Chapitre 12 : Les soins primitifs
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Manshik, jour 61
Manshik espérait ne pas s'être fait piquer sa place. Il voulait être le premier à aller au cabinet de Li Mei ! Elle s'était installée hier. À part si quelqu'un avait eu la même idée que lui – il y avait malheureusement de forte chance -, il devrait être le premier à pousser sa porte.
Il passa une main dans ses cheveux fous, secoua sa tête pour les replacer et tapa en rythme sur le mur du Hall. Fichu toc qu'il avait depuis son arrivée sur l'île. Ou peut-être bien avant, il n'en savait rien. Mais il adorait taper sur toutes les surfaces qu'il croisait et entendre les différents sons qui en sortaient.
Il poussa la porte principale du Hall.
Manshik aimait se montrer présent. Il aimait accueillir les nouveaux comme il se devait, même si ce rôle était destiné à Harin. Il adorait faire rire la galerie et être aimé. Il avait besoin de monde, il avait besoin de rire, il avait besoin de parler. Manshik aimait les gens. Même les plus désagréables comme Miya ou les plus insolents comme Kihyun. Il les prenait comme ils étaient. Du moment qu'ils les faisaient rire.
Manshik se désola même que Insu soit si solitaire, il aurait aimé parler plus souvent avec lui. Comprendre cet homme des plus étrange. Il l'admirait pour son originalité et sa condescendance. Un personnage bien à lui.
Il poussa la porte de la cuisine avec son pied et tomba directement sur Li Mei.
Elle était penchée devant son établi à faire, il ne savait quoi.
Manshik s'en approcha et passa sa tête au-dessus de son épaule, en toute discrétion. Elle n'avait même pas entendu la porte s'ouvrir à la volée. Il allait en profiter.
— Tu fais quoi ?
Bingo. Li Mei sursauta, se retourna et porta une main à sa poitrine.
— Waouh... Manshik ! Tu m'as fait une de ces peurs !
Il esquissa un sourire et ajouta :
— J'adore faire ce genre d'effet.
— Tiens. Il se la ramène lui.
Manshik se retourna en un éclair et vit Kihyun à l'autre bout de la pièce les mains plongées dans un pot plein de terre.
— Tu ne vas pas aider tes poules à pondre des œufs ? plaisanta Manshik.
— Je dois vérifier que les vieux fous comme toi ne viennent pas séquestrer ma nouvelle colocataire.
— Je m'inquiète surtout pour elle. Travailler dans le même local que toi ça ne doit pas être simple tous les jours. Hein, Li Mei ?
Manshik se retourna vers elle. Elle agita ses mains dans tous les sens, embarrassée par la situation.
— Non, non... Ça va ! Tout va bien.
Manshik s'esclaffa et posa une main sur son épaule.
— Tu vas t'habituer. Tu sais, avec Kiki, faut savoir lui parler. C'est de l'amitié rude entre nous.
— Euh... Oui, oui, ça a l'air.
Manshik se pencha sur l'établi de Li Mei et observa le mélange qu'elle était en train de faire. Une odeur de coco s'émanait du mortier, un liquide blanchâtre et jaunâtre se déphasait et des petits morceaux flottaient encore à la surface.
— Tu fais de l'huile de coco ?
— Oh, tu as reconnu ? J'en ai pris à Sangook. Enfin, il était d'accord, bien évidemment.
— Ne t'inquiète pas, je sais bien que tu n'es pas une voleuse, dit-il avec un clin d'œil.
— Tu comptes parler de plus en plus fort ? lança la voix de Kihyun de l'autre côté de la pièce.
Manshik s'approcha du milieu de la pièce et tira une porte coulissante imaginaire.
— Tu sais quoi Li Mei, je vais demander à Baek de te faire une porte, comme ça il arrêtera de t'embêter.
Li Mei piqua un fard, et une nouvelle fois, elle secoua ses mains dans tous les sens.
— Non, mais il ne m'embête pas ! dit-elle, paniquée.
— Tu viendras me le dire sinon ?
— Oui, promis, répondit-elle en posant ses paumes de main les unes contre les autres.
Manshik esquissa un sourire, puis lança un regard en biais à Kihyun.
— Retourne à tes poissons Chafou. Sinon Miya va te faire une crise de jalousie.
Manshik attrapa une cuillère en bois qui lui passait sous la main et la jeta à Kihyun. Il le loupa de justesse.
— Oh, là, là, ne vous blessez pas... Je n'ai encore aucune préparation de faite !
Manshik tourna le dos à son copain et se retourna vers Li Mei. Il était temps d'arrêter les gamineries.
— Désolé, je ne veux pas te donner du travail supplémentaire, s'excusa Manshik en douceur.
Li Mei souffla un bon coup. Elle avait eu un petit coup de stress, Manshik esquissa un sourire maladroit.
Je venais te voir parce que j'ai la gorge qui gratte, dit-il en montrant son cou.
Li Mei lui fit signe de s'asseoir sur le fauteuil qui se trouvait juste derrière lui.
Manshik hocha la tête et s'y installa. Moelleux, confortable, Manshik pourrait y rester un moment. Mais il ne voulait pas mettre la pression à la benjamine. Elle devait travailler en toute tranquillité. Mais il tenait, malgré tout, à être son premier patient.
La gorge qui grattait n'était qu'un petit prétexte.
— Peux-tu ouvrir la bouche ?
Manshik ne se fit pas prier et ouvrit grand ses lèvres suivit d'un "Aaaaah" disgracieux. Il en exagéra tellement que Li Mei laissa échapper un rire.
— Ça n'a pas l'air rouge ou gonflé... Ça te gratte beaucoup ?
— Hum... Un petit peu.
— Comment, sur une échelle de 1 à 10 ?
— Un ? Ou non... deux.
Li Mei rigola franchement. Manshik n'avait aucune envie d'être malhonnête, et Li Mei avait bien compris son petit jeu.
— Je voulais avoir l'honneur d'être ton premier patient. Je le suis, n'est-ce pas ?
— Oui, merci. Je me sens plus utile maintenant, dit-elle sur le ton de la plaisanterie.
— Alors, j'en suis ravie.
— Mais si tu as vraiment mal à la gorge, tu peux prendre du miel si on en a... Ou alors je pourrais te faire une infusion au gingembre.
— Bien évidemment. Je n'oserais pas te déranger pour rien. Je verrais avec Ratatouille si il a ça, dit-il en faisant référence au cuisinier.
Li Mei laissa échapper un nouveau rire et Manshik s'en félicita.
Alors qu'il s'apprêtait à se relever du fauteuil, Li Mei posa ses yeux sur son bras droit.
— Oh... Tu as un tatouage ?
Manshik observa son propre avant-bras : il y avait ce singe qui marchait dans un rond coupé par différentes lignes, comme une géométrie complexe.
— Je pense que ce cercle est un Diamant et le singe c'est moi.
Li Mei leva le visage vers lui, les yeux ronds comme des billes.
— Je plaisante, bien-sûr, je n'en sais rien. Mais je suis quand même un petit singe dans ma tête...
Li Mei porta sa main à sa bouche pour rire une nouvelle fois des bêtises du garçon.
— Ah ça, le macaque tu sais faire, s'exclama la voix de Kihyun.
Manshik ne prit pas la peine de le regarder.
— Tu sais quoi ? Tu devrais peut-être investir dans un paravent... Au moins tu auras plus d'intimité, lui chuchota Manshik, ignorant complètement l'agriculteur.
Li Mei frappa dans ses mains comme si c'était la meilleure idée du siècle. Elle attrapa un crayon à la volée et écrivit sur une feuille qui trainait sur son établie.
Soudainement, un murmure sembla venir du Hall. Quelque chose de doux, de paisible. Manshik fronça des sourcils et se concentra sur ce bruit. Il tourna son visage vers la porte. Était-ce une mélodie ? Il se leva délicatement du fauteuil. Le son semblait venir de Kihyun. Non de Li Mei. En fait, de partout.
— Quelque chose ne va pas ?
La voix de Li Mei ne fut que secondaire. Manshik avait instinctivement levé les mains pour ordonner le silence. C'étaient comme des notes de piano, accompagnées de cordes de guitare. Mais c'était lointain. Manshik n'entendait pas bien. Est-ce que quelqu'un jouait de la musique ? Et quelle était-elle ?
Puis tout disparut d'un coup. Cette jolie mélodie aussi douce et fraîche qu'une nuit d'été. Il n'avait pas pu l'écouter assez longtemps pour l'identifier.
— Vous avez entendu cette musique ? susurra-t-il plus pour lui-même.
Manshik regardait sauvagement autour de lui, comme si quelque chose allait sortir du mur, du plafond ou peut-être même du sol.
— Tes grandes oreilles ont captées quelque chose ? se moqua Kihyun.
— Non, désolée, je n'ai pas une bonne ouïe mais... Aurais-tu de la fièvre ? s'inquiéta Li Mei.
Mais Manshik ne voyait plus ses amis, trop perturbé par ce son si soudainement apparut et si violemment oublié.
Il sortit du cabinet de Li Mei, puis du Hall. Le son ne s'élevait plus dans le ciel. Son cerveau lui jouait des tours.
Il secoua ses cheveux dans tous les sens. Manshik savait qu'il avait mal dormi cette nuit. Couvait-il un virus ? Peut-être que son mal de gorge deviendrait bien plus violent qu'il ne le croyait.
Il soupira. Il devrait aller se reposer, près de la rivière, pour reprendre du poil de la bête.
Il porta une main à son front. Peut-être était-il chaud après tout ? Manshik n'arrivait pas à le savoir. Il avait toujours l'impression qu'il était bouillant.
En tout cas, une chose était sûre : sa bonne humeur s'était évaporée. Il n'aimait pas divaguer comme ceci. Il avait l'impression de ressasser de mauvais souvenirs.
— ...shik, je te pré... chan.
Manshik sortit de sa rêverie pour croiser le regard de Harin. Elle venait de lui parler, mais il n'avait rien compris.
— Quoi ? dit-il totalement perdu.
— Je te présente Joochan, notre nouveau Joaillier.
"Joaillier" était le surnom que Manshik avait donné aux habitants du Diamant. Ce surnom avait été adopté par certains d'entre eux, dont la blonde.
Manshik se retourna vers le nouveau garçon. Et vu le regard terrifié de celui-ci, Manshik était sûre d'avoir l'apparence d'un fou furieux. Ils sentaient ses yeux secs - et donc probablement rouge -, ses cheveux dansaient la java sur sa tête et son air était toujours ahuri, depuis qu'il avait cru entendre quelque chose. Mais il tenta de rattacher les wagons entre eux et comprit qu'il devait se présenter à Joochan.
Il ne prit même pas la peine de sourire.
— Bonjour, je suis Manshik, pêcheur du Diamant. Bienvenue, dit-il d'une voix robotique, le regard vaquant autour de lui.
Il avait perdu cette mélodie. Il l'avait totalement inventé, il devait dormir, il devait se reposer.
— Euh... Oui, hum.
Manshik se força à regarder le nouveau. Jamais Manshik n'avait vu des yeux aussi étirés que ceux de Joochan. Une partie de ses cheveux châtains cachait la moitié de son front, l'autre partie se rebellait sous forme d'épi. Il n'était pas très grand. Mais surtout, ce que Manshik remarqua, c'était son sourire maladroit, son regard absent, vaquant autour de lui, ses mains qui bougeaient de nervosité et ses jambes en appui.
Puis d'un coup, il s'échappa. Joochan prenait la fuite, criant de le laisser tranquille, ne voulant pas rejoindre cet asile de fou.
Manshik ne réfléchit pas. Son joli son s'étant évaporé, soudainement oublié. Il s'élança vers Joochan. Le rattrapa en quelques secondes et le plaqua au sol. Il entendit Harin crier, il entendit Joochan hurler. Mais peu lui importait. Il ne le lâcherait pas.
Ça sera sa bonne action du jour.
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Point de vue de Manshik pour ce chapitre :) Qu'avez-vous pensé de lui ? Ça change un peu ? 😄
Li Mei n'est maintenant plus la nouvelle arrivée ~ Jusqu'à combien seront-ils...
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