Nothing - Yugyeom x Jungkook (part.1)
"La souffrance et les larmes lavent toutes les fautes."
Il pleuvait ce jour-là, comme presque tous les jours à vrai dire. Alors comme à chaque fois, j'avais passé mon après-midi à maudire ce mauvais temps. Je détestais être mouillé. Devoir constamment trimbaler mon parapluie avec moi ou courir pour éviter les rhumes me mettait tout simplement de mauvaise humeur. Je haïssais ça presque autant que les cours de maths. Étant devenu une habitude, j'avais longuement soupiré sous le hall du bâtiment, admirant les autres élèves courir rapidement pour atteindre l'arrêt de bus en premier. Moi, je n'avais pas envie de bouger alors j'essayais de me préparer mentalement à ce qui m'attendait. Le bus était toujours pleins, l'odeur qui en émanait le prouvait bien d'ailleurs, tous se bousculaient pour ne pas avoir à attendre le deuxième bus. Nous nous retrouvions bien souvent serrés aux autres, ou complètement collés contre la vitre du véhicule, à galérer pour un peu d'air. Puis c'est à cet instant précis qu'une personne a capté mon attention. Contrairement aux autres élèves, le garçon s'est lentement avancé sur la cour du lycée et une fois arrivé au milieu de ce large espace, ses jambes se sont distinctement stoppées. Il était là, laissant la pluie mouiller ses cheveux comme si c'était ce qu'il avait attendu depuis toujours. Les autres ne se souciaient pas de lui. J'avais même l'impression d'être le seul à le voir agir aussi bizarrement. Rapidement son uniforme bleu a viré au noir tandis que ses mèches de cheveux l'empêchaient presque de voir quelque chose. Puis au loin, à une vingtaine de mètres environ, je l'ai aperçu tendre sa main. Sa paume faisant fièrement face au ciel, ce garçon admirait presque étrangement les gouttes d'eau s'écraser contre sa peau. Oui, c'est à cet instant précis que j'ai commencé à apprécier la pluie. J'ai fais quelques pas en avant puis j'ai redressé la tête vers cette couleur grisâtre. Les yeux fermés, j'ai laissé le mauvais temps caresser mon visage, comme si c'était le moment le plus important de toute ma vie. Je voulais ressentir ce qu'il ressentait à ce moment-là, découvrir la sensation qu'il était certainement le seul sur terre à apprécier.
D'après ce que j'avais pu trouver à son sujet, il s'appelait Jeon Jungkook, il avait dix-huit ans et se trouvait lui aussi être en dernière année de lycée. Au début, j'étais assez surpris de ne jamais l'avoir remarqué mais comme me l'avait fait comprendre beaucoup de mes camarades, peu de personne avait déjà entendu parler de lui. Il était pourtant lycéen ici depuis trois ans alors ce manque d'intérêt pour sa personne me semblait peu commun vu la situation dans laquelle nous étions. Gamjeong est un petit village perdu au centre de notre bien beau pays, alors évidemment, nous nous connaissons tous plus ou moins. Je suis né ici donc j'estime que rien ne m'échappe, surtout pas un garçon comme lui. En approfondissant mes recherches, j'ai appris que Jungkook s'était discrètement installé avec ses deux parents il y a déjà quelques années. Étant très secret, personne n'a jamais réellement échangé de conversation avec la famille Jeon. Peut-être que cela expliquait pourquoi Jungkook n'avait pas d'ami. Des jours et des semaines ont passé et moi, je ne cessais plus de l'observer. J'espionnais ses faits et gestes et j'ai rapidement découvert quel genre de personne il était. Jungkook ne souriait jamais. Il ne parlait presque pas et le plus souvent, s'il prenait la peine d'ouvrir la bouche, c'était pour paraître désagréable et froid. Aucune expression ne franchissait son visage. Il ne ressentait pas de joie, de peur ou d'euphorie, même les jours où l'un des professeurs était absent. Il était neutre. Incroyablement indifférent à tout ce qui l'entourait. Totalement apathique, comme désabusé d'avoir à vivre ou à ressentir des émotions.
– « Salut. Moi, c'est Kim Yugyeom. J'peux m'asseoir ? » avais-je demandé tout sourire. Ma curiosité me poussant beaucoup trop, j'avais fini par m'avancer vers lui un jeudi midi, pendant l'heure de pause. Jungkook était assit sur un banc, protégé du soleil par le feuillage des arbres, visiblement très intéressé par le match de foot qui se disputait juste devant lui. Malgré les battements de mon coeur qui s'étaient considérablement intensifiés, j'avais pris mon courage à deux mains avant de pouvoir prononcer cette phrase déjà toute préparée dans ma tête. Bien évidemment, sans grande surprise, le brun s'était contenté de me fixer quelques secondes de son regard noir avant de détourner la tête vers sa première occupation. Comme à son habitude, Jungkook était le seul à fuir les rayons du beau temps, sûrement parce qu'il détestait ressentir la chaleur ou ce genre de chose... J'avais donc pris place à ses côtés même s'il souhaitait certainement rester seul. Mais je ne pouvais me résoudre à laisser tomber. Depuis ce jour, depuis ce premier jour où j'avais eu la chance de poser mes yeux sur lui, quelque chose avait changé en moi. Ou plutôt...quelque chose s'était créé en moi, sans que je ne puisse vraiment définir quoi. L'espionner de loin sans jamais pouvoir lui adresser la parole m'avait presque rendu obsédé par lui. Je voulais savoir. Je voulais à tout prix savoir pourquoi est-ce que ce garçon de dix-huit ans ne souriait jamais alors que tout son entourage au lycée s'exaltait du bonheur que tout jeune adulte pouvait ressentir. C'était les meilleures années de nos vies, les meilleurs instants, ceux qu'on était supposé vivre qu'une seule fois pourtant, Jungkook ne semblait pas le réaliser. Ou du moins, c'est l'impression qu'il donnait... « Tu aimes le foot ? » l'avais-je interrogé sans quitter son visage des yeux. Il était beau. Incroyablement beau. Même s'il semblait totalement privé d'émotion, les traits de son visage ne cessait de m'hypnotiser. « Peut-être qu'on pourrait aller jouer avec eux ? J'connais bien celui qu'arrête pas d'marquer, il nous laisserait rejoindre une équipe si j'lui demandais... » avais-je ajouté, toujours impatient de pouvoir entendre le son de sa voix.
– « Pourquoi est-ce que tu t'es assis ici ? » s'était-il finalement intéressé. Et comme un imbécile, j'avais esquissé un large sourire, presque satisfait d'avoir réussi à capter son attention. A la minute qui suivait, je me rappelle avoir imaginé ce que notre relation pourrait devenir dans un futur proche. J'avais idéalisé notre amitié, le lien qui allait nous unir et changer nos vies pour toujours. Je me souviens avoir pensé pouvoir le faire sourire, pouvoir changer cette expression neutre et complètement désintéressé qu'il s'obstinait curieusement à arborer. C'était ça. Cette chose indescriptible qui s'était immiscé en moi, c'était le désir, la convoitise démesurée de vouloir le faire sourire, de pouvoir l'entendre rire au moins une fois.
– « J'sais pas... J'me disais...qu'on pourrait être ami tous les deux. J'sais pas pourquoi mais...j'aime pas vraiment te voir seul... » lui avais-je expliqué avec honnêteté. Jungkook s'est tout compte fait tourné vers moi, de manière lente et insensible comme s'il était bien trop épuisé pour pouvoir ne serait-ce que mimer la curiosité sur son visage. Cependant, j'arrivais à décrypter ses émotions. Jungkook ne semblait pas comprendre mon comportement. Peut-être avait-il peur que je me moque de lui, peut-être pensait-il que je ne cherchais qu'à jouer avec lui. En réalité, les idées avait fusé de toute part dans ma tête sans que je ne puisse trouver réponse à mes suppositions.
– « Pourquoi ? Tu as pitié de moi ? » Son regard était resté intact. Pitié de lui ? Pourquoi avait-il pensé ça ? Je me retrouvais donc à paniqué à l'idée de tout faire foirer dès notre première discussion. Ce n'était pas mon intention, je n'avais pas voulu qu'il pense que je ne le considérais que comme faible ou autre...
– « Non. Non, c'n'est pas du tout ça... Je... J'aimerai juste qu'on apprenne à se connaître. Si...tu es d'accord. » J'étais affolé. Intérieurement, toutes les cellules de mon corps étaient en alerte. Pourquoi échanger avec lui me rendait si nerveux ? C'était un lycéen comme les autres, un gars de dix-huit ans, il n'allait pas me juger ou me pointer du doigt juste pour se moquer, alors pourquoi je stressais à l'idée qu'il me repousse ?
– « Je n'arrive pas à comprendre. Si ce n'est pas de la pitié, qu'est-ce que c'est ? » avait-il continué. Jungkook était étrange. Pour son âge, il semblait ailleurs, comme s'il n'avait jamais eu d'ami ou de conversation avec quelqu'un. Pourquoi se devait-il de mettre un mot sur ce que tout cela représentait. Je ne cherchais qu'à être gentil, qu'à apprendre sur sa personnalité...
– « Je suis juste...curieux... Oui, c'est sûrement ça. » avais-je avancé, un large sourire sur les lèvres. Jungkook s'était contenté d'un d'accord, comme si cette réponse lui avait amplement suffit. Moi, j'étais comme sur un petit nuage. Je ne pouvais l'expliquer mais je savais que je n'avais pas été aussi excité et heureux depuis bien longtemps. Quelque chose venait de commencer entre nous...
– « Salut ! » m'étais-je écrié de manière un peu trop enjoué. Jungkook, lui qui semblait jusque-là perdu dans ses pensées, leva le regard vers moi. J'avais cherché Jungkook durant toute l'heure de pause du midi. J'espérais avoir la chance d'échanger de nouveau avec lui comme la veille mais visiblement, il s'était de nouveau caché je ne sais où pour profiter de sa solitude. « J'te raccompagne jusque chez toi ? » Je l'avais aperçu alors que j'étais sur le point de monter dans le bus. Alors immédiatement, sans me poser de question j'avais ré-ouvert mon parapluie avant d'accourir derrière lui pour le protéger du mauvais temps.
– « Pourquoi ? Tu ne sais même pas où j'habite... » avait-il marmonné, les mains dans les poches. Il disait vrai mais je m'en fichais pas mal, j'étais déterminé à vouloir passer plus de temps avec lui même si cela signifiait que je devais marcher jusqu'à je ne sais où pour ça. Jungkook me rendait dingue. J'étais même prêt à refuser d'aller jouer à des jeux vidéos chez mon meilleur ami, rien que pour avoir ne serait-ce qu'un échange avec lui. Il me hantait l'esprit, jour et nuit. Et le voir comme ça, ce jour-là, les yeux noirs, ses cheveux humides lui tombant presque sur les yeux m'avait amplement conforté dans mon choix. Oui, c'est avec lui que je voulais être.
– « Et bien, maintenant je l'saurai... Puis, tu n'as même pas de parapluie. » J'avais tout de suite regretté mes mots. Je savais pertinemment que Jungkook adorait la pluie alors proposer de marcher avec lui seulement parce que moi j'avais un parapluie avec moi n'était même pas une bonne excuse... Pourquoi je me sentais aussi nul et angoissé avec lui ?
– « Fais comme tu veux... » avait-il dit avant d'accélérer le pas afin de ressentir de nouveau la pluie sur lui. Content qu'il ait plus ou moins accepté ma compagnie, j'avais refermé mon parapluie avant de revenir à ses côtés. J'étais heureux, heureux de ressentir les gouttes d'eau rouler sur mon visage. La chaleur de l'été rendait cet instant encore bien plus agréable. C'était le temps parfait, le temps idéal pour marcher auprès de Jungkook.
– « Je t'ai vu une fois...tendre ta main vers le ciel et admirer la pluie s'écraser contre ta paume... Pourquoi aimes-tu la pluie ? » avais-je fini par demander après quelques minutes de silence pesant. Jungkook était loin d'être bavard, j'en avais conscience mais j'avais espéré qu'il s'ouvre un peu plus facilement à moi après que j'ai ouvertement fais un pas vers lui. Je voulais tout savoir à son sujet. D'où est-ce qu'il venait, pourquoi est-ce qu'il préférait être seul, s'il avait des frères et sœurs, absolument tout.
– « Je n'sais pas... » avait-il bougonné. Il ne savait pas ? Même si j'étais légèrement déçu que Jungkook ne fasse aucun effort, je ne pouvais pas abandonner maintenant. Il finirait par me laisser venir vers lui. J'en étais certain. Il le fallait.
– « Tu aimes les glaces ? » lui avais-je proposé en pointant du doigt l'une des affiches collées contre la vitrine du petit supermarché. Je n'étais pas décidé à rentrer tout de suite. Plus j'arrivais à le distraire, plus je passerai de temps avec lui.
– « J'en sais rien. Pourquoi est-ce que tu m'poses toutes ces questions ? » Est-ce qu'il était agacé par toutes mes interrogations ? Jungkook savait vraiment comment cacher ses émotions...je n'étais même pas capable de savoir si je lui tapais sur les nerfs où s'il était juste naïvement curieux de savoir pourquoi je me donnais tant de mal pour lui. Pourtant, j'avais supposé qu'il finirait par comprendre. N'importe quel adolescent de notre âge l'aurait compris, il m'intéressait. Bien plus que n'importe qui avant.
– « Désolé... Ça t'dit quand même une glace ? J't'en offre une... » avais-je prononcé tout sourire. Je m'étais naturellement emparé de son poignet pour le mener avec moi à l'intérieur. Et à ce contact anodin mais nouveau pour nous deux, je me souviens avoir frémis. Et malgré le fait que je ne connaissais encore rien à son sujet, je savais ce que cela signifiait... Nous avions passé plus de cinq minutes à choisir nos glaces, ou du moins, à choisir sa glace. Apparemment, Jungkook était le genre de personne à ne jamais savoir ce qu'il veut. Et même si avant de le rencontrer, j'aurai pu trouver ça agaçant. Savoir qu'il était indécis l'avait rendu encore plus adorable à mes yeux... « Je connais un endroit sympa où on pourra s'abriter. J'suis sûr que tu l'connais pas... » Je ne le lui laissais pas le temps de refuser ou de s'enfuir. J'avais l'impression qu'avec lui, il me fallait agir vite sans lui donner l'occasion de se questionner sur la situation sinon je perdais. Et j'étais vraiment déterminé à ce que cela n'arrive pas... « Suis-moi. » lui avais-je présenté tout en lui tendant la main. Nous étions monté un peu plus haut dans le parc, là où on pouvait observer le village de Gamjeong dans sa totalité. Nous étions trempés, complètement. Alors j'avais eu la formidable idée de nous protéger sous l'espèce de petite abris abandonné. Jungkook n'avait pas prononcé un mot en dix minutes. Tout en mangeant sa glace, il s'était perdu dans ses pensées ou plutôt sur la scène plus que suggestive qui s'affichait juste sous nos yeux. A quelques mètres plus bas, un couple s'embrassait avec passion sous un parapluie, comme s'ils s'imaginaient être les seuls à venir s'asseoir dans le parc par un temps de pluie. Je n'avais plus rien trouvé à dire. J'étais tellement embarrassé par la situation que je ne trouvais même pas une foutue question à lui poser et pourtant, beaucoup m'avaient traversé l'esprit quelques minutes auparavant.
– « Est-ce que c'est agréable d'être embrassé ? » m'avait-il demandé tout en continuant de lécher sa glace à la vanille. J'étais resté figé face à sa question. Est-ce que c'était une manière pour lui de se foutre de moi ou bien était-il sérieux ?
– « Pourquoi tu... Tu n'as jamais eu de relation ? » avais-je osé demander. Je me souviens encore de cette chaleur intérieure qui avait fait son apparition après que j'ai finalement risqué de poser ma question. Mes joues avaient très certainement virées au rouge tellement j'étais troublé par la manière dont la conversation tournait.
– « Non. Et toi ? » J'étais presque jaloux qu'il puisse rester aussi sérieux. Jungkook n'avait pas semblé le moins du monde être déconcerté par le sujet. Il me répondait juste avec sincérité, sans aucune pression.
– « Oui. Une fois... » avais-je soufflé, honteux. Ma première relation avait duré près d'un an. Tout s'était terminé lorsque le garçon avec qui je fricotais avait déménagé. J'avais ressenti des choses pour lui mais pas au point de dire que j'en étais amoureux. Sortir avec lui avait été une sorte d'expérience, de découverte. Parce que nous étions tous les deux du même côté, je m'étais tout simplement laissé porté par mes désirs et fantasmes, tout en prenant le soin de tout cacher aux autres. Parce qu'être gay dans un village comme le mien ne ferait que me rendre la vie plus difficile... « Et bien...j'pense que c'est agréable d'être embrassé quand c'est avec la bonne personne. » Jungkook s'était immobilisé, le regard perdu dans le vide. Il semblait réfléchir scrupuleusement à la question.
– « Comment sais-tu si c'est la bonne personne ou non ? » Comment ? Je le trouvais déjà bizarre avant même qu'il ne me pose cette question mais pour le coup, sa question me paraissait bien trop étrange. J'imagine que chaque personne le sait. Que c'est une sorte d'instinct naturel...
– « Ben...c'est compliqué à expliquer. J'dirai qu'il faut qu'tu ressentes des choses pour cette personne... » C'était compliqué d'essayer d'expliquer à un garçon de dix-huit ans ce que c'était d'être amoureux. Je ne savais pas moi-même comment le décrire.
– « Quel genre de chose ? » avait-il insisté.
– « Tu n'as jamais été amoureux ? » avais-je ricané gentillement. Même si c'était assez étonnant de devoir expliquer tout ça à Jungkook, je ne pouvais m'empêcher de trouver ça mignon. Il était si innocent, si naïf. Et je crois, que j'adorais vraiment ça... Jungkook me regardait, indifférent. Lui ne semblait pas être amusé par la situation. « Oh, le prends pas mal, c'est juste assez étrange. Tout le monde tombe amoureux, même à l'école maternelle... » Je ne me moquais pas de lui. En réalité, je le jalousais. Lui n'avait jamais gâché sa vie avec des sentiments insignifiants ou autre. Peut-être attendait-il la bonne personne ?
– « Je n'ai jamais été amoureux. » avait-il confié d'une voix presque inaudible. Le brun avait recommencé à lécher sa glace tout en restant analyser le couple plus bas. Et d'un coup de folie que je ne saurai encore expliqué aujourd'hui, j'avais prononcé cette phrase. Cette phrase totalement absurde...
– « Tu veux...essayer ? » J'avais regretté immédiatement. Et le regard passif que m'avait jeté mon voisin n'avait en rien arrangé la situation. L'admirer d'aussi près m'avait fait perdre la raison...
– « Pourquoi ? Est-ce que tu es en train de... » Je ne lui avais pas laissé le temps de terminer sa phrase. J'avais jeté mes lèvres contre les siennes, sans même lui demander son avis. Mouvoir ma bouche contre lui avait fait naître en moi un besoin sexuel que je n'avais plus connu depuis ma précédente relation. C'était presque identique à mes autres désirs sauf que cette fois-ci, j'étais même prêt à le déshabiller sur place tellement son regard impassible me rendait dingue. Je le voulais. Je le voulais si ardemment que ce baiser avait bien duré près de cinq minutes sans nous laisser l'un à l'autre l'occasion de respirer correctement. Et c'est comme ça que tout a commencé. C'est comme ça, que je n'ai plus jamais cessé de penser à lui.
Jungkook m'évitait depuis plus d'une semaine déjà. Il m'arrivait de le croiser dans les couloirs mais comme toujours, cet idiot se donnait la peine de m'ignorer comme s'il ne m'avait même jamais adressé la parole. Je n'étais pas vexé ni même démoralisé par la situation. Parce que j'avais la nette impression qu'il avait apprécié tout autant que moi. Après notre baiser, Jungkook avait prétexté qu'il devait rentrer chez lui, alors je l'avais simplement raccompagné, sans un mot. Contrairement à moi, il n'avait pas paru gêné ou déboussolé, comme si ce que nous avions fait n'avait aucune signification à ses yeux. Mais j'espérais que c'était seulement sa manière à lui de cacher ses ressentis... Parce que s'il m'évitait aujourd'hui, c'est que quelque chose le préoccupait. Peut-être avait-il tout simplement besoin de réfléchir à tout ça. Peut-être n'avait-il jamais été attiré par un autre homme avant... Je m'étais donc forcé de le laisser méditer sur tout ça pendant une semaine. Parce que c'est vident que je n'aurai jamais pu tenir plus longtemps... Alors ce samedi matin, j'avais décidé d'aller lui parler. Je savais où il habitait et je savais aussi qu'il n'était pas du genre à sortir avec des amis pour s'occuper l'après-midi.
Alors que je me trouvais devant la porte de sa maison depuis déjà une dizaine de minute sans n'avoir rien fait, cette dernière s'ouvra subitement. Je n'ai même pas eu les couilles de frapper ou de sonner comme tout homme le ferait mais maintenant, au moins, je ne peux plus me défiler.
– « Oui...c'est pourquoi ? » s'interroge une femme qui se trouve certainement être la mère de Jungkook. Bordel, c'est bien pire que tous les scénarios ridicules que je m'étais imaginé. Moi qui stressait à l'idée que Jungkook me repousse, je me retrouvais tout bêtement face à sa mère, sans savoir quoi dire...
– « Oh, hum... Bonjour Madame Jeon. Je suis Kim Yugyeom, je... Je venais voir si Jungkook était là. Je voulais lui proposer d'aller au cinéma... » Je n'ai jamais été aussi nerveux de toute ma vie... Et le pire, c'est que je suis certain que ça se voit... Madame Jeon referme rapidement la porte d'entrée derrière elle avant de s'approcher un peu plus de moi.
– « Pourquoi ? Qu'est-ce que tu lui veux ? C'est pour te moquer de lui que tu es là ? » commence-t-elle à s'énerver. Moi, totalement affolé, je ne comprends rien à la situation. Pourquoi est-ce que je voudrais me moquer de lui ? Est-ce qu'il...est-ce qu'il lui aurait parlé de notre baiser ? Bordel de merde, je suis vraiment dans un sale pétrin... Si tout ça va jusqu'aux oreilles de mes parents, je suis foutu...
– « N-Non... Je suis un ami de Jungkook. Je... Je voulais simplement passer du temps avec lui. Je... Pourquoi est-ce que vous dites ça ? Est-ce qu'il s'est passé quelque chose avec Jungkook ? » m'empressais-je de demander. Alors qu'il y a de cela cinq secondes, j'étais l'homme le plus angoissé de la terre me voilà désormais contrarié. Qui est-ce qui s'en prend à Jungkook ? Et pourquoi ne m'a-t-il rien dit ? Est-ce que quelqu'un s'amuse réellement à se moquer de lui ?
– « Tu as une minute ? » me questionne-t-elle, bien plus calmement. J'acquiesce lentement, peu sûr de ce qui est en train de se passer. « Alors suis-moi. J'ai à te parler. » La mère de Jungkook commence à marcher, son panier de course vide en main. A la fois inquiet et stressé, je me contente de la suivre muettement. J'ai l'impression que quelque chose de sérieux est arrivé à Jungkook... Et rien que d'y penser, j'ai presque envie d'accourir jusqu'à lui pour le prendre dans mes bras. « Assieds-toi. » me propose-t-elle, tout en faisant de même, lorsqu'un banc se présente finalement à nous. « Tu es vraiment un ami de Jungkook ? » s'assure-t-elle pour commencer.
– « Oui, Madame. Je sais que Jungkook est un peu différent mais...je crois que j'apprécie vraiment sa personnalité... » Imaginer qu'on puisse s'en prendre à Jungkook simplement parce qu'il n'est pas aussi expressif et sociable que le reste du monde me rend fou. Je serais presque capable d'en venir aux mains si une telle chose arrivait sous mes yeux. Jungkook n'est pas un méchant garçon, il est juste un peu étrange. Mais c'est ce qui m'attire chez lui... Madame Jeon prend une profonde inspiration avant de se lancer, visiblement angoissée.
– « Jungkook...ne ressent aucune émotion. Il est l'un des rares cas psychopathologiques à n'avoir aucune émotion, ni aucun sentiment. Certains médecins parlent d'anhédonie, de schizophrénie ou encore d'effet secondaire dû à la clinophilie mais en réalité, nous ne savons pas vraiment à quoi cela est dû... Alors, il le qualifie simplement d'apathique. Tout ça a commencé lorsqu'il était enfant... Quand il avait cinq ans...il a assisté à un acte horrible qui a de manière inexpliqué engendré la disparition de toutes ses émotions. » Mon esprit se vide de manière instantané. Jungkook ne ressent aucune émotion... Alors...lorsqu'il me regardait de son air apathique, lorsqu'il n'arrivait même pas à transmettre un sourire ou une interrogation, ce n'était pas parce qu'il se donnait du mal pour le cacher. C'est parce qu'il en était tout simplement incapable ? « La mort de sa grande-sœur a été l'élément déclencheur. Lui qui était si joyeux étant bébé... Il se mettait à pleurer toutes les larmes de son corps lorsqu'il n'avait pas son doudou pour s'endormir, il chouinait de peur lorsqu'il entendait l'orage, il riait à pleine dent lorsque sa sœur lui faisait des grimaces... Tout ça...il en est aujourd'hui incapable. Il continue de suivre une thérapie, mais les médecins disent qu'ils ne peuvent rien faire. On a tout essayé... Les traitements, la psychanalyse, l'hypnose... Rien n'y fait. Il a essayé...pendant des années, il a essayé de ressentir des choses. Mais à part analyser les gens, ça n'a jamais fonctionné. Il sait qu'une personne est censée être heureuse lorsqu'elle sourit, il sait que lorsque quelqu'un pleur, c'est parce que cette personne est triste mais...il est totalement perdu lorsqu'une personne se met à pleurer de joie. Même s'il a beau analyser les choses, il ne peut pas comprendre ou décrypter les vrais sentiments. Alors dans son ancienne école, les autres enfants s'en amusait. Il se moquait, se jouait de lui simplement parce qu'il est incapable de le comprendre. Le pire dans tout ça, c'est qu'il est même incapable d'éprouver de le colère envers eux... » Je commence alors à comprendre. Ce jour-là, le jour où je l'ai vu tendre sa main vers le ciel, il n'était pas en train d'apprécier la pluie, il essayait de la ressentir. Et toutes ces questions qu'il me posait, toutes ces questions sur le fait de ressentir ou de savoir qui est la bonne personne...ce n'était pas par manque d'expérience. Il ne sait vraiment pas ce que c'est que d'aimer... « Je sais...que c'est difficile à supporter. Je suis moi-même épuisé d'être la seule à l'aimer, à souffrir de cette situation... Son beau-père l'aime comme son propre fils mais n'a même pas la chance de pouvoir le traiter de cette façon... Cependant... Je n'ai jamais perdu espoir...et lui non plus. Il continue d'essayer. Il continue de vouloir ressentir quelque chose. Alors pitié...ne l'abandonne pas. Ne te joue pas de lui comme le font les autres. Essaye avec lui. Essaye de lui redonner l'envie de sourire... » me quémande-t-elle, les larmes aux yeux. C'était mon but depuis le début...pouvoir le voir sourire, l'entendre rire. Je ne sais pas pourquoi mais j'ai immédiatement ressenti une connexion entre lui et moi, comme si le destin l'avait poussé sur ma route et m'avait fait signe qu'il avait besoin de moi. Je ne sais pas si j'en serai capable, ni même si je ne vais pas finir par abandonner après quelques mois, épuisé d'être le seul à apprécier passer du temps avec lui mais j'essaierai. Je donnerai tout ce que j'ai...
– « Salut... » m'annonçais-je, à l'entrée de la chambre de Jungkook. Le brun est allongé sur son lit, les yeux rivés sur le plafond, un style de musique hip-hop en arrière-plan. Il se redresse et vient s'appuyer contre l'entête de son lit, sans pour autant rien dire. Mal à l'aise de ne savoir comment réagir, je me contente d'entrer et de venir m'asseoir face à lui en position indienne. J'admire silencieusement sa chambre, découvrant les dernières technologies en matière de jeu vidéo ou encore l'énorme enceinte JBL posé sur l'une de ses commodes. Est-ce qu'il ne peut vraiment pas prendre de plaisir à jouer ou à écouter de la musique ? Je me sens tellement peiné pour lui, il devrait se sentir terriblement seul mais même ça il est incapable de le ressentir...
– « Pourquoi es-tu là ? » pense-t-il finalement, remarquant certainement que je ne dis rien pour justifier mon apparition soudaine.
– « Tu ne m'ignorais pas, pas vrai ? Cette semaine, au lycée...quand tu me croisais dans les couloirs, tu ne t'efforçais pas de m'ignorer...c'était juste...normal pour toi de ne pas venir vers moi, n'est-ce pas ? » supposais-je, sans vraiment attendre une réponse de sa part. Et moi qui pensait qu'il était juste bien trop gêné après que je l'ai embrassé... Je me faisais vraiment des idées... « Ta mère vient de me raconter...à ton sujet... » C'est plus fort que moi, je ne peux m'empêcher de penser que je pourrai le blesser si je formulais mal mes phrases. Pourtant, rien ne le contrarie, même pas ces imbéciles qui s'amusaient à l'embêter. Mais j'imagine que lorsqu'on est habitué à faire attention aux sentiments des autres, on ne peut se retenir de le faire.
– « Elle t'a raconté que j'étais un psychopathe, un pervers narcissique ? » Le fait qu'il se définisse ainsi me surprend et me rend furieux à la fois. Pourquoi pense-t-il être ce genre de personne ? Lui ne tue et ne manipule personne, alors pourquoi pense-t-il être ce genre de fou ?
– « Pourquoi tu dis ça ? Ce n'est pas c'qu'elle m'a dit. Ne redis plus jamais une chose pareille... » lui commandais-je de manière autoritaire. Je ne laisserai personne lui dire qui il est et encore moins le juger pour ce qu'il est.
– « Ce sont pourtant les mots exacts des médecins. Les psychopathes ne ressentent aucune émotion, ni sentiment. Comme moi. » Ces foutus médecins... Ils n'ont pas une once de pitié pour lui ? Jungkook n'a pas choisi d'arrêter de ressentir les choses, c'est son corps, son subconscient qui l'a décidé pour lui et ce certainement pour le protéger de toutes les émotions qui l'ont habité. Il ne mérite pas une telle punition. Personne ne la mérite d'ailleurs...
– « Les psychopathes, comme tu dis, se donnent eux beaucoup de mal pour cacher qui ils sont vraiment. Toi non. Alors n'écoute pas ce qu'ils disent. Ce n'est pas vrai... » lui expliquais-je, la peine au coeur. Si tu étais vraiment un psychopathe, tu te forcerais à sourire, à mépriser les autres, à traiter inférieurement tout autre être humain en faible. Mais toi, tu n'es pas comme eux. Tu sais que tu ne peux cacher ton manque d'émotion. Et tu vis avec...
– « Est-ce que ça te contrarie de savoir qu'ils m'appellent ainsi ? Pourquoi ? Pourquoi continues-tu de venir vers moi ? Je te demande parce que je ne comprends vraiment pas... Les autres...ils étaient dégouttés, horrifiés par moi. Pourquoi tu ne sembles pas l'être, toi ? » Jungkook et ses questions... Je commence presque à m'habituer à ce regard froid et éteint. Pourtant, j'aimerai avoir la chance de l'entendre rire à plein poumon, de voir ses yeux sourires de bonheur ou même...ne serait-ce que de les voir pleurer de souffrance. J'aimerai pouvoir le voir vivre...vraiment, pas seulement en surface...
– « Parce que j'suis pas un idiot, moi. Tu m'dégouttes pas, au contraire. J'te trouve même...très attirant. » avouais-je naturellement. Puisque Jungkook ne peut pas décrypter mes intentions, alors je promets d'être le plus honnête possible avec lui. Même si je suis encore embarrassé de devoir me confier de manière si ouverte, je finirai par m'y habituer. Je veux le faire réagir, lui faire comprendre qu'il me plaît.
– « Attirant ? Je suis dépourvu de toute humanité mais toi, tu dis que tu me trouves attirant ? » Si je ne connaissais pas sa situation, je penserai vraiment qu'il se fout de moi. Mais je crois que c'est bien plus éprouvant de savoir qu'il se pose sérieusement la question. Pourquoi se dénigre-t-il de cette façon ? Pourquoi est-ce qu'il continue de parler de lui comme s'il n'était qu'un raté sans intérêt ? Il a vraiment dû en entendre des conneries pour finir par se qualifier de cette manière...
– « Si tu étais vraiment dépourvu d'humanité, tu ne continuerais pas d'essayer de ressentir les choses. Que ce soit la pluie qui tombe sur toi ou l'échange d'un baiser. » Toi tu essayes. Les fous, les psychopathes eux ne cherchent qu'à dissimuler leur infériorité en s'en prenant à ceux qui, au contraire, arrivent à ressentir la culpabilité ou l'angoisse. Toi tu es vrai, plus vrai que n'importe qui sur terre, tu n'as juste pas les moyens de t'enrichir ou de te ravir des plaisirs de la vie.
– « Tu n'as pas idée de ce que je suis, Yugyeom. Il est vrai que je continue d'essayer de ressentir à nouveau les choses mais je ne sais même pas pourquoi je le fais. Peut-être que c'est parce que je ne supporte plus de voir ma mère pleurer tous les jours, peut-être que j'aimerai simplement savoir si j'aime ou non telle ou telle chose... Mais il y a plus de chance que ce ne soit que par ennuie, par manque d'intérêt. J'essaie d'avoir des émotions mais je ne sais même pas si cela me servirait réellement à quelque chose. » C'est parce qu'il n'a pas conscience de ce que ça fait d'être heureux ou triste. Même si on souffre, même si on subit, on est reconnaissant de pouvoir ressentir la tristesse. Parce que c'est elle qui va nous aider à faire le deuil de ceux qui nous quittent, à tourner la page d'une relation éprouvante ou bien trop cruelle. C'est le sentiment de culpabilité qui nous aide à demander pardon, à prendre nos responsabilités comme il le faut. C'est la joie qui nous donne envie de nous investir et de revivre certain moment encore et encore. C'est la peur qui peut parfois nous sauver la vie ou nous pousser à tenter quelque chose d'incroyable seulement pour pouvoir la surmonter. Mais surtout, c'est l'amour qui nous fait nous sentir moins seul, qui nous pousse à nous soucier des autres et à ne pas perdre complètement la raison. C'est parce que Jungkook n'a pas conscience de ce que tout cela lui apporterait qu'il ne pense pas avoir le droit d'éprouver des sentiments.
– « Ne dis pas ça. Si tu n'abandonnes pas, si tu es déterminé à changer, c'est bien la preuve que tout n'est pas encore fichu... »
– « J'ai vu mon père étrangler ma sœur, juste sous mes yeux. » m'interrompt-il subitement. Alors c'était de ça que parlait Madame Jeon... Cet acte horrible qu'il a dû supporter à un si jeune âge... « Je l'ai vu faire, je suis resté là à le regarder faire sans bouger, ni même crier. Je suis simplement resté là, à l'observer. J'ai vu ma grande-sœur perdre la vie, je l'ai vu se faire enterrer et même ça je ne peux le définir. Je devrais pleurer sa perte, je devrais culpabiliser de n'avoir rien fait, de ne même pas avoir hurler pour alerter ma mère mais non. Je n'arrive même pas à savoir si elle me manque ou non... Et que tu le veuilles ou non, pour les autres, ce comportement fait de moi un monstre. Je le sais. Et ça me va... » Un monstre ? Comment ont-ils pu le laisser penser ça ? C'est plus fort que moi, les yeux humides, je détourne le regard vers un point invisible. J'ai tellement mal de l'entendre dire ça... « Pourquoi pleurs-tu ? » renchérit-il, toujours sur ce ton sec et froid qu'il prend depuis le début de notre conversation.
– « Parce que ça me rend triste...de t'écouter dire ça à ton sujet. La première fois que j'ai posé les yeux sur toi, tu étais au beau milieu de la cour, à laisser la pluie tomber sur toi. J'ai ressenti comme une connexion à ce moment-là. Pour moi, tu semblais bien plus vivant que n'importe qui autour. Les autres courraient comme des malades pour éviter d'être mouillés, bien trop préoccupé par le fait d'avoir une place ou non dans le bus. Mais toi non. Toi, tu étais là, à vivre le moment présent. Alors, c'est ce que j'ai fais moi aussi. J'ai laissé la pluie rouler sur mon visage et pendant ces longues minutes, j'ai eu l'impression que j'oubliais qui j'étais, où j'étais et tout ce que je me donnais tant de mal à cacher. J'étais là. Avec toi, sous cette pluie. C'est tout ce qui comptait. J'allais mal, j'avais fais souffrir quelqu'un, j'avais été méchant, odieux, j'avais souffert. Mais les larmes que j'ai laissé couler sur mes joues ce jour-là, elles ont tout fait disparaître. Et...j'ai le sentiment que tout ça, c'est grâce à toi... » Je ne sais pas vraiment ce qui me prend, ni même pourquoi je suis en train de péter un câble là tout de suite, dans sa chambre. Je pense que c'est parce que d'une certaine manière, je m'étais rattaché à lui en l'observant pendant ces trois derniers mois. J'avais espéré qu'il puisse faire en sorte de me faire me sentir plus vivant. Je n'aurai jamais imaginé que celui qui avait le plus besoin de se sentir en vie, ce serait lui... Jungkook qui était jusque-là resté silencieux, s'avance vers moi pour effacer avec délicatesse mes larmes. Puis, sans que je ne puisse m'y préparer, le brun s'est lentement penché sur mes lèvres pour les embrasser. La pression de ses lippes était parfaite, à la fois douce et entreprenante, comme s'il avait cherché à me consoler par ce geste. Perdu, je l'interroge d'un froncement de sourcil tandis que lui se remet naturellement à sa place. Ça n'a duré que quelques secondes mais ce fut amplement suffisant pour éveiller mes envies.
– « La dernière fois que tu m'as embrassé, j'ai cru ressentir quelque chose. C'était léger, presque inexistant mais c'était bien là. » explique-t-il en touchant son bas-ventre. Est-ce qu'il aurait finalement réussi à ressentir du désir ? « Je voulais savoir si ce serait de nouveau le cas aujourd'hui... »
– « Et alors ? » m'exclamais-je promptement. Jungkook nie catégoriquement. Cependant, je prends l'importante décision de ne pas en rester là. S'il pense avoir ressenti quelque chose après notre premier baiser, peut-être que le plaisir sexuel saura le faire réagir plus intensément. Je me redresse alors vers lui pour emprisonner son visage dans mes mains. « Laisse-toi faire. » susurrais-je avant de revenir mouvoir ma bouche contre la sienne. Je continue de caresser ses lippes, allant jusqu'à les léchouiller voire les mordiller d'envie. Jungkook ne rétorque pas, mimant à la perfection le moindre de mes gestes. Je viens même forcer l'accès à ses lèvres pour venir trouver sa langue. Je ne sais pas vraiment ce que lui en pense mais moi, mon corps s'est échauffé bien plus vite que je ne l'aurai cru. J'ai l'immense désir d'en vouloir plus de lui mais connaissant la situation, je me contente de l'embrasser avec passion, je cherche à lui transmettre ce plaisir, ce jeu de séduction qu'il pourrait y avoir entre nous. Tout commence par un baiser, tout commence de cette façon...mais peut-être faudra-t-il aller plus loin pour qu'il ressente de nouveau cette sensation, bien que presque inexistante. Je me détache de lui après quelques minutes, la respiration saccadée. Je suis toujours collé à lui, mes mains n'ayant toujours pas lâché son magnifique visage. Jungkook me fixe muettement, les lèvres rougies, le souffle rapide. Pitié, dis-moi que tu as ressenti quelque chose...
– « Je crois qu'je bande... » avance-t-il spontanément. Mon regard se dirige directement sur son entrejambe. Alors il ne ressent aucune émotion mais son corps, lui, réagit encore ? Bordel, et pourquoi est-ce que ça m'excite autant de voir ça ?
– « Co...Comment est-ce que tu fais dans ce genre de situation, d'habitude ? » Parce que j'imagine que s'il ne ressent pas de plaisir à se toucher, il n'a aucune raison de le faire.
– « J'attends que sa disparaisse. Ça ne m'arrive pas souvent à vrai dire... » constate-t-il naturellement. Je vois... Alors peut-être que si c'est moi qui le fait... Je reviens de nouveau embrasser Jungkook même si j'ai conscience que c'est dangereux pour ma santé mental de me torturer de la sorte. Alors que lui s'est contenté de refermer les yeux pour me laisser faire, moi, je m'attaque au bouton de son jean pour pouvoir avoir accès à son intimité. « Tu penses...que ça peut marcher ? » me demande-t-il entre deux baiser avant de venir observer ma main s'emparer de son sexe.
– « J'ai envie d'essayer... » soufflais-je, désireux. Lorsque je commence mes mouvements, ma libido prend le contrôle total de mon corps. Cela fait tellement longtemps que je n'ai pas eu de rapport sexuel que toucher un autre homme de cette façon me fait perdre la raison. Mon intimité s'éveille au fil des secondes, grossissant à vue d'œil sous mon jean. Lorsque je constate que Jungkook observe avec attention son pénis augmenter et rougir sous mes coups de main, mon autre main vient l'obliger à retirer son t-shirt. Il m'en faut plus, tellement plus... Jungkook exécute, toujours de manière aussi studieuse. Je l'allonge sous mon corps, tout en continuant de branler sa queue alors que ma bouche s'attaque désormais à son cou. Il me rend dingue, son odeur, la douceur de sa peau, ce regard vide et naïf, tout me pousse à en vouloir davantage. « Ah, Jungkook... » Par surprise, le brun s'est emparé de mon entrejambe à travers mon jean.
– « Laisse-moi essayer aussi. » proclame-t-il tout en défaisant mon pantalon pour y introduire sa main froide. Convoiteux de le voir faire, je ne rétorque pas. Je prends même plaisir à savoir qu'il calque mes mouvements à la perfection pour me faire du bien. L'un au-dessus de l'autre, yeux dans les yeux, nous nous observons mutuellement. Sauf que lui ne faiblit pas à chacun de mes gestes. Moi, la vision brouillée, le désir au bord de l'explosion, j'en viens même à gémir de satisfaction. Lui à le regard impassible, toujours aussi neutre. Pourtant, c'est lui qui prend l'initiative de revenir m'embrasser, et ce de manière langoureuse et profonde. Je resserre ma poigne autour de lui, ce que fait également le brun. Puis, un mouvement de plus et j'éjacule sévèrement dans sa main. Putain de bordel de merde... « Qu'est-ce que je suis censé faire maintenant ? » s'inquiète-t-il, alors que je reste là, à quatre pattes au-dessus de lui, à profiter de cette sensation de bienfaisance. Je reviens à la réalité lorsque je constate que Jungkook, lui, ne semble pas avoir pris de plaisir. Je suis vraiment le plus con de tous les imbéciles...
– « Pardonne-moi. J'ai été égoïste... » marmonnais-je, honteux, en libérant son sexe. Je ne voulais pas en arriver là. Je ne voudrais pas que Jungkook s'imagine que je me sers de lui et de son manque d'émotion pour me faire du bien. Ce n'était pas mon intention. J'essayais juste...de le faire réagir...
– « Non. Tu avais l'air d'y prendre plaisir, alors... Puis...j'ai ressenti cette sensation que j'avais ressenti la semaine dernière. C'était tout aussi léger, ça n'a duré qu'une seconde. Mais lorsque tu as jouis, je l'ai senti moi aussi. » J'aurai aimé que tu puisses ressentir ce que j'ai ressenti lorsque tu es de toi-même venu te perdre dans ma bouche pour enlacer ma langue. J'ai cru rêver...j'ai cru me perdre dans l'un de mes nombreux fantasmes. C'était si exaltant...presque magique. J'aimerai tellement savoir que si tu viens m'embrasser c'est parce que tu en meurs d'envie et pas seulement parce que tu te contentes de m'imiter tout bêtement...
– « Mais toi tu n'as pas jouis... » dis-je à voix basse, comme si c'était presque inavouable. J'ai échoué. Cette idée était certainement la plus mauvaise que je n'ai jamais eu. A quoi est-ce que je m'attendais ? Des années et des années de thérapie et de traitement... Je pensais vraiment que l'embrasser pourrait faire réapparaître ses émotions ?
– « Non. Mais peut-être une prochaine fois. » Une prochaine fois ? Il veut...réessayer ? Vraiment ? Je ne sais pas pourquoi mais l'entendre dire ça m'a rendu bien plus heureux que ce que nous venions tout juste de faire tous les deux...
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