16) Emily Turner : ... mais noyé sur tes lèvres
— Bonsoir, messieurs-dames. Avez-vous réservé une chambre pour la nuit ? Je peux vous trouver quelque chose au plus vite si ce n'est pas le cas.
La jeune femme au guichet scruta Christopher Bang de haut en bas lorsqu'il entra dans le hall de l'hôtel. Elle semblait baver intérieurement devant sa plastique parfaite. Un regard furtif vers Emily pour jauger la femme osant lui voler sa place à ses côtés. Irene, son nom inscrit sur le badge en plastique blanc, arborait un rictus en voyant le visage pâle et le manteau trop large de l'autre femme.
— Je n'ai pas réservé, non. Mais je voudrais deux chambres, annonça le dieu grec aux cheveux bouclés.
Irene sourit de satisfaction. Deux chambres ! Parfait. Évidemment, il n'allait pas partager un lit avec une femme aussi basique. Il pourrait plutôt l'inviter elle à passer une nuit torride dans la meilleure suite de l'hôtel. Elle vérifia, puis revérifia une deuxième fois pour être sûre, mais le résultat fut le même.
— Hmm... Je suis désolée, je n'ai plus qu'une seule chambre de disponible, s'excusa-t-elle intérieurement exaspérée.
Il n'allait sûrement pas accepter...
— On fera avec, dit-il en sortant une black card pour la poser nonchalamment sur le comptoir en marbre noir.
Irene ravala ses paroles amèrement. Vraiment pas son jour de chance.
— Soit. Je vous enregistre à quel nom ? grinça-t-elle.
L'homme d'affaires au visage d'ange se tourna vers sa compagne et ne lui laissa pas le temps de parler, répondant calmement :
— Christopher et Emily Bang, conclut-il avant de se diriger vers l'ascenseur.
Emily se détacha aussitôt de l'emprise de son patron lorsque les portes se refermèrent.
— Ça vous amuse de me mettre mal à l'aise ?
— Énormément, ricana-t-il en la fixant.
— Emily Bang, elle tenta de s'imaginer à l'autel dans une robe blanche, jamais de la vie, jura-t-elle en sortant de la boîte en métal.
Chambre 009, le couloir sombre, la lumière tamisée, puis la chambre sobre organisée autour d'un lit double tellement spacieux qu'ils auraient pu y faire entrer tout un cartel. Emily faillit s'étouffer en voyant Christopher enlever sa cravate et déboutonner sa chemise d'une main.
— Je vais me doucher, dit-il.
Emily acquiesça, déboussolée. L'eau commença à couler, elle reprit enfin son souffle. La chambre semblait soudainement trop petite. L'autre côté du lit n'était finalement pas si éloigné. Elle prit un moment avant d'enlever le long manteau noir que Christopher avait déposé sur ses épaules.
Elle alluma son téléphone toujours bloqué sur cette phrase stupide. Deux heures du matin.
Elle allait devoir partager une chambre avec son boss, le leader d'un gang, l'homme qui avait pourri sa vie et commençait à hanter ses nuits.
Emily se glissa sous les draps, entièrement habillée. L'eau cessa de couler dans la salle de bain adjacente. L'obscurité totale de la chambre la rassurait autant qu'elle la plongeait dans une atmosphère terrifiante. C'était comme être à nouveau dans cette pièce, au fond du sous-sol pourri du Palace. Elle devait lutter contre une crise d'angoisse imminente. Mais à ce moment précis, Christopher sortit, une serviette autour de la taille. Elle ferma les yeux aussitôt, le voyant dans la lumière de la salle de bain, sortant et allumant une petite lumière près de la porte.
— Tu ne comptes pas prendre de douche ? demanda-t-il en s'arrêtant.
— Non. Pas de douche, répondit-elle en serrant fortement le drap contre elle.
Le silence qui s'ensuivit la fit paniquer. Que faisait-il ? La regardait-il dormir ? Ou se déshabillait-il ?
Elle ouvrit les yeux doucement... mais tomba sur une vision inattendue. Christopher était de dos, la serviette posée sur une chaise, remettant son pantalon et sa chemise blanche. Ce n'était pas cela qui la figea. Elle ouvrit grand les yeux en parcourant du regard le dos de Monsieur Bang, marqué de cicatrices profondes et anciennes.
Des coups de fouet ? Une attaque qui avait mal tourné ? De l'automutilation ? Des représailles qui avaient laissé des marques indélébiles ?
Emily était sans voix, incapable de détourner le regard de ce dos à la fois musclé et marqué.
— As-tu peur ? Ou bien de la pitié ? demanda-t-il, la voix grave, laissant Emily sursauter. Elle vit son reflet dans le miroir, et il avait dû percevoir la douleur traverser ses yeux sombres.
Elle resta figée, incapable de répondre.
Il tourna légèrement la tête. Elle ne pouvait voir que son profil, et la grande main rugueuse qui effleurait son flanc gauche. Il semblait prêt à dire quelque chose mais enfila rapidement sa chemise, presque avec une pointe de honte, puis éteignit la lumière.
Le corps chaud de Christopher glissa sous la couette à côté d'elle. Il s'installa rapidement, faisant pencher légèrement le lit. Dans l'obscurité totale, impossible de savoir s'il était tourné vers elle ou non.
Cette soirée semblait figée dans le temps, suspendue dans la réalité, comme un mirage hors du temps. Elle avait complètement oublié sa crise d'angoisse, sa haine envers cet homme odieux, et même la peur constante liée au bracelet à son pied. Inconsciemment, sa tête se tourna sur l'oreiller, et elle fixa, dans le noir, le dos de l'homme qui reposait.
La lueur de la pleine lune traversait les persiennes, peignant sa silhouette d'une aura éthérée dans la pièce. Dans ce silence, cet espace paisible dénué de toute odeur, elle aurait pu céder à une impulsion sans regret.
Sa main, presque sans réfléchir, s'avança. Le tissu léger et doux de sa chemise glissa entre ses doigts. Emily se souvenait de chaque ligne, comme si chacune était gravée dans sa mémoire. Comme s'il anticipait son geste, Christopher émit un léger grognement de malaise. Au début, c'était maladroit, mais bientôt, elle sentit réellement les cicatrices sous sa peau et les suivit du bout des doigts.
— Est-ce que ça te fait mal...?
Aucune réponse.
— Est-ce toi qui te les ais faites?
Toujours pas de réponse, juste un mouvement. Enfin, Christopher se retourna pour la regarder dans la pénombre. Avec leur position, elle était presque certaine qu'il pouvait voir son visage à travers les volets laissant passer une mince lumière.
Sa main rugueuse attrapa la sienne suspendue entre eux, l'approchant de ses lèvres. Qui aurait pensé qu'il serait si délicat?
— On me les a infligées. Quand j'étais petit, dit-il calmement.
Cette confession accroît la tension. Emily aurait voulu le réconforter, mais était-il judicieux de vouloir réconforter cet homme ?
— Qui? Elle sentit qu'il ne voulait pas répondre. Christopher glissa juste une mèche de ses cheveux bruns derrière son oreille et ferma les yeux.
— Dors. On se lève dans quatre heures et tu dois être en forme pour demain.
Elle le repoussa.
— Parle pour toi. De toute façon, je suis incapable de dormir dans le noir comme ça. Tu ne le sais peut-être pas, mais quelqu'un m'a enfermé de force dans une cave, et depuis, j'ai un léger problème avec le noir.
Elle perçut l'ombre d'un sourire sur son visage. Il devait aimer les répliques cinglantes. Mais cela ne l'empêcha pas de la tirer contre lui, plaquant sa tête contre sa poitrine et la serrant fermement. Elle aspira involontairement son parfum boisé, et évidemment, il s'arrangea pour qu'elle ne puisse pas s'échapper.
— Je sais. Maintenant, dors.
Ce fut sans arrière-pensées qu'elle glissa ses mains le long de son ventre pour venir les placer dans son cou pour enfin venir poser ses lèvres sur les siennes. Christopher ne rechigna pas. Il vient même agrémenter le baiser de morsure délicieuses et d'un échange de caresses affreusement érotiques. L'envie était là, depuis combien de temps ? C'était difficile à dire... Mais ce baiser n'était pas qu'un simple baiser. C'était l'échange unique et honnête de tous ce qu'ils avaient gardé en eux depuis le début, de toute cette haine, de l'attirance ignoble qu'elle ressentait pour lui et de l'amour qu'il reconnaissait pour la première fois.
Y avait-il au moins une raison de s'arrêter ?
Christopher glissa sa main dans les cheveux d'Emily pour qu'elle s'éloigne, simplement pour l'embrasser de plus bel. Il lui était monté dessus, l'englobant de tout son corps, emprisonnant ses moindres faits et gestes de ses grands bras massifs.
Il n'y aurait pas de marche arrière. De toute façon ils n'avaient fait que courir en avant, droit vers leur pertes.
Le temps de penser à leur fin et Christopher était déjà sous son t-shirt, à malmener les seins de sa compagne d'une nuit. Elle se détesta de ne pas avoir envoyé ses principes se faire foutre plutôt et de ne pas avoir goûté à ce délice avant.
— Arretes de rêvasser. Concentre-toi sur moi et seulement sur moi. Dit-il en lui mettant une petite tappe sur l'intérieur de la cuisse.
Emily sursauta mais ne dit rien. Elle aurait pu se plaindre mais ça aurait été l'inverse de tout ce qu'elle voulait. Il la redressa, assit l'un en face de l'autre, elle défit son crop-top et sa jupe et lui sa chemise. Quand il se tourna pour poser leur affaires sur le sol, elle en profita pour se glisser dans son dos. Christopher se stoppa net.
— Ne jamais tourner le dos à son adversaire. Se moqua-t-elle en commençant par de langoureuses caresses.
L'homme était contre elle, les yeux fermés en train de plonger dans un plaisir intense. Comment pouvait-il avoir oublié à quelle point cette femme le rendait fou ?
Il y avait peut-être un côté dominateur chez elle puisqu'elle pris un grand plaisir à le voir se tortiller, se mordre les lèvres pour ne pas gémir et s'empêcher de finir vite.
— Emily... siffla-t-il une première fois. Ne joue pas avec le feu.
Elle s'appliquait particulièrement sur les extrémités qui le fit balancer la tête en arrière.
— Alors c'est son petit nom ? Le feu ?
Le directeur du Palace attrapa sa main et accéléra ses mouvements lui-même si elle ne voulait pas le faire. Les gémissements et souffles rauque de Christopher envahissent la chambre tandis qu'Emily en profite pour se glisser dans son cou.
Mais quand elle eut le temps de relever la tête pour essayer d'apercevoir l'heure sur la table de chevet de l'hôtel, elle ne trouva pas de table de chevet. Tout avait disparu. Ca n'avait rien d'une chambre d'hôtel. C'était même la chambre de Christopher, chez lui, dans sa maison. C'était d'ailleurs son lit, avec les draps en soie bleu roi et les meubles en bois foncé. Qu'est ce que-
— Emily réveilles-toi ou je pars sans toi.
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