Scarlett se réveilla au son insistant de son réveil. La jeune fille poussa un grognement, et entrouvrit les yeux pour l'éteindre, avant d'enfouir de nouveau son visage dans son oreiller. Avec un peu de chance, personne ne s'en apercevrait, et elle pourrait faire une grasse matinée en douce. Il ne lui fallut pas beaucoup de temps pour commencer à se rendormir. Mais à peine cinq minutes après la sonnerie intempestive du réveil, le bruit de la porte de sa chambre s'ouvrant sur sa mère la tira de nouveau du sommeil.

''- Allez, debout jeune fille. C'est l'heure !''

La mère de Scarlett ouvrit les volets, laissant la lumière du jour se déverser dans la petite chambre de l'adolescente. Cette dernière ne bougea pas, émettant simplement un grognement mécontent lorsque sa mère vint lui tirer sa couette pour s'assurer qu'elle ne se rendorme pas.

''- J'ai fait des pancakes. Si tu veux avoir une chance d'en manger, tu ferais bien de venir avant que ton frère ne les aies tous finis.''

Après avoir déposé un baiser sur le front de sa fille, la femme sorti en refermant la porte.
Scarlett fini par se décider à ouvrir les yeux, et se redressa dans son lit avec un bâillement. Pourquoi fallait-il que ce soit toujours si compliqué de se réveiller ? Jettant un coup d'oeil a son bureau, elle réfléchit à la journée qui l'attendait. Elle commençait par maths. Ensuite, c'était le cours de français philo.
Maths, sérieusement ? pensait elle. Quel psychopathe serait capable de mettre maths en première heure le lundi matin à de pauvres adolescents innocents ?
Elle continua de fixer son bureau sans bouger, les paupières lourdes. La jeune fille sentait qu'elle se rendormait... Elle secoua la tête, et prit son courage a deux mains en se levant. Les yeux encore tout ensommeillés, elle sorti de sa chambre, et descendit les escaliers de bois, la main sur la rampe, jusqu'à la salle a manger. Assis à la table, son assiette pleine de pancakes encore chauds, un jeune homme lui fit un signe de tête.

''- 'lut. Lui lança t'il.
- Salut frangin.''

Il piocha de nouveau dans la petite pile de pancakes au centre de la table, pour en rajouter à la sienne, dans son assiette. Scarlett fronça les sourcils.

''- Eh, laisses m'en !
- T'inquiète, je veux juste être sûr que tu vas pas te goinfrer égoïstement.
- Alex !
- Bah quoi ? C'est pas ma faute si t'es un danger public dès que tu vois de la bouffe, rétorqua t'il avec un sourire en coin.
- T'es sérieux ?!''

La jeune fille plongea la main dans la direction de l'assiette de son frère, et lui arracha quelques pancakes en le fusillant du regard. Lui ? Il est mort de rire. Scarlett dirige maintenant son attention sur le siège vide en bout de table. Le siège de son père, déjà parti travailler. Elle attrapa le sirop d'érable, posé à côté de la pile de pancakes centrale, et en verse un peu sur les siens. Son petit déjeuner préféré. C'était la seule chose qui pouvait sauver sa journée de l'horreur d'un cours de maths en première heure. Elle mangea ses pancakes, le regard dans le vide. La seule chose qu'elle voulait faire, c'était dormir. Ne serait ce qu'un peu plus. Une fois qu'elle eût terminé, la jeune fille entreprit de débarrasser son assiette et se dirigea mollement vers la salle de bain, où elle entra. Avant de ressortir avec un ''merde'' râleur.

''- Le language, Scarlett, la reprit sa mère.
- Désolée. J'ai oublié mes vêtements en haut, je reviens.''

Avec un soupire, l'adolescente remonta l'escalier, enjambant une marche sur deux. Arrivée dans sa chambre, elle prit des sous vêtements, un jean large noir et vola un pull dans l'armoire de son frère. Puis elle redescendit et fila sous la douche.
Une fois sortie de la salle de bain, son frère la succéda, puis ils se dirigèrent tout les deux vers le bus qui devait les emmener au lycée après avoir souhaité une bonne journée à leur mère. Alexandre, le frère de Scarlett, avait un an de plus que sa soeur. Il avait redoublé son CE1, et depuis, les deux jeunes avaient toujours été dans la même classe. La jeune fille salua le chauffeur, avant d'aller s'asseoir vers le milieu à une place libre, côté fenêtre, et posa son sac sur le siège à côté d'elle pour pouvoir dormir tranquillement sur le trajet. C'était toujours un quart d'heure de gagné. La tête appuyée contre la vitre, elle ferma les yeux et re plongea dans le sommeil.
Scarlett se réveilla en sursaut. Quelqu'un lui tapotait l'épaule.

''- On est arrivés, flemmarde, dit un garçon.''

La jeune fille tourna la tête. Tout allait bien, c'était son frère. Elle se leva, et balança son sac sur son épaule.

''- Je te suis, c'est bon.''

Elle se sorti de la rangée de sièges et se glissa derrière Alexandre, et ils sortirent tout deux du bus en marchant vers le lycée. Le bus était arrivé légèrement en retard, tout le monde était déjà entrain de rentrer. Scarlett repéra un groupe de filles de sa classe, et trottina pour les rattraper. Arrivée devant la classe, elle alla s'asseoir à sa place, au milieu de l'avant dernier rang, à côté d'Abby, la seule à peu près amie qu'elle s'était faite pour le moment. Elle posa son sac par terre, et sorti ses affaires. La chaise de sa voisine était vide. Abby avait un rendez-vous médical, et ne serait pas là de la journée. Le professeur entra et commença un long court ennuyeux sur les limites de suites. Scarlett posa sa tête dans sa main et ferma les yeux. De toute façon, elle n'y comprenait rien, à son histoire de limites de suites.
La sonnerie retentit, et la jeune fille fila en direction du cours de philo. Voilà un cours intéressant. Dans le couloir, une foule d'adolescents pressés se bousculaient pour rejoindre leurs salles de classe. Un garçon percuta l'épaule de Scarlett, et s'excusa en s'éloignant. Une fille lui marcha sur le pied, et lui rétorqua de faire attention à où elle marchait lorsque Scarlett protesta. Finalement, Alexandre lui passa devant, et lui permit une petite bulle d'air dans cette masse en mouvement. Il passa un bras derrière sa soeur pour lui permettre d'entrer sans trop se faire bousculer.
Après s'être de nouveau installée, cette fois au bout droit du premier rang, l'ado tourna la tête vers le tableau, où se tenait maintenant Madame Collin, sa professeur de philosophie. Aussi sa prof préférée.

''- Aujourd'hui, nous allons parler du bonheur, commença Madame Collin. Quelqu'un connaît-il l'étymologie du mot bonheur ?''

Personne ne leva la main. Madame Collin poursuivi.

''- Selon l'étymologie, le mot ''heur'' signifie ''hasard''. D'où l'opposition de ''bonheur'', le bon hasard, et de ''malheur'', le mauvais hasard, pour simplifier les choses. Maintenant, qu'est ce qui, selon vous, défini le bonheur ?''

La professeur croisa les bras en s'asseyant à moitié sur son bureau, attendant les réponses de ses élèves. L'heure se poursuivi dans le calme, tout comme le reste de la journée.
Scarlett terminait plus tôt : son dernier cour était à 15h. Elle avait prévu de traîner un peu en ville avant de rentrer. À la sortie du lycée, une voix féminine l'interpella.

''- Eh ! C'est toi la nouvelle ?''

L'adolescente se retourna. Elle était arrivée il y avait déjà quelques semaines ; à ce compte, on pourrait penser qu'elle ne serait plus considérée comme ''la nouvelle''. Mais elle s'était si peu intégrée aux jeunes du lycée que ce surnom la suivait toujours -et la suivrait sûrement pendant encore quelques semaines supplémentaires-.
Devant elle se tenait une jeune fille en survêtements de sport, ses longs cheveux châtains ramenés en queue de cheval faite visiblement avec soin, et ses jolis yeux verts braqués sur Scarlett.

''- Oui ? Répondit la jeune fille.
- Je m'appelle Julie. Je suis en première C.
- Moi c'est Scarlett, je suis en ter..
- Terminale B oui, je sais'' la coupa la dénommée Julie.

Scarlett fit la moue. Elle venait de se faire couper dans sa propre présentation, ça commençait bien. La jeune fille se tu, l'air renfrogné.

''- Je vais traîner au centre commercial avec des potes. Ça te dit de venir avec nous ?''

Depuis son arrivée, Scarlett ne s'était faite aucune amie. À part Abby, et encore, c'était plutôt une connaissance avec qui elle s'entendait bien qu'autre chose. Peut être qu'elle devrait essayer de se rapprocher de quelques personnes... Même si l'attitude de cette Julie n'était pas très engageante.

''- Pourquoi pas.
- Cool. Suis moi, elles sont là bas.''

Julie agita les bras en l'air en direction d'un petit groupes de filles qui ricanaient, les yeux rivés sur le téléphone de l'une d'entre elles. Elle agrippa le bras de Scarlett, et la tira sans ménagement vers ses amies.

''- Les filles, Scarlett. Scarlett, je te présente Louna, Lina, et Julia.''

Lina et Julia dévisagèrent Scarlett, tandis que Louna la regardait de bas en haut du coin de l'oeil. Cela ne dura qu'un instant, un tout petit instant, à peine saisissable. Mais ça n'échappa pas à Scarlett.
Qu'est ce que je fais avec elles... Et surtout, pourquoi la seule personne à venir vers moi fait partie des pestes du lycée ? La jeune fille chassa cette pensée de son esprit. Elle devait être sociable. Qui sait, avec un peu de chance, elles n'étaient pas vraiment... Pas vraiment ça.
Les filles arborèrent rapidement un sourire éclatant.

''- Scarlett ! C'est toi donc ! Lança Lina.
- J'adore tes cheveux ! C'est qui ton coiffeur ? La complimenta Louna.
- Arrête, t'as vu ses fringues ? T'es trop canon meuf ! S'empressa d'enchérir Julia.
- Ouais... Merci...''

L'adolescente recula d'un pas. Elles s'étaient toutes ruées sur elle, et elle avait besoin de son espace vital. Ça puait l'hypocrisie à plein nez. Elle n'était pas dupe. Depuis toujours, elle tenait à fuir ce genre de filles, qui ne juraient que par les fausses amitiés et la popularité.
Courage... Attends de voir, peut être que ce sera moins... Pire ?
Julie dégaina son portable, et se colla à Scarlett. Les autres filles s'agglutinèrent contre elle aussi, et Julie prit une photo de leur petit groupe en envoyant un baiser à la caméra. Scarlett, un peu perdue, se contenta d'un sourire timide, presque maladroit, et reflétant surtout son malaise.

''- Donnes moi ton insta, je vais te rajouter au groupe !
- Euh...
- Oublies pas de nous envoyer la photo lol.
- Attends je vais t'ajouter aussi ! S'exclama Lina.
- Du coup ton insta ?
- Scar.skye789...
- C'est toi avec la pâquerette en photo de profil ?
- C'est une marguerite... Mais oui, c'est moi...
- C'est pareil.''

Julie ajouta Scarlett, et lui dit qu'elle l'intégrerai au groupe lorsqu'elle aurait accepté sa demande d'abonnement.

''- T'as pas beaucoup d'abonnés toi. Julie gloussa. Mais t'inquiètes c'est pas grave on s'en fou de toute façon.
- On y va ? Scarlett essaya de la couper court.
- Le gars dans ta classe, tu sais le grand brun avec un an de plus, c'est ton frère ?
- Oui... Pourquoi ?
- Proposes lui de venir aussi ! Qu'il reste pas tout seul !''

La jeune fille leva un sourcil. Elle commençait à comprendre où ce groupe de pestes voulait en venir.

''- Il termine plus tard. C'est ses heures de spécialité.
- Oh... Dommage. Fit Julia avec un air blasé.
- Dites les filles, vous voulez pas plutôt qu'on se fasse une aprèm shopping ensemble jeudi ? Proposa Louna.
- Ouais. Scarlett, on se retrouvera devant la grille.
- Ton frère pourra venir cette fois si il veut.''

Scarlett roula des yeux. Elle ramassa son sac, qu'elle avait posé par terre, et recula.

''- Sans moi. Si mon frère vous intéresse, vous avez qu'à bouger vos petites fesses bien trop serrées dans vos leggings moulants et aller lui parler en face. Bye.''

Sur ces mots, elle tourna les talons et s'en alla.
Finalement, elle décida de rentrer directement chez elle. Le chemin du retour se fit à pieds. Elle se ferait de vraies amies à son rythme, point. Voilà la conclusion qu'elle avait tiré à la suite de son échange avec les jeunes pimbêches de première. Lorsqu'elle arriva chez elle, elle trouva la maison vide. Sa mère était partie travailler à son tour. Scarlett sorti ses clefs de sa poche, et rentra. Elle posa son sac contre le mur de l'entrée, comme tout les soirs, avant de monter dans sa chambre. Elle n'avait aucun devoir, ce qui était rare, et elle n'en était pas moins heureuse au contraire. L'adolescente s'assit sur son lit, en tailleur, et prit sa guitare avant de commencer un air de Metallica.
Après le repas, la jeune fille souhaita bonne nuit à son frère, puis remonta pour se laisser tomber sur son lit. Le lundi était toujours la journée la plus épuisante. Elle se glissa sous la couette, et passa un bras sous son oreiller, avant de fermer les yeux, attendant le sommeil. Ce dernier vint assez rapidement ce soir là.
Un sommeil profond, silencieux et sans rêve.