ces fameux objectifs.

La vieille dame nous répartit donc par groupe de deux. Étant donné que nous étions un nombre impair, Vanina ne passa pas l'observation en même temps que nous. Devoir se battre entre nous n'est pas spécialement difficile puisque ce n'est pas la première et que nous retenons toujours nos coups. Pourtant, il y en a un qui ne respecte pas cette "règle" : Armand. Et devinez qui se retrouve contre lui...

-- C'est à votre tour, lança l'organisatrice en s'adressant à nous deux.

Nous nous plaçâmes donc aux extrémités du terrain.

-- Vous pouvez commencer, déclara-t-elle avec une voix calme, et surtout, ne retenez pas trop vos coups.

C'est inutile de le préciser, pour lui du moins.

Armand fonça donc sur moi sans prévenir et fendit l'air avec un coup de pied que j'esquivai sans mal. J'ouvris mon miroir et en sortis la hachette.

-- Je te présente mon arme du moment.

-- Allez ! s'exclama Lyvia.

-- Mais taisez-vous ! réprima la vieille dame. Je ne veux pas de blabla mais des coups !

-- Ne vous inquiétez pas, des coups j'en ai sous le pied, ria mon adversaire.

Il tenta de me donner un coup de genou que je bloquai avec le plat de mon arme. Il répéta l'action plusieurs fois afin de percer ma défense. Malheureusement, il y arrivera à un moment et me désarma. Je semai plusieurs rochers sur le terrain mais Armand réussissait à les briser.

-- C'est tout ?

-- Très drôle.

Soudain, il fit un grand saut et se retrouva pile devant moi. Désemparé, je n'eus le temps de réagir à son coup.

-- Argh ! lâchai-je en essayant de ne pas me focaliser sur la douleur.

Étant en position de faiblesse, il n'hésita pas à me pousser du pied pour me faire tomber sur le dos. Ensuite, il posa délicatement son talon sur mon torse.

-- Ce n'est que le commencement, me dit-il avec un sourire sadique.

Il exerça alors une pression avec mon pied qui me fit horriblement mal.

-- Arrête Armand ! s'écria Sylvain.

-- Stop ! rajouta Thélio.

-- Chut enfin ! fit la patronne. Je suis la seule à avoir le droit de mettre fin à un combat ici.

Mon adversaire continuait à enfoncer son talon dans mon torse et je crus entendre quelques craquements qui me firent peur. Il voyait que je souffrais, et pourtant il ne s'arrêtait pas.

-- Je... Ah... Arghl...

Je venais de cracher du sang. En voyant ce que je venais de faire, Armand retira son pied.

-- Le combat est fini, déclara-t-il.

-- Oui tu as raison. Il n'y a pas besoin d'en voir plus de ce misérable spectacle, soupira la vieille dame.

-- Il faut l'emmener à l'hôpital ! s'exclama Lyvia en s'approchant de moi.

-- Il y a une infirmerie, indiqua l'organisatrice. Il s'agit de la grande tente rose, vous ne pouvez pas la louper.

Ainsi, Lyvia, aidée de Thélio, m'emmena dans ce chapiteau en quatrième vitesse. Je fus déposé sur une table d'examen et malgré ma vue qui commençait à se flouter, je distinguais une femme et un homme.

-- Tout va bien se passer. Nous allons tout d'abord voir si votre cas est grave.

L'infirmier découpa mon T-shirt et examina mon torse. À ce que j'entendais, ce n'était pas une blessure importante. Cependant, ils disaient que je saignais. La seule chose que je ne voulais pas que l'on me dise est que j'avais quelque chose de cassé. Ça aurait été très embêtant.

-- Anna, penses-tu qu'il y ait besoin de faire des points de souture ?

-- Hmm... Non, non ça ne sera pas nécessaire. Enfin, ça sera en dernier recours. Ce qu'il vous faut pour l'instant c'est beaucoup de repos, dit-elle en s'adressant à moi. Vous resterez en observation cette nuit.

-- Très bien...

+++++++++++++++

Lorsque je rouvris les yeux, il faisait complètement nuit. J'étais allongé sur un lit très confortable. Je regardai tout autour de moi et sursautai quand je vis quelqu'un posé juste à côté de moi.

-- Vous m'avez fait peur...

-- Je suis désolée, s'excusa la jeune femme. Je me force à être réveillée alors je dois avoir une sale tête.

-- Ahah... Je ne parlais pas de cela. J'ai simplement eu peur de voir quelqu'un m'observer alors que je dormais. Enfin, je me porte mieux ?

-- Oui ne vous inquiétez pas. Votre ami n'a pas trop forcé.

Ça m'étonnerait...

-- Heureusement que vous êtes un Renaissang. Un humain normal aurait été gravement blessé.

-- Je peux me remercier alors, plaisantai-je.

-- Si vous le dîtes ahah.

-- Au fait, les craquements et le sang...

-- Pour le premier, ça ne devait être qu'une impression. Et ensuite, la pression a simplement fait rejeter du sang mais rien d'alarmant, expliqua-t-elle.

-- Merci beaucoup.

-- C'est notre métier après tout. Maintenant, vous feriez mieux de vous rendormir.

-- Vous devez avoir raison. Bonne nuit.

+++++++++++++++

-- Je vous l'avais dit qu'il n'était pas mort pendant la nuit. Regardez, il se réveille.

-- Oh je suis tellement contente de savoir que tu vas mieux ! s'exclama Lyvia en me prenant dans ses bras.

-- Attention, il ne faut trop le brusquer, mit en garde le médecin.

-- Oups...

-- Moi j'savais qu'tu tiendrais l'coup, lança Neven en me faisant un clin d'œil.

-- Héhé ! Tu as vu juste.

-- D'ailleurs, y en a un qui voudrait te parler.

-- Ah oui ? Qui donc ? demandai-je.

Mes deux amis s'écartèrent laissant apparaître Armand qui était resté à l'entrée du chapiteau. Voyant que je l'avais remarqué, il vint vers moi en traînant des pieds.

-- Tu m'excuses ?

-- Je sais pas..., m'amusai-je.

-- Oh ne joue pas ! Déjà que je viens de mon plein gré !

-- Je plaisantais ! Je plaisantais ! Ce que tu peux être susceptible. Bien sûr que je te pardonne !

-- Même pas un coup de hachette ? demanda Lyvia.

-- Même pas, répondis-je avec le sourire. Je peux rejoindre mes autres camarades ?

-- Oui ça devrait bon. Dans le cas où vous ne vous sentez pas bien, venez nous voir sans hésiter.

-- Ça marche ! Bonne journée !

Je descendis du lit et cherchai mon T-shirt.

-- C'est ça que vous voulez ? questionna la médecin en me présentant mon vêtement découpé.

-- Ah oui c'est vrai...

-- Ne t'en fais pas pour ça, commença Armand. Apparemment nous avons une tenue obligatoire à porter.

Finalement je ne m'étais peut-être pas trompé sur le côté militaire de ce stage.

Je suivis donc mes camarades qui m'emmenèrent jusqu'à une grande tente.

-- Voici notre "chambre", présenta Neven.

-- Notre ? Nous sommes tous logés là-dedans ?

-- Et oui, soupira Armand. La vieille nous a dit que notre sexe n'était pas une raison suffisante pour occuper deux tentes distinctes.

-- C'est qui que tu appelles la vieille ? interrogea une voix venue de nulle part.

L'organisatrice du stage était juste à côté de nous et nous ne l'avions même pas remarquée.

-- Vous trois, filez dans le chapiteau. Et toi le faiblard tu viens avec moi.

Ouch ! Mon égo !

Je m'exécutai donc sans rechigner et ce fut elle qui engagea la discussion.

-- Vous vous faîtes toujours battre aussi facilement ?

-- Je ne vous permets pas !

-- Eh bien moi si. Écoute, ce que t'as fait ton ami, ce n'est qu'une infime partie que pourrait te faire subir un véritable ennemi. Tu as grand besoin de t'améliorer. Dans le cas contraire, je serai obligée de te renvoyer chez ta mère.

-- Je ne connais pas ma mère, répondis-je sèchement.

-- Oui eh bien ton père peu importe.

-- Je ne connais pas non plus mon père.

-- Oh vraiment ?

Elle marqua une pause.

-- Aurais-tu un traumatisme lié à cela ? Ou un quelconque blocage ? Je précise, il s'agit d'une question sérieuse.

-- Non, enfin, je ne crois pas.

-- Je vois, je vois. Malgré le fait que tu sois peu impressionnant, tu devrais en théorie avoir du potentiel. Je donnerai vos objectifs à chacun demain matin à la première heure. Cela sonnera le début de votre stage. Si ça ne te dérange pas, j'aimerai te voir utiliser ton pouvoir.

-- Si c'est nécessaire.

-- Ça l'est. Bon, par quoi commencer ? Vois-tu ce banc ? Aspire-le.

Sans mal, je fis disparaître l'objet dans mon miroir.

-- Parfait. Maintenant fais-le réapparaître mais le plus haut possible.

Je fis ce qu'elle me demandait et le banc chuta de plusieurs mètres de haut avant de s'écraser.

-- Très bien. Sais-tu ouvrir deux miroirs en même temps ?

-- Pendant un très court instant car je deviens rapidement épuisé.

-- Je veux voir ça de mes yeux.

Même si je n'en avais pas particulièrement envie, je fis apparaître un second miroir pendant quelques secondes.

-- Effectivement, c'est peu, commenta la vieille dame.

J'avais remarqué...

-- Ça suffira. Tu peux rejoindre les autres maintenant.

-- En fait... j'aimerai... vous parler de...

-- Exécution, coupa-t-elle.

-- Ça me paraît... important et...

-- Je vais vous supporter pendant un moment alors vous trouverez le temps de me dire ça. Allez ouste !

Décidément, elle n'est pas commode.


2649 mots.

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Bon... Nous voilà partis pour un bout de temps dans ce fameux stage intensif. Chacun en ressortira plus fort (je l'espère) mais ce n'est pas tout.
Ils ne feront pas que se taper dessus, il y aura aussi des dialogues et encore de "nouvelles" rencontres ;)

Chapitre suivant : premier entraînement du Héros dirigé par la patronne en personne ! Et il n'est pas prêt...

Publié le 08/07/2020

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