- Mon coeur! Tu m'as tellement manqué, comment était ton après-midi?

Je raconte, sans filtre. Les fraises à la chantilly, la danse tiktok, le câlin à la fin. Mauvais choix. Je le vois changer sous mes yeux.

- Non, ce n'est pas ce que tu crois! C'est toi que j'aime Eden, pour toujours.

Inconfortable, cette promesse. La voix de maman résonne dans ma tête. "C'est pas quelqu'un de bien pour toi Arthur." Bêtises.

Un mordillement de ma lèvre en le fixant finit par le convaincre, et il m'embrasse.

- Désolé. Je ne veux pas te perdre...

Je lui dit les choses de d'habitude; pas sa faute, je prendrai mes distances avec elle.

On oublie.

Le jour d'après, je rentre pour le trouver affalé dans son lit. La maison est rangée, son travail est fait. Il n'a rien mangé, sa mère l'a appelé. Mauvais jour, à nouveau. Je retombe en mode babysitter. Il pleure contre moi, je tente de le convaincre. Une psychologue, je t'en prie, tu en as besoin. Non, il ne veut pas changer. Je le rassure, du mieux que je peux. Je ne fais pas assez, mais il ment pour me faire plaisir.

On oublie.

On fait l'amour, chacun son rôle. Aujourd'hui, il est professeur et moi un élève innocent. Nos morales s'envolent, le goût de danger familier reprend sa place dans mon coeur. Puis la tête emplie de coton. Le silence. Se reconstruire une façade plus appropriée à la situation. Une dispute suivante, on s'est mal compris. Mon cœur bat comme jamais, on pleure et on promet. "Je t'aime, tu le vois pas?" Mes émotions reviennent peu à peu. Un câlin, une soupe, Lilo et Stitch.

On oublie.

Les prochains matins s'enchaînent. Les problèmes s'empilent, les histoires s'épuisent plus vite que jamais, mes amis s'inquiètent.

Trois lettres et deux nuits plus tard, une nouvelle histoire. On retombe amoureux, avec de nouvelles personnalités. On refait l'amour.

Mes émotions ne reviennent plus après la dispute.

Je le quitte.

Je me rappelle de ses sourires, de ses jolis mots, de ses mains. Une à la fois, mes émotions reviennent.

Regret.

Haine.

Humiliation.

Anxiété.

Amour.

Je me rappelle celle d'avant. Parmi les histoires envolées, elle est la seule chose stable.

Je deviens son grand frère, celui qui, de loin, navigue tout bien mieux.

Parfois, un fragment de souvenir survient. J'oublie le présent. Je l'aime, deux secondes ou une éternité, qui sait.