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Les jours sans te voir avaient été tellement longs si tu savais. Chaque minute semblait durer une éternité. Une éternité morose et ennuyante. Une éternité sans couleur et sans vie.
Alors, pour ne pas tomber dans la nostalgie, je retraçais, sans cesse, les souvenirs de ton visage dans mon esprit. Souriant chaque fois qu'il se dessinait délicieusement lorsque je fermais les paupières.
Chacun de ces sept interminables jours, j'avais pensé à toi. Oubliant tout le reste. Parce que tout le reste n'avait plus d'importance, si tu n'en faisais pas parti. C'était idiot de penser de cette manière je le sais bien. Pourtant, il n'y avait qu'avec toi que je me sentais entier.
Il n'y avait qu'avec toi que je pouvais trouver un intérêt à n'importe quelle chose pourtant futile.
Et puis finalement, l'heure décisive que j'avais tant attendue était finalement arrivée. C'était finalement le septième jour. Celui pour lequel tu m'avais fait promettre de revenir à notre point de rendez vous. À notre heure précise.
De toute façon, tu ne me l'aurais pas dit, j'aurais quand même été à l'heure. J'aurais même été en avance. Alors que toi, comme à ton habitude, tu serais arrivé légèrement en retard. Essoufflé par ta course pour venir jusqu'à moi.
En sortant de mon appartement, c'était ce que j'avais aussitôt imaginé. Je savais qu'au final, même si ça faisait plusieurs jours qu'on ne s'était pas vu, rien n'allait changer. Tout resterai exactement pareil.
Exactement parfait.
Alors, j'avais accéléré le pas, encore plus que d'habitude, jusqu'à la bordure de cette rivière gelée. Tout en moi trépignait d'impatience de te voir. Comme toi, j'étais aussi redevenu un enfant lorsqu'il s'agissait de nous deux.
Et puis j'avais attendu. Des secondes. Des minutes. Des heures. Fixant le tournant de ce carrefour par lequel tu arrivais à chaque fois en trombe. Pourtant, ce soir là, tu tardais à venir. Tu n'arrivais pas.
Me laissant alors seul. Immobile au milieu de cette route. Le froid mordant douloureusement mon corps. Alors que mon cœur commençait déjà à s'effriter peu à peu. Une affreuse appréhension s'était emparée de mon esprit.
Je m'imaginais des scénarios atroces et excessifs. Des scénarios tellement invraisemblables que l'on pourrait en faire des films je pense. Mais d'un côté, je me dis que c'était complètement justifié, toute cette inquiétude.
Parce qu'il n'y avait aucune raison valable pour que tu ne viennes pas.
Il n'y avait aucune raison valable pour que tu brises cette promesse qui était aussi vraisemblablement importante à tes yeux qu'aux miens.
Alors j'avais continué d'attendre. J'avais continué d'espérer. Seul. Alors que le soleil s'était déjà couché depuis trop longtemps. Alors que seulement quelques lampadaires éclairaient le pavé. Alors que le froid devenait de plus en plus brutal.
Mon regard n'avait pas quitté l'endroit d'où tu devais apparaître.
Il l'avait fixé, sans aucune interruption. Souhaitant ardemment voir ta silhouette se dessiner dans l'angle de cette rue. Dans l'obscurité déjà trop présente.
Et alors, que je pensais finalement abandonner, tu étais apparu. Jaillissant des ténèbres tu étais entré dans la lumière. En courant vers moi. Essoufflé. À en perdre haleine. À peine couvert. Le visage complètement paniqué.
Puis, tu t'étais stoppé d'un seul coup. À plusieurs mètres de moi. En m'apercevant. En constatant que, non, je n'étais pas parti. En constatant que j'étais resté là, à attendre, malgré tes heures de retard.
Que j'étais resté là, pour toi.
Alors tu avais voulu sourire. Je me souviens que tes lèvres tentaient inlassablement de remonter leur commissure pour exprimer ta joie. Seulement, tu n'y arrivais pas. Tu n'y arrivais plus.
Seules des larmes roulaient le long de tes joues alors que tu restais planté au milieu de la route.
Tu pleurais comme un enfant. Littéralement. Ne pouvant pas t'arrêter. Comme si tu croyais être venu ici pour rien et que le soulagement de me voir, contre toute attente, te fasse perdre toute retenue.
Il y avait un mélange de sentiments singuliers dans tes pleurs. Il y avait la joie. Il y avait l'apaisement. Il y avait la fatigue. Mais il y avait aussi de la tristesse.
Beaucoup de tristesse.
Trop de tristesse.
Alors, ne réfléchissant même pas à mes actes, au tact dont je devais faire preuve avec toi, à cette distance de précaution que j'avais déjà oublié la dernière fois, j'avais couru vers toi. Brisant les derniers mètres nous séparant.
Brisant l'absence de ces sept jours.
Brisant tout ce qui ce mettait entre nous.
Puis, j'avais enroulé mes bras autour de toi. Te serrant fort. Comme si ma vie en dépendait. Alors que toi, tu continuais de pleurer en t'accrochant à mes vêtements.
Tu étais tellement froid. Glacial même. Et j'avais l'impression que mon étreinte n'arrivait pas à te réchauffer. Que ce soit ton corps. Ou ton cœur. Je ne réussissais à donner du réconfort à aucun des deux.
- Désolé d'être en retard.
C'est ce que tu avais finalement réussi à bredouiller après plusieurs minutes. La voix fragile. Le souffle encore court. Inconsciemment, je n'avais pas pu faire autrement que de rigoler légèrement. Ce n'était pas pour me moquer de toi tu sais. C'est juste que la remarque était inattendue.
Elle l'était comme chacun de tes gestes.
Alors je m'étais écarté légèrement de toi. Pour pouvoir te regarder finalement. Pour pouvoir sécher les larmes encore présentes le long de tes joues. Pour pouvoir te sourire et te voir sourire. Pour pouvoir te rassurer et te dire que ce n'était pas grave.
Avant de plonger sur ta bouche. Ta bouche que j'avais désirée comme un fou durant cette semaine.
Mais tu étais tellement froid. Mes lèvres contre les tiennes provoquait un étrange contraste de température. Comme si ma chaleur ne t'atteignait pas. Comme si je n'arrivais pas à t'atteindre. Pas entièrement du moins.
Pas comme avant.
Et même si la sensation ne perdait pas de son ressenti premier, elle perdait néanmoins en intensité. Alors, j'avais naturellement eu du mal à comprendre. Pourquoi tu ne me repoussais pas alors que c'était pourtant comme si ?
Tu avais alors attrapé ma main qui traînait sur ta joue avant d'entremêler nos doigts le long de nos corps. Nos visages s'étaient légèrement séparés, et finalement tu avais réussi à me sourire. À me sourire tristement. Alors que tes yeux plongeaient sur nos deux mains.
Et alors que les miens avaient fait pareil.
Et alors que les miens avaient aussitôt vu le problème.
Et alors que les miens avaient aussitôt compris ce qu'il manquait.
Le fil rouge.
Tu ne l'avais plus. Il n'était plus là. Que ce soit sur mon doigt ou sur le tien. Il n'y avait plus rien.
C'était alors face à cette incompréhension que je t'avais demandé pourquoi.
Pourquoi est ce que le lien n'était plus là ?
Pourquoi est ce que ce qui nous avait réunis avait disparu ?
Ton regard fuyait le mien. Tentant de trouver un point d'encrage éloigné. Tentant de ne pas céder à la panique.
À cette question à laquelle tu t'attendais certainement.
Et c'est douloureusement que tu avais finit par me répondre.
- Yoongi, je crois qu'il y a quelque chose que je dois t'avouer.
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