Chapitre 30
Il n'y avait aucune chance sur terre pour qu'Octave soit au courant de ça. Aucune chance qu'il sache que Théo et moi avions prévu de partir quelques jours, seuls. Alors que faisait-il ici ? Comment le savait-il ?
Si, jusqu'à présent, je m'étais mis des œillères pour m'empêcher de voir ou même de penser au pire, sa présence n'a rien de rassurant.
Je ne sais pas ce qu'Octave fait ici.
« Qu'est-ce que tu fais là ? »
Si j'en suis venu à garder le silence, incapable de poser la moindre question ou de sortir la moindre phrase, Théo lui ne s'est pas gêné pour dire tout haut ce que l'on pensait tout bas.
Oui, dis-nous, qu'est-ce que tu fais ici ?
« Je vous accompagne, pourquoi ? Je n'ai pas le droit ?
— Tu ne sais même pas où l'on va.
— C'est vrai... Mais je n'ai jamais été contre un petit voyage surprise ! Bien au contraire ! Je trouve ça cool ! Partir vers l'inconnu tout ça, tout ça.
— Tu ne peux pas venir.
— Pourquoi pas ?
— Parce que.
— Ça fait des jours que vous me tenez à l'écart de absolument tout ce que vous faites.
— Et avec raison ! »
Je regarde Théo de peur qu'il n'en dise trop. Allait-il lui dire ? Lui dire qu'il n'est pas lui ?
« Vous êtes devenus vraiment bizarres depuis quelque temps tous les deux. Je ne vous reconnais plus.
— Octave... »
J'ai de la peine pour lui. J'ai l'impression que depuis le début, on se fourvoie.
« Ah non, Alex ! Ne commence pas. »
Mais Théo, lui, ne semble pas ressentir la même chose que lui. Il est méfiant. Suspicieux, et sans doute a-t-il raison, mais n'empêche, nous n'avons toujours aucune preuve qu'Octave est celui que l'on pense être. On sait pour sûr qu'il est Octus, notre meilleur ami d'antan. Notre frère.
Mais qu'il soit responsable de ce qu'on l'accuse ? J'ai un doute. J'ai toujours eu un doute. Il n'a aucune raison.
« Alexandre... T'es mon pote, non ? Depuis que tu ne traînes qu'avec lui... Tu... Tu n'es plus le même, tu as changé. »
En vrai, je n'ai jamais changé. Pas une seule fois. J'ai juste prétendu ne pas être celui que je suis réellement. J'ai juste fait semblant.
J'ai joué un rôle en tentant d'ignorer tous ces souvenirs qui se déversent comme un flot dans mon esprit.
Au final, je suis peut-être le plus hypocrite de nous trois.
Je suis sûrement le méchant de l'histoire.
Peut-être aurais-je dû lui dire la vérité dès le départ ? Il m'aurait certainement pris pour un fou, mais qu'importe.
Il n'aurait pas eu ce regard-là.
Celui qui ne comprend pas ce qui se passe.
« Dis-nous Octave, comment tu as su que l'on partait aujourd'hui ? Hein ?
— Je vous ai entendu en parler.
— On ne l'a jamais fait publiquement, ni même dans notre chambre. »
C'est vrai. Théo m'a juste annoncé du jour au lendemain qu'il comptait aller là où tout a commencé pour nous et je l'ai suivi tout naturellement. D'ailleurs, je ne sais absolument pas si Alexandre suit Théo ou si c'est Alexander qui suit Thétis. J'ai si longtemps été éloigné de lui que ne plus l'avoir près de moi creuserait de nouveau ce gouffre au fond de moi.
Telle est ma malédiction, je pense.
Devoir le suivre pour l'éternité.
Ça pourrait être pire.
« Dernier appel pour les passagers du vol A-666
— C'est notre vol Théo.
— Je sais, mais il est hors de question que ce psychopathe nous suive. Accouche Octave. Comment tu sais qu'on prendrait l'avion ? »
C'est l'impasse.
Octave s'est cloîtré dans son silence, devenu soudainement muet tandis que je vois la liste des passagers se réduire à vue d'œil.
À ce rythme-là, on ratera notre vol.
« OK. Je présume qu'il est temps d'arrêter de faire semblant. Retournons-nous à la maison, Alexander, Thétis ? »
Et si Octus a toujours été là ?
« Octus ou pas, ce n'est pas pour autant qu'on te laissera poser tes petites fesses dans cet avion !
— Mais ! Je viens de vous dire la vérité.
— Non, tu viens de nous dire ce que l'on savait déjà. Maintenant, accouche. Dis-nous tout.
— Toujours aussi chiante, et ce, malgré les époques, hein ? »
Il jette son sac par terre, croise les bras contre son torse et soupire.
Et si j'avais raison ? Depuis le début ?
« Tu veux la vérité Théo ? La voilà ta putain de vérité. Si vous retournez là-bas, encore une fois, vous allez mourir. Tous les deux.
— Comment tu peux le savoir ?
— Parce que vous êtes maudits. Tout a commencé cette nuit-là. »
Qu'est-ce qu'il s'est passé cette nuit-là ?
« La nuit où nous sommes morts tous les trois. »
OK.
Ça.
Je ne m'y attendais pas.
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