Tout ira bien...
« Je voulais seulement te dire...Te dire que ma vie est toujours pleine de toi et que mille fois par jour, je t'envoie mes pensées dans l'espoir qu'elles t'atteignent. Te dire que j'ai tout gardé de nous et que tout reste en moi comme une infection dont je refuse de guérir. Te dire que j'ai essayé de te fuir, mais que tout me ramène à toi. »
Musso
*
« - Deku... »
Un peu à la manière du froid qui s'empare des lieux, la voix de Katsuki s'élève rapidement, d'un seul coup. Malgré sa difficulté à parler, malgré sa respiration qui se coupe par instant. Il rassemble les quelques forces qui résident encore dans ses muscles, et ordonne à ce qui fonctionne toujours de remplir son rôle, afin de l'aider.
Il est même prêt à supplier, tant la détresse s'empare de lui, tant le désespoir s'insinue dans toutes ses cellules, un peu comme un poison qui se mettrait à couler dans ses veines, pour venir l'étouffer, et faire arrêter les battements de son cœur.
Relevant le regard, du mieux qu'il peut, il observe le champ de bataille qui ne ressemble plus qu'à une vaste étendue de débris, digne d'un film post-apocalyptique. Les bâtiments ne tiennent plus debout, et les quelques chanceux qui ne se sont pas encore écroulés, devraient voir leur sort changer d'ici quelques instants, au vu des fondations qui sont toute fragilisées au possible. Des éclats de ciments et de briques s'éparpillent à même le sol, partout autour de lui, ainsi que d'autres matériaux, qu'il n'a même pas envie de se fatiguer à identifier pour le moment.
Et puis, ensevelis sous les décombres, les corps des malheureux qui n'ont pas survécu à l'affrontement sont là, alors qu'ailleurs, leur familles et amis attendent impatiemment des nouvelles. Certainement prostrés derrière leur écran de télé, qui avait commencé à diffuser le conflit, il les imagine se ronger les ongles. Parce que dès l'instant où les choses ont dégénérées, pour ne devenir qu'un bain de sang d'une atrocité sans nom, les journalistes ont été priés de stopper le partage des images de cette bataille. Alors, Katsuki le sait, tous les courageux qui ont donné leur vie aujourd'hui, manqueront au moins à une personne, quelque part dans ce monde, et beaucoup de larmes seront versées ce soir, une fois cet enfer derrière eux.
L'odeur si singulière et bien trop abondante de l'hémoglobine parvient jusqu'à ses narines, lui provoquant un léger haut le cœur, tandis qu'il essaye, à son rythme, de poser le regard sur son propre corps, afin de constater les dégâts. Mais les cendres de l'explosion, qui s'est produite il y a à peine quelques minutes continuent de tomber, telle une pluie sombre qui vient brouiller les quelques facultés visuelles qu'il parvient à récupérer. Il les sent tomber sur sa peau, aussi délicates que la neige, virevoltant ici et là.
« - Deku ! »
Ce n'était pas du tout prévu que les choses dérapent de la sorte. D'aucune façon.
Mais quand cet attroupement de vilains à débarqué de nulle part, semant le chaos dans les rues de la ville, ce qui semblait être au premier abord une mission de routine, à fini par donner lieu à une guerre cauchemardesque. L'impression que chaque attaque à duré des heures, pour finalement s'étaler sur des journées entière s'encre dans son esprit. Il n'est même plus certain de savoir quand tout cela a commencé, ni même avec qui. Il ne saurait pas non plus dire si ses camarades sont encore en vie, et si la totalité de leurs ennemis ont pu être arrêtés.
Aucune information ne parvient à sortir de ce fouillis qu'est devenu sa tête.
Et de toute manière, à l'heure actuelle, c'est le cadet de ses soucis.
« - Deku, réveille-toi bordel... »
Et puis il y a eu ce moment de flottement, quand ils ont tous compris ce qui était sur le point d'arriver. Quand ce vilain capable de produire des armements à sortit de nulle part une bombe surpuissante, qui aurait probablement éradiqué la ville de la surface de la carte, prêt à créer le génocide le plus meurtrier que cette décennie ait connue, reproduisant les tragédies dignes de leur pire cauchemars. À l'image d'un nouveau Tchernobyl, ou d'une reproduction effrayante des bombardements d'Hiroshima, la peur s'est faites bien réelle en chacun d'eux.
Katsuki ignore ce qui a permit de limiter les dégâts de cette catastrophe, tout est encore trop flou dans son esprit pour espérer rassembler les pièces du puzzle et les assembler. Il revoit seulement quelques bribes, où Kaminari se jette sur l'assaillant, afin de faire barrière de son corps. Il sent encore sur lui le souffle puissant de l'explosion, venant les balayer un par un sur le champ de bataille. Ainsi que cette émotion indescriptible, qui s'est emparé de lui, lui causant une larme ou deux au passage.
Parce qu'à cet instant, alors qu'il cherchait Izuku du regard par pur instinct de protection, il a vu sa vie défiler devant ses yeux. Il a revisionné tous ses souvenirs, un à un, dans un moment qui lui a paru à la fois tellement long, mais pourtant si rapide. Il a ressenti en lui toute une palette d'émotion propre à ce qu'il a pu vivre. Mais surtout, ce qui l'a le plus marqué, ce sont ces regrets.
Toutes ces choses qu'il n'a pas trouvé le courage de faire, ou de dire, lorsqu'il pensait en avoir encore la possibilité, juste parce qu'il repoussait ces instants. C'est tellement plus simple de repousser lorsque l'on imagine avoir le temps, lorsque l'on imagine se lever encore le lendemain matin, et tous les autres jours de la semaine. Lorsque l'on pense que rien ne viendra effacer cette flamme de vie, qui persiste malgré les intempéries, bien à l'abri dans notre poitrine.
Et puis il vient le moment où l'on se rend compte que notre temps n'est plus. Que le sablier de notre vie vient probablement de s'épuiser juste sous nos yeux, et que ce que l'on remettait à demain, devient urgent.
Terriblement urgent.
« - Deku... je t'en supplie... Réveille-toi...
- Kat...Katchan... »
Le murmure, pourtant à peine audible, parvient jusqu'à lui.
Parce que c'était tout ce qu'il attendait au fond, il voulait juste entendre cette voix qui l'insupportait tant autrefois, juste une seule et unique fois. Et puis, avec le recul il se dit qu'il a besoin de l'entendre encore et encore, besoin de l'imprimer quelque part dans sa tête, ou même d'en faire un enregistrement qu'il pourra écouter juste avant de s'endormir. Juste pour vibrer encore et toujours sur l'éclat si mélodieux de son timbre de voix.
« - Deku, dit-moi, dit-moi comment tu te sens, s'il te plaît... »
C'est une question stupide, il le sait ça aussi.
Parce qu'il lui semble évident que les trois grosses barres en ferrailles qui viennent transpercer respectivement sa poitrine, son abdomen et sa cuisse, ne peuvent que lui causer une douleur infernale. Et ce supplice, il peut en témoigner, puisqu'il est actuellement dans le même cas qu'Izuku, empalé à quelques centimètres de lui.
« - J'ai froid...j'ai si froid Katchan... Et j'ai mal... »
La peur qui transparaît à travers ses mots vient lui retourner l'estomac, et peut-être même tous ses autres organes maintenant qu'il y pense. Il aimerait trouver n'importe quelle solution pour s'emparer de sa détresse, et de son mal, afin qu'il soit siens, et que Deku soit sain et sauf. Mais les miracles n'existent pas, du moins pas dans la réalité. Ils ne sont pas dans un de ces films où un sauveur va apparaître d'il ne sait où, avec une baguette magique ou une prophétie à la con, qui pourrait faire revenir tout ça à la normale. Parce que plus rien ne sera jamais normal, de toute manière.
Alors, cherchant une solution à sa hauteur, il dégage son bras comme il peut des gravas, et l'avance jusqu'à son camarade, dont il perçoit peu à peu les sanglots.
« - Deku, donne ta main...
- Katchan...
- Je suis là Deku. »
Enlaçant leur doigts du mieux qu'ils peuvent, ils savourent la chaleur qui se dégage de ce simple geste. C'est tout ce qu'ils peuvent s'offrir maintenant, tout ce qu'ils peuvent faire dans cette position des plus inconfortables, en attendant difficilement les secours, qui ne devraient à présent plus tarder. L'alerte a du être donné il y a un moment déjà, mais Katsuki ignore où ils se situent précisément dans ce bordel ambiant, et si le chemin est facile d'accès jusqu'à eux.
Alors il prie plus fort, plus intensément, toutes les divinités qu'il connaisse, afin qu'on vienne au moins libérer Izuku, qui pâlit juste sous ses yeux.
« - Reste avec moi Deku, steuplais... Ouvre les yeux...
- Je suis épuisé...
- Je sais... Mais tu dois tenir bon, juste encore un peu... »
Le jeune homme hoche la tête, tout en glissant sa seconde main, celle qui n'est pas occupée, jusqu'à l'une de ses plaies. Grimaçant à la vue de l'importante quantité de sang qui s'en dégage, il repose la tête sur la pierre qui lui sert en quelque sorte d'oreiller, et étouffe un hoquet tant bien que mal, avant de finalement porter son regard sur Dynamight, qui est à peu de choses près, dans le même état que lui.
« - Katchan... tes blessures...
- C'est pas grave fichu nerd, on se concentre sur toi, dit-il en se crispant.
- Tu as mal...
- Non...non je n'ai pas mal arrête...
- Katchan... »
Le grand héro explosif arrache les débris de son masque, rageusement, et se met à pleurer silencieusement, tandis qu'une pluie faites d'eau remplace peu à peu celle emplit de cendres, qui ont fini par cesser de tomber. La fraîcheur de celle-ci vient les glacer un peu plus, et ils ne rêvent plus que d'un lit confortable, pour remplacer ce cauchemars, qui ne prend définitivement pas fin malgré leur espérances.
Interpellé par les quelques larmes qui tombent sur sa peau, Deku vient essuyer les joues de son ami d'enfance, comme si ce geste pouvait tout effacer, et peut-être les faire revenir à ce matin même, quand ils se sont croisés dans le hall de leur agence, bien avant cette mission catastrophe.
« - Katchan...
- Deku...
- Je ne veux pas mourir... pas ici...pas maintenant...
- Tu ne va pas mourir foutu nerd, arrête de dire n'importe quoi ! »
Il ne sait même pas si il croit réellement en ses paroles. La vérité, c'est sans doute qu'il aimerait être persuadé de tout ça, de tout ces mots qu'il vient lui dire, usant du peu de patience dont il possède. Mais il n'est pas dupe, ni complètement stupide.
Il a assisté à suffisamment de mission comme ça, en cinq ans dans le monde de l'héroïsme, pour savoir que la perspective d'en ressortir vivant relève de la folie pure et simple. Ce n'est qu'une idée utopique, à laquelle il se raccroche fermement, pendant que la crainte lui bouffe les entrailles, en s'immisçant dans ses blessures bien trop profondes.
« - De toute façon, tu ne peux pas mourir maintenant, on a...on a encore tellement à faire toi et moi... »
Et quand le poids des regrets vient alourdir sa poitrine, quand ce mal vient s'y placer tel un lierre sauvage qui prend toute la place nécessaire pour ses racines, tout le reste craque. Les quelques larmes se transforment en sanglots qu'il ne parvient pas à maîtriser, la panique vient saccader ses gestes, tandis qu'il maintient sa prise sur la main de Deku, qui commence à perdre en vigueur. Et lui aussi, se sent plus faible, plus aussi apte à contrôler ses muscles, mais il tient bon, pour eux deux.
« - Deku tu peux pas mourir maintenant, parce que... j'suis amoureux de toi.
- Oh... Katchan...
- Je suis fou de toi... j'aime tes tâches de rousseurs, et tes yeux, qui sont tellement uniques. Et ta façon de te battre... de parler, de rire, de vivre, d'espérer, de grandir, d'apporter de la joie aux autres... même quand tu marmonne... tous ces putains de trucs que je détestais chez toi, j'ai fini par les aimer... »
Peu importe l'issue de cette journée, il se déleste de tout ça, il ne veut plus avoir de regret, plus repousser au lendemain ce qui doit être dit et vécu. Alors il parle, il dit, il vit peut-être ses derniers instants, mais ce sera intensément, et aux côtés de la personne qu'il aime profondément depuis tant d'années maintenant...
Malgré l'essoufflement, malgré ces bribes de vies qui s'envolent de son corps peu à peu. Il se raccroche à son âme qui est encore là, encore bien présente, et à la main d'Izuku, toujours dans la sienne.
« - Je suis amoureux de toi... moi aussi... »
Dans un autre cadre, loin d'ici, Katsuki aurait probablement sauté de joie. C'est bien loin de son caractère, bien loin de ses habitudes, mais il n'aurait pas pu faire autrement que d'extérioriser ce souffle de joie, cette injection de dopamine pure qui s'est installé dans sa cage thoracique, et dans les multiples veines qui le traverse. Il aurait peut-être même rit, en attrapant Izuku par la taille, pour le faire virevolter dans l'espace, avant d'échanger un baiser langoureux, comme il rêve de le faire depuis toujours.
Et puis, il y aurait eu un rendez-vous, et sûrement encore un autre, aboutissant à une relation, dans laquelle il se serait construit un cocon emplit de l'amour de Deku, de ses mimiques, et de sa présence.
Mais ils sont là, sous ce ciel gris, dans ce vent froid et cette pluie qui commence à s'intensifier, de la même manière que l'angoisse les empêche de bouger. Bouffés par les regrets, par la tristesse, la colère et la peur de ce qui va arriver après.
Parce qu'il n'y aura sûrement pas d'après.
« - Katchan... c'est trop dur...
- Je sais Izuku... mais je suis là... accroche-toi à moi... »
Mais lui non plus, n'est plus vraiment là.
Son être commence peu à peu à trépasser, son esprit s'égare, ses yeux papillonnent, et sa vue se brouille. Il ne sent pratiquement plus la douleur physique, l'existence de ces barres devient peu à peu un mythe, au même rythme que son corps se prive de son sang, cette matière première nécessaire à sa survie, et même simplement à sa vie.
Il n'y a que la douleur mentale, pour lui rappeler qu'il est encore un peu présent, la douleur de voir son amour agoniser devant ses yeux, alors qu'il subit le même traitement. L'amertume de constater que le seul chemin qu'ils seront amenés à partager ensembles, main dans la main, s'avère être celui de la grande faucheuse, qui vient les chercher, dans la fleur de l'âge. C'est terriblement frustrant, surtout lorsqu'il sait que ses sentiments sont réciproques, et qu'il aurait pu avoir bien plus d'Izuku, bien avant.
Il aurait pu connaître la saveur de sa peau, lors de nuit tendres et amoureuses, ainsi que ses éclats de rire au creux de son oreille. La joie de quelques surnoms, prononcés sur l'oreiller, au milieu de la nuit, et la sensation de sa peau contre la sienne. Il aurait pu avoir des souvenirs heureux d'eux deux à chérir, aux portes du départ, au lieu de n'avoir que cette solitude face à lui.
« - Ka...tchan...
- De...deku... »
Tout commence à s'évaporer autour d'eux, le paysage est totalement flou, un peu comme si ils étaient dans un entre-deux. Ils reconnaissent, sans l'avoir vécu auparavant pourtant, les signes que la mort est en train de les cueillir, petit à petit, les emmenant de force de l'autre côté, pour passer ce voile qui les séparent de cette nouvelle existence qui les attend, sans qu'il ne sache pour autant ce qu'ils vont vivre.
Alors, dans un dernier élan d'espoir et d'envie de vivre quelque chose d'époustouflant, Katsuki se baisse jusqu'à l'amour de sa vie, venant doucement frôler ses lèvres avec les siennes. Et, comme prit d'un subit regain d'énergie, Izuku vient combler l'espace entre eux, appuyant comme il peut sa bouche contre celle de l'homme qu'il aime.
Ce baiser a un goût particulier : la saveur de celui que l'on ne connaîtra qu'une seule fois dans sa vie, ainsi que le goût mutuel de leur peau, qui réussit tant bien que mal à s'imposer au milieu de la poussière, des cendres et du sang. Et puis, comme si ils étaient fait pour s'embrasser toute leur vie, comme si leurs lippes n'étaient destinées qu'à eux, ils perçoivent cette explosion d'amour qui s'en dégage, ainsi que l'envie d'en partager tant d'autres.
Mais ils savent que ce baiser sera unique.
Alors ils l'approfondissent, autant que possible. Imprimant au fond d'eux cette sensation unique, et chaque détail qui s'en détache, pour partir en paix, de la plus belle façon qui soit, selon eux.
Ensembles.
Et, quand Katsuki perçoit le souffle d'Izuku qui s'estompe, jusqu'à disparaître totalement, il s'applique à reposer l'ange correctement contre la pierre. Il s'autorise à verser quelques larmes, et caresser son visage, paisible, lui laissant penser qu'il est simplement endormi. Puis, sentant sa propre respiration s'amenuiser, alors que les gyrophares au loin commencent à l'éblouir, il s'approche une dernière fois de Deku, et vient lui murmurer quelques mots, avant de finalement trépasser lui aussi.
« - Attends-moi de l'autre côté, je te rejoins, mon amour... »
____________________________________
Je m'en veux un peu de vous proposer un os aussi triste soyons honnête (j'aime pas les fins malheureuses non plus pourtant 👀), mais quand j'ai vu ce fanart que j'ai placé en illustration de cet os, j'ai eu très envie d'écrire cet instant.
J'espère que ça vous plaira,
Bisous, Onyx ❤️
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top