Chapitre 25

Toute la nuit, nous avons cogité. Réfléchis. Plusieurs fois, nous avons repassé ces moments passés ensemble jusqu'à comprendre que l'un avait forcément les souvenirs de l'autre tel un jeu pervers où nous ne pouvions nous passer de l'autre qui détenait plus d'information. Je me souvenais de certains moments et Théo avait tous les autres.

Dont ce soir-là.

L'implication d'Octus.

Aussi loin que je m'en souvienne, il a toujours été un ami proche. Un frère et je n'imagine pas Octus, maintenant Octave, ayant eu un quelconque rôle à jouer dans notre mort.

« C'est ridicule.

— Tu peux tourner ça dans tous les sens, il était là.

— Et quoi ? Il nous aurait tués ? Octus nous a toujours soutenus, aidés et protégés toi et moi. Encore maintenant, ça reste un ami que j'apprécie particulièrement.

— Je ne dis pas que c'est forcément le coupable... Après tout, nous n'avons aucune preuve concrète et je ne suis pas du genre à désigner un meurtrier du bout des doigts. Mais de toute évidence, Octus a eu sa part.

— Quand bien même... Qu'est-ce que ça veut dire ?

— La seule façon d'avoir le fin mot de toute cette histoire, c'est d'avoir sa version.

— Et comment ? Tu te souviens. Moi aussi. Mais ce n'est visiblement pas son cas.

— Et si...

— Théo !

— Quoi ? Avoue que tu y penses aussi quelquefois. Tu dis toujours que tu connais Thétis par cœur, mais c'est valable dans l'autre cas. Tu es un livre ouvert pour moi et si tu es l'homme que j'ai connu jadis ou au moins la moitié de ce dernier, alors cette possibilité trône aussi dans ton esprit.

— Et si depuis le début, il se jouait de nous ? C'est improbable. »

Impossible aurait été correct. Je ne connais personne qui joue aussi bien la comédie. Qui vit comme il ment.

C'est ridicule.

Octave n'est pas celui que l'on cherche.

« Néanmoins, Alex, ce n'est pas sans te rappeler qu'il nous faut cette réponse. Il faut que l'on trouve un moyen pour Octave.

— Un moyen de se souvenir ? Et comment ?

— Je n'en sais rien...

— Parce que de toute évidence, la magie n'aidera pas. On ne va pas lui jeter un peu de poudre de perlimpinpin en criant "Souviens-toi !". Ça ne marche pas comme ça.

— On ne sait même pas comment ça marche. Comment tu t'en es souvenu toi ?

— Après un coup sur la tête... Mais hors de question que j'assomme mon meilleur ami. Je te préviens ! Et toi alors ?

— Moi ? Ça a commencé à cause de toi. Des flashs. Des rêves.

— À cause de moi ?

— Je te l'ai dit, en te fréquentant... »

Je me jette sur mon lit, à court d'idées, de solutions magiques. Qu'avons-nous fait pour mériter un châtiment pareil ? Pourquoi sommes-nous morts ? Dans quel but ?

« Je perds espoir.

— Et moi donc... Tout ce que nous savons c'est que, faute de souvenir, nous avons juste l'intime conviction d'avoir eu une morte violente. Tu parles d'un indice.

— Dommage que l'on n'en sache pas plus avec les cours...

— Comme s'il était possible que l'on trouve notre histoire dans un bouquin ! »

À cet instant, on s'est arrêtés, on s'est regardés et on s'est précipités à l'extérieur de la chambre, jusqu'à tomber nez à nez avec Octave à moitié à poil, le regard endormi.

« Waw... Vous allez où comme ça tous les deux ?

— À la bibliothèque...

— Elle est fermée... Il est 2 h du matin. »

Ah oui. Maintenant que tu le dis.

« Et toi ? Tu viens d'où ?

— Toilette. Grosse envie. »

Je ne veux pas savoir.

« Quoi ? Pourquoi vous me regardez comme ça ?

— Non, non. Pour rien. »

Et si...

Et si Octave...

Non ! Alexandre ! Ne commence pas à laisser de fausses bonnes idées faire leur bout de chemin dans ton esprit.

« Bon bah je retourne me coucher. On se voit tout à l'heure ?

— Ouais... À plus tard... »

Il referme la porte de sa chambre et on se surprend, Théo et moi, à plaquer une oreille contre cette dernière.

« C'est ridicule ! »

Je le frappe derrière la tête tandis que l'on retourne se vautrer sur nos lits respectifs.

« Tu sais à trop réfléchir, ça nous tuera sur le long terme.

— On est déjà morts une fois, on peut bien remettre ça.

— Vachement enthousiaste comme discours ! Dis-moi Alexandre...

— Quoi ?

— Et si on s'en fichait de tout ça ? Si on faisait notre vie tous les deux de notre côté, laissant le passé au passé ?

— Une vie tous les deux ? Ouuh !

— Pas dans ce sens-là triple idiot !

— Le temps d'un instant, j'ai eu une lueur d'espoir.

— L'espoir fait vivre mon cher.

— Oui, mais moi je vis d'amour et d'eau fraîche.

— Tu as au moins l'eau fraîche, il ne manque plus que l'amour.

— Non, lui aussi, je l'ai déjà. La preuve est sous mon nez. Si vraiment nous n'étions pas destinés à être ensemble, tu te serais réincarné dans un autre coin du globe. Probablement loin de moi. Tu ne te serais souvenu de rien dans le meilleur des cas. Mais j'ai une influence sur toi... Sur ton toi présentement et ton toi de l'ancien temps. Et tu le sais. Je te l'ai dit, c'est inéluctable. C'est le destin.

— Le destin ? Je m'assois grossièrement dessus. Et puis un grand monsieur a dit un jour "Je suis maître de mon destin, capitaine de mon âme".

— Donc tu vas me dire que citer Mandela ne te fait rien ressentir pour moi ? Qu'au fond de toi, il n'y a pas une petite flamme ? »

Il s'arrête, souris et détourne les yeux. Malgré son air boudeur, je reconnais tout de suite quand Thétis/Théo essaye de me cacher quelque chose.

« Une flamme ? Vois plutôt ça comme un feu de forêt. »

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top