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Journaliste, alors. Merveilleux. Ça explique les meubles qui doivent coûter cher de mon appartement. Et les bouts de journaux. Je suis vraiment, très provocant dedans. Les articles sont si bien menés qu'en fait c'est impossible de me contredire. Mais encore... Je ne comprends pas pourquoi il n'y a rien sur l'ordinateur si j'écris mes articles dessus. Comme si on les avait supprimés pour que je ne les trouve jamais...

Je me lève et cache l'album dans le dressing sous plusieurs t-shirts. En fait, cet espèce de placard est aussi grand qu'une chambre. Je n'ai pas besoin d'un endroit aussi grand pour ranger mes vêtements pourtant. J'en ressors avec un autre jean bleu et un chandail noir. J'ai besoin de me familiariser avec l'endroit, en commençant par la salle de bains parce que j'ai désespérément besoin d'une douche.

Je me déshabille, dépose mes vêtements dans un panier de linge sale et programme la douche tactile... qui commence à m'envoyer des jets d'eau un peu partout. J'adore. Au bout d'une vingtaine de minutes pendant lesquelles je ne faisais que jouer avec les différentes options, je me mousse les cheveux et me nettoie avec le gel douche. J'enfile un boxer avant de nettoyer la buée qui s'est formée sur le miroir et me regarde.

Le noir autour de mon œil s'est beaucoup atténué grâce à la crème. Ça commence lentement à virer au jaune pour disparaitre vers l'extérieur de mon œil. La coupure que j'avais sur la joue n'est plus qu'une fine ligne rose sur ma peau. Je baisse le regard et admire mes épaules musclées, ma peau bronzée, mes pectoraux saillants et mes abdos. L'autre moi s'occupait plutôt bien de lui.

J'enfile les vêtements et place mes cheveux avec mes doigts parce que je ne sais pas où sont les peignes ici. Après avoir fait un semblant de coiffure, je me rends au salon et attrape le cellulaire. J'appuie sur six zéros comme Mathis m'a dit et le téléphone se débloque. Au bout d'un moment, je remarque qu'il n'y a rien ici aussi. Rien du tout. Aucune photo, aucune application de réseaux sociaux, rien. Ça devient vraiment louche, là. J'entre dans mes contacts et les seuls numéros que je trouve sont ceux de Mathis, ma mère et ceux de personnes qui travaillent avec moi, je crois.

J'appuie sur le numéro de « mon meilleur ami » et attends qu'il décroche. Au bout de quatre sonneries, j'entends sa voix au bout du fil.

— Salut, fait-il d'une voix ensomeillée.

— Bonjour. Je te dérange ?

— Nan, t'as besoin de quelque chose ?

Je réfléchis un instant. Est-ce que j'ai vraiment besoin de retrouver Elizabeth ? Une partie de moi me dit non alors que l'autre me pousse à la poursuivre jusqu'à l'autre bout du monde. Je ne l'ai rencontrée qu'une fois et elle m'a parue louche. Je ne sais pas qui elle est, je ne l'ai jamais vue ( je crois ) et elle est grave bizarre. Mais d'accord. Va pour l'inconnue qui, elle, me connait.

— Ouais, est-ce que tu connais l'adresse de cette Elizabeth dont tu m'as parlé ?

Silence au bout du fil. J'ai presque l'impression qu'il n'y a plus personne au téléphone. Puis, un soupir me détrompe.

— Non, mais cherche CréaCouture sur Internet, tu devrais trouver l'adresse.

— OK. Merci, mais est-ce que ma voiture est en bas ?

— Oui, un autre ami te l'a apportée. Je te le présenterai un jour. Les clés sont sous le tapis devant ta porte.

Nous nous discutons encore un peu, nous saluons et je raccroche rapidement avant de chercher l'adresse que je veux. Sur la 5e Avenue. Pas trop loin d'ici je crois. Je le note sur un bout de papier et enfile mes chaussures pour me rendre chez ma voisine et lui redonner son assiette.

— Vos biscuits étaient un vrai régal, merci.

Un grand sourire éclaire son visage puis elle referme la porte sur elle. Tout de suite après, je prends les clés sous le tapis et descends par les escaliers pour me rendre à ma voiture blanche dans le stationnement. J'ouvre la portière, m'installe du côté conducteur, attache ma ceinture de sécurité et place mes mains à exactement dix heures et deux heures sur le volant en prenant une grande inspiration. Je vais sûrement bâcler le code de la route au complet, mais ce n'est pas trop grave. Je crois. Je fais démarrer la voiture et sors du stationnement avec extrême lenteur. Si bien que quelqu'un commence à klaxonner pour que j'y aille plus vite. OK ! Calme-toi ! Amnésique perdu à bord !

Je roule lentement, très lentement dans les rues à la recherche de l'atelier de couture de la fille. Je me récolte une bonne cinquantaine de coups de klaxons, mais c'est mieux que de provoquer un accident. Mon subconscient sait quoi faire dans une voiture, mais bonne chance pour le faire comprendre à mon conscient. Parce que j'ai brûlé au moins trois feux rouges et cinq panneaux d'arrêt.

Au bout d'une demi-heure de conduite, j'y arrive. CréaCouture. Des mannequins de plastique vêtus de belles robes de mariées décorent les vitrines. Le nom de l'atelier est écrit en mauve sur le devant du toit. Je me gare près du trottoir et débarque en faisant attention aux voitures qui passent près de ma portière.

Après un moment d'hésitation, j'ouvre la porte et une petite cloche retentit pour annoncer aux propriétaires qu'ils ont un client. J'observe un peu la décoration du magasin, assez féminine. Puis, une femme arrive de dos en riant d'une blague que son collègue a faite. Lorsqu'elle se retourne, je la reconnais. Elle. Un petit sourire étire ses lèvres belles à croquer pendant qu'elle se place derrière la caisse en tant qu'employée modèle.

— Eh bien, le bonjour Gael, murmure-t-elle en plongeant ses yeux gris dans les miens.

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