Chapitre 10

Mira avait pris un incommensurable plaisir à la dénigrer tout au long de l'après-midi. Tant et si bien que Mercy avait fini par craindre que son supplice ne prendrait jamais fin. Elle avait donc accueillit avec joie le départ de l'autre nymphe, qui n'avait accepté de la laisser seule que parce que l'événement n'allait plus tarder à débuter. La jeune femme s'avança jusqu'à son imposant miroir, voulant flatter son narcissisme quémandeur d'attention. Ses très longs cheveux auburns avaient été rassemblés en un grand chignon complexe où se liaient diverses tresses et boucles bien dessinées. Mira y avait glissé quelques petites fleurs blanches qui contrastaient avec la chevelure de par leur couleur. Elle était vêtue d'une longue robe de princesse d'un mauve éclatant qui laissait ses épaules dénudées. Les longues manches ainsi que le corset étaient faits d'une dentelle des plus fine et la jupe volumineuse mettait en valeur son corps. Satisfaite par son reflet, Mercy avança jusqu'à son balcon afin d'admirer l'extérieur.

Des dizaines de personnes s'activaient, courant ici et là afin d'organiser cette réception. Les pensées de la jeune femme ne tardèrent pas à dériver sur ses appréhensions. Elle ne comptait pas fuir devant Sillas, mais craignait leurs retrouvailles. Leur dernière rencontre avait été plus que chaotique mais peut-être avait-il effacé la rancœur qu'il nourrissait à son égard. Ce doux rêve lui parut irréaliste à l'instant même où il franchit la barrière de ses réflexions. En effet elle connaissait le soldat et il était loin de pouvoir pardonner un affront de ce genre ou ce qu'il avait pu considérer comme une trahison à l'état pure. Emmêlée dans ses maints souvenirs, la princesse ne vit pas le temps s'écouler et ne put réprimer un sursaut en entendant une voix froide énoncer avec hauteur:

-Je suis agréablement surprise de voir que tu n'as point pris la fuite.

Mercy plaqua un sourire sur son visage et se retourna.

-Voyons mère, cela ne me ressemble pas de prendre la poudre d'escampette.

Régina haussa les épaules, ce qui fit frémir le voile azur de sa robe. Le bustier incrusté de pierreries dessinait à merveille les pourtours de sa silhouette tandis que la jupe peu volumineuse laissait deviner la finesse de ses jambes.

-Je ne peux être sûre de rien avec toi. Bien ma fille, il est temps de faire notre entrée, j'espère que tu es prête.

Haussant les sourcils, la jeune femme rejoignit la souveraine.

-Ai-je vraiment le choix?

-Je ne peux qu'espérer que tout se déroulera à la hauteur de mes attentes, susurra un murmure aussi discret qu'un souffle glacé.

Mercy suivit sa mère à travers les silencieux couloirs du palais. Leur arrivée dans la salle de bal fut extrêmement conventionnelle, annoncée par l'un des principaux conseiller royal. Un silence fit place a cette declaration, brisé par le claquement régulier des talons sur le marbre froid. Les deux femmes avançaient la tête haute. La princesse réprima farouchement le malaise qui s'insinuait en elle sous le poids des murmures saluant son passage.

Régina prit place sur son trône, suivie de peu par sa fille. Les intonations autoritaires de sa voix claire résonnèrent au milieu de l'immense pièce:

-Mes chers amis, nous sommes ici afin de célébrer le retour tant attendu de nos dévoués soldats. La guerre fut longue et les batailles périlleuses. Sans eux notre royaume serait bien trop vite tombé aux mains d'un de nos ennemis. Ils nous comblent un peu plus d'honneur chaque jour et nous leur en sommes grès. Je tenais à remercier tout particulièrement notre très cher général, j'ai nommé Sillas.

Un tumulte d'applaudissements répondit à ce court discours. Une imposante silhouette se détacha de la foule et vint jusque devant la reine. L'homme s'agenouilla sous le regard bienveillant de Régina tandis que Mercy essayait tant bien que mal de garder la tête haute malgré le malaise qui l'envahissait. Une voix aux intonations graves prit la parole:

-Ma reine, je ne saurais trouver les mots pour exprimer ma gratitude. Mes soldats et moi-même tenons à combattre chaque jour avec bravoure pour notre royaume. Le bien-être des nymphes et la pérennité de nos alliances est primordial.

La souveraine frappa dans ses mains, un grand sourire satisfait lui barrant les lèvres.

-Allons, relevez-vous très cher. Afin de vous conférer des remerciements et la reconnaissance à la hauteur de vos actions, nous avons organisé un bal en votre honneur. Mes chers amis je déclare donc ce bal ouvert.

Régina baissa un peu la voix et s'adressa directement à Sillas.

-Puisque vous êtes notre invité d'honneur vous vous devez d'ouvrir le bal. Je ne suis malheureusement pas en mesure de danser. Vous devrez donc composer avec ma fille.

Le sang de Mercy se figea dans ses veines et la jeune femme ferma les yeux quelques secondes, se sentant vaciller. Lorsqu'elle les rouvrit, elle croisa le regard pourpre de son ancien fiancé.

-Bien votre altesse.

Bien qu'il eusse essayé de paraître enjoué par cette idée, sa voix avait été plus tranchante qu'il ne l'avait escomptée. Le général tendit sa main à la princesse qui n'eut d'autre choix que de lui donner la sienne. Ils avancèrent lentement au centre de la piste et se laissèrent porter par la musique. La tension entre eux était palpable et le moment où ils furent rejoins par d'autres couples parut salvateur. Dès que la musique cessa ils se séparèrent précipitamment, partant dans des directions opposées.

Mercy se dirigea d'un pas assuré vers sa mère et se planta devant elle en attendant patiemment que celle-ci ait fini sa conversation avec la Duchesse Pavlona. Régina tourna finalement la tête vers elle, un sourire factice toujours collé sur le visage.

-Que veux-tu Mercy?

Le regard orangé de la jeune femme était assombri par la colère.

-Pourquoi avez-vous fait cela?

La reine replaça une mèche indisciplinée imaginaire dans son chignon serré.

-Je souhaite que vous mettiez certains points au clair. Tout le monde perçoit la tension qui persiste entre vous et cela ne manque pas de rappeler à tout à chacun ton moment d'égarement. Tu iras lui parler et tacheras de le convaincre d'oublier sa rancœur. Maintenant laisse-moi, je dois voir quelques personnes.

La princesse partit, bien habituée à ne pas être une priorité pour ses proches. En croisant les doigts pour ne pas croiser Sillas, elle se dirigea sur le balcon et observa le soleil se coucher lentement. Le ciel irisé faisait ressortir les ténèbres de sa forêt bien-aimée. Un bruit la tira de sa contemplation et elle se retourna brusquement. Mercy se retrouve face au général. Dès qu'il l'aperçut il eut un mouvement de recul et s'apprêta à faire demi-tour, mais elle le retint:

-Attends.

Il se stoppa et se tourna lentement, de façon à la regarder dans les yeux. Il fit passer tout le mépris et la rancœur qu'il ressentait à son égard par ses prunelles pourpres.

-Qu'est-ce que tu me veux?

Elle inspira profondément.

-Je pense que ce serait bien qu'on discute. De façon civilisée.

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