8. Confrontation

- Il pourrait toujours être en Amérique ?

- Non, ami Tony, Loki est bien trop intelligent pour rester aussi près de nous.

- Mais il aurait très bien pu le faire, sachant qu'on ne penserait jamais à le chercher si près, non ?

Natasha haussa un sourcil, regardant tour à tour le milliardaire et l'asgardien. Il n'y avait rien d'étonnant au fait que ce soit elle qui propose cela, car c'était exactement ce qu'elle aurait fait et elle était toujours aussi sûre que Loki n'était qu'un fourbe, manipulateur et cruel. Ce qu'il était, du moins en partie, il ne fallait pas prendre le Jotun pour un ange non plus. Thor, cependant, se contenta de faire non de la tête avant d'expliquer :

- Mon frère veut s'éloigner de nous pour des raisons que seul lui-même comprend, mais il est toujours prudent, que ce soit consciemment ou non. Il s'est peut-être caché, mais avec la menace qui plane au-dessus de sa tête, il a forcément laissé possible le fait de le retrouver. Et ce, encore une fois, qu'il le sache ou l'ignore.

- J'ai du mal à comprendre comment tu peux savoir tout ça, interrompit Clint. Vous ne faites que vous battre sans arrêt !

- Nous avons passé des siècles tous les deux, ami Barton. J'ai eu plus de temps que n'importe qui pour cerner mon frère, et il me connait tout aussi bien.

En effet, le Dieu du Tonnerre et le Jotun avaient passé toute leur enfance ensemble. Thor se souvenait encore du jour où son père et sa mère lui avaient amené un tout petit Loki qui riait et plongeait ses iris verts dans les yeux océans du petit blond, qui pour sa part ne dépassait pas les trois ans humains. C'est Frigga qui avait pris la parole la première. « Tu vois, Thor, c'est Loki. C'est ton petit frère, alors je compte sur toi pour l'aider et le protéger, d'accord ? ». Le petit dieu avait hoché vigoureusement la tête, trop content de savoir qu'il était le grand frère et qu'il avait une responsabilité pareille.

Et où en étaient les deux frères inséparables maintenant ? Thor était peut-être le futur roi d'Asgard, il avait peut-être le statut de héros, il pouvait peut-être soulever Mjölnir, mais ça ne changeait rien au fait qu'il était tout aussi responsable que Loki de tout ce qui s'était passé. Il avait promis à ses parents de protéger son petit frère, et autant dire qu'il avait lamentablement échoué à la tâche. A cause de sa stupidité et de son arrogance, il avait été absent lorsque son frère avait finalement appris qui il était et avait donc du affronter ça seul. Et même avant ça, ce même égo lui avait fait abandonner Loki pour ses batailles et ses nouveaux amis. Si le Jotun n'était pas parfait, l'asgardien ne l'était pas non plus. Et il s'en voulait, vraiment. Voilà pourquoi il fallait qu'il se rattrape, maintenant que Loki semblait lui aussi faire des efforts. Il allait retrouver son frère, et il passerait par Thanos s'il le fallait.

- Pas en Amérique, alors. Et en Antarctique ? enchaîna Stark. Dans le Sahara ?

- A quoi ressemblent ses endroits ?

- Des déserts, de glace ou de sable. Il n'y a personne sur la plupart du territoire, donc ton frère est sûr de ne pas se faire reconnaitre.

- S'il n'y a vraiment rien, Loki n'y sera pas. Mon frère a ce qu'on pourrait appeler des goûts de luxe.

Et Thor ne mentait pas en disant cela. Il n'imaginait même pas ce que son frère aurait fait s'il avait été élevé sur Jotunheim. En fait, le blond était prêt à parier qu'ils auraient retrouvé la planète avec d'énormes palais de glace et d'or et des statues un peu partout, ce qui aurait radicalement changé de l'état des lieux pour le moment qui, s'ils restaient très beaux dans leur genre, n'étaient pas une merveille architecturalement parlant.

- Si c'est le cas, un hôtel serait peut-être plus probable.

- Et comment Cornes de Bouc aurait eu l'argent pour se payer son hôtel cinq étoiles ?

Thor leur expliqua ensuite que les pouvoirs du Jotun lui permettaient également de matérialiser n'importe quel objet à portée de main, s'attirant les regards envieux de Tony et de Natasha, qui auraient visiblement aimé que le Dieu de la Malice leur prête ses pouvoirs de temps en temps. Puis le milliardaire se mit à rire sous les expressions interrogatrices du reste des Avengers – et de Coulson – avant de s'expliquer :

- Je viens de visualiser Loki en train d'utiliser une carte de crédit.

C'est donc en silence et cerclé par les regards emplis de jugement et d'ennui de ses camarades que Stark redevint enfin sérieux. Il ne savait même pas à quel point sa vision avait été véridique.

Sur un autre continent, en Europe pour être exact, un certain Dieu du Chaos, des Mensonges et tout ce qui allait avec se débattait en ce moment même avec une télécommande. Ou plutôt, avec le "boitier à boutons" dont le nom lui échappait. Il avait involontairement allumé la télévision présente dans la chambre en appuyant par mégarde sur un bouton rouge un peu plus grand que les autres, et cela faisait maintenant une bonne dizaine de minutes qu'il s'employait à éteindre l'écran. Il avait appuyé sur presque tous les autres boutons, faisant changer les images et apparaître des écritures de toutes sortes sur l'appareil, sans penser à appuyer de nouveau sur le bouton rouge. Parce-que si c'était le bouton qui servait à allumer la télévision, ce ne pouvait pas être celui qui servait à l'éteindre, non ? C'était du moins la logique de Loki, qui n'arrivait donc plus à s'en sortir et qui commençait à avoir mal à la tête à cause de la chaîne sur laquelle la télé s'était finalement arrêtée. La musique qui sortait donc désormais de l'appareil ressemblait à une craie qu'on aurait laissé crisser sur un tableau et les paroles tellement stupides que les oreilles du pauvre prince n'étaient plus très loin du saignement. Sur le côté de l'écran, un logo étrange apparut, avec en dessous de lui l'inscription « Sapé comme jamais – Maître Gims ».

Soudain, la baie vitrée qui donnait sur le balcon de la chambre d'hôtel explosa, projetant des morceaux de verre brisé un peu partout dans la pièce dans un bruit perçant. Loki, qui avait repris sa véritable apparence un peu plus tôt lorsqu'il avait été certain de ne pas être dérangé, en lâcha la télécommande, une lueur verte commençant à miroiter au bout de ses doigts, par réflexe. De plus, cette fois, il avait une idée de qui cela pouvait être, et il devait admettre que derrière son air déterminé il avait un peu peur. D'accord, peut-être légèrement plus qu'un peu. Mais si c'était bien Thanos, il avait de quoi. Même lui, qui avait pourtant suffisamment de pouvoirs pour vaincre pratiquement n'importe qui, même Odin lui-même avec un peu de chance, savait qu'il ne pourrait pas lutter contre le titan. Résister, ça, il le pouvait. Il pouvait se battre pendant des décennies, s'aidant de sa magie et de sa ruse. Mais à la fin, contre Thanos, il ne pourrait pas gagner. Parce-que le titan pouvait manipuler l'énergie cosmique, qui contrairement aux pouvoirs de Loki, ne s'épuiserait jamais. Parce-qu'il était bien plus fort physiquement, et que si cela tournait au corps à corps, le Jotun n'avait aucune chance. Et parce-que la Mort, en lui refusant l'entrée dans son royaume, l'avait rendu immortel, ce qui n'était pas le cas de Loki. Alors, même avec toute l'arrogance que le Dieu du Chaos possédait, il ne pouvait qu'être réaliste. Il était puissant, intelligent, manipulateur... Mais il ne fallait pas se mentir, le titan était meilleur.

Les yeux fixés sur les restes de la fenêtre, serrant les dents, celui qu'on surnommait Langue d'argent attendit. Quelques secondes s'écoulèrent, peut-être quelques minutes, le temps semblait s'être ralenti de toute façon. Puis, aussi soudainement que l'explosion qui avait eu lieu quelques instants auparavant, une silhouette se dressa dans l'espace autrefois comblé par les fragments de verre sur le sol. La nuit avait commencé à tomber, la personne en face du Jotun étant donc plus une ombre qu'autre chose jusqu'au moment où elle s'avança et entra enfin dans la chambre.

L'armure d'or brillait à la lumière de l'ampoule accrochée au plafond, tandis que deux paires d'yeux se croisèrent. Si ça avait été une quelconque bande-dessinée, des étincelles seraient probablement apparues entre les deux êtres magiques présents dans la pièce. Au lieu de cela, Loki resta immobile et le visage lavande de Thanos se fendit en un sourire. C'est seulement après s'être observé pendant deux bonnes minutes que le Dieu des Mensonges lança, brisant le silence et étirant lui aussi les lèvres dans un sourire en coin :

- Le grand Thanos vient donc lui-même me chercher, quel honneur.

Ne jamais montrer de faiblesse. Rester droit et fier. Garder ce sourire moqueur et ne jamais baisser les yeux. S'il y avait quelque chose que Loki avait appris durant toutes ces décennies, c'était comment paraître sûr de lui.

- Tu savais ce que tu risquais en échouant, Asgardien. Et tu as échoué, contre des humains. Je dirais bien que c'est pitoyable, mais je ne peux même pas me résoudre à éprouver de la pitié pour toi.

- Je ne suis pas un asgardien.

Ce fut la seule chose que répondit Loki sur le moment. Puis il ajouta :

- Tout cela n'a plus d'importance, finissons-en.

Mais la seule chose qu'obtint le Jotun fut un bref ricanement de la part de son ennemi. L'aspect mauvais et menaçant du rire mélangé à la voix naturellement grave du Titan, on aurait presque pu croire que c'était le Diable lui-même qui venait de pouffer. Peut-être était-ce le cas, après tout. Thanos avait toujours plus ou moins joué le rôle du Maître des Enfers dans l'univers.

- Si tu es si pressé d'endurer les souffrances que je t'ai promises, rien ne sert de se battre, Asgardien.

- Pourquoi ça, aurais-tu peur de perdre ?

La seule réponse fut un second rire, moins amusé cette fois, cachant tant bien que mal la fureur de Thanos. Il avait menacé le Jotun, lui avait dit ce qui se passerait s'il échouait. Et pourtant, ce dernier avait bel et bien échoué, si lamentablement que le Titan se demandait même si cela n'était pas intentionnel. Mais le pire, ce qui donnait vraiment à l'immortel du mal à contrôler sa colère, c'était la façon dont le Dieu du Chaos le recevait. Il savait comment tout ça se terminerait, il savait qu'il allait souffrir mille tortures et des millénaires d'ennui, ce qui était en fin de compte tout aussi grave pour lui. Mais il ne fuyait pas, ne le suppliait même pas de l'épargner. Il se contentait de rester là, droit et fier, le dévisageant et lui lançant ce sourire arrogant dont il avait le secret. C'était inacceptable. 

Dans un mouvement soudain, sans un mot de plus, le Titan se dirigea vers le Jotun. Le poing serré, il l'envoya dans sa direction, seulement Loki qui avait de son côté anticipé l'attaque esquiva facilement. Chance qu'il n'aurait pas deux fois, il en était conscient, et c'est pourquoi il devait répliquer au plus vite.

Se concentrant sur ses pouvoirs fraîchement retrouvés, Loki leva une main d'où s'échappait désormais une aura verte et exaltante de puissance. Derrière Thanos, les éclats de la fenêtre brisée se mirent lentement à léviter, pour finalement venir se stopper au-dessus du Titan. Une seconde plus tard, avant que ce dernier n'ait le temps de se rendre compte de ce qui se passait, une huée de morceaux de verre lui tombèrent dessus. Evidemment, c'était loin d'être suffisant pour maîtriser le géant, mais cela permettait au Dieu des Mensonges de réfléchir et avait mine de rien laissé à Thanos quelques entailles d'où s'échappait un peu de sang.

Le Titan se remit finalement, marchant de nouveau vers lui. Il feignait presque l'indifférence, la seule chose trahissant sa colère étant les éclairs que lançaient ses yeux. Loki ne le laissa pas l'atteindre, se servant de ses pouvoirs de Géant des Glaces pour matérialiser un givre qui prit possession des jambes de son ennemi, l'empêchant de se rapprocher d'avantage. Bientôt, la glace envahit également le reste du corps de Thanos, l'emprisonnant jusqu'à la tête. Lentement, ce dernier sourit. Comprenant qu'il se décidait enfin à user de ses pouvoirs, le Jotun se téléporta derrière lui, laissant un clone à l'endroit où il était une seconde auparavant. Désormais sur le lit à baldaquin de la chambre, dans une position guerrière, accroupi et s'appuyant d'une main sur les couvertures de soie, le prince regarda Thanos utiliser sa force sans égale pour se libérer de la glace, projetant de petits morceaux de givre dans toute la pièce. Il s'attaqua ensuite au pauvre clone, qui disparut lorsqu'il lui lança une boule d'énergie bleu électrique en pleine poitrine. Comprenant la supercherie, le géant fit donc mine de se retourner, mais Loki ne lui en laissa pas le temps. Décidant lui aussi de jouer avec la magie brute dans ses veines, il fit apparaitre ce qui ressemblait à un rayon de lumière verte et étincelante, l'envoyant directement sur Thanos.

La suite du combat ne fut plus qu'un étrange mélange de magie, d'éclairs et d'explosions. Les boules d'énergies et autres manifestations magiques se multipliaient, les dagues et autres armes blanches volaient dans la chambre à moitié détruite. Le reste de la vitre avait disparu, le lit n'était plus qu'un amas de plumes et de tissus déchirés, même la télé avait rendu l'âme, à l'envers sur le sol, la poignée d'un couteau de lancer ressortant de l'écran. Sur l'un des murs, une vilaine fissure s'étendait en diagonale.

Après deux bonnes heures de bataille, à bout de souffle, Loki soigna comme il le pouvait l'énième blessure qu'il venait de recevoir. Thanos était mal en point, c'était vrai, avec le bras gauche de son armure qui était maintenant loin de lui sur le plancher et les entailles diverses sur son corps, mais ce n'était rien comparé au Jotun. Une plaie sanglante et plus profonde que les autres s'étendait dans son dos, lui envoyant des décharges électriques dans tout le corps dès qu'il esquissait un geste. Il avait essayé de la soigner comme il le pouvait, mais, comme il le craignait plus tôt, sa magie commençait à s'épuiser et n'était plus aussi forte qu'au départ, sans oublier qu'il devait concentrer ce qui lui restait sur le Titan plutôt que sur lui-même. A la main droite, un ongle lui manquait, et du sang coulait lentement de son front sur son visage bien qu'il ne sache pas exactement d'où il provenait.

- Abandonne, Asgardien. Tu as suffisamment à souffrir durant les prochains siècles pour en rajouter autant maintenant.

- Tu aimerais... Bien...

La voix du Titan manquait d'air ; celle de Loki n'était presque même plus audible. Dans un dernier et vain effort, le Jotun matérialisa une dague à la lame recourbée et la planta par télékinésie à la base du cou de son ennemi. Ce dernier grimaça, puis attrapa l'arme avant de la jeter sur le côté. Fonçant sur le prince dans un dernier accès de haine, le géant lui décocha un coup de poing qui lui fit voir des étoiles. Alors qu'il se sentit défaillir, il fit un dernier appel à sa magie, dans une tentative désespérée de survie.

Et, alors que Thanos empoignait enfin le Dieu du Chaos presque inconscient, il ne put retenir un cri de rage lorsque celui-ci disparu dans une faible lumière verte.

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