Jour 4_NaVi

Écrit par Ydonis

***

Il y a fort, fort longtemps, vingt dieux majeurs veillaient scrupuleusement sur le monde mortel. Ces
dieux avaient la réputation de répondre à chaque souhait formulé, moyennant une rétribution. Ils ne
voulaient qu’une chose en échange de leur aide : une offrande. Chacun d’entre eux avait un attribut
propre et si l’on voulait faire appel à l’un en particulier, il fallait alors lui offrir l’attribut en question.

De nombreuses légendes entourent la bonté de ces dieux. Le plus souvent, il est question de jeunes
hommes ou de jeunes femmes qui, alors qu’ils n’avaient rien pour eux, ont pu devenir de grandes
figures historiques. On raconte même que grâce à la bénédiction des dieux, un homme du nom de
Roger a pu régner durant des années sur les flots du monde entier, atteignant ainsi son vœu le plus
cher : la liberté. Mais aussi étonnant que cela puisse être, cette légende n’est pas la plus célèbre et
encore moins la plus appréciée.

Il existe parmi ces nombreux contes, un connu de tous. Celui d’une histoire d’amour entre une déesse
et une mortelle. Un amour en temps normal interdit, mais un amour profond. C’est cette légende-ci
que je vais aujourd’hui vous conter…


***


La déesse des richesses et des enfants n’était pas connue pour sa tendresse. Oh ça non. Et pourtant,
mystérieusement, personne ne pouvait réellement la détester. Peut-être était-ce due à sa beauté
exceptionnelle ou à son côté étonnamment maternel lorsqu’elle se trouvait en présence d’enfants.
Mais une chose était sûre, ce n’était certainement pas pour sa générosité. Jamais les Cieux n’avaient
connu de déesse plus radine qu’elle. Même ses prédécesseurs n’avaient jamais été aussi à cheval sur
l’argent et encore moins aussi manipulateurs qu’elle. C’était une escroc redoutable, qui acceptait
toujours de faire des prêts, avec gentillesse, bien que cette gentillesse ne soit que feinte. Quiconque
empruntait à cette déesse était certain de se retrouver avec des taux d’intérêts colossaux. Malgré tout,
tous avaient décidé de se plier en quatre pour lui offrir le plus merveilleux des cadeaux pour son
passage à la majorité et son entrée dans la fonction de déesse des richesses et des enfants.

Les Cieux étaient en pleine effervescence. Chaque dieu et autres habitants célestes cherchaient une
idée de cadeau pour la déesse. Bien sûr, pour certains, c’était déjà tout trouvé : un nouveau plant de
mandarine ou des cartes terrestres combleraient sans nul doute la jeune déesse qui les remercierait
avec un petit hochement de tête amical. Mais d’autres souhaitaient marquer le coup, et ne pas offrir un
banal présent pour l’anniversaire de la déesse. Hélas, le seul à connaître parfaitement les goûts de la
déesse était son meilleur ami, Monkey D. Luffy, le dieu de la gourmandise et de l’aventure. Si en soi
le jeune dieu était une personne agréable et toujours gaie, tous le trouvaient néanmoins un peu simplet
et doutaient qu’il puisse leur être d’une réelle utilité. C’est pourquoi personne ne lui avait encore
demandé d’aide, au grand désarroi de ce dernier.

-Le pire, pensa-t-il en observant les autres dieux et apprentis dieux converser entre eux, c’est que moi
je connais le cadeau parfait pour Nami.

Et il avait tout à fait raison. Il y avait une chose que Nami désirait ardemment mais qu’elle ne pouvait
obtenir d’elle-même : l’amour. Plus jeune, la déesse était tombée irrémédiablement amoureuse mais
cet amour lui avait été interdit. Les règles des Cieux étaient claires : un dieu n’avait pas le droit de
tomber amoureux d’un mortel, et encore moins un apprenti dieu. Un dieu avait le devoir de satisfaire
chaque besoin de ce monde et ne pouvait se laisser distraire par de telles relations. La déesse des
richesses et des enfants, encore apprentie à ce moment-là, avait été forcée d’enfouir ses sentiments au
plus profond d’elle-même et de se contenter de s’assurer, de temps à autre, que l’élue de son cœur
vivait une existence paisible. Luffy avait toujours trouvé ces règles idiotes et tout ce que lui souhaitait,
c’était de voir enfin sa meilleure amie heureuse. Même si pour cela, il devait enfreindre quelques
règles, le bonheur de Nami était sa priorité. Il n’était peut-être pas très intelligent, même un peu idiot,
mais quand il avait un objectif, il faisait tout pour l’atteindre. Et cette fois, son objectif était simple :
offrir à Nami le cadeau de ses rêves.

***

Le monde mortel avait toujours fasciné Nami. Il ne passait pas une journée sans qu’elle ne jette un
regard au miroir céleste qui reflétait tout ce qui se passait sur la terre des humains. Parfois, elle ne
restait que quelques minutes mais le plus souvent, c’était une question d’heures. Elle faisait défiler les
nombreux continents, pays, s’arrêtant sur certains plus que d’autres mais celui qui avait acquis au fil
des ans le plus son attention était le pays prospère d’Alabasta. Un oasis au milieu du désert, un pays
où les visages n’étaient marqués que par les sourires et où les enfants évoluaient sereinement, sans
inquiétude d’une possible guerre. Bien sûr, comme dans tout pays, ça n’avait pas toujours été le cas.
La déesse de l’Histoire lui avait expliqué qu’il y a de cela plusieurs années, avant même sa naissance,
un homme s’était emparé du pouvoir et avait fait régner une véritable dictature sur le royaume,
parvenant même à le priver d’eau et de pluie. Ces années-là n’avaient été que misère et désespoir,
jusqu’à l’arrivée de Cobra Nefertari. Aidé du précédent dieu de la guerre, l’homme était parvenu à
chasser l’horrible tyran et avait accédé au trône, régnant d’une main ferme mais avec douceur sur le
royaume. Il avait ramené la pluie, l’eau et l’espoir dans le pays.

Pour autant, ce n’était pas le nom du roi qui était sur toutes les lèvres. Il y avait au sein du royaume
une personne plus aimée encore que le roi : la princesse Vivi Nefertari. A cette simple pensée, une
bouffée de tendresse envahit la jeune déesse et le miroir, suivant ses pensées, afficha le visage encore
un peu enfantin de la princesse. Elle n’avait que deux ans de moins que Nami, soit dix-huit ans, et
pourtant, ses traits et son sourire la faisaient paraître plus jeune. Ses cheveux d’une couleur unique au
monde, un bleu semblable aux eaux claires, étaient tressés et elle semblait irradiée de joie. Si
seulement c’était à moi qu’elle pouvait sourire ainsi, soupira intérieurement la déesse en s’éloignant
du miroir.

Elle y avait eu le droit par deux fois, à ce sourire. Deux moments inoubliables pour la jeune déesse.

***

Nami désespérait. Demain signerait les treize ans d’existence de l’apprenti dieu de la gourmandise et
de l’aventure et pour une fois, aucune idée de cadeau ne lui traversait l’esprit. Habituellement, les
dieux ne fêtaient que deux uniques anniversaires : celui de la majorité, à 20 ans, et celui du
remplacement, qui pouvait survenir à n’importe quel âge. Mais avec Luffy, ils avaient décidé de fêter
chaque année leur anniversaire, comme le faisaient généralement les mortels. C’est pourquoi elle
était là, assise en tailleur sur le sol cotonneux que formaient les nuages, à réfléchir au cadeau qu’elle
pourrait offrir à son meilleur ami.

-Je ne trouve rien, se lamenta-t-elle en levant son regard vers sa professeure.
-Pourquoi ne lui donnerais-tu pas simplement un succulent encas ? Questionna Belmer en feuilletant
les vœux mortels lui ayant été adressés.
-Parce que chaque année, c’est encore et toujours la même chose. Nourriture, nourriture…
-Il n’est pas l’apprenti de Ace pour rien ce gamin !

Nami soupira. C’est vrai que ces deux-là étaient beaucoup trop semblables. De vrais estomacs sur
pattes. Mais tout ça n’aidait toujours pas Nami dans sa recherche d’idées. Au fond, à part la
nourriture, qu’est-ce qui mettait des étoiles dans les yeux de son ami ? Elle eut une soudaine
illumination et tapa dans ses mains de satisfaction. L’aventure. Luffy aimait ça presque autant que la
nourriture. Mais une simple escapade dans la forêt céleste ne lui suffirait pas. Il fallait partir plus
loin, dans un lieu encore inconnu d’eux deux.

Un endroit comme le monde des mortels.

***

Elle jeta un regard en direction de Belmer et réprima un soupir de soulagement en voyant que
l’attention de sa professeur était portée sur ses documents. Rien que de penser à l’éventualité de
descendre dans le monde mortel, alors qu’ils n’étaient qu’apprentis, était passible de sanction. Mais
d’un autre côté, ce goût d’interdit saurait amplement satisfaire Luffy. Si personne ne savait qu’ils
étaient descendus, alors il n’y aurait aucun risque, n’est-ce pas ? Nami hocha gravement la tête, déjà
prête à élaborer le meilleur des plans pour que cette escapade ne se termine pas en punition.

Le jour J, Nami réussit à convaincre Belmer et Ace de ne pas se faire de soucis pour eux, qu’ils
n’allaient que dans la forêt céleste donc pas de quoi être inquiet. Bien sûr, si Ace avait immédiatement
gobé le mensonge sans remettre en question les paroles de la petite apprentie, ça n’avait pas été le cas
de Belmer. Elle avait longuement fixé du regard sa disciple, cherchant le moindre signe pouvant la
trahir, mais ne trouvant rien, elle avait fini par abandonner. C’est donc satisfaite que Nami s’était
emparée de la main de Luffy pour le traîner à sa suite en direction de la forêt céleste.

Si Luffy était heureux de passer un moment avec sa meilleure amie, il était pour autant assez déçu
d’aller dans la forêt. Il l’avait déjà visité moulte et moulte fois avec Ace et Sabo et en connaissait les
moindres recoins. Ce n’était donc pas une aventure assez distrayante pour lui. Il traîna un peu des
pieds, toujours sa main dans celle de son amie, et fronça finalement les sourcils quand Nami les guida
dans un coin plus profond de la forêt. Il se stoppa net, arrêtant l’apprentie déesse par la même
occasion.

-On n'a pas le droit d’aller par là, bouda Luffy en se rappelant les avertissements de Ace. C’est l’un
des chemins pour aller dans le monde des humains.
-Je sais, répondit Nami malicieusement. Tu ne croyais quand même pas que j’allais t’offrir une simple
escapade dans la forêt pour ton anniversaire ?
-Tu veux dire que…
-Nous allons un peu enfreindre les règles. Il ne faudra surtout pas le dire aux autres, pas même à Ace
et Sabo, d’accord ? Tu es partant ?

Les yeux de Luffy se mirent aussitôt à rayonner. Bien sûr qu’il était partant ! On ne lui avait jamais
autorisé à se rendre dans le monde mortel alors que cet endroit regorgeait de lieux à découvrir. Il
sauta au cou de sa meilleure amie, en répondant à l’affirmatif et tous deux éclatèrent de rire. Si
jamais ils se faisaient prendre, Nami en assumerait entièrement les conséquences. Même la pire des
punitions ne saurait lui faire regretter d’avoir donné un tel sourire à Luffy.

***

-J’ai chauuuud.

Nami s’épongea le front, elle aussi affectée par la chaleur. Aux Cieux, la température n’était pas un
soucis, elle s’adaptait en fonction de chaque dieux mais le monde mortel était bien différent sur ce
point. C’était aux hommes de s’adapter au climat et non à lui de s’adapter aux hommes.
Heureusement pour Luffy et elle, ils n’avaient pas besoin de boire ou de manger. Les dieux ne se
sustentaient que des offrandes qu’on leur faisait et les apprentis récupéraient une partie des offrandes
de leur professeur. La nourriture n’était donc rien d’autre qu’une forme de gourmandise pour eux,
pas un besoin. Nami se doutait qu’à leur place, un humain serait déjà mort de soif. Cela faisait une
heure qu’ils marchaient sans réelle destination, dans un endroit qui leur était inconnu. La seule chose
que savait Nami était qu’ils se trouvaient dans un désert. Comment peut-on accepter de vivre
volontairement dans ce genre d’endroit ? Se questionna-t-elle intérieurement, faisant fi du
gémissement plaintif de Luffy à ses côtés. Elle était sur le point de lui proposer de rentrer quand ses yeux rencontrèrent au loin les contours d’une ville. Elle poussa une exclamation soulagée et entraîna
avec elle un Luffy épuisé jusqu’à la cité.

Les rues étaient bondées et animées, chaque marchant criant plus fort que son voisin pour attirer
l’attention des clients. Les yeux brillants, Luffy et Nami observaient l’agitation autour d’eux avec une
certaine fascination. L’ambiance qui régnait sur la grande place n’avait rien à voir avec les Cieux.
Nami avait toujours connu les Cieux comme un endroit calme et paisible, agrémenté parfois de
frasques de certains dieux, mais jamais une telle animation. Il était impossible pour son regard de se
poser sur un endroit en particulier tant il y avait de choses à voir. Pourtant, son attention se retrouva
attirée par un éclat bleuté, non loin d’eux.

Nami écarquilla les yeux. Elle venait de tomber sur la plus belle humaine du monde, elle en était
convaincue. Sa beauté pourrait même être comparable à celle des dieux. Elle dansait au milieu de la
place, le sourire aux lèvres et les cheveux voletants au gré de ses mouvements. Un canard géant
l’accompagnait dans ses pas, assez grossièrement. Nombreux s’étaient arrêtés pour observer la danse
de la fillette et certains tapaient même dans leur main afin de lui offrir un tempo sur lequel s’appuyer.
Nami aurait sûrement suivi le mouvement si Luffy n’avait pas lâché sa main et disparut dans la foule.

En remarquant l’absence de son ami, elle commença à paniquer. Laisser Luffy seul dans cet endroit
inconnu n’était pas une bonne chose. Qui sait ce qu’il pourrait faire. Elle abandonna avec regret le
spectacle et partit à la recherche de l’apprenti dieu. Seulement, au bout de plusieurs minutes, elle
n’avait toujours aucune trace de lui. Son cœur tambourinait fort dans sa poitrine à cause de
l’inquiétude et ses yeux piquaient à force de retenir ses larmes. Elle était responsable de lui, c’était
elle qui l’avait amené dans le monde mortel et voilà qu’à cause de son inattention, elle l’avait perdu.
Une main se posa tendrement sur son épaule et elle se retourna vivement, espérant voir le sourire si
candide de son meilleur ami. Mais à la place, elle tomba nez-à-nez avec la sublime danseuse qu’elle
avait aperçu sur la grande place.

-Tout va bien ? Questionna-t-elle. Tu as l’air soucieuse.
-Je… J’ai perdu mon ami…

La jeune fille acquiesça et caressa les cheveux de Nami pour la réconforter. L’apprentie déesse était
surprise. Était-ce commun pour les mortels d’avoir de tels gestes avec des inconnus ? Elle frotta ses
yeux et loucha un instant sur la main tendue de la danseuse.

-Je vais t’aider à le retrouver. Je connais mieux cette ville que quiconque et je pourrais demander aux
marchands s’ils n’ont pas aperçu ton ami. Qu’en dis-tu ?

Bien que hésitante, Nami s'empara de cette main tendue et ensemble, elles partirent à la recherche de
Luffy. L’apprentie déesse admira l’aisance avec laquelle la danseuse obtint des renseignements. Elle
semblait connaître tous les marchands de la grande place et ces derniers s'adressaient à elle avec
révérence, comme si elle appartenait à une importante famille. Etonnant pour une danseuse de rue.

Au bout de plusieurs minutes, un homme les informa avoir vu Luffy se diriger vers le restaurant non
loin de la place et les deux jeunes filles se lancèrent un sourire heureux. La danseuse tira Nami vers la
rue où se trouvait le restaurant et, maintenant soulagée de savoir où se trouvait son meilleur ami,
l’attention de Nami se porta sur leurs doigts liés. Une chaleur inexplicable monta à ses joues et elle
devint soudainement mal à l’aise. L’étreinte n’était pas désagréable, loin de là, mais Nami n’avait
jamais été aussi physiquement proche d’un humain. Peut-être cela expliquait-il l’étrange sentiment
qu’elle ressentait ? Son cœur tressauta lorsqu’elle croisa le regard bleuté de la jeune fille et ses
rougeurs prirent de l’ampleur lorsque cette dernière lui adressa un sourire resplendissant. Bon sang,
que lui arrivait-il ? Elle ne put se poser plus de questions car Luffy apparut aussitôt, la bouche
remplie de nourriture et poursuivi par ce qui semblait être le cuisinier du restaurant. Nami se prit le
visage dans sa main, désespérée.

-Arrêtez-le ! Criait l’homme furieux. Ce petit vaurien est parti sans payer !
-C’est ton ami ? Questionna la danseuse avec surprise.
-Malheureusement oui…

La jeune fille acquiesça puis abandonna la main de Nami pour aller parler au cuisinier. En quelques
minutes, l’affaire était réglée et l’homme repartit, non sans un regard noir pour l’apprenti dieu de la
gourmandise. Lorsque ce dernier s’approcha de Nami, il n’eut pas le temps de s’expliquer que déjà la
rousse le frappait. Elle lui hurla dessus, mais une fois le sermon fait, elle le prit dans ses bras,
rassurée.

-Merci pour tout, dit-elle en direction de la danseuse qui admirait tendrement la scène.
-Ce n’est rien. Au fait, je ne me suis pas présentée convenablement. Je m’appelle Vivi Nefertari.
-Et moi c’est Nami. Juste Nami.

Vivi fit une révérence, comme les princesses dans les contes humains que lui lisait parfois Belmer,
avant de se redresser, un doux sourire aux lèvres. Cette fille est la douceur incarnée, pensa Nami. Elle
réfléchit un instant à la manière de remercier la danseuse et fouilla dans l’une de ses poches. Nami ne
partait jamais sans emporter ses précieuses pierres et récupéra un saphir. Ça lui coûtait de se séparer
d’une de ses pierres mais Belmer lui avait appris à toujours remercier les personnes au cœur
généreux. Alors elle plaça la pierre dans la main de Vivi et se détourna d’elle aussitôt. Il était l’heure
de rentrer et ils ne pouvaient pas s’attarder plus longtemps. Seulement, alors qu’elle allait s’en aller,
l’autre fille la retint. Nami sentit une paire de lèvres se poser sur sa joue et son cœur loupa un
battement. L’expression qu’abordait Vivi la figea, tant la danseuse était belle en cet instant, la joie
l’illuminant.

-Merci pour ton cadeau Nami, il a une valeur inestimable. J’en prendrais grand soin.

Une valeur inestimable ? Aux Cieux les saphirs n’ont pas tant de valeur que ça. Mais Nami décida de
passer outre cette question et fit la chose la plus raisonnable face à cette situation. Elle embarqua
Luffy et fuit.

***

“Des rougissements à sa simple vue ? Une envie de veiller toujours sur elle ? De la toucher, caresser
ses cheveux, sentir le contact de ses lèvres ? De ne la voir sourire que pour toi ? C’est l’amour ma
chère Nami-swan !”. L’amour ? Nami jeta un regard à Sanji avant de reporter de nouveau son
attention sur le miroir céleste. Alors c’était ça… Mais comment pouvait-on tomber amoureux après
une seule rencontre ? Le coup de foudre sûrement. Nami sourit discrètement à cette pensée. C’était un
concept qu’avait inventé le premier dieu de l’amour mais à vrai dire, personne aux Cieux n’y croyait
vraiment.

-Au fait, demanda le blond en regardant affectueusement un groupe de mortelles dans le miroir, qui
est l’heureuse élue ? Une des apprenties déesses ? Même si elles sont toutes belles, je ne pensais pas
que l’une d’elle te plairait ! Ou alors une habitante céleste ?
-Non, c’est une mortelle, avoua Nami en dirigeant le miroir céleste vers le continent européen.
-Une mortelle ?

Nami sursauta devant le ton froid de Sanji. Il ne lui avait jamais parlé ainsi. Même son expression
était terrifiante, loin de celle béate qu’il abordait chaque fois qu’il la voyait. L’apprenti dieu posa ses
mains sur les épaules de la rousse avec un sérieux inhabituel.

-Nami, je pensais que tu le savais, mais aimer un mortel est strictement interdit. On peut t’enlever ton
statut de dieu pour le simple fait d’éprouver des sentiments pour un humain. Tu ne le dois dire à
personne, d’accord ? Si quelqu’un l’apprend…
-Mais pourquoi existe-t-il une telle règle ?
-Les dieux originaux ont estimé qu’aimer un mortel empêcherait un dieu d’accomplir son devoir.
Qu’en favorisant un humain, il délaisserait les autres.
-Mais c’est idiot ! Nous sommes capables de faire la part des choses, d’offrir de l’amour à l’un tout
en offrant aussi aux autres. Aimer un mortel ne nous empêchera pas d'exaucer des vœux, je ne
comprends pas leur logique !
-Personne ne la comprend…

Il tapota tendrement l’épaule de Nami en signe de réconfort mais cette dernière s’écarta. Elle se leva
sans un mot et s’en alla, sous le regard triste de Sanji.

***

Si Belmer l’apprend, je suis une apprentie déesse morte. Les mots de Sanji l’avait tellement
bouleversée qu’elle n’avait pas pu s’empêcher de retourner dans le monde mortel, malgré que son
âge le lui interdisait encore. Elle n’était qu’à trois ans de sa majorité mais cela ne lui autorisait pas
encore les escapades sur Terre. Nami sentait que c’était peut-être sa dernière chance de revoir Vivi
avant qu’elle ne devienne déesse à part entière. Une fois qu’elle le sera devenue, ses rencontres avec
les humains seront contrôlées et s’ils remarquent qu’elle va voir Vivi sans que cette dernière n’ait
formulé de vœux, alors ils la soupçonneront d’entretenir une relation avec elle et Nami pourrait dire
adieu au statut de déesse. Mais si je ne suis pas une déesse, que serais-je alors ? Personne ne savait ce
qui arrivait aux dieux déchus.

Nami arpenta les rues, le moral à zéro, avant de se rendre compte qu’elle ne connaissait pas l’endroit
où elle se trouvait. Le passage l’avait mené là où se trouvait Vivi mais rien ne rappelait à Nami
l’ambiance festive et joyeuse d’Alabasta. Au contraire, l’atmosphère qui régnait ici était pesante et
l’apprentie déesse fronça les sourcils. Qu’est-ce que Vivi pouvait bien faire dans un endroit pareil ?
Elle continua à marcher, les sourcils froncés, avant d’être attirée par le rire gras de deux hommes.
Curieuse, Nami se cacha derrière un mur et observa les deux mortels discrètement. Si les dieux
étaient connus pour être des êtres à la beauté renversante, ce n’était pas le cas des humains. Oh bien
sûr, il existait des exceptions, comme la princesse d’Alabasta, mais ces hommes n’en faisaient de toute
évidence pas partie. Ils étaient d’une laideur à faire peur aux enfants et, même si Nami était assez
éloignée d’eux, elle les imaginait sans mal pourvus d’une odeur nauséabonde. Elle grimaça et tendit
l’oreille pour connaître la raison de leur amusement.

-N’empêche qu’elle se débat bien la p’tite. Difficile de croire que c’est une de ces princesses choyées
et à la richesse démesurée ! On se fera un bon prix en la vendant.
-Tu as vu comment elle a mordu le chef ? Une vraie furie ! Je plains quand même son futur maître !

Nami mordit sa lèvre furieusement. Elle se faisait peut-être des idées, mais c’était tout de même une
drôle de coïncidence qu’elle soit envoyée ici, où est sensée se trouver Vivi, et qu’elle tombe sur des
marchands d’esclaves en possession d’une princesse. Nami trouvait aberrant que des mortels puissent
faire du trafic d’êtres humains mais quand elle avait demandé à Belmer pourquoi les dieux n’empêchaient pas cela, la déesse l’avait fixée tristement. “Malheureusement, nous devons aussi
laisser les humains agir en toute liberté. Ils doivent apprendre d’eux-mêmes leurs erreurs et ne pas
toujours compter sur l’assistance des dieux. C’est pour cela que les vœux que nous acceptons sont
rares et uniques. Nous ne pouvons pas aider deux fois le même humain”. D’après elle, certains
humains avaient déjà souhaité la paix dans le monde, l’arrêt de l’esclavagisme ou d’autres souhaits
dans ce genre mais que les dieux avaient refusé net d’y répondre car il incombait aux humains de
cesser eux-mêmes de tels agissements.

Seulement, si Vivi était concernée, elle ne pouvait pas rester les bras croisés. Elle n’était pas comme
Luffy, pas aussi courageuse que lui, mais quand elle le devait, l’apprentie déesse savait affronter le
danger. Nami prit une profonde inspiration et un sourire malicieux étira ses lèvres. Lorsqu’elle sortit
de sa cachette, les deux hommes sursautèrent et braquèrent leurs armes sur elle. Malheureusement
pour eux, Nami était destinée à être une déesse de la richesse. Et qui dit argent, dit souvent
négociation et manipulation. C’est pourquoi, l’apprentie déesse avait été dotée à sa naissance d’un
fort pouvoir de persuasion.

Au bout de quelques minutes, elle savait déjà où ces hommes retenaient la princesse. Quelle n’avait
pas été l’horreur de Nami de découvrir enfermés, dans une pièce délabrée, une dizaine de personnes
prêtes à être vendues en esclavage. Et parmi eux, se trouvait bien évidemment la princesse Vivi mais
également deux jeunes enfants, encore trop petits pour savoir lire ou écrire. Lorsqu’elle la vit, la
princesse écarquilla les yeux et Nami l’aperçut serrer contre son cœur un pendentif. C’était le saphir
qu’elle lui avait offert, des années auparavant. Elle se précipita vers elle, vérifiant que Vivi n’était pas
blessée mais avec soulagement, Nami constata que tout semblait aller bien malgré la situation.

-Nami, soupira-t-elle d’une voix fatiguée et la rousse s’étonna un instant que la princesse se
souvienne de son nom. Ces enfants… Ils sont en bien plus mauvais état que moi…

Tournant son regard vers les petits, elle s’aperçut que c’était en effet le cas. Or voilà. Nami n’était
pas seulement l’apprentie déesse de la richesse. Elle était aussi destinée à être plus tard la protectrice
des enfants. Et en cet instant, une rage incontrôlable l’envahit. Elle demanda à Vivi de veiller sur eux
et se dirigea à l’endroit où se trouvait le chef de cette organisation.

Personne ne sut jamais exactement ce qui se passa ce jour-là. Mais tous s'accordaient à dire que les
hommes avaient péri sous les flammes de colère d’une déesse.

Vivi avait aidé tous les prisonniers à s’échapper, veillant également à ce que les enfants soient
rapidement pris en charge par un médecin. Après s’être assurée que tout le monde était sauf, elle
avait attendu, longtemps, que Nami réapparaisse. Et quand elle avait vu la jeune femme indemne, elle
avait soupiré de soulagement. Sans un mot, elle l’avait serré dans ses bras, la remerciant en silence
d’être venue la secourir. Elle garda pour elle le fait qu’elle avait longuement prié pour que la jeune
femme vienne à son secours, et elle garda tout autant le fait qu’elle se doutait que la rousse n’était
pas tout à fait humaine. Car durant toutes ses années, elle avait eu l’impression que Nami veillait sur
elle et que le saphir la protégeait des moindres dangers. Et alors même si aujourd’hui le pouvoir du
saphir avait été inefficace, Nami était venue la sauver à la place.

Elle lui offrit un merveilleux sourire de remerciement à Nami. Puis, prise d’une impulsion, elle ferma
les yeux et embrassa la tempe de la déesse. Comme elle l’avait imaginé, sa peau était douce et son
cœur battit un peu plus fort dans sa poitrine. Elle sentit le contact s’évaporer et quand elle réouvrit
les yeux, Nami avait disparu.

***

C’était le grand jour. Nami termina de tresser ses longs cheveux roux en une unique natte et lissa sa
robe de cérémonie avec précaution. Satisfaite, elle s’admira dans le miroir de sa chambre et ne put
nier qu’elle était tout à fait splendide ainsi vêtue. Un toussotement à l'embrasure de la porte la sortie de sa contemplation et elle adressa un sourire serein à son meilleur ami. Beaucoup de dieux
étaient nerveux au passage de majorité mais pas elle, pas alors qu’elle avait Luffy à ses côtés pour
cette journée importante. Faisant preuve d’un rare galantisme, le brun lui offrit son bras qu’elle prit
sans aucune hésitation. Ensemble ils se dirigèrent vers la salle Céleste où se déroulerait la cérémonie.

-J’ai troooop hâte de te donner ton cadeau, s’enthousiasma Luffy en tirant involontairement le bras de
son amie, faisant trébucher cette dernière.
-Moi aussi j’ai hâte de voir ce que tu m’as concocté comme surprise mais pour le moment calme-toi !

Nami frappa le crâne du Dieu de la gloutonnerie et de l’aventure avant de récupérer son bras, refusant
de le confier de nouveau à Luffy.

La salle Céleste était remplie de dieux et déesses, mais également d’habitants célestes. Nami salua
chacun d’eux du mieux qu’elle put puis se hissa jusqu’aux trônes où l’attendait les quatre dieux
principaux. Il s’agissait de dieux sans spécifications mais qui étaient chargés de veiller sur eux tous,
dieux comme humains. C’était également eux qui étaient chargés des cérémonies. La génération de
Nami les appelaient les quatre Empereurs des Cieux.

Elle s'inclina à leurs pieds et attendit que Barbe Blanche, l’un des Empereurs, ne l’autorise à se
relever. Une fois qu’il le fit, la cérémonie débuta. En soi, elle ne dura pas aussi longtemps que Nami
l’avait imaginé. On lui fit réciter les règles auxquelles devaient se soumettre les dieux, on lui rappela
son rôle futur et Shanks lui transmit un peu de son pouvoir, lui permettant dès lors de répondre aux
vœux des humains.

Une fois terminée, la fête débuta. Rapidement, Nami croula sous les présents mais chacun d’eux la
remplissait de joie. Elle remercia tous ceux qui avaient pris la peine de lui offrir un cadeau et attendit
en vain celui de son meilleur ami mais étrangement, le brun ne semblait toujours pas vouloir lui faire
ce plaisir. A la place, il discutait gaiement avec Zoro, l’actuel dieu de la guerre. N’était-ce pas lui qui
avait pourtant clairement dit qu’il avait hâte de lui offrir son cadeau ? Elle soupira et bien décidée à le
réprimander, elle s’avança vers lui mais une douleur au crâne la stoppa.

“Déesse des richesses et des enfants, je réclame ton aide”, dit une voix dans son esprit et Nami
écarquilla les yeux. Une demande, déjà ? Mais comment était-ce possible ? Elle n’avait aucun temple,
ce qui faisait que les mortels ne connaissaient pas encore ses attributs et donc les moyens de
l’invoquer. Alors comment ?

-Tout va bien Nami ? Questionna Belmer, soucieuse pour celle qu’elle considérait comme sa fille.
-Je… J’ai une demande.
-Tiens, en voilà une chose étrange, ce n’est pas habituel d’avoir des souhaits avant même la
construction d’un temple, s’étonna Robin, la déesse de l’Histoire, le menton entre ses doigts.
-Mais même si c’est suuuuuuper bizarre, tu dois y aller en tant que nouvelle déesse, s’exclama le dieu
des charpentiers.

Nami acquiesça, incertaine, et grâce à ses nouveaux pouvoirs, se rendit sur Terre, là où la demande
avait été formulée. Quelle ne fut pas sa surprise lorsqu’elle se retrouva nez à nez avec la magnifique
princesse d’Alabasta. Cette dernière tenait une mandarine au creux de ses mains, l’un des attributs de
Nami, et ses yeux scintillaient d’émerveillement.

-Alors c’était vrai, tu n’es pas humaine mais une déesse. Je comprends mieux pourquoi, malgré mes
contacts, il m’a été impossible de te retrouver !

Nami était figée par la surprise. Comment était-elle censée réagir dans cette situation ? Elle ne pensait
pas pouvoir revoir la jeune fille un jour, autrement que par le miroir céleste. Et pourtant elle se
trouvait bel et bien là, face à elle, en chair et en os. Mais surtout, elle ne semblait pas vraiment
choquée d’apprendre sa vraie nature. Voyant qu’elle n’obtiendrait pas de réponses de Nami, Vivi
reprit la parole, ses bras enserrant fermement la mandarine.

-J’ai le droit à un souhait, n’est-ce pas ? Un qui soit réalisable.
-Comment le sais-tu ? Personne n’est censé me connaître en tant que déesse !
-Disons qu’en échange de quelques mets rares, un jeune dieu m’a offert cette information.

Nami comprit alors. Ses yeux brillèrent de larmes contenues. C’était son cadeau. Le cadeau que lui
offrait son meilleur ami. On pouvait dire ce qu’on voulait de Luffy, qu’il n’était qu’un idiot et un
ventre sur pattes, mais au moins, on ne pouvait cependant pas lui reprocher de faire tout pour ceux
qu’il aimait. Et là, il lui avait permis de revoir au moins une fois l’humaine qu’elle aimait. Avant
qu’elle ne puisse répondre quoique ce soit, Vivi la coupa.

-Je veux formuler mon vœu. Si tu es d’accord avec ça, alors je souhaite que tu restes à mes côtés
jusqu’à la fin de mes jours, en tant que ma compagne, sans que cela n’entrave ta fonction de déesse.
-Mais… Mais c’est impossible… Et puis tout souhait qui touche l’amour n’est pas de mon ressort,
soupira Nami qui oscillait entre la joie de comprendre que ses sentiments étaient partagés et la
tristesse de ne pas pouvoir répondre à la demande de sa mortelle.
-Peut-être que ça n’est pas de ton ressort, mais ça l’est du mien, à présent, dit une voix enjouée
derrière elle.

Lorsqu’elle se retourna, Nami aperçut Sanji qui la fixait avec une certaine tendresse. Son cœur battit
plus vite à ces mots mais elle craignait de se faire de faux espoirs.

-Les Empereurs ont décidé de faire une exception, car ils connaissent ton caractère et qu’ils savent
que malgré ton amour pour cette humaine, tu ne mettras pas en péril ton rôle de déesse. Et Shanks m’a
dit de voir ça comme un cadeau de leur part, même si bon, à part lui et Barbe-Blanche, les deux autres
étaient plutôt réticents. Quant à moi, j’accepte de te déléguer ce souhait, en tant que dieu de l’amour.
Alors n’hésite pas Nami.

Nami pleurait à présent de joie. Elle pourrait aimer librement Vivi sans que les Cieux ne l’en
empêche. Elle se tourna vers la bleutée qui lui souriait avec tendresse et amour. Elles devraient certes
apprendre à mieux se connaître, à affermir leurs sentiments, mais le coup de foudre qui les avait toutes
deux frappé, des années plus tôt, n’avait pas disparu. Alors même si elles ne s’étaient vues qu’à deux
reprises, l’amour, ce sentiment inexplicable, était bel et bien présent.

La déesse se rapprocha de la mortelle et l’embrassa avec douceur, goûtant pour la première fois aux
lèvres de la princesse.

***

On raconte qu’avec les années, les deux femmes n’ont jamais cessé de s’aimer et qu’au contraire, leur
amour n’a fait que décuplé.


Note de l’auteur : Voilà, j’espère que tu auras passé un bon moment avec ce texte et je te souhaite un
joyeux anniversaire !

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