Écrit par Asilia

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S'il y avait bien un jour de l'année que Zoro détestait, c'était celui de la Saint-Valentin. Déjà, parce qu'il trouvait le principe de cette fête stupide. Pourquoi l'amour aurait-il besoin d'un jour pour être célébré, alors que l'on était amoureux toute l'année ? En plus, le but de cette fête était d'offrir du chocolat, et Zoro n'aimait pas ça. Enfin, tous ces malheurs pouvaient se résumer en deux mots : les filles.

Toute la journée, elles se succédaient pour lui offrir des chocolats dans une affreuse boîte en forme de cœur. Pas moyen pour lui d'être au calme pour une petite sieste. Il était toujours interrompu. Il y avait pourtant une seule chose qui était pire que tout ce qu'il devait endurer le jour de la Saint-Valentin.

Le fait que cet abruti de Cook aimait ça.

Il attendait avec impatience le jour de la Saint-Valentin pour recevoir des chocolats de la part des filles. Chaque fois que l'une d'elle lui adressait un regard, il avait deux gros cœurs roses à la place des yeux et il se tortillait comme s'il avait un petit rongeur dans son pantalon. Zoro le trouvait ridicule et agaçant, d'autant plus qu'il ne recevait jamais rien au final. Ça ne semblait pas le décourager, cependant.

Ce matin-là, c'était la Saint-Valentin. Quand Zoro arriva en classe, il avait déjà été abordé par trois filles. Il était donc de mauvaise humeur et ça ne s'arrange pas lorsqu'il entendit Sanji complimenter Nami et Robin d'un ton mielleux. Il se laissa tomber sur sa chaise et Luffy apparut d'on ne sait où avec des yeux brillants.

-Tu vas les manger ?!

Zoro baissa les yeux sur les petits sacs décorés de ruban et de cœurs qu'il tenait à la main. Il avait complètement oublié qu'il les avait. C'étaient des chocolats que les filles lui avaient donnés. Il grogna de mécontentement et les jeta à Luffy.

-Vas-y, fais-toi plaisir.

-Super ! Merci Zoro !

-Oi, Marimo !

Zoro tiqua au surnom familier qu'il détestait presque autant que cette fête. Il tourna la tête pour voir Sanji venir vers lui. Le cuisinier avait une démarche hésitante et il fuyait clairement son regard. Zoro trouvait cela étrange. Arrivé à son niveau, Sanji s'apprêtait à dire quelque chose lorsqu'il remarqua ce que Luffy faisait. Il fronça les sourcils et demanda.

-Où les as-tu eu ?

-C'est Zoro qui me les a donnés.

-Zoro ?!

-Des filles les ont fait pour moi mais je n'aime pas ça.

La tristesse passa brièvement sur le visage de Sanji, avant de laisser place à la colère. Zoro n'eut pas le temps de s'interroger sur cette réaction car il dût bloquer un coup de pied. Apparemment le cuisinier voulait se battre.

-C'est quoi ton problème ?!

-Toi, c'est quoi ton problème, stupide cactus ?!

-Je n'ai rien fait de mal ! Pourquoi tu t'énerves ?!

-C'est un manque de respect de ne pas manger le chocolat que t'ont préparé ces filles !

-Ça revient au même si c'est Luffy qui le mange !

-Bien sûr que non ! T'es idiot ou quoi ?!

Zoro aurait voulu répliquer, mais leur dispute a dû s'arrêter là. Leur professeur entra dans la pièce et Sanji retourna à sa place. Il lui fallut plusieurs minutes pour décolérer. Il se demanda ce qui avait mis le blond de si mauvaise humeur. En quoi était-ce important que ce soit lui qui mange les chocolats ? Et puis, il se posait une autre question.

Qu'est-ce que Sanji était venu lui dire ?

Zoro était convaincu que quelque chose n'allait pas avec le cuisinier. Il agissait étrangement. Il décida de l'observer discrètement pour tenter de comprendre. Malheureusement, non seulement les filles continuaient d'accaparer toute son attention, mais en plus Sanji passa la journée à l'éviter. L'après-midi, Zoro bouillonnait littéralement de colère.

-Stupide Cook, avec ses stupides sourcils stupidement enroulés...

-Arrête, marmonne Usopp, t'es ridicule.

-Pourquoi il est aussi stupide ?!

-Il a fait quoi pour que ça t'énerves à ce point ?

Zoro s'efforça de lui expliquer la raison de son énervement. Mais au regard blasé que lui jetait Usopp après son récit, il eut l'impression de ne pas avoir réussi à lui faire comprendre à quel point tout cela était agaçant. Était-il le seul à avoir remarqué le comportement anormal du cuisinier ?! Usopp haussa simplement les épaules.

-C'est la Saint-Valentin, dit-il comme si ça justifiait tout.

-Il n'est pas comme ça d'habitude. Même à la Saint-Valentin.

-Cette année c'est particulier. Sanji est amoureux.

Zoro dévisagea Usopp, les yeux ronds, et le brun sembla réaliser ce qu'il venait de dire. Il blêmit, se leva comme un robot, marmonna une excuse minable et s'enfuit en courant. Zoro ne savait pas où il comptait aller car le cours allait bientôt commencer et il serait contraint de revenir ; mais il y avait autre chose de plus important dont il devait s'occuper.

Le Cook était amoureux.

Il essaya de réfléchir à l'identité de celle qu'il aimait. Mais il n'avait aucune chance de découvrir quelle fille avait pris son cœur. Il y avait trop de possibilités. Zoro passa toute l'heure qui suivit à y penser, avant d'arriver à une conclusion.

S'il voulait savoir , il devait lui demander directement.

-Oi ! Cook !

Sanji se figea. Il était en train de fourrer rapidement ses affaires dans son sac pour partir lorsque Zoro l'interpella. Il envisagea de courir jusqu'à la porte pour s'échapper mais cette boule de mousse s'interposa, une main sur la table pour lui bloquer le passage. Il se rapprocha de lui, se tenant brusquement trop près pour ne pas remarquer les rougeurs sur les joues du blond.

-Je dois te parler.

-Dépêche-toi, marimo, je suis pressé !

-Pourquoi tu m'évites depuis ce matin ?

Sanji grimaça. Il aurait dû se douter qu'il aurait une question de ce genre. Il aurait dû réfléchir à une bonne excuse à lui donner. Il serra son sac contre son torse, priant pour que Zoro ne voit pas ce qui se trouvait à l'intérieur. Heureusement (enfin, ça se discute) toute l'attention du marimo était sur son visage.

-Je... Je t'en veux encore pour ce matin !

-Je ne comprends pas pourquoi tu m'en veux à ce point.

-C'est compliqué...

-Et qu'est-ce que tu voulais me dire ce matin ?

-Eh bien...

-Excusez-moi...

Les deux garçons tournèrent la tête, apercevant une élève d'une classe inférieure qui se tenait à quelques mètres, les joues rouges et le regard fuyant, jouant avec ses doigts. Zoro fronça les sourcils. Pas moyen d'être tranquille apparemment.

-Qu'est-ce que tu veux, grogne-t-il.

-Marimo, le sermonne Sanji.

-Je voudrais parler à Zoro, dit-elle.

Zoro leva les yeux au ciel. Il s'y attendait. Malheureusement, Sanji y vit une occasion de se dérober. Il s'éloigna de Zoro, se dirigeant vers la porte avec un petit sourire gêné, serrant toujours son sac contre lui.

-Je vous laisse discuter !

-Quoi, proteste Zoro. Mais, on était en train de...

-Tu ne peux pas faire attendre une femme, marimo.

Mais Zoro ne pouvait accepter ça. Il craignait que s'il laissait Sanji partir, il n'aurait jamais sa réponse. Alors il tendit la main, parvenant à lui saisir le bras et à le retenir. Il sentit le blond tressaillir alors qu'il lui jetait un coup d'oeil.

-Attend-moi dehors, dit Zoro. S'il-te-plaît.

Sanji hésita, puis acquiesça. Satisfait, Zoro le relâcha. Ils se fixèrent l'un l'autre quelques secondes avant que le blond ne se détourne et ne quitte la pièce. Il referma la porte derrière lui. Zoro se retourna alors vers la fille, lui adressant un regard ennuyé. Il voulait en finir vite et reprendre sa conversation avec Sanji.

-Vas-y, je t'écoute.

Bien que décontenancée quelques secondes par son ton froid, la jeune fille s'efforça de parler calmement. Elle échoua lamentablement, se mettant à bégayer quelques mots. Zoro se retient de lever les yeux au ciel à nouveau. Il n'était pas près de pouvoir sortir si elle mettait autant de temps à parler. Mais il avait dit qu'il l'écouterait alors il devait se montrer patient. Finalement elle parvient à pousser contre son torse une petite boîte entourée d'un ruban, avant de crier.

-Je suis amoureuse de toi !

Zoro resta un moment sans réagir, alternant entre elle et la boîte qu'elle continuait de lui enfoncer dans les côtes. Jusqu'à présent, les filles s'étaient contentées de lui offrir du chocolat. C'était la première fois qu'il faisait face à une déclaration d'amour. Inquiète de ne recevoir aucune réponse, la jeune fille lui adressa un coup d'oeil nerveux. Zoro lui prit les poignets, la repoussant doucement.

-Désolé. Je ne partage pas tes sentiments.

-Je... Je vois... Je m'en doutais un peu.

Elle avait l'air triste, mais Zoro ne voulait pas lui mentir. Il ne pouvait pas non plus accepter son cadeau, ce serait impoli. Elle finit par le saluer gentiment avant de quitter la pièce. Quand Zoro sortit à son tour, il aperçut Sanji qui attendait, appuyé contre le mur. Lorsqu'il entendit le claquement de la porte qui se fermait, il tourna la tête dans sa direction.

-On y va ?

-Ouais.

Ils quittent le lycée d'un pas traînant, dans un silence confortable. Zoro promena son regard le long de la silhouette de Sanji, sans trop savoir comment démarrer la conversation. Puis, il remarqua quelque chose qui dépassait de son sac.

-Qu'est-ce que c'est ?

-Quoi ?

-Dans ton sac.

-Oh, ça !

Sanji tira le petit paquet, permettant à Zoro de voir de quoi il s'agissait. Il reconnut des chocolats faits maison de diverses formes. Le paquet était simple, décoré d'un discret ruban bleu ciel. Il n'était pas ouvert. Sanji y avait accordé un grand soin, sans doute parce que c'était le seul qu'il avait reçu.

-C'est une fille qui te l'a donné ?

-J'aurai préféré... C'est moi qui les ai faits.

-Vraiment ? Pourquoi ne les as-tu pas offert ?

Sanji lui répondit par un sourire triste. Il avait essayé en fait. Il avait guetté une occasion de les donner à la personne à qui ils étaient destinés. Mais plusieurs raisons l'avaient poussé à renoncer, à laisser tomber. Il avait fini par accepter que cette Saint-Valentin ne soit pas la bonne.

-J'essaierai l'année prochaine.

-Ça ne te ressemble pas d'abandonner. La journée n'est pas finie.

-C'est inutile. Il n'aime pas ça.

-Comment tu le sais ?

-Il en a reçu toute la journée mais ne les a pas mangés.

Sanji remit le paquet dans son sac avec un soupir. Il n'avait vraiment pas de chance. Il était tombé amoureux du garçon le plus convoité de tout le lycée, qui n'aimait pas le chocolat et qui n'avait pas conscience de ses sentiments. En le voyant comme ça, Zoro comprit pourquoi il s'était énervé le matin même. Sans doute qu'il avait renoncé à les donner par peur que son cadeau soit ignoré. Dans ce cas, peut-être que...

-Qu'est-ce que tu vas en faire ?

-Je ne sais pas. Sans doute les donner à Luffy.

Zoro fit la moue, visiblement contrarié par cette réponse. Il tendit la main, attrapant le paquet. Sanji tenta de s'écarter pour l'en empêcher, mais il ne fut pas assez rapide. Zoro l'ouvre, pioche au hasard l'un des chocolats et l'enfourne dans sa bouche. Ce n'était pas trop sucré. C'était même plutôt bon. Sanji était doué. Le blond lui jeta un regard interloqué, les joues légèrement roses.

-Qu'est-ce qui te prend ?

-J'ai le droit. Ils étaient pour moi n'est-ce pas ?

Sanji cligna des yeux plusieurs fois, avant de virer brusquement à l'écarlate. Zoro sourit, amusé. Il avait raison. Si Sanji était venu le voir ce matin, c'était pour les lui donner. Savoir qu'il était la cible de l'affection de Sanji le rendait plutôt heureux. Ce n'était pas à une des nombreuses filles du lycée que ces chocolats étaient destinés. C'était pour lui.

-C... Comment tu l'as su, bredouille Sanji.

-Je l'ai deviné. J'accepte ton cadeau.

-Tu n'es pas obligé de les manger.

-Je ne veux pas que Luffy les mange à ma place ! Pas ceux-là !

Les autres, ça ne le dérangeait pas, parce qu'il ne les aimait pas ces filles. Mais ceux de Sanji, il ne voulait les partager avec personne. Il glissa le paquet dans son sac puis attrapa la main du blond, appréciant de voir à quel point ce dernier était gêné par ce geste. Mais il ne retira pas sa main pour autant. Ils finirent le trajet jusqu'à chez eux, main dans la main.

Zoro trouvait toujours la Saint-Valentin stupide. Il était amoureux, et il ne comptait pas le montrer qu'un seul jour par an. Son petit blond, il allait continuer de l'aimer toute l'année.