81 - Consécration

Himeko descendit du taxi et elle posa sa fille sur sa hanche.

– J'espère qu'on est pas trop en retard... Dit-elle.

Elle paya, puis se dirigea vers l'entrée de l'Imperial Hotel en ralentissant une seconde devant le panneau qui annonçait la présentation ce soir-là de la nouvelle collection de Takashi Mitsuya.

Le succès avait enfin été au rendez-vous pour Taka. Après la naissance de la petite et leur déménagement, les commandes avaient commencé à se multiplier. Aujourd'hui, presque un an et demi plus tard, plus personne ne remettait en doute son talent et son sérieux. Il était devenu le créateur en vogue que tout le gratin de Tokyo s'arrachait.

Himeko pressa le pas dans le vaste hall de l'hôtel et elle gagna les coulisses de la salle du Toko-An où avait lieu tous les défilés les plus prisés. La foule était déjà au rendez-vous. Quantité de femmes chargées de bijoux hors de prix et de vêtements, dont chaque éléments valait chacun un petit salaire, se pressaient dans les couloirs en attendant qu'ouvrent les portes.

Himeko les contourna. Elle avait toujours l'impression d'être une potiche au milieu de tous ces gens riches qui traitaient Taka comme un enfant prodige. Lui, n'avait pas changé, il n'était pas plus fasciné par la richesse de ses clients qu'il l'était avant. La célébrité ne lui était pas montée à la tête. Pourtant il avait fait plus d'une fois la couverture des magazines et quelques mois plus tôt un hebdomadaire américain était venu l'interviewer. Ils avaient même pris des photos d'elle, de leur fille et de l'appartement où ils vivaient. Himeko avait du mal à réaliser qu'il y avait des américains en ce moment qui avaient lu un article dont les photos la montrait dans sa cuisine.

Ils sont tous fous !

Parvenue au bout du couloir, elle repoussa la porte menant au coulisse et se fit arrêter par un vigile. Elle sortit de son sac le pass que Taka lui avait donné et elle le lui tendit.

Contre elle, Maya commençait à s'agiter et Himeko la berça doucement.

– Et bien alors mon cœur ? Murmura-t-elle. Ça ne va pas ? Il y a trop de bruit ici et tu n'aimes pas ça ? On va bientôt voir papa, ça ne sera pas long...

L'homme du service de sécurité la laissa finalement passer et Himeko se remit en route. Autour d'elle maintenant, des dizaines de mannequins, assistants, habilleuses, maquilleuses s'affairaient en tout sens sans prendre garde à elle.

Himeko se dressa sur la pointe des pieds pour tenter d'apercevoir son mari, mais c'était peine perdue au milieu de toutes ces femmes immenses qui la dépassaient toutes d'une bonne tête.

Des cris et des voix montaient de toutes parts et elle serra son bébé contre elle pour enfouir son nez dans son cou.

Soudain, la foule des coulisses s'écarta et elle l'aperçut, plus loin, son éternel mètre ruban autour du cou, les cheveux retenus par une barrette et les lunettes sur le nez.

Himeko sentit son cœur se serrer.

Je t'aime Taka, si tu savais comme je t'aime !

La foule se referma autour de lui, une foule compacte de femmes à demi-nues, superbes, avec des jambes qui n'en finissaient pas et des corps tous plus parfaits les uns que les autres et Himeko se réfugia de nouveau dans le cou de son bébé.

Takashi passait de l'un à l'autre, arrangeant un ourlet, corrigeant un pli, modifiant la tenue d'un vêtement...

Qu'est-ce que je fais là ? Se demanda-t-elle. Je ne suis qu'un petit boudin avec des vergetures à côté de toutes ces déesses...

Inconsciemment, Himeko fit un pas en arrière lorsqu'une voix l'arrêta.

– Tu fais une drôle de gueule Hime.

Himeko leva les yeux, surprise.

– Arisa ?

Arisa et Hakkai étaient restés les mannequins fétiches de Takashi. Ils avaient participé à chaque présentation de ses vêtements au cours de l'année écoulée et le trio était devenu indissociable aux yeux de la presse.

Arisa suivit la direction de son regard et elle comprit.

– Tu sais qu'il ne les voit pas vraiment, hein ? À ses yeux, on n'est rien de plus que des mannequins en plastique. Enfin les autres, avec Hakkai, on est plus ses potes qu'autre chose.

– Oui... La voix de Himeko manquait de conviction.

– Tu sais aussi, reprit Arisa, que si une d'entre elles s'avisait de mettre un doigt sur ton mec, je lui mettrais mon poing dans la gueule dans la seconde qui suit ?

Cette fois, Himeko rit franchement.

– Je te fais confiance.

Mais son sourire se fana sur ses lèvres.

– Comment tu veux que je fasse le poids ? Dit-elle. Vous êtes toutes tellement... sublimes. Moi à côté, je ne ressemble à rien.

Arisa la regarda un instant en silence. Elle soupira.

– T'es toujours aussi conne ma parole, dit-elle. Bon, ne le quitte pas des yeux, regarde-le bien surtout...

Puis elle cria :

– YO MITSUYA REGARDE PAR ICI !

Takashi tourna la tête. Son visage se transforma dès qu'il vit Himeko. Son expression, si sérieuse et concentrée un instant plus tôt, laissa la place à un sourire radieux, plus rien ne sembla exister tout à coup autour de lui. Il abandonna aussitôt ce qu'il était en train de faire.

– Tu vois ? Dit Arisa. Il n'y a que toi qui a droit à ce sourire. Alors arrête de flipper.

Elle s'éloigna tandis que Takashi rejoignait sa femme et sa fille.

Il passa un bras autour de la taille de Himeko.

– Tu as pu venir, lui dit-il, ravi.

Il lui posa un baiser sur le front et Maya lui tendit immédiatement les bras.

– Laisse-moi la tenir un peu, lui dit-il, vous me manquez toutes les deux, j'ai hâte que ça soit terminé !

Himeko lui donna la petite et Takashi la posa sur sa hanche pour la câliner. Maya leva les mains pour saisir celle de son père en gazouillant de bonheur. Puis Takashi revint à Himeko.

– On rentre ensemble, d'accord ? Dit-il. J'ai envie qu'on passe la soirée tous les trois. Ça ne devrait pas être trop long ici. Pas question que je me coltine leur petite fête après le défilé.

Himeko hocha la tête, les larmes au bord des yeux.

– Oui, dit-elle, moi aussi j'ai envie...

Taka se pencha pour lui embrasser le coin des lèvres.

– Tout va bien ? Lui demanda-t-il.

– Oui, je t'aime Taka... Si tu savais comme je t'aime et comme je suis heureuse avec toi !

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