2. Attente du Bijou
J'observe ma mère dans le miroir incrusté dans le mur de notre salle de bal. Ses ailes scintillent grâce aux rayons de soleil passant à travers la coupole du plafond. Sa robe est plutôt simple: sa poitrine est mise en valeur par le buste à bretelles d'un tissu rouge profond, sensuel. Le bas de sa robe glisse le long de la courbe de ses hanches dans un mouvement fluide, son cou est orné d'un collier elfique de grande valeur.
Je tourne le regard vers mon propre reflet. Je porte un simple pantacourt brun et une chemise blanche aux manches bouffantes. Des mèches de cheveux rebelles se glissent hors de mon chignon mal fait.
La voix douce de ma maman retentit dans la salle quasiment vide. Elle m'explique une énième fois comment arranger mes cheveux, caressant doucement mon semblant de coiffure. Je me dérobée sous son toucher et murmure un simple "Je vais voir Alia, au revoir". J'évite de regarder plus que nécessaire mes minuscules ailes, simple accessoire inutile.
Je me hâte vers mon amie. À pied, évidemment. Une fois arrivée dans la petite ferme de la famille Dahl, je remarque l'agitation présente. Timidement, je tapote l'épaule d'Olivier, le frère aîné d'Alia. Il se tourne vers moi et je manque de défaillir lorsqu'il pose sa main sur mon épaule en souriant, de ce sourire d'autant plus charmant qu'il est imparfait. Par Morgane, je pensais l'avoir oublié ! Et il se permet de me faire cet effet !
Il interrompt mes pensées.
O: Si tu cherches Alia elle est dans le jardin, avec maman et Mamillon. Elles seront ravies de te voir !
J'hoche la tête et pars rapidement vers la terrasse, inondée de soleil, menant vers le jardin. Dès que je franchis les portes battantes, une petite furie, que j'identifierai comme ma meilleure amie, se jette à mon cou.
A: Tori je l'ai! Il est apparu ce matin, là, posé sur mon oreiller ! Si tu savais comme je suis heureuse !
Mamillon Marlène se lève, son vieux visage est fendu par un large sourire.
M: Nous sommes si fières d'elle !
La maman d'Alia prend la parole, tout aussi émue et excité que les deux autres: Il ne manquait plus que toi pour fêter ça, Astoria !
Je fais un pas en arrière, ne voulant pas croire à cet évènement.
T: Que... Qu'est-ce qui est arrivé ?
A: Le collier elfique évidemment, dit Alia.
Elle se tourne vers moi, et la réalité de la situation m'échappe. Là, scintillant autour de son long cou délicat, je découvre le collier argenté imprégné de la magie sacrée des elfes. À l'image de sa personnalité, il est simple au premier abord mais très beau lorsqu'on l'observe de plus près. De petites pierres précieuses d'un bleu profond et mystérieux sont incrustées dans le fin travail d'argent.
Après une interminable période de réalisation béate, les larmes me sautent aux yeux, la jalousie et la tristesse me rongent le cœur.
T: Mais... Tu... Bravo...
Mes félicitations sont entrecoupées de sanglots brusques, le goût du sel sur mes papilles me fait presque vomir mon goûter.
Je sens les bras de ma sœur de cœur m'entourer et je m'autorise à cacher mon visage dans ses longs cheveux, enfin détachés grâce à l'obtention de son collier.
Désespérément, je tente de calmer mes sanglots. Je n'arrive pas à y croire, mon cœur se serre d'appréhension à l'idée de me retrouver seule pendant trois longs mois, prisonnière dans ma condition d'enfant. Je sais très bien que je devais m'y attendre, Alia à toujours été plus mature que moi.
En tant que fille de la reine Dahlia, toute la ville attends que je reçoive à mon tour mon collier, que je puisse enfin commencer ma formation en tant que future reine. Dès mes treize ans, les enfants autour de moi ont commencé à recevoir leurs bijoux respectifs. Ils partaient alors au palais éternel, situé au cœur de Shengan, le continent où nous, les fées, vivons.
Ils arboraient alors de grandes ailes, des ailes adultes, assez fortes pour les emporter dans les airs. Pour eux, jouer avec les enfants et aller à l'école faisait partie du temps passé. Ils se plongeaient corps et âme dans le travail qu'on leur avait désigné, finissaient mariés et parfaitement heureux, vivant en harmonie avec leur conjoint et leur portée de marmots.
Pendant quatre ans, Alia et moi avions patiemment attendu l'obtention de cette richesse qu'est le collier elfique, maintenant un statut d'enfants aux yeux de notre société. J'avais supporté les rires et moqueries à mon égard, du style: "Alors petite princesse, 17 ans et toujours aussi gamine, " grâce à la présence d'Alia à mes côtés.
Elle était mon rocher, mon espoir: nous obtiendrons ce bijou le même jour, nous vivrions notre rêve de gamines ensemble. Aujourd'hui, je me vois retirée de cet ultime espoir.
Je finis par me reculer de l'étreinte de meilleure amie, honteuse de mes pleurs enfantins et égoïstes. Je ne peux m'empêcher de jeter un coup d'œil à ses ailes, qui sont tout aussi petites qu'hier. À mes yeux, pourtant, les ailes d'Alia sont majestueuses et impressionnantes, ses cheveux sont bien plus longs et soyeux et elle est vêtue d'une robe magnifique, indiquant son rang élevé.
À mes yeux, je viens de la perdre.
À mes yeux, elle est adulte.
♕︎♕︎♕︎
Je l'ai écrit hier soir, j'espère qu'il vous plaît !!!
Gret
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