69 - Pardon

Le combat était enfin terminé. Takashi se laissa tomber au milieu de la gare de triage. Tout autour de lui, les membres des deux clans gisaient au sol. Jamais il n'aurait cru que ça se finirait ainsi.

Il se passa une main sur le visage et soupira.

Je suis mort de fatigue, moi.

Plus loin, Hakkai reprenait lentement ses esprits. Il se redressa et jeta un œil vers son frère.

Taiju est blessé, se souvint Mitsuya, il faut l'emmener rapidement à l'hôpital.

Il n'y avait pas que lui cela dit, plusieurs autres allaient avoir besoin de soins. Takashi regarda dans la direction de Takemicchou. Mikey était à côté de lui.

C'est fini maintenant, se dit-il en détournant les yeux.

Il se leva et tituba un instant.

J'ai pris cher moi aussi, réalisa-t-il.

Quand il passa près des frères Shiba, Takashi s'arrêta.

– Ton frère a besoin d'aller à l'hôpital, dit-il. Tu veux un coup de main pour l'y emmener Hakkai ?

Ce fut Taiju qui répondit.

– Je suis pas une tapette de couturier moi ! Dit-il. J'ai besoin de personne pour m'aider !

Sur ces mots, il se leva avec peine, appuyé sur l'épaule de son petit frère.

Mitsuya rigola.

– Ferme ta gueule Taiju ! Dit-il. Une pichenette et tu tombes !

Il raccompagna les deux frères jusqu'à la moto de Hakkai et quand il fut sûr qu'ils pourraient faire la route sans risque, il se tourna vers le reste du Toman deuxième génération.




La nuit était bien avancée quand Mitsuya put enfin quitter le théâtre de l'affrontement. Il avait quelqu'un à voir. Quelqu'un auprès de qui se faire pardonner.

Hime, se dit-il, j'espère que tu veux toujours de moi.

Il accéléra, sans tenir compte de ses blessures, et rejoignit le quartier de Omotesandô. Il n'avait qu'une seule pensée à l'esprit, lui parler.




Lorsque Takashi s'arrêta devant le foyer Hakifumi, presque toutes les lumières étaient éteintes.

Je devrais peut-être attendre demain, se dit-il.

Malgré cette pensée, il mit pied à terre et il se dirigea vers la porte. Ce fut après avoir frappé qu'il remarqua seulement qu'il portait toujours son uniforme de gang et qu'il était couvert de blessures.

Merde ! Se dit-il.

Il n'eut pas le temps de faire demi-tour, la porte s'ouvrit sur la petite femme à lunettes qu'il avait rencontré lors de sa première visite.

Mitsuya s'inclina aussitôt.

– Je suis désolé de vous déranger à une heure pareille, dit-il. Je suis venu voir Himeko et je n'ai pas réalisé qu'il était si tard.

Madame Kanami le détailla des pieds à la tête.

– Oui, dit-elle, il est tard. Qu'est-ce qui t'arrive mon grand, tu as l'air dans un sale état ?

Mitsuya releva la tête, surpris.

– Une bagarre, lui apprit-il. Mais ça n'est rien de grave, juste des égratignures.

Emi Kanami le regarda comme pour voir jusqu'à quel point elle pouvait le croire. Finalement, elle reprit.

– Oniroku san n'habite plus ici depuis un moment, dit-elle. Je dois avoir son adresse dans mon bureau, ne bouge pas.

Elle tourna les talons sans attendre de réponse, ses chaussons frôlant le sol dans un chuintement. Quand elle eut disparu à l'angle du couloir, Orie Reimi parut à la porte de la cuisine. Elle jeta un regard dans la direction qu'avait prise la trésorière du foyer, puis sautilla jusqu'à l'entrée. Mitsuya la regarda approcher.

Orie se pencha sous son nez, les mains dans le dos.

– Dis, dit-elle, t'es con ou t'es con ?

Surpris, Takashi ne sut que répondre et elle reprit.

– Hime a déménagé il y a presque deux mois, dit-elle, et ça m'étonnerait qu'elle te l'ait pas dit. Alors c'est pour ça que je te demande si t'es con ou bien si t'es con ?

Le souvenir flou d'une conversation revint à l'esprit de Takashi. Il se revit dans sa chambre, Himeko à côté de lui. Elle lui parlait, il y était question de déménagement et d'autres choses encore, mais il avait beau réfléchir, ses paroles lui échappèrent.

– Je plaide coupable, dit-il. Je suis un connard.

Orie regarda par-dessus son épaule si madame Kanami revenait.

– Comme tu as interrompu l'engueulade que j'étais en train de me prendre pour avoir dépensé tout mon fric, dit-elle, je vais être sympa avec toi. Hime a laissé sa place à une petite jeune. C'était pas elle qui devait partir normalement, c'était cette dinde de Mitsuki. Mais tu connais Hime, sacrifice, bla, bla, bla... Bref, elle est partie et elle a aussi quitté le lycée pour travailler à plein temps au resto.

Un bruit de pas monta à l'angle du couloir et Orie tendit l'oreille. Elle revint vers Takashi et ajouta rapidement.

– Elle habite maintenant dans un petit studio qui pue le vieux dans le quartier de Azabujûban, au sud de Roppongi. Salue-la de ma part quand tu la verras. À la prochaine mec !

Elle lui fit un petit signe et partit en catimini.

– Bon, dit-elle, c'est pas tout ça mais je vais me planquer.




L'adresse de l'appartement de Himeko en poche, Takashi se remit en route.

Et si elle ne voulait plus me voir ? Après ce que je lui ai fait, ça se comprendrait. Elle a une vie, un travail... Pourquoi elle voudrait d'une racaille qui n'a même pas été capable de raccrocher ?

Tout en se faisant ces réflexions, Takashi ralentit.

Je pourrais aller la voir demain, ou alors au restaurant un de ces jours. Il n'y a pas d'urgence. Je me prends pour qui pour débarquer chez elle au milieu de la nuit alors que je l'ai plaquée comme un connard ?

Finalement, il s'arrêta le long du trottoir pour réfléchir.

Attendre, ça serait la meilleure chose à faire, se dit-il.

Mais la vérité, c'est qu'il n'en avait pas envie.

Je veux la voir, pas demain, pas dans une heure... maintenant. Et si elle m'envoie paître, ça sera bien fait pour moi.

Il se remit en route plus lentement cette fois, une sourde angoisse chevillée au cœur.




La rue était déserte à cette heure. Le petit quartier résidentiel était calme. Takashi consulta une nouvelle fois le plan donné par madame Kanami et il gravit les marches menant à l'appartement de Himeko.

Une fois devant la porte, il leva la main et inspira.

À nouveau, l'hésitation le saisit, mais il se contraignit à la faire taire et frappa un unique coup.

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