Chapitre 17 : Coup monté

PDV Jason

Je n'arrive pas à m'endormir, je ne peux pas penser à autre chose que la proximité avec Aisling et à cette envie stupide que j'ai de la serrer contre moi. J'ai hésité à accepter sa proposition à cause de ça. Je ne craignais pas tant qu'elle fasse une crise d'angoisse, mais plutôt le fait que j'allais vouloir être plus proche d'elle encore. Depuis que je l'ai vu revenir ce n'est que ça dont j'ai envie, la prendre dans mes bras, lui avouer un tas de choses que je ne devrais pas, comme le fait que je n'ai pas pu penser à autre chose qu'elle tout le long de cette semaine. Mais je ne veux pas l'affoler, après tout ce qu'elle a subit je sais que je ne suis peut-être pas ce dont elle pourrait avoir besoin, je travaille trop, avec des cas souvent similaire au sien, et je suis clairement trop vieux pour elle, elle me verrait probablement plus comme un grand frère qu'autre chose.

Aisling s'est endormi il y a plus d'un heure déjà, j'ai tenté de faire de même après m'être assuré qu'elle n'allait pas faire de cauchemars, mais quand je me suis décidé à passer dans les bras de Morphée à mon tour, le sommeil n'est pas venu. J'ai tourné dans un sens ou dans l'autre dans l'espoir de trouver la position parfaite, en vain. J'abandonne donc et récupère mon portable que j'ai déposé sur la table de chevet. Je vois tout de suite que Griffin a répondu au message que je lui ai envoyé avant de tenter de dormir. Je relis mon message rapidement avant de me concentrer sur sa réponse.

Jason : Je vous redonne votre matelas pourri dès demain...

Griffin : Un problème ? Tu t'es pas dégonflé j'espère ?

Je connais mon meilleur ami tellement bien que je le vois derrière son écran probablement mort de rire. Je suis certain qu'il savait que leur matelas était troué ou défectueux. Je réponds en sachant pertinemment qu'il ne dort pas encore et qu'il va se faire une joie de se foutre un peu plus de moi. Mais je reçois un nouveau message avant même d'avoir envoyé le mien.

Griffin : Tu dors dans ton canapé ?

J'efface mon message précédent et en écrit un nouveau rapidement.

Jason : Espèce d'enfoiré...

Un tas d'emojis qui pleurent de rire apparaissent presque aussitôt suivi d'un autre message.

Griffin : C'est un oui ?

Jason : Non... Je suis dans mon lit. Tu savais que ton matelas était pourri n'est-ce pas ?

Griffin : Il se pourrait ou non que Sarah me demande de le jeter depuis plus d'un an...

Jason : Je vais te foutre mon pied au cul, rien à foutre si tu as encore mal ! Pourquoi me l'avoir proposé ?!

Griffin : À ton avis détective ? Pas très futé en dehors du boulot à ce que je vois... Elle aurait refusé de venir chez toi si elle savait que tu finirais dans ton canapé. Mais on n'avait pas envisagé que tu finisses dans le lit avec elle... À moins que tu sois l'enfoiré qui la laisse dormir dans ton canapé ?

Jason : Elle n'est pas dans le canapé...

Griffin : Sarah applaudit.

Jason : Il ne c'est rien passé.

Griffin : On n'a rien dit. Tu peux me rendre un petit service ? Comme ça fait un moment que je dois foutre le matelas en l'air... Tu pourras le faire à ma place ?

Jason : Vas te faire voir.

Je n'ai pas le temps d'attendre de réponse de Griffin que je commence à entendre Aisling remuer à côté de moi. Je comprends tout de suite que quelque chose ne va pas et alors que je pose mon portable elle commence déjà à geindre. Des phrases entrecoupé sortent comme un murmure de ses lèvres, je n'ai pas besoin de m'approcher pour comprendre le seul mot qui me tord l'estomac : Ben.

Comme la première fois où j'ai assisté à ses cauchemars je ne sais pas quoi faire, j'ai peur de la réveiller et de la faire paniquer. Mais je ne peux définitivement pas la laisser comme ça. Je tente donc de m'approcher lentement d'elle, tentant de ne surtout pas la faire bondir quand je serais à proximité suffisante pour lui caresser le bras et essayer de la rassurer. J'ai à peine posé ma main sur son épaule qu'elle se tend aussitôt, un « non » étranglé par les larmes sort de ses lèvres. Je m'en veux de lui faire peur mais je ne peux vraiment pas la laisser comme ça. Alors je m'approche encore d'elle et chuchote aussi paisiblement que je peux contre elle.

— C'est un cauchemar Aisling, tout va bien. Je suis là pour toi, Ben est loin et ne peux plus te faire de mal, je te le promets.

Je la sens se détendre peu à peu, elle cesse lentement de pleurer puis se rapproche d'elle-même vers moi. Je n'hésite pas une seule seconde à la prendre dans mes bras quand sa tête se pose sur mon torse. Je la garde contre mon flanc sans jamais la lâcher tout en continuant à chuchoter près de son oreille que tout ira bien et que je suis là pour elle, que je le serais aussi longtemps qu'elle en aura besoin et que je vais prendre soin d'elle. Je sais qu'elle se rendort sans s'être réellement réveillée mais je ne m'arrête pas, c'est une promesse silencieuse que je lui fais à elle, mais surtout à moi. Je ne supporte pas de la voir comme ça, je préfère quand elle sourit et je ferais tout pour que cela arrive bien plus souvent à partir de maintenant. Son bien être est tout ce qui m'importe à partir de ce moment là et j'espère qu'elle va le comprendre. Et même si elle me plait énormément mais qu'elle ne me verra que comme un grand frère ou un ami alors ça m'ira parfaitement, tant qu'elle retrouve le bonheur c'est tout ce que je souhaite.

Il ne m'en a pas fallu plus hier soir pour enfin réussir à m'endormir. Une fois que j'ai compris que je ne pourrais pas laisser Aisling sortir de ma vie, il a été beaucoup plus facile pour moi de sombrer dans le sommeil. Cette dernière est restée contre moi toute la nuit, je l'ai vite compris quand je me suis réveillé dans la même position où je me suis endormi. J'essaie de ne pas bouger pour la laisser se reposer autant que possible, je sais que son sommeil a été léger ces derniers jours, probablement même ces derniers mois, vois années... Je veux qu'elle profite du calme et de la sécurité qu'elle peut avoir ici tant qu'il dure. Je suis d'ailleurs surpris que Van Gogh ne soit pas encore venu nous déranger mais ce chien est tellement intelligent que je ne serais pas surpris s'il avait compris comme moi qu'Aisling avait besoin de dormir. Cette dernière bouge d'ailleurs légèrement contre moi et resserre son bras qu'elle a passé autour de ma taille. Je commence à caresser son avant bras sans même réfléchir à ce que je fais, un soupir de plaisance s'échappe de ses lèvres ce qui m'incite à continuer alors que sa respiration change me faisant comprendre qu'elle se réveille doucement. J'arrête alors mes caresses aussitôt mais encore une fois elle m serre davantage, allant même jusqu'à passer une jambe sur les miennes et en murmurant :

— Encore.

Je souris et m'exécute. Mes doigts effleurent sa peau et se baladent tout le long de son bras. Cela dure un moment, aucun de nous ne bouge plus que nécessaire ou ne dit quoi que ce soit alors que je sais qu'Aisling est désormais réveillée. Elle n'a pas l'air d'être dérangé par cette proximité ce qui me rassure, elle sursautait dès que j'essayais de l'approcher la première fois que l'on c'est vu, ce changement me fait du bien, je vois qu'elle a confiance en moi et je compte bien lui prouver qu'elle pourra continuer. Aisling brise finalement le silence la première

— Est-ce que... tu veux que je me pousse ? Je suis désolée, j'envahi encore plus ton espace et...

Je la coupe avant qu'elle ne s'excuse plus. Je suis certain qu'elle pense encore qu'elle me dérange à être ici, j'ai l'impression qu'elle se voit comme du boulot pour moi alors même que c'est loin d'être le cas. Tellement loin...

— Tu n'envahi rien du tout Aisling crois moi. Si tu me dérangeais tu ne serais pas ici, je ne t'aurais pas laissé dormir dans mes bras et je ne serais pas heureux de t'avoir avec moi.

À ces mots sa tête se redresse aussitôt, ses yeux s'ancrent aux miens, j'ai peur d'avoir dit une connerie mais je suis vite rassuré quand un petit sourire vient naître sur ses lèvres.

— Tu es heureux ? demande-t-elle en rougissant légèrement.

J'hoche la tête et me gratte la nuque et réfléchis un instant avant de répondre. Je peux soit lui dire la vérité et risquer de lui faire peur ou y aller plus lentement et risquer de lui faire penser que je souhaite juste devenir amis.

— Je... Oui. Je suis heureux que tu sois là, je te l'ai dit j'ai regretté comment on s'est quitté quand je t'ai déposé. Ce n'est pas ce que j'ai voulu mais j'ai paniqué parce que je ressentais des choses que je ne pense pas avoir le droit de ressentir. Tu viens tout juste de te sortir d'une relation toxique, et tu as surement besoin de temps avant de t'en remettre et de penser à trouver quelqu'un d'autre, ce que je comprends mais je suis heureux que tu sois là parce que j'ai envie que tu te sentes mieux et que tu te sentes en sécurité et je pense avoir compris que c'est comme ça que tu te sens ici.

Je vois son sourire s'agrandir avant qu'elle ne le cache en reposant sa tête sur mon torse. Je ne vois plus son visage quand elle me répond.

— Tu as raison sur une chose. Je me sens bien ici, vraiment très bien même.

— Et j'ai tors sur quelque chose d'autre ? je demande curieux de connaitre le sens de sa phrase.

— Sur deux choses.

— Dis-moi.

— Tu as le droit de ressentir ce que bon te semble d'une part.

Je souris malgré moi à l'entendre dire ça et la laisse continuer alors que mes doigts ont recommencé leur caresse sur son bras.

— Ensuite, je ne pense pas qu'il y ait un temps recommandé pour me remettre dans le bain. Je pense que ce sera quand je me sentirais de nouveau en sécurité avec un homme, que je n'aurais pas peur quand il me touchera, que je ne craindrais pas de partager un lit avec lui et quand j'arriverais à dormir toute une nuit sans penser qu'il va m'arriver quelque chose le lendemain.

Je n'ose pas répondre à ce qu'elle vient de dire. J'ai peur de mal avoir compris et de me faire de faux espoir, je ne suis pourtant pas aussi inquiet d'habitude, mais je vois bien que c'est différent cette fois. Je tiens déjà tellement à elle. Alors au lieu de dire une bêtise je redresse doucement ma tête et vient poser mes lèvres sur le haut du crâne d'Aisling. J'y vais lentement pour ne pas qu'elle sursaute, je sais que si elle ne réagit pas de la même façon que la semaine précédente, quand on s'est réveillé dans le canapé et que j'ai tentais de la toucher, alors c'est qu'elle me fait vraiment confiance. Je l'embrasse là et laisse traîner ma bouche un peu plus longtemps que nécessaire. Aisling ne bouge pas, elle n'a pas eu un seul mouvement de recul ou de peur ce qui me soulage tellement.

Quand je repose la tête sur l'oreiller plus aucun de nous ne dit un mot pendant longtemps, jusqu'à ce qu'Aisling rompe de nouveau le silence.

— Je suis vraiment endommagée. Je ne sais pas comment je guérirai, je ne sais même pas si je guérirai, c'est ancré en moi au fer rouge, aucun homme ne pourrait supporter de vivre avec une femme qui pensera sans cesse à son ex et qui pourra se mettre à paniquer n'importe quand, pour n'importe quelles raisons et dans n'importe quelles situations. Je serais surement un poids pour n'importe qui. Et je n'ai que vingt et un an les hommes de mon âge n'auraient pas la maturité nécessaire pour faire fasse à ça. J'ai été pourri de l'intérieur.

Mon cœur se serre pour elle à l'entendre se dénigrer ainsi. Elle se trompe tellement en pensant ça d'elle. Elle est loin d'être pourri et je suis sûr qu'un spécialiste pourra l'aider si elle le souhaite.

— Je pense que tu as tors. Tu ne seras jamais un poids si tu trouves la bonne personne, et puis il te suffit de prendre un homme un peu plus mûr.

—Plus mûr de douze ans, tu penses que ce serait suffisant ?

Je la sens sourire contre moi et le mien apparait rapidement. Elle a l'air d'avoir compris mon sous entendue et ne le prends apparemment pas mal.

— Ce serait probablement l'idéal. À cet âge un homme aura eu de l'expérience, aura vécu suffisamment de chose pour être prêt à aider la femme avec qui il veut être.

— Tu as surement raison. Et puis les hommes mûrs sont beaucoup plus attirants selon moi.

Je pense maintenant que les choses sont plutôt claires entre nous. Elle me plaît et la réciproque à l'air d'être vrai, il suffit juste de laisser faire le temps et de voir où tout ça nous mène, s'il nous mène quelque part évidement. Je laisserais Aisling décider de ce qu'elle souhaite et ne lui mettrais en aucun cas la pression.

Cette dernière quitte d'ailleurs la position qu'elle occupait depuis un long moment et se redresse avant de sortir du lit. Elle me regarde un instant et rougis avant de se mordre la lèvre et baisser la tête. Si seulement je savais à quoi elle pense...

— Tu as quelque chose de prévu aujourd'hui ? demande-t-elle enfin sans me regarder.

— Je dîne tous les samedis soir -ou presque- avec Sarah et Griffin sinon je n'ai rien à faire de particulier dans la journée. Pourquoi ?

— Cela te dérangerais de m'accompagner pour faire quelques achats ? Je ne veux pas envahir ton appartement ou quoi que ce soit mais j'aurais vraiment besoin de vêtements et...

Elle hésite, elle a l'air de plus en plus nerveuse, je me redresse finalement à mon tour et sors du lit pour me poster devant elle, en laissant un assez grand espace entre nous pour ne pas l'envahir. Je l'encourage à continuer sa phrase. Elle se lance après une dernière hésitation et en me regardant enfin.

— J'ai beaucoup discuté avec une conseillère du centre ses derniers jours, je m'interrogeais énormément sur mon avenir et elle m'a conseillé de reprendre mes études puisque je n'étais plus très loin d'obtenir ma licence pro.

J'hausse les sourcils surpris et essaie de faire un calcul rapide dans ma tête, elle est trop jeune pour avoir pu arrêter à une licence à moins qu'elle était en avance. Bizarrement ça ne m'étonnerait pas plus que ça, je sens depuis le début qu'il y a quelque chose de spécial chez elle, un truc qui m'attire plus que n'importe quelles femmes auraient pu le faire avant et bien que cela me fasse un peu peur, cela me plaît encore plus et me donne envie comme jamais de la connaitre davantage et de continuer à partager des moments avec elle.

À penser comme ça, j'ai l'impression d'entendre Sarah il y a plus de quinze ans me décrire Griffin...

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