Chapitre 3
Chapitre 3
Le message de ma cousine me secoua. Qu'étais-je en train de faire, moi, la belle conne, dehors, pendant que ma mère souffrait? Je me sauvais. Voilà. Encore une fois de plus car je ne suis qu'une peureuse. Je pris le temps de regarder le ciel. Il n'avait que des nuages par ci par là aujourd'hui. Notre plafond quotidien brillait de son bleu clair. Je me dis alors que ce fut sûrement la dernière fois que j'observerai le ciel et que ma vie serait de cette manière. Je me sentais tellement impuissante. J'avais laissé ma longue veste grise à l'hôpital il ne me restait plus que ce t-shirt noir. Mes yeux me piquaient pendant que je rebroussai chemin par ladite piste cyclable. Mes pieds semblaient figés dans le ciment, comme si eux aussi, comprenaient qu'ils ne faillaient pas aller plus vite au risque de perdre une vie chère. Je vis l'hôpital au loin. Je me suis rendue quand même assez loin. Des chansons roulaient en boucle dans ma tête. Je ne pouvais m'en départir.
She was young and she was forced to be a woman
Yeah, all the time, all the time
Peut-être que c'est moi qui l'avais forcée à devenir une femme. Peut-être que c'est moi qui l'entraîna trop vite.
Sauf que là, je ne pouvais plus penser à ma vie antérieure. J'avais un cas beaucoup plus important. Cela me serrait au niveau de la poitrine. « Calme-toi, Éléonore, tu es capable »
J'entrai dans l'établissement à toute vitesse. Je bousculai des gens, qui parurent scandalisés, mais cela me passait par-dessus la tête. J'essayais de repérer Marianne ou Isabelle parmi toutes ces têtes de personnes malades. Tout semblait tourner autour de moi. Je me sentais comme le centre de l'action, celle que tous fixent. Je n'aimais pas ce ressentiment. Je finis par me détacher de la foule mécontente par l'interminable attente quand je vis Isabelle adossée sur le rebord d'un corridor. Elle se tenait la tête et je cru voir des larmes rouler sur ses joues. Je me sentis honteuse à ce moment là. Je les ait abandonnés. Parce que moi je pensais bon d'être égoïste, alors qu'elles aussi avaient besoin d'aide. J'ai tout fait retomber sur ma peine, alors que certaines choses se passaient en même temps. Je ne savais même pas où était Marianne ni même si ma mère avait déjà franchie le seuil de la mort. J'étais pétrifiée seulement à cette image, mais je savais au fond qu'elle était très réaliste. Isabelle, à quelques mètres de moi, en était la preuve vivante. Nul sait comment je réagirai, encore moins moi, mais je ne voulais pas déplaire à ma tante une fois de plus. Je marchai tranquillement vers elle et je posais ma main délicatement sur son épaule.
- Éléonore? Me demanda-t-elle, me regardant dans les yeux. Elle cherchait son air. Elle semblait épuisée d'avoir pleuré.
- Isabelle, je suis désolée. Vraiment.
Elle soupira et s'approcha de moi. J'avais des tonnes de questions à lui demander, mais je la laissai respirer un peu. Je ne savais pas plus pourquoi Marianne n'était pas à ses côtés, mais je commençai par lui parler de la base ; ma mère.
- Comment va...
- Caroline? Me coupa-t-elle.
Elle se mordit la lèvre. Je savais bien que ce n'était pas bon signe. Que pouvais-je faire maintenant? Isabelle commença à me flatter le bras.
- Son état, eh bien, il s'est...
Elle regardait partout. Ses yeux voulaient m'éviter. Je posai mon poing sur le mur.
- Quoi?! Demandai-je, un peu trop irritée.
- Il s'est hyper détérioré le temps que tu es partie, Éléonore. Caroline n'est...
Je vis alors Marianne s'avancer derrière sa mère et poser sa main sur son épaule. Elle semblait plus paisible que celle-ci, même si elle savait que je m'apprêtais à recevoir une claque de mots au visage.
- Caroline n'est désormais plus de ce monde.
Je sentis mon coeur s'accélérer a une vitesse inimaginable. Mes joues étaient devenues brûlantes. J'avais mal au coeur. Plus jamais je pourrais lui parler. C'était fini. Ce lien familial brisé. Derrière moi. J'étais devenue qu'une pauvre « orpheline ». Pouvais-je exactement me donner ce titre? Je ne savais pas comment réagir. J'y est pensé si longtemps, j'ai tellement appréhendé cette réaction que maintenant, quand le moment est venu, je ne sais même pas quoi faire de mon propre corps. Tout ce que je sais, que je comprends, c'est que je suis fâchée contre moi même. Tellement frustrée d'une manière dont je n'ai jamais été. Si je ne serais pas partie... Qui sait? Peut-être que les choses se seraient déroulées autrement, là elle est morte sans me voir pour une dernière fois, sans dire un adieu à sa pauvre petite fille. Je l'imagine à quelques pas de la mort, criant à ma tante à quel point elle souhaite voir sa Éléonore chérie, mais que cette fameuse Éléonore s'est sauvée, par peur de voir ce corps se faire détruire. Elle a dû m'en vouloir. Elle est partie, et maintenant je dois faire comme si cela ne s'était pas passé. J'aimerais tant m'expliquer, lui dire, simplement.
J'essayais de reprendre mon souffle et surtout de garder contrôle sur mes émotions.
- Je veux voir ma mère, dis-je, tremblotante.
- Quoi? Articula Marianne avec difficulté.
- Oui, Marie. Je veux la voir une dernière fois. Même si elle n'est plus là directement. Je sais que son âme il y sera, qu'elle sera là. Elle voulait que j'y sois. Et voilà, j'y serais. Sa petite Éléonore se rendra à son chevet, pour lui parler, pour lui rendre l'hommage qu'elle se doit de mériter, finis-je, une larme coulant sur ma peau.
Je relevai mes yeux pour voir que le médecin qui s'occupait de ma mère était alors à mes côtés. Je tournai ma tête vers lui.
- C'est trop tard, mademoiselle.
- BORDEL ! PUTAIN ! QU'AVEZ VOUS À RIEN COMPRENDRE, SEIGNEUR?!
Je poussai le médecin et la rage reprit le dessus. Il venait de tuer le peu d'espoir qui pouvait me rester à cette heure.
- Mademoiselle, dit-il, essayant de me rattraper.
Je piétinais fort sur le plancher, frappant d'ailleurs les chaises. Je faisais des aller-retours dans le couloir.
- FUCK, FUCK! PUTAIN, MAIS PERSONNE NE VAS JAMAIS, OU SE DONNER LA PEINE, DE COMPRENDRE CE QUE JE PEUX RESSENTIR?!
Tous s'étaient tût. J'étais seule à crier dans ce silence pesant.
- JE SUIS HUMAINE, BORDEL! JE RESSENS DES CHOSES ! !
Isabelle et Marianne se rapprochèrent de moi, laissant l'homme de côté. Je n'étais plus maître de mon organisme alors la première chose que je fus était hors de mon contrôle. Je resserrai le poignet de Marianne avant de la frapper intensément au visage. Je poussai Isabelle avant de l'agripper par le cou. Le médecin revint et me pris violemment. Je pleurais abondamment.
- POURQUOI VOUS NE M'AVEZ PAS RETENUE?!
- Éléonore, c'est toi qui est partie..., me dit Marianne, plus calme que jamais même après ce que je venais de lui faire.
Je crois qu'elles n'étaient pas fâchées. Elle comprenaient. C'était le moins que je pouvais espérer.
*
Les secondes, les minutes, les heures ont fini par s'écouler. Enfin. Les quelques médecins qui sont revenus me voir, après m'avoir laissée dans un bureau, m'ont autorisée à aller voir ma mère. Ils ont dit que c'était mieux pour moi, que de cette manière je pourrais apaiser ma frustration. C'est vrai, je le ne nie pas. J'attends, collée à la porte, qu'un travailleur vienne m'ouvrir. Je n'ai pas revu ma famille depuis l'incident.
Un employé arrive finalement avec des clés. La porte s'ouvre, la mort me prend dans ses bras.
Je m'avance, tranquillement, peur de réveiller quelque chose qui pourrait s'avérer dangereux. Je m'accroupis au lit d'hôpital où le corps de ma mère gît, sans vie. Elle est blême, mais je ne la regarde pas trop. Je lui prends la main, elle est frigorifiée. Je la serre, me rappelant que c'est la dernière fois. Un lourd poids pèse sur mon corps. Je pleure, mais c'est le moment.
- Maman, je suis désolée. Je n'ai pas été à la hauteur. Je suis partie, tel une incapable. Je m'en excuse beaucoup. J'aurais aimé pouvoir te parler de vive voix avant que cette foutue maladie t'emporte avec elle. J'aurais tellement aimé te parler plus, mais c'était impossible. Je m'en veux aussi. Tu te rappelles ce que tu me disais petite? « Éléonore, tu réussiras dans la vie. Tu feras ce que tu voudras. Et surtout, peu importe ce qui se passera, je serais à tes côtés. » C'est vrai, maman? Tu seras toujours là? J'aimerais te sentir, comme quand tu me rassurais enfant. Tu me disais que je serais capable de tout entreprendre. La petite Éléonore que j'étais a absolument échoué, mais elle t'aime. Oui, je t'aime. Éternellement. Même si un monde nous sépare, même si nous ne pourrions plus se coller, s'amuser comme avant. J'aurais aimé te parler tout à l'heure. Mais je suis arrivée trop tard. Je me suis sauvée, désolée, désolée. Maman, j'espère que m'entends. J'espère que l'endroit où tu es est remplie de magnifiques roses et d'oiseaux comme tu les aimais tant. Est-ce qu'ils chantent, maman? Est-ce que c'est beau? Je voudrais y être avec toi. Mais je dois vivre ma vie et rester forte. J'en ai aucune envie, tu dois l'avoir constatée, maman chérie, mais je vais rester pour toi. Ta grande fille, fière et accomplie, comme tu le souhaitais. Je sourirai pour toi. Je te le promets. Je t'aime, je t'aime tellement... J'espère qu'on pourra se revoir. Ce n'est qu'un court adieu, n'est-ce pas? Tiens bon, je viendrais te rejoindre dans ce monde et nous pourrions valser entre ces champs immenses. Tu as été forte, la seule personne qui m'a réellement élevée et je te dois tout le respect pour cela. Je ne t'oublierais jamais. Ta jolie Éléonore fera quelque chose de bien, ne t'inquiètes pas. D'ici là, amuse-toi bien dans cette nouvelle phase. Vis, tu le mérites. Moi, je resterai ici, attendant le moment où je pourrais revoir ton doux visage. Je t'aime, maman.
Je me relevai puis j'allai lui déposer un tendre baiser sur son front meurtri.
➰
Bonne fête à moi, bonne fête à moi 🎉 Chapitre centré sur la mort de Caroline, j'espère que c'est bien décrit 🙄 C'était supposé être un chapitre assez court mais je crois avoir réussi à l'allonger ! Sinon, je pense bien qu'à partir de la semaine prochaine je posterai 2x 😏 Laissez-moi vos avis ❤️
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