Chapitre 2

Chapitre 2

Mon pouls s'accélère. J'ai de la difficulté à respirer. Je vois des images, des gens. J'aperçois du noir. Je réussi à ouvrir les yeux. J'expire lentement. Mon front ruisselle. Je suis en sueur. Ce cauchemar, n'était qu'un parmi tant d'autre mais là ; je le sens. Quelque chose se passe. La différence, c'est qu'elle se passe de notre côté. C'est la réalité. Je le sais, tout simplement. Je suis indirectement clouée à mon lit, déchirée entre le fait de voir et d'accepter ce qui m'attend ou de simplement passer le flambeau à quelqu'un d'autre.

Mais je ne peux pas. C'est ma mère, et je sens qu'elle ne va pas bien. Il n'est que cinq heures du matin, et cela m'a tirée de mon sommeil. Elle a besoin de moi et je suis la seule qui le sais. C'est n'est pas le moment de regretter.

Je poussai les couvertures qui étaient par dessus-moi et elles finirent leur chute sur le plancher. Je descends l'escalier en trombe, et je manquai de m'y faire mal. Je ne regardai pas les marches avec attention, une de manquée et j'aurais pu me blesser moi de même. Je découvris ma mère sur le canapé. Qu'est-ce qu'elle fait là? Habituellement, elle dort dans sa chambre. Qui l'a laissé là? J'aurais dû m'en occuper par moi-même. Peut-être que j'aurais évité ce passage. Je me lance sur le plancher, et je me retrouve à genoux. Je l'observe rapidement. Elle respire hyper lentement. Ses signes vitaux ont l'air affaiblis. Je ne sais même pas si elle entend. Je met ma main sur son sein gauche, rien de très puissant. J'appuie ensuite deux doigts sur son poignet, mais cela ne contribue pas à grand chose.

- MAMAN!

Je la secoue, mais elle a peine à se bouger. Tous ses membres ont l'air fixes, gelés dans le temps. Son corps semble se faire emporter vers un espace lointain, malgré que je sens son âme toujours présente. Elle ne veux pas nous quitter. Je l'appréhendais.

- NE PARS PAS!

Je tremble, et j'ai de la difficulté à faire mes mouvements. Mon corps est pris par des spasmes violents. La mort nous envahit. Elle vient nous, ou plutôt me, prendre l'être le plus cher que j'ai. J'ai envie de vomir. Toute cette pression s'accumule dans mon organisme et menace de ne pas y rester. Mes jambes ne ressentent plus rien. Je suis sans voix, j'aimerais crier au monde entier mon désespoir.

- Maman... Reste..., dis-je sanglotante. Je pris des souffles courts et mon menton trembla. Je sentis mon coeur se serrer.

- MARIANNE, MARIANNE !

Je frappai le sol de toutes mes forces pour qu'elle puisse entendre le vacarme qui se déroulait ici. Je n'avais pas l'énergie de remonter en haut, je devais utiliser mon corps.

- ISABELLE!

Une larme roulait sur ma joue brûlante.

- Maman, reste, je t'aime, tu ne peux pas partir, ne parts pas...

Mais si, elle le pouvait. Elle n'allait pas le faire contre moi, je le savais bien, elle m'aimait de tout son coeur. Je me sentis égoïste après ces mots, comme si son absence n'allait se faire ressentir que pour moi. J'entendis quelqu'un dévaler les marches.

- BORDEL!

Je reconnu la voix de Marianne. Elle venait de s'accrocher après quelque chose.

- Ça fait mal, seigneur! Dit-elle, pétrifiée.

Je lui en voulu sur le coup de ne penser qu'à elle, mais je ne savais pas non plus ce qui venait de survenir exactement. Ma tête était couchée sur la poitrine de ma mère, et mes yeux se noyaient dans toutes mes larmes naissantes.

- TA GUEULE! MA MÈRE A BESOIN DE NOUS, ARRÊTE DE PENSER QU'À...

Je m'étouffai dans mes sanglots ce qui m'empêcha de terminer ma phrase. Marianne couru vers moi, et vit que ma mère ne semblait plus trop présente.

- Maman! Cria-t-elle.

Elle se releva et alla frapper à coup de poings dans la porte de chambre de sa mère. J'entendis les pieds de ma tante atterrir sur le plancher et une porte s'ouvrir violemment.

- Quoi, quoi? Demanda-t-elle, perdue.

Elle avait peur, elle aussi. Nous étions tous conscientes qu'un jour tout allait se terminer, s'éteindre, mais à chaque jour qui commençait, nous espérions que cela ne soit pas aujourd'hui. Mais, à contre-coeur nous devrions bien accepter la situation.

Je passai ma main sur ma joue, essayant de dissiper le plus de larmes possibles. Isabelle me tassa de là, et chuchota quelque chose à sa fille. Les deux prirent le relais tandis que j'étais assise en indien contre le canapé. Mes avants-bras étaient croisés sur mes genoux et je me faisais basculer d'avant en arrière. J'entendis les portes de l'automobile de ma tante s'ouvrir. Je pris alors les clés de la maison qui traînaient sur le comptoir. Je verrouillais la porte principale et me précipitais sur les deux femmes qui se trouvaient à quelques mètres de moi. J'ouvris la portière de derrière et je me remis à pleurer. Le trajet d'ici à l'hôpital étaient environ vingt minutes. Je ne voulais pas que ma mère meurt ici, juste à côté de moi. Je m'en sentirais responsable toute ma vie.

*

Mon dos me faisait mal. La chaise était atroce. Je me rongeai un ongle, comme toujours. Mon coeur battait la chamade. Je n'en pouvais plus d'attendre, d'avoir une putain de réponse venant d'un médecin pour me diriger vers une nouvelle phase de ma vie. Ma tante était debout, faisant les cents pas et tournant sur elle-même. Marianne quant à elle, semblait un peu plus détendue. Je la trouvais courageuse, mais il fallait que je me rappelle que ce n'était pas sa mère à elle. Je tapai du pied, et enfilai ma veste grise. J'avais froid et cet hôpital n'aidait en rien. Une voix dans l'haut-parleur me sortit de mes pensées. Celle-ci appelait ma tante et lui dictait de se rendre à la chambre trente-quatre. Je me levai en sursaut, surprise que mon nom n'ait pas été appelé.

- Je viens, déclarais-je.

- Selon moi, ils ne laisseront pas entrer plus qu'une personne..

Ma tante semblait désolée. J'en avais absolument rien à foutre alors je continuai de marcher derrière elle jusqu'à cette fichue porte. Un médecin se tenait devant. Il était d'un certain âge, et d'une carrure assez surprenante. Il avait l'air d'une personne bien loquace, même si son sérieux prenait le dessus des mètres plus loin. Il sourit discrètement à ma tante, mais son sourire s'effaça quand il me vit derrière. Sa main se secouait pour m'avertir que je devais m'éloigner.

- Une personne seulement, madame.

Ma tante se retourna vers moi.

- Mais Isabelle!

Je me sentis attaquée, comme si on me retirait le seul privilège que j'avais. Le médecin demeurait à la même place et aucune expression voyageait sur son visage. Marianne se tenait loin derrière.

- Éléonore...

Ma tante vint me prendre par les épaules et fit signe de me calmer. Je ne pouvais pas.

- ISABELLE, NON! JE VEUX VOIR MA MÈRE!

Je la poussai de quelques peu et cela l'a surpris. Elle perdit l'équilibre quelque instants.

- ÉLÉONORE!

Les gens qui passaient nous observaient, comme si nous étions des bêtes de scène.

- JE VEUX VOIR MA MÈRE!

Je la tassai de mon chemin et m'avançais vers le docteur. À ce moment, je ne contrôlais plus rien. La colère avait pris le dessus et maîtrisait mon corps à pleine capacité. Je bouillais de rage et je piochai de gros coups de pieds dans la porte de chambre. Ma tante revint et m'attrapa rigoureusement.

- Putain, Éléonore!

C'était sûrement la première fois que je l'entendais jurer. Cela me fit reprendre conscience légèrement, mais pas totalement, alors je ne fis que reculer. Sur mon passage, je frappai murs, chaises et meubles de toute sorte.

- ALLEZ TOUS CHIER!

Je poussai un cri. J'étais hors de moi. Et si je me revoyais plus jamais ma mère? J'allai vers la cafétéria de l'hôpital. Je m'assis à une table et essayai de me calmer le plus possible. Je sentais l'adrénaline circuler dans les moindres centimètres de mon corps.

J'étais assise dans une position plutôt inconfortable. Je sentis que quelqu'un s'approchait de moi par derrière. Une présence alourdissait l'atmosphère. Je voulais être seule. Mais ce n'est quand me retournant, que j'aperçus ma cousine. Elle souriait d'une manière compatissante. Marianne avait assisté à la scène de loin, mais je pense qu'elle a pu ressentir toutes mes émotions. Elle me regarda un moment, attendant que je me lève. J'étais frustrée, mais je pillais sur mon orgueil, et je me levai. Je baissai la tête, j'avais honte de mes réactions, et Marianne se rapprocha encore plus. Elle ouvrit ses bras, souhaitant que je m'y blottisse. C'est ce que je fis, ce n'est pas parce que pendant quelques instants tous semblaient contre moi que maintenant je dois refuser l'affection qu'on me porte. Elle resserra son étreinte, j'étais presque en train de suffoquer avec toute cette chaleur humaine. Des larmes refirent leur spectacle une fois de plus sur mes joues. Marianne ne parlait pas, elle ne faisait qu'accepter mon silence douloureux.

Les derniers mois ont été éprouvants. Sûrement les plus de ma vie entière. Tant d'événements, de sentiments en quelques peu de temps. Toutes mes journées se ressemblait et avaient surtout un point en commun ; la tristesse.

Cela ne faisait que peu de secondes que mon coeur venait de s'alléger, quand je vis Isabelle entrer en trombe dans la cafétéria. Je me rapprochais un peu plus de ma cousine, apeurée par ce qui pourrait se passer. Quelque chose bouillait dans mes veines, j'avais peur de mes réflexes.

- Les médecins doivent garder Caroline pour encore beaucoup de temps. Sauf que... Sauf que cela peut être ces derniers soufflements. Ils ne savent pas mais sa vie est très critique en ce moment. Une chance que tu l'a trouvée tôt ce matin, Éléonore. Elle aurait pu être déjà morte.

- Donc? Ils peuvent la garder en vie encore?

Je ne comprenais plus rien. Je ne voulais pas comprendre.

- Je crains que non. Il ne lui reste que quelques jours, Élé...

Je bousculai d'une force impressionnante avec mon avant-bras ma pauvre cousine qui assistait une fois de plus à une scène malheureuse. J'ai cru, oui, que c'était possible que ma mère revienne. J'y ai pensé, même si cela était fou. Je me suis laissé emportée et voilà que maintenant je retombe bas, très bas avec mes putains de rêves. Je ne voulais pas en faire plus, en dire plus, alors je rechercha des yeux la porte la plus près. Elle n'était qu'à plusieurs tables de moi. Je pris de l'air à maintes reprises, et essayant de me contrôler, je resserrais mes poings, regardant ma tante d'un regard désolé avant de partir en courant dehors. Le vent frais me frappa de plein fouet. Je vis ma tante qui sembla s'inquiéter de l'intérieur puis Marianne qui l'arrêtait, lui marmonnant sûrement quelque chose du genre qu'elle devrait me laisser tranquille pour accepter le tournant de la vie. Je sais bien que ma mère va mourir. Mais pas aujourd'hui. Et pas demain. Ni les jours qui suivent.

Pitié.

J'étais tellement enragée que je me mis à courir à une vitesse folle. Je pris des rues voisines, dont une contenant une piste cyclable. Je me dirigeai en vue de celle-ci et je fut happée d'un souvenir. Bam, comme cela, comme un cliché, comme une apparition. Cela empirait ma douleur, elle me donnait envie de crier jusqu'à l'extinction de ma voix. Jusqu'à ce que ma gorge saigne, que j'aille expulsé toute particules d'amertume. Je me revis près de chez moi, à courir. Je venais de terminer le travail et je devais quitter l'école le plus rapidement. Je savais que ma cousine allait me rappeler pour me redonner des nouvelles et j'avais laissé mon téléphone à la maison cette journée là par mégarde. Je courais vite, je n'habitais pas très loin. Je croisais plusieurs élèves, comme à l'habitude, mais là je la vis. Elle était dans mon chemin et je savais que j'allais la contourner. Un poids se forma dans mon coeur, je ne maîtrisais plus rien. Elle portait ces jeans que j'aimais tant, d'un bleu si foncé, avec une chemise noire et blanche. Je pouvais déjà entendre le bruit de ses petites bottines brunes d'ici. Elle semblait sereine, même si elle était à des kilomètres de l'être. Elle rentrait chez elle, elle retournait dans cet enfer familial.

C'est exactement cela que ça m'a rappelé.

Cette foutue fois où je croisai Amy sur la piste et que je dû me contenir de ne pas l'enlacer jusqu'à la fin des temps.

Comme beaucoup trop de fois désormais, c'est la sonnerie de textos de mon téléphone qui m'extirpa de mes souvenirs.

Marianne : Reviens, Éléonore, s'il te plaît. Nous avons besoin de toi. Ne te fais pas regretter quelque chose. Viens à l'hôpital, n'attends pas. Ta mère s'efface peu à peu...


Bonjour à tous ! Voilà le chapitre deux, avec plus de 2100 mots (record😸). Je pense qu'on peut voir d'autres facettes de la personnalité d'Éléonore et encore, un retour dans sa vie d'avant. Aimez-vous la manière dont les chapitres sont écrits ? J'essaie de faire passer le plus de choses possibles, que ce soit l'histoire même de cette suite (avec la mort de Caroline) mais en n'oubliant pas qu'Éléonore s'ennuie d'Amy, malgré elle. Vous avez peut-être remarqué que je poste une fois par semaine, les lundis, mais quand j'aurais fini d'écrire la fiction (il ne me reste que le chapitre 16, 17 et l'épilogue) je commencerai à poster deux fois 😛 Sinon j'essaie de mettre le plus de sentiments possibles pour rejoindre le réalisme donc j'espère que les émotions passent bien ! Goodbye💘

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