Chapitre 29

Au début, je l'ai pris pour un fou. Il n'y avait que ce terme qui me semblait assez juste pour qualifier son idée. Une idée folle. Il n'y a que dans les films ou dans les séries que l'on voit les personnages tout quitter du jour au lendemain pour partir on ne sait où et le tout, sans avoir le moindre problème.

Pourtant, voilà que j'ai mes fesses dans un fauteuil peu confortable de l'aéroport, à regarder les gens passer, à écouter la moindre annonce faite.

C'est débile.

Je ne devrais pas être là.

Non.

On ne devrait pas être là.

Je suis un étudiant en Histoire, tout à fait lambda avec quelques petits soucis, mais rien de plus. Alors pourquoi me suis-je retrouvé embarqué dans cette quête aux réponses alors que cette dernière me semblait impossible ?

On ne devrait pas. On devrait laisser le passé au passé et continuer nos vies. C'est la chose la plus logique à faire. Oui. On devrait profiter de cette nouvelle occasion que nous donne la vie et faire nos vies dans cette époque. Oui.

On devrait.

On avait même été d'accord sur ça. Ne pas se préoccuper du passé. Ne plus laisser Alexander et Thétis interférer dans les vies d'Alexandre et de Théo.

« Qu'est-ce que tu fais ? »

Pourtant, nous voilà, assis l'un à côté de l'autre, attendant que l'on puisse franchir le terminal. Attendant pour prendre l'avion. Attendant de s'envoler vers un endroit qui nous est inconnu.

« Rien... Je regarde les gens qui passent. Je me demande à quoi ils pensent.

— Et toi ? À quoi tu penses ? Depuis qu'on a quitté le campus, tu n'as pratiquement pas décroché un mot.

— Je me demande si, au lieu de partir en voyage, on ne devrait pas s'inscrire dans un de ces hôpitaux spécialisés. On doit être fous.

— Alex...

— Non, Théo, écoute-moi. Je suis d'accord sur un point. La curiosité prime sur tout et dirige nos vies, mais qu'est-ce qui nous dit qu'une fois là-bas nous aurons les réponses que nous recherchons ? Qui nous dit que l'on saura alors ce qui se passe ?

— Cela vaut le coup d'essayer, non ? Et puis toi et moi, on ne peut pas se mentir plus longtemps. Oui, on pourrait reprendre nos vies et vivre celles de deux étudiants ordinaires, mais plus on essaye d'avoir un brin de normalité, plus on est appelés, tirés vers ce sombre passé. Tout nous rappelle à cette époque et je refuse de laisser ça traîner plus longtemps. Si l'on veut avoir la paix une bonne fois pour toutes, alors il faut y mettre un terme. Et pour ça, on doit savoir ce qu'il s'est passé.

— Et si... Si l'on apprend ce que l'on redoute tant ? Qu'est-ce que l'on fera, hein ?

— Honnêtement ? Je n'en sais rien. Ce n'est pas parce que j'ai 2000 ans de souvenirs que je sais forcément tout. Normalement, de nous deux, ça a toujours été toi qui as toujours su quoi faire.

— Justement, pour une fois, pour la première fois, je sèche. Partir en guerre ne m'a jamais fait peur. Affronter des légions d'ennemis ne m'a jamais effrayé... Mais là... C'est différent.

— En quoi ? On ne part pas en guerre.

— Qu'est-ce que tu en sais ? »

Et puis, il y a cette chose que je n'arrive pas à me sortir de la tête.

Octave.

Son sourire de la dernière fois. Ses paroles.

Quelque chose ne tournait pas rond et j'en étais convaincu.

Toute cette histoire est bien trop tordue pour que je puisse prendre suffisamment de recul pour savoir quoi faire et quoi penser.

« Mesdames et Messieurs, les passagers du vol A-666 sont priés de s'avancer vers la porte d'embarquement 7.

— C'est notre vol. Viens. Ramasse ton sac.

— J'arrive. »

Pourquoi ai-je cette appréhension soudainement ?

Pourquoi ai-je ce doute ne cessant de planer au-dessus de ma tête ?

Pourquoi ai-je peur ?

Comme si... Comme si je savais au plus profond de moi-même, qu'une fois là-bas...

Non. Je ne veux pas y penser. C'est ridicule. C'est sûrement mon ancien moi qui redoute de retourner là-bas après tout ce qui s'est passé. Mais l'époque n'est pas la même. Les gens eux-mêmes ne sont plus là.

Alexander et Thétis sont morts.

Morts et enterrés sur cette terre lointaine. Durant cette époque lointaine.

Personne ne se souvient de nous. Personne ne sait qui nous sommes réellement.

Je n'ai rien à craindre. Oui, tout ira bien.

Soudain, une main sur mon épaule tandis que nous faisons la queue pour embarquer dans l'avion.

« Vous ne comptez quand même pas partir sans moi les gars ? »

Octave.

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