Chapitre V - je suis à la hauteur
La température à l'intérieur du dôme est de plus en plus insoutenable. Cela fait plus d'une semaine que nous revenons ici tous les jours. Nos superviseurs ont longuement insisté sur la nécessité pour nous d'entraîner notre corps à fournir des efforts physiques qui jusque-là me semblaient dépasser la limite du raisonnable. Bien-sûr, pour survivre face aux Mirages, il nous faudra non seulement un mental d'acier, mais aussi un corps d'athlète. Ce qui, pour certains, est loin d'être gagné.
Si une minorité de cadets parvient à s'adapter et à s'illustrer dans la majorité des exercices, les combats, les courses d'obstacles et les auditions interminables sur la maîtrise de l'aleotechnologie doublées des sessions d'études sur les Mirages commencent à nous épuiser. Depuis que nous avons commencé cet entrainement, la plupart des novices enchaînent de cuisants échecs.
Accrochée comme une punaise sur la première face d'un mur que je n'ai pas réussi à franchir, je me laisse glisser jusqu'en bas, mes mains moites faisant grincer la surface métallique de l'obstacle qui a eu raison de moi. Lorsque mes pieds touchent le sol, je réalise que je ne parviens même plus à déglutir. Je n'ai plus de salive. Ma gorge est complètement sèche.
Dans un mouvement las, je pivote pour faire face à la colonne de cadets qui attendent plus loin de débuter le parcours à leur tour. Mes muscles me brûlent. Ma vue se brouille.
— Recommence !
La voix impérieuse de Bellelac retentit de l'autre bout du dôme. Il est appuyé contre le mur, les bras croisés. Denor et lui supervisent notre entrainement depuis ce matin en beuglant des ordres toutes les trois minutes.
Je n'ai pas le temps de reprendre ma respiration. Le parcours d'obstacles m'attend. Je dois courir. Encore, ignorer la fatigue. Je voudrais déglutir, mais je n'ai plus de salive. Derrière moi, Tess me touche l'épaule.
— Ça va aller ?
J'inspire bruyamment. Ne pas être en bas du classement, ne pas être faible, c'est tout ce qui compte. Je secoue la tête, remonte mes manches et dépasse la ligne de départ. Il faut arriver à l'autre bout de la piste et franchir les obstacles. Mais depuis des heures, tout ce que nous faisons, c'est nous rétamer un par un. J'allonge les foulées en approchant du premier accroc. C'est un mur d'environ deux mètres à gravir à la simple force des bras. J'accélère afin m'accrocher en haut de la barricade. Mes bras tremblent dès que j'essaie de me hisser en haut. Je sens le regard de tous les autres cadets et celui du commandant sur moi. J'ai honte. Je pousse de toutes mes forces, usant de mes pieds qui dérapent sur la surface lisse du mur pour grimper. Je balance les hanches sur la droite pour passer une première jambe par-dessus le sommet. Après ça, je parviens sans plus de difficultés à me laisser tomber de l'autre côté.
Premier obstacle franchi : un véritable soldat l'aurait sûrement passé en une poignée de secondes.
Je cours jusqu'à l'épreuve suivante.
— Allez Juno ! s'enflamme Tess à la ligne de départ.
Je tâche de rester concentrée. Maintenant, il s'agit de sauter une série de barrières. Pas très hautes, certes, mais l'enchaînement est rapide et a coûté à bon nombre d'entre nous de se prendre les pieds dedans et de recommencer depuis le début. Cette fois-ci, je dois calculer ma trajectoire avant de me lancer. Une foulée entre chaque barrière devrait me permettre de reprendre de l'équilibre sans pour autant perdre le rythme. J'enchaîne les sauts. Ça passe. Les autres obstacles n'ont rien d'extraordinaire. Cela me permet de reprendre quelque peu mon souffle avant de me retrouver face à la contrariété qui m'a renvoyée à la ligne de départ déjà trois fois.
A l'autre bout du dôme, une escouade vient d'entrer pour s'entraîner. L'attention de ses membres est happée par le brouhaha que font certains novices – à commencer par Tess – pour m'encourager et ils se mettent eux-aussi à me regarder. Une distraction en plus qui pourrait bien m'être fatale. Je garde mon regard fixé sur l'obstacle suivant : trois turbines hautes de plusieurs mètres sur lesquelles sont attachées des poutres qui tournent aléatoirement. L'objectif est simple. Passer de l'autre côté. Je suis arrivée jusque-là, je peux réussir.
— Arrête d'hésiter soldat ! À l'extérieur, tu serais déjà morte ! hurle Bellelac.
D'ici, je peux presque entendre les ricanements des nouveaux arrivants. Mes oreilles sifflent, j'ai l'impression d'entrer en transe. Mon cœur s'emballe, dépasse la vitesse de battements naturelle si bien qu'il pourrait jaillir de ma poitrine à tout moment. Je tourne la tête. Appolo et la fille du mess suivis d'autres jeunes kairosiens se délectent du spectacle. Même d'ici, je discerne leurs sourires narquois.
Je sens que mes jambes risquent de me lâcher au moindre mouvement. Je tente de respirer lentement, de me concentrer uniquement sur les battements de mon cœur. Mes spectateurs retournent à leurs occupations, probablement déçus de ne pas me voir accomplir des exploits, ou bien au contraire de ne pas assister à un cuisant échec. Il ne reste que lui. Qu'Appolo qui s'est accroupi comme pour se mettre à l'aise dans la contemplation de mon agonie.
— Qu'on en finisse ! se plaint le superviseur.
Décidée, je me lance. Je me baisse à plusieurs reprises pour éviter un coup fatal dans la tête. Ceux qui sont arrivés jusque là se sont fait faucher par les poutres du dessous. Je dois être attentive de tous les côtés. Je passe la première turbine. Les deux dernières sont rapides. Le moindre choc pourrait me mettre hors-jeu. J'exécute quelques sauts, quelques esquives. J'y suis presque. Je glisse au sol pour éviter un énième piège. Oui, je vais y arriver.
— Attention ! hurle Tess au loin.
Au moment de me redresser, quelque chose me frappe la nuque si fort que je m'écroule au sol, à plat ventre. Après une poignée de secondes, le son mécanique de la turbine disparaît. Elle s'est arrêtée. Sonnée, je ne distingue que la silhouette d'Appolo qui se relève et disparaît au loin.
❅❅❅❅❅❅
La sonnerie retentit. Celle que j'entends matin, midi et soir, celle qui rythme mes journées et qui délimite mon temps. Les ouvriers ont terminé pour aujourd'hui. Mais cette pause ne sera pas longue. Le travail reprend tôt le matin pour les adultes. Les machines doivent tourner. Il y a tant de choses à faire, à fabriquer, à améliorer. Quand les pièces sont prêtes, on envoie tout là-haut et on recommence du début. La manufacture Est assemble les armes. Je pose sur la table le canon du Vendetta M4 que j'ai presque terminé de monter. Avec un peu de chance, il finira par accomplir de grandes choses quand on l'utilisera en haut. Peut-être même que quelqu'un s'en servira pour abattre ces sales mirages.
Puisque j'ai 16 ans, je bénéficie d'un temps de travail obligatoire plus court et de pauses plus longues. Parfois, papa et maman font des heures supplémentaires alors Elias et moi restons seuls à la maison. Les parents ne détestent pas leur vie ici. Papa me dit souvent que c'est grâce à nous, les petites fourmis travailleuses, que là-haut, ils pourront bientôt libérer notre monde.
Tous les ouvriers et ouvrières se dirigent vers la sortie. Je prends place dans la queue pour aller déjeuner. Les jours de travail, je mange avec les adultes à la cantine d'Aiôn Est et les jours d'école, je passe la pause du midi avec les autres jeunes de mon âge.
J'aperçois Elias. Il est en train de chercher un endroit où s'asseoir et zigzague entre les ouvriers en tenant fermement son plateau. Je tourne la tête pour choisir ce que je vais me mettre sous la dent. J'ignore si les ouvriers d'Aiôn Nord qui ravitaillent les deux cités en nourriture sont de très bons chefs cuisiniers, mais visiblement, ils ont quelque chose à fêter. Nous n'avions pas mangé de betteraves depuis des mois !
— La mission Echo vient de revenir, m'explique le commis aux cuisines en se penchant sur le comptoir. Ils n'ont perdu personne, il faut fêter ça !
Je lève la tête. La mission Echo se renouvèle tous les ans. Les meilleurs légionnaires partent pendant plusieurs jours voire plusieurs mois pour explorer et sécuriser un périmètre toujours plus éloigné de la base et reviennent généralement avec de précieuses informations.
Je souris et hoche la tête pour répondre à l'enthousiasme de mon interlocuteur avant de prendre une assiette et de la déposer sur mon plateau.
Un fracas retentit soudainement à l'autre bout de la salle. Je fais volte-face pour comprendre ce qui s'est passé.
Mon frère est figé au milieu de l'allée. Ses mains sont encore tendues comme pour porter un plateau imaginaire. Le siens quant à lui vient de s'écraser sur le sol, et son contenu sur la poitrine d'un type que je ne connais que de vue. Le jeune homme en question doit être âgé de quelques années de plus que nous, mais il dépasse bien Elias d'une tête. Tandis que mon frère est rouge de honte, l'autre garçon vire au vert et, dans une colère démesurée, il saisit Elias par le col et le plaque contre le mur. Sa tête cogne contre ce dernier tandis que l'autre lui susurre sûrement quelques insultes que je n'entends pas de là où je suis.
Mon sang ne fait qu'un tour. J'abandonne mon plateau pour passer par dessous la barrière qui sépare la file d'attente de la salle à manger et court jusqu'à eux. Dès que je peux l'atteindre, je pousse violemment le jeune homme qui titube. Je me place devant Elias.
— Vas-y, lève la main sur lui si tu l'oses, ça me démange déjà de te faire payer cette erreur, je le provoque en le regardant droit dans les yeux.
Elias me tire par le bras.
— C'est bon, laisse tomber Juno, tirons-nous.
Mais je me débarrasse brusquement de son emprise.
Non. J'en ai assez d'entendre ça ; laisse tomber, laisse couler, regarde ailleurs et trace ta route... je ne peux pas m'y résoudre.
Cette enflure mérite de recevoir une leçon et il ne paie rien pour attendre. Elias insiste en me disant que je risque d'avoir des problèmes et personne d'autre ne semble avoir le courage de réagir. Je m'en fiche. Je me fiche de savoir que les gens risquent de me prendre pour une sauvage et je me fou encore plus de me faire arrêter.
— Tu te crois peut-être impressionnante ? N'importe qui pourrais te manger toute crue, pas besoin de t'envoyer là-haut pour ça, se moque le type en s'approchant de moi.
Je serre très fort les poings et enfonce mes ongles dans mes paumes de mains jusqu'à sentir le sang couler entre mes doigts. Au moment où il ouvre la bouche pour parler à nouveau, je lui décoche un coup de poing en plein visage, assez fort pour sentir son nez craquer. Une spectatrice pousse un cri d'effroi tandis que deux ouvriers saisissent le garçon par l'épaule pour l'éloigner. Je voudrais le frapper encore, mais un bras passe autour de ma taille pour me retenir. Deux chargés de sécurité me trainent à l'extérieur.
❅❅❅❅❅❅
— Cadette, vous m'entendez ?
Quelqu'un saisit mon bras pour me relever : Bellelac. Il me donne une tape sur la joue. Sa voix se détache des bourdonnements, mais je ne trouve pas la force de répondre. Denor est juste derrière lui accompagné d'autres jeunes légionnaires sûrement alertés par les cris.
— Juno !
Elias nous rejoint en courant et passe ses bras autour de moi pour me soutenir.
— Juno, ça va ? Réponds-moi, merde !
Je secoue faiblement la tête, reprenant mes esprits.
— C'est bon, sortez-là d'ici, ordonne le commandant. Suivant !
— Non ! m'écrié-je soudainement.
Je me débarrasse des bras de mon frère qui recule, méfiant. Le commandant me toise d'un regard sévère.
— Je veux recommencer, dis-je fermement en soutenant son regard.
Je fais tout pour ignorer la douleur qui me traverse la nuque comme si l'on me poignardait indéfiniment. Je n'ai pas l'intention d'abandonner maintenant.
— Être un bon soldat signifie aussi savoir reconnaître lorsque l'on n'est pas à la hauteur, réplique Bellelac.
Puis il se tourne pour retourner à son poste d'observation. Je fais un grand pas en avant pour lui barrer le passage et fiche mon regard dans le siens.
— Je suis à la hauteur. Laissez-moi simplement le prouver.
Il me scrute d'un œil furieux. Il ne doit pas avoir l'habitude que l'on s'oppose à son bon vouloir. Mais je ne laisserai pas tomber. Je ne laisserai pas mes supérieurs partir avec une telle impression de moi. Je refuse d'être à nouveau la délinquante bonne à rien que j'étais à Aiôn.
— Tu penses que tu es plus forte que les autres ? Tu crois être en droit de discuter les ordres ? fait-il en approchant son visage du miens.
J'ai l'impression d'avoir déjà vécu cette situation. Je connais ce sentiment qui monte en moi lorsque je soutiens son regard. Je prends soin de ne laisser paraître aucune peur sur mon visage. J'ignore si c'est l'adrénaline ou bien l'angoisse qui me tord le ventre.
— Donnez-moi une chance de faire mes preuves.
Il ne répond pas. Denor avance pour se placer à côté de lui et ils échangent un regard entendu.
Le Sentinelle prend la parole :
— Vex, approche, ordonne-t-il.
Une fille les rejoint. Je l'ai vue en sortant du réfectoire l'autre jour, elle était avec Appolo. Elle porte l'écusson des Sentinelles. Il s'agit de la capitaine Vex Solano. Sa réputation la précède malgré son jeune âge.
— Donne à la cadette Vang cette chance qu'elle demande.
Elle sourit et secoue la tête en se plaçant face à moi. J'ignore ce que je suis censée faire.
— C'est comme ça que l'on règle les litiges ici, explique Bellelac en tournant autour de nous.
Les cadets se regroupent, bientôt imités par le reste des légionnaires présents sous le dôme.
— Un duel, rien de plus, rien de moins, commence un garçon brun qui porte visiblement le même grade que Vex. La règle est simple : faire sortir l'adversaire du cercle.
A ces mots, Vex fait craquer ses poignets. Si je dois vraiment me battre contre elle, alors je suis fichue. Elle n'est pas capitaine des Sentinelles pour rien, ce doit être une sacrée combattante.
Hésitante, je reste là sans bouger. Le "cercle" en question se résume simplement à celui formé par nos spectateurs qui nous fixent tous, impatients d'assister à la pâtée que je vais prendre. Vex resserre sa queue de cheval puis se met en position de combat, poings en avant.
— Allez, saisis ta chance, lance-t-elle ironiquement.
Je ne parviens même pas à déglutir, ma gorge est trop sèche. Mon regard croise celui de Elias. Il flippe pour moi, mais m'adresse un signe de tête encourageant.
Je lance mon poing en direction de son visage, mais elle esquive le coup avec une facilité déconcertante. Je tente une nouvelle fois, sans résultat.
— C'est tout ? se provoque-t-elle en me tournant autour.
Elle avance brusquement vers moi, ce qui a pour effet de me faire faire un bond en arrière. Elle bandit son poing en direction de mon visage, mais je me baisse aussitôt pour l'esquiver. Elle profite de cette diversion pour me saisir par les épaules et m'assène un coup de genoux dans le ventre. Je grimace.
— La peur ne te sauvera pas.
Son poing s'écrase en plein sur mon visage et j'ai l'impression de sentir ma mâchoire se décrocher. D'un coup de pieds, elle me fauche les deux jambes et je me retrouve à genoux. Pas moyen de réagir assez vite.
— La haine, oui, poursuit-elle en me regardant de haut.
— Debout ! hurle une voix derrière moi.
— Tu abandonnes ? demande une autre.
Je me relève en titubant et crache. Un filet de sang vient asperger le sol. Mes jambes tremblent.
— Allez, frappe ! ordonne le commandant Denor derrière moi.
Je tente le tout pour le tout. Je n'ai absolument plus rien à perdre. Après tout, c'est moi qui ai provoqué ça.
Je lève mes poings pour protéger mon visage, imitant ainsi la position de mon adversaire.
— Allez ma belle, attaque, s'impatiente la capitaine.
Je lance une nouvelle offensive et vise son menton. Elle esquive. J'enchaîne le plus rapidement possible avec un second coup qui effleure son oreille. Je me baisse pour éviter sa contre-attaque et décide de garder cette position pour foncer sur elle, encerclant ainsi sa taille avec mes bras et la pousser violemment sur le bord du cercle. Cela fonctionne avec la surprise, mais elle réagit vite et se dégage avant de dépasser la limite du ring improvisé. Elle pousse à son tour pour nous ramener au milieu et je tombe à la renverse, emportée par son poids largement supérieur au miens. Mon dos percute le sol et ma respiration se coupe. Je me recroqueville en position chien-de-fusil.
Vex quant à elle se relève aussitôt. Ses longs cheveux noirs viennent se coller à sa joue humide de transpiration. Elle pousse un cri bestial lorsque son pied s'enfonce à deux reprises dans mes côtes. Lorsqu'elle recule pour me laisser reprendre mon souffle, je tousse et bascule sur le côté les mains sur le ventre.
— Encore ! me somme-t-elle.
Vex est intelligente. Elle sait comment fatiguer son adversaire, comment l'affaiblir. Je me relève et positionne mes poings en garde afin de protéger mon visage de ses futures attaques. Si je ne peux pas la frapper, je peux au moins l'empêcher de me toucher.
Solano revient rapidement à la charge. J'évite quelques coups de poing en utilisant tout l'espace dont je dispose. Si je reste mobile, elle aura moins de chances de m'atteindre.
Cette technique semble fonctionner. Pendant un moment, je la balade de part et d'autre du cercle, virant à gauche, pivotant à droite et reculant de manière aléatoire pour éviter le plus de coups possibles sans pour autant contre-attaquer. Je sens mes forces revenir tandis que le visage de Vex se crispe sous sa frustration grandissante.
Je la sens perdre patience. Elle n'a plus l'air aussi fière et sûre d'elle. C'est le moment que j'attendais. Je fais mine de frapper en concentrant mes forces sur mon poing droit. Elle le bloque. J'en profite pour la frapper violemment au ventre avec le gauche. Elle se plie en deux. J'ajoute un second coup de poing en plein dans le maxillaire droit.
Surpris, le public s'exalte. J'essuie le sang qui s'écoule de mon nez d'un revers de manche avant de lever le poing pour la frapper au visage mais elle se redresse brusquement.
— Ok, ça suffit les conneries, souffle-t-elle, furieuse.
Elle fond sur moi comme un rapace sur sa proie. Son poing droit s'abat sur mon visage et je sens ma lèvre se fendre au moment où elle le touche. Déséquilibrée, je fais quelques pas de côté et recule sans m'en apercevoir jusqu'à la limite du ring, c'est-à-dire le public. Un liquide chaud et poisseux coule le long de mon menton et de mon cou. J'essuie le bas de mon visage d'un revers de manche en ignorant la douleur et quelques gouttes écarlates viennent tacher le sol.
La capitaine s'arrête un instant pour me fixer d'un air dédaigneux, puis elle agrippe mon bras et me propulse à l'autre bout du cercle. Je percute à nouveau nos spectateurs qui me renvoient aussitôt à mon adversaire. J'ai l'impression d'être une pauvre poupée désarticulée.
Comme si cela n'était pas assez, Vex tourne sur elle-même à une rapidité folle, puis son pied frappe l'arrière de mon crâne.
Sonnée, je tombe à genoux. Je la vois préparer son coup final : un nouveau coup de pied en hauteur que même mes poings en défense ne pourront parer. Je n'ai plus la force de bouger, je ne peux que planter mon regard assombri par la colère dans celui de mon adversaire, sans osciller.
— Stop ! ordonne Bellelac avant qu'elle ne frappe.
Vex cesse aussitôt tout mouvement agressif. La foule se détend et se dissout.
— Nous avons vu ce que nous voulions voir.
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