Au fil des jours précédant la confrontation, les tentes des soigneurs avaient déjà été installés, avec des dispositifs défensifs tel que des arbalètes mécaniques ou des canons.
Quant aux troupes, elles avaient été entraînés et testés pour savoir l'aptitude de leurs rôles et s'ils devaient être sur le front ou en retraite.
Et au fil des jours, la lune artificielle du Shìjìè-Chùan était éclipsé par Rahu la dévoreuse. Dans le ciel, on aurait dit que Rahu avait avalé la lune, prenant sa place comme un double maléfique.

Ce jour-là, Rei se réveilla en sursaut. Encore.
Il avait encore rêvé de sa mort. Encore.
Chaque fois qu'il arrivait à s'endormir, ses rêves sombres venaient et le rattrapaient, et ceux même s'il se blottissait contre son petit-ami. Néanmoins, il y avait aussi des nuits sans rêve, qui passaient un clin d'œil. Un clin d'œil qui durait plusieurs heures.

Son réflexe matinal était de zyeuter l'avancée de la vivanosphère, qui plongeait petit à petit le ciel dans une couleur sombre, comme s'il faisait nuit en permanence. Le jour n'existait plus.
Dans le vaisseau, une tension palpable régnait. Il n'y avait plus que des soldats occupés à se préparer. Certains étaient aussi jeunes que Xingxing ou Rei, d'autres étaient aussi vieux que Jing Yuan ou Huaiyan. Les forges tournaient à plein régime. Les rues avaient été fortifié autant que possible, transformant les allées agréables en véritables champs de bataille encore vierge de sang et de violence. La Prison des Enchaînés avait été scellé. Vingt portes aussi solide les unes que les autres séparaient les cellules du possible risque d'évasion.

Xingxing s'entraînait à découvrir l'étendue de ses pouvoirs sur des Borisiens prisonniers. Les étoiles les brûlaient, et l'énergie de la Nihilité les absorbaient.
Quant à Rei, il alternait séances d'entraînement et rencards avec Blade. L'entraînement consistait à se battre à main nu contre les sept Arbitres en même temps. Une activité épuisante en soi, surtout que les Généraux étaient loin d'être inexpérimentés. Mais Rei se débrouillait bien. Il avait quelques bleus mais bien moins que ceux qu'il infligeait à ses adversaires le temps de l'activité.
Ces entraînements duraient longtemps, jusqu'à ce que la nuit sombre soit bien tombée, et que le ciel soit couleur sang à cause des "dents" de la Dévoreuse.

A chaque fin de ses entraînements, Rei entendait de rares fois une voix émanant du Yamato. Elle était enfantine et lointaine, mais le jeune homme prêtait cela à la fatigue aussi dévorante que Rahu, et allait dormir. Puis il faisait le fameux cauchemar. Celui de sa mort.

Celui où, alors que tout est en flammes et en ruines, son sang se répand sur le sol alors que son corps est élevé par les Abominations dans le ciel noir de cendres, en offrande à l'Instigateur des Fléaux. Celui où tout le monde pleurait et priait. Celui où une traînée arc-en-ciel se dessine petit à petit dans la voûte céleste, qui s'abat violemment sur le Shìjìè-Chùan, ne laissant qu'un abîme à la place de l'autre fois florissant Shìjìè-Chùan.

Et Rei se réveilla en sursaut et en sueur. Comme toutes les autres fois.
Il se leva aussi discrètement que possible pour ne pas réveiller Blade, puis il de dirigea vers la salle de bains. Il se passa un peu d'eau froide sur le visage avant de se regarder dans le miroir.
Rei a changé. Ses cernes sont plus creusés, sa mâchoire plus définie, ses yeux ont des reflets violets. Ses cheveux bouclés châtains ont maintenant des mèches et des pointes rouges.
Son corps aussi, a changé. Il est plus musclé. Ses pectoraux sont mieux dessinés, tous comme ses abdominaux. Ses bras sont plus gros.
Mais certaines choses restaient les mêmes, notamment le tatouage au poignet qu'il arborait depuis sa nomination. Empereur en Xianzhouien. Ses marques divines, celles de l'œil, du cœur et de la main. Sa cicatrice au sourcil qu'il avait depuis enfant.

Tous ces petits détails allaient peut-être disparaître si son rêve se réalisait.

Après cette petite occupation, Rei alla se recoucher et retrouver Bladie. Malgré le fait que le jeune homme mesurait une voire deux têtes de plus que son amant, il aimait bien se blottir au milieu de ses bras.

-Qu'est-ce qui se passe..? peina à articuler le Chasseur de Stellaron en raison du sommeil.

-Cauchemar. répondit simplement Rei, en posant sa tête contre le torse de son amant.

Blade passa juste sa main dans les cheveux bouclés de son compagnon, puis lui embrassa la tête.

-Tu fais toujours les mêmes ?

-Oui. Ceux où je meurs. Où tout est détruit. Où je suis offert à LUI.

-Ne me voles pas mes rêves. C'est moi qui veut mourir, normalement.

-Tu veux toujours mourir ?

Blade laissa un petit silence durer avant de répondre :

-Pas quand tu es là.

-Dois-je comprendre que je suis devenu ta raison de vivre ?

-Peut-être.

-Je prends ça pour un oui.

Les deux amants restèrent ensuite dans le silence. Un silence long.
Dehors, on entendait le fracas de la pluie. Un coup de tonnerre gronda, illuminant brièvement la pièce de la lumière foudroyante, avant de disparaitre aussi fugacement qu'elle n'était apparue.

-Dis... Qu'est-ce qui se passera, si l'un de nous deux meurt ? demanda Blade, en regardant dehors.

Rei se leva à moitié, pour pouvoir voir la tête de l'immortel.

-Je ne sais pas... avoua tristement le Maréchal, en jouant avec une de ses bagues.

Soudain, un éclair de génie, comme la foudre, surgit dans la tête de l'Émanateur.

-Et si on faisait une promesse ?

-Une... Promesse ?

Rei prit vigoureusement la main de son amant malgré le sommeil qui le taraudait. Puis, il ferma les yeux avant de réciter une promesse.

-Je te jure que même si je pars à jamais, je reviendrai toujours pour toi. Toujours.

Et avant de le jeune homme eut le temps de détacher leur étreinte, Blade ressera sa main, avant de promettre de sa voix grave et erraillée :

-Même si je partais à jamais, même si les Aeons nous détruisent et que le Destin nous sépare... Je jure que je reviendrai toujours pour toi.

Et avec un léger sourire, il ajouta, en embrassant son amant :

-Et pour tes beaux yeux et ta bonne cuisine.

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rei_mayo